- Ouah...

C'est le seul mot que je pus prononcer une fois mon corps arrivé devant la grille de TERRAE. Mon voyage s'achevait ici, j'entrais dans un lieu nouveau pour moi et pourtant si attirant. Mon esprit ne tarda pas divaguer, à imaginer d'éventuelles situations dans lesquelles je pourrais me retrouver un fois cette limite en fer franchie. Je sentais mon estomac se nouer et mon coeur battre la chamade, comme à chaque fois que je me tenais face à l'inconnu. Comment étaient les autres ? On m'avait expliqué que j'allais rejoindre d'autres jeunes gens concernés par le même "problème" que moi. Une histoire d'appel. L'homme venu me chercher ne m'avait donné que de brèves explications à ce sujet. Pas assez pour tout comprendre, suffisemment pour me convaincre de quitter ma ville natale et mes parents afin de venir jusque devant cette grille justement.

À nouveau mon imagination se plut à imaginer ceux que je considérais à ce moment comme des semblables. Des filles et des garçons, certains accueillants, d'autres moins... Je secouai la tête. Il fallait arrêter de rêver et se lancer, sinon je risquais de prendre racine et de ne jamais savoir ce qu'il en était réellement ! Mais voilà que mes jambes capricieuses hésitent. Le stress, encore une fois. Et si au final on me renvoyait à peine rentrée ? Non. Impossible. On ne serait pas venu me voir si on doutait de mes capacités. Et si les autres m'ignoraient ? Je ne suis pas contre paraître invisible de temps en temps mais je ne suis pas une associale totale non plus ! Allez ! Un pas après l'autre. Voilà. Le plus incroyable dans tout ça, c'est que personne ne pouvait deviner ma lutte mentale contre l'angoisse. Mon visage restait totalement neutre.

Il le resta tout autant lorsque mes yeux se posèrent sur les arbres du parc que je traversais maintenant. Aucune expression ne s'afficha non plus chez moi à la vue des bâtiments de l'institut où j'allais continuer mon éducation. Pourtant je trouvais chaque parcelle observée d'un beauté époustouflante. À tel point que je finis par m'arrêter de marcher pour lâcher d'une voix ébahie :

- C'est donc ça TERRAE. C'est magnifique...

Un bruit me fit sursauter. Un animal, quelqu'un ? J'en cherchai l'origine et tomba sur une personne venue me rejoindre sans que je ne m'en aperçoive, trop occupée à être dans mes pensées.

- Aah !

Sa présence me surprit tellement que je tomba les fesses les premières à terre.

La surprise laissa place à la plus grande honte que je n'avais jamais encore ressentie. Je crois que je venais de gâcher ma toute première rencontre. Comment, bon sang, avais-je fais pour ne pas avoir remarqué plus tôt ce garçon ?? Il était vêtu de rouge, une couleur pourtant visible de loin, et sa taille était plutôt considérable par rapport à la mienne. Encore un tour de ma concentration vaporeuse ! Il fallait vraiment que j'apprenne à faire plus attention à mon environnement.

- Pas de mal ? Tu nous as fait une jolie cascade là ! Je t'avoue que j'hésitais à te prendre pour un fantôme, mais tu viens de dissiper tous mes doutes.

L'inconnu me tendis une main pour m'aider à me relever. Une main que je ne pris pas tout de suite, trop occupée à regarder son visage. Lui aussi avait des cheveux très clairs, mêmes blancs en fait. Sa peau, en revanche, était bien bronzée. Lui ne devait certainement pas être comparé à un fantôme ! Sa remarque et son air amusé me fit rougir. Est-ce qu'on pouvait trouver un trou de souris dans ce parc ? J'aurais bien aimé m'y cacher même si je ne le montrais pas. Seules les rougeurs sur mes joues trahissaient mes émotions. Je le laissai m'aider à me remettre debout. Sa poigne était assez forte et une chaleur rassurante s'en dégageait.

- Pardon, je ne vous avais pas vu ! Je suis assez étourdie, on me le dis souvent ! Un fantôme a d'ailleurs certainement plus les pieds sur terre que moi, désolé !

Utiliser l'humour. Voilà. Avec un sourire. Comme ça. Pencher un petit peu la tête sur le côté et fermer les yeux pour l'accentuer. Faire disparaître la honte pour paraître plus à l'aise. Aimer le théâtre, l'air de rien, ça aide ! L'improvisation, c'est toujours utile dans les situations délicates. Dans le cas présent, je devais rattraper une première rencontre un peu loupée.

- Je suis moins effrayante comme ça ?

Tout en disant ces mots, je ne pus m'empêcher de penser qu'au moins, il n'avait pas accouru vers moi en pensant que je faisais un malaise ! Les gens avait plus tendance à me croire malade que fantômatique à cause de ma peau très pâle. C'était devenu tellement ennuyeux d'assurer qu'on va bien !

Il me regarda de haut en bas et éclata d'un rire franc.

- Si tu veux me faire peur tu devras t'y prendre autrement, d'ailleurs entre ton arrivée et ton sourire... sans te vexer le deuxième à une légère tendance psychopathe.
Mais j'en oublie mes manières, Zacharia !

Psycopathe ? Mon sourire ? Voilà que je savais encore moins où me mettre ! D'habitude on me dit toujours que je suis charmante avec ! Si seulement c'était plus facile pour moi de sourire naturellement... En plus, vu ce qu'il venait de me dire juste avant, ma blague sur les fantômes n'avait visiblement pas été comprise. Ta tentative de rattrapage est un échec sur toute la ligne, ma chère Natsu.

Je clignai des yeux, les joues toujours aussi rouges, mon faux sourire envolé. Il me tendait à nouveau la main et insista sur son prénom :

- Mais c'est mieux de m'appeler Zach', ça économise de la salive.

Je la lui serra doucement et dévia mon regard. Je n'arrivais pas à soutenir le sien, encore trop dévorée par la honte.

- Moi c'est Natsu Inoue. Ravie de faire ta connaissance Zachar...Zach' ! Pour les fantômes, en fait je parlais de leur concentration. c'était une image les euh... Pieds sur terre... Enfin bref...

Je coupai court à ce passage gênant et décidai de changer de sujet. Je fis de mon mieux pour l'oublier et continua la discussion comme s'il ne c'était rien passé. Aucune chute, aucune blague vaseuse... C'était difficile mais je ne risquais pas de m'améliorer en restant sur des défaites !

- Je viens d'arriver. Tu es la première personne que je rencontres. Dis, c'est comment cet endroit, on s'y habitue vite? Les gens sont sympas ?

Beaucoup de questions me trottaient dans la tête mais j'en mis de côté un bon nombre. Personne n'aimait en être bombardé, moi la première, et je pouvais me renseigner petit à petit. Inutile de vouloir aller trop vite, et puis j'étais assez fatiguée par mon récent voyage. Dans mon état actuel, je ne pouvais pas retenir beaucoup d'informations.