Allongée dans mon lit, les yeux fermés, je laisse mon esprit divaguer. Je sais qu'il est encore très tôt, je n'ai pas envie de me lever. Après quelques instants je soupire.

Depuis que j'ai passé mon initiation, un peu plus d'un mois déjà !, je cherche souvent dans mon esprit la source de mon pouvoir, celui de l'air, mais les résultats ne sont pas très concluant. Hideko m'a pourtant expliquée comment faire, mais ça ne vient pas. Le temps... je dois laisser faire le temps et m'entraîner... donc je m'entraîne, seule dans le noir.

A nouveau, j'essaie de faire le vide, d'entrer en contact avec cette énergie. Je perçois quelque chose de flou, de lointain. Je m'approche, je le sens, et au moment où je l'effleure, je perds ma concentration. C'est à chaque fois pareille ! Vraiment lamentable... est-ce que tous les élèves ont autant de peine que moi ?

De rage je me lève. Après m'être toilettée et changée, je quitte ma chambre. Ma chambre, voilà une nouveauté d'une à mon nouveau statut que j'apprécie particulièrement. Un univers à moi où je suis tranquille et où je peux réfléchir. Je quitte donc mon nid douillet et me balade sans but précis. Il est encore très tôt, je ne croise presque personne.

Lorsque je reviens à la réalité, oui, mes divagations peuvent être profondes..., je me rends compte que je me trouve devant la salle d'entraînement. Je ne suis encore jamais allée là-bas, il doit y avoir plein de monde... plein de monde sachant maîtriser ses pouvoirs.

Pourtant, ce matin, je décide de franchir la porte. Après tout, il est encore très tôt, il n'y a sûrement personne.

Je retiens un cri lorsque je vois une tornade foncer droit sur moi... et pourtant je reste figée par la peur. Soudain, elle disparait et je vois une jeune femme au centre de la salle.

– Eh, tout va bien ? Je suis désolée, je pensais pas que quelqu'un viendrait maintenant.

J'ouvre la bouche de surprise. Une air, c'est une air... qui sait faire des tornades. Je sens une pointe de jalousie naître. J'essaie d'imaginer le jour où je saurai faire la même chose, dans longtemps sûrement.

Mon instant d'étonnement passé, je décide de lui répondre.

- Oui... oui... tout va bien.

Je marque une pause. Ma timidité fait encore des siennes. J'aimerais... j'aimerais tellement la regarder s'entraîner, mais... je n'ose pas, non, je n'ose pas lui poser la question. Je n'arrive même pas à ouvrir la bouche pour lui répondre quelque chose. Je ne sais pas quoi dire.

Je lui lance alors un sourire timide et je vais m'asseoir dans un coin de la salle. D'ici je pourrai l'observer sans qu'elle ne le remarque, j'espère.

En attendant qu'elle se reconcentre et qu'elle m'oublie, je ferme les yeux et tente de trouver mon pouvoir... en vain.

[hrp : j'ai un jour de retard sur ma prédiction, sorry ^^]

– Tout va bien ? Je suis désolée de te déranger, mais tu as l'air un peu dépitée, je voulais savoir si je pouvais t'aider.

Je sursaute. Moi qui espérais me faire oublier, c'est raté. La jeune femme a sûrement remarqué que je n'arrivais à rien, que j'essayais de me concentrer. Bon, ce n'est pas ce que j'espérais, je ne voulais pas la déranger, je voulais rester discrète, tant pis.

Qu'est-ce que je fais maintenant ? Est-ce que je lui mens pour qu'elle retourne à son entraînement, en espérant qu'elle le fasse. Peut-être qu'elle s'entraîne depuis longtemps et qu'elle est fatiguée. Ce serait dommage qu'elle parte. Toute seule je ne vais pas y arriver... mais lui demander de l'aide, enfin accepter l'aide qu'elle me propose, je ne sais pas... j'aimerais... oui.

- Euh... je... c'est moi qui ne voulais pas te déranger.

Je me sens rougir. Pourquoi est-ce que j'ai encore autant de peine à parler avec les gens que je ne connais pas ? Est-ce que ça va changer un jour ? J'ai pourtant bien remarqué depuis le temps que Terrae n'est pas comme mon ancienne école ! Râaa, ça m'énerve.

- Erhm... j'aurais aimé te regarder t'entraîner...

Je marque une courte pause.

- Je peux ?

A présent, je dois sûrement lui lancer un de ces regards de chien battu, lamentable...

Soudain, j'ai envie de tout lui dire, de lui raconter mes problèmes. Après tout, c'est une air, elle peut sûrement m'aider. M'expliquer comment faire ? Pour la guérison, je crois que ça va. Lors de mon initiation, c'était assez facile. Je ne me suis pas entraînée depuis, je devrais, mais me taillader ne m'enchante pas trop, alors j'attends une bonne occasion. Je devrais aller faire un tour à l'hôpital une fois. Hum, n'est-ce pas un peu glauque ? Je souris. Sûrement …

La jeune femme a l'air très surprise par ma question. J'espère que je ne l'ai pas choqué... ou je ne sais pas, c'est peut-être malpoli ce que j'ai demandé. Puis elle me sourit, ouf.

– T'inquiète pas, ça ne me gêne pas, au contraire ! La salle d'entraînement est pour tout le monde, de toute manière. Dis-moi, tu es de quelle affinité ? Tu es aussi venue t'exercer ?

Elle rit.

– Pardon, je suis un peu curieuse. Moi, c'est Aoi. Aoi Amazaki. Si jamais tu as besoin d'aide ou quoi que ce soit, n'hésite pas, d'accord ? Je suis pas un professeur formidable, mais je pense pouvoir t'apporter quelques réponses si tu as des questions.

Aoi ? C'est un joli prénom. Je hoche la tête. Oui, je lui demanderai de m'aider... un jour... bientôt. Je suis sûre qu'elle pourrait m'aider... mais pas tout de suite. Je ris en moi-même... Serait-ce de l'orgueil ? Sans doute oui... va falloir que je travaille là-dessus.

Repensant à ses premières questions, je décide de répondre à Aoi.

- Je... je suis une air, comme toi... erhm, une air guérisseur. Je peux soigner les gens avec mes mains.

Je me tais et rougis. Qu'est-ce que je suis bête. Elle doit déjà être au courant ! Enfin... je ne suis pas sûre que tous les airs soient des guérisseurs, mais quand bien même, à force de vivre à Terrae, on finit par connaître les différents pouvoirs développés par les gens. Je sais qu'il y a les feux, les terres, les tonnerres, les eaux et les airs. Ça, c'est facile à voir. On observe un moment et c'est dans la poche. J'ai remarqué que certains élèvent pouvaient parler très fort... non pas crier comme un humain normal... mais parler vraiment fort ! Qu'est-ce que j'ai vu encore... ah oui, une fois un élève s'est transformé en lapin juste devant moi. Je ne sais pas si c'est ce qu'il voulait faire, mais le résultat était époustouflant. Bref... je sens que Terrae a encore de nombreuses choses à m'apprendre.

Je reviens à la réalité et remarque que Aoi m'observe. Est-ce que par hasard elle m'aurait déjà répondu quelque chose ? Oups, impossible de savoir, bon... qu'est-ce que je fais... hum... je réponds à son autre question ? Oui, je vais faire ça... tant pis, je passerai pour une fille mal élevée peut-être.

- Et euuh, oui... non, enfin je ne sais plus. Je ne sais pas exactement ce que je suis venue faire ici en fait.

Je lui lance un sourire gêné. Lamentable...


[hrp : coucou, vraiment désolée pour le retard, j'avais mes exams et tout, j'aurais dû prévenir :S]

Aoi me sourit en retour, ce qui me rassure. Je n'ai pas dû louper grand-chose pendant ma divagation.

– Ahah, je suis guérisseuse moi aussi. Je suis contente de te rencontrer, en tout cas. C'est quoi, ton prénom ?

J'ouvre la bouche, surprise. Zut ! Quel impolitesse !

- Désolée, je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Selvi Sayanel.

Je m'incline légèrement. Je crois que c'est comme ça qu'on fait ici.

– Puis si tu ne sais pas ce que tu es venue faire... Tu as envie de t'entraîner avec moi ?

Elle se relève et me tend la main avec un sourire. Je fixe sa main. S'entraîner avec elle ? Elle risque d'être déçue... puisque je n'arrive à rien avec l'air et je REFUSE qu'elle se taillade comme Hideko lors de mon initiation. Si je dois soigner des gens, je ne veux pas qu'il se fasse du mal exprès.

– Reste pas toute seule, c'est pas très amusant de regarder les autres sans rien faire du tout.

C'est vrai que d'un côté, si je n'y arrive pas seule, autant demander de l'aide. Elle est air guérisseur, comme moi, je ne pourrai pas trouver mieux. Je souris et m'aide de sa main tendue pour me relever.

- Je... j'ai un problème avec l'air... je n'arrive à rien.

Est-ce que je dois lui expliquer ce que je ressens ? C'est un peu embarrassant quand même. Râaa, orgueil à la poubelle !

- En fait... je... j'ai l'impression de devoir chercher mon pouvoir dans ma tête. Je sens l'énergie, mais c'est flou... c'est très « loin ». Du coup j'essaie de m'approche et de la toucher, mais à chaque fois que j'entre en contact, je sursaute, je perds ma concentration. Je crois... je crois que j'ai peur... de l'air.

Je baisse les yeux, honteuse. Quoi de plus lamentable que d'avoir peur d'un élément qui nous entoure tout le temps, où que l'on soit, un élément indispensable à sa survie... mon élément.

[hrp : meuuh non, c'est cool ^^ J'ai failli rater ta réponse xD Heureusement que je suis passée aujourd'hui]

Je relève la tête lorsqu'Aoi prend la parole.

– Ne t'en fais pas, ça arrive. Ce que je te propose, ce n'est pas de chercher ton pouvoir d'air en toi, mais autour de toi. Essaie de visualiser l'air t'entourant comme tu le souhaites, en fermant les yeux ; ça peut-être des formes, des couleurs... Pour ma part, je le visualise sous forme d'arabesques de différentes couleurs, en fonction de la force et de la direction des courants d'air. Elles sont un peu luminescentes quand un Air l'utilise, et leur couleur est aussi modifiée en fonction de la personne.

J'ouvre de grands yeux... visualiser l'air... pourquoi pas. Après tout, je n'ai rien à perdre !

– Essaie de visualiser l'air autour de toi, et dis-moi quand tu y arrives.

Je ferme les yeux, comme Aoi me l'a demandé. J'essaie d'imaginer l'air. Je pense à ses arabesques, aux couleurs. Comment est-ce que j'ai envie de me représenter mon élément, c'est peut-être ça la première question à se poser. Les couleurs.. oui, j'ai envie de voir des couleurs, c'est motivant ! J'imagine des plages de couleurs qui bougent et changent. Les dégradés modèlent des formes qui indiquent la direction des courants, leur force, leur chaleur,...

Je me concentre sur mes sens. Je suis une air, je suis censée être liée d'une manière spéciale à cet élément. Je sais que je peux y arriver, je  dois y arriver !

J'essaie à présent de sentir l'air. Cet élément est présent partout, il nous entoure constamment et même si c'est très faible, il exerce une pression sur notre corps. Je lève lentement mes mains et tâche de sentir une sorte de résistance, un poids. Je sens de légers picotements sur ma peau. Je souris, car maintenant je sais... je perçois l'air, je comprends ce dont Aoi parlait. Je crois... que je peux même... l'entendre.

J'ouvre les yeux, satisfaite par ce premier contact. C'est alors que ma prof crée une tornade dans sa main.

– Est-ce que tu perçois les mouvements de ma tornade ?

Je regarde Aoi, puis fixe sa main. Au début, c'est un peu flou, je vois la forme globale, mais pas l'air, pas les courants... puis peu à peu... oui, je perçois quelque chose. Ça parait tellement simple ! Et dire que j'ai galéré pendant plus d'un mois !

Bon, faut que je descende de mon petit nuage. Oui, j'apprivoise gentiment l'air, j'arrive à le sentir, mais est-ce que je saurais le contrôler ?

Je prends une inspiration pour rassembler mon courage. Je ne dois plus avoir peur. L'air est mon élément, il fait en quelque sorte parti de moi.

Je tends une main devant moi et la tient au niveau de mon ventre, paume vers le haut. Je sens l'air qui l'entoure et je l'imagine... je l'imagine bouger, se déplacer. Je dessine une bille dans ma main avec les petites particules d'air que j'imagine.

Je ris... je ris parce que j'ai réussi... enfin ! Je viens de former une bille d'air. Elle est toute petite, mais ça m'est égale ! Je l'observe un moment... un long moment je crois, je ne sais pas trop, je n'ai pas vraiment conscience du temps qui passe.

Je finis par la dissiper, je laisse les particules rejoindre la masse invisible qui m'entoure et relève la tête. Oups, Aoi... je l'avais... oubliée ? Hum, ce n'est pas très gentil. Est-ce qu'elle m'avait posé une question ? Je ne me souviens plus.

- Euuh... je suis désolée, mais... je... tu m'as dit quelque chose ? Parce que j'étais tellement concentrée, j'étais un peu comme dans une bulle...

Je me gratte la joue, gênée.

– Non, non, c'est rien. Tu as été parfaite. Je suis contente que tu aies réussi, vraiment ! Tu vois que ce n'était pas si compliqué, finalement.

Je souris. Oui, c'était plutôt simple. Je me sens... heureuse et fière.

– Et si tu essayais de faire autre chose ? De plus grand, par exemple ? Une sphère un peu plus grosse, par exemple.

Mon premier réflexe est d'ouvrir de gros yeux. C'est vrai, il me semblait que je venais de réussir un exploit. Puis je ris. Je n'allais pas me contenter toute ma vie de cette ridicule bille d'air que je venais de former. Il faut que je progresse !

– Ou alors de contrôler les courants autour de toi pour faire se lever le vent. Enfin peu importe. Tu aimerais tenter le coup ? Mais si tu es trop fatiguée, dis-le, et ne te force surtout pas. C'est mauvais d'épuiser toutes ses réserves.

Je secoue la tête. Je ne me sens pas fatiguée, pas encore du moins. Je sens l'adrénaline qui monte. J'ai réussi et je réussirai encore, je le sais !

- Non, ça va. Je peux le faire.

Je suis déterminée. C'est bien ça, non ? Je décide de créer un léger vent dans la pièce. Peut-être que je vois trop grand, mais ça, je le saurai bien assez tôt.

Je me campe bien sur mes jambes pour être stable et je ferme les yeux. J'entre à nouveau en contact avec mon élément. Je sens les particules d'air autour de moi. Il y en a tellement ! Ça me donnerait presque le vertige. Je n'essaie pas de toutes les mouvoir en même temps, mais j'y vais progressivement. Au fur et à mesure, je sens que mes particules en entraine d'autres sans que j'aie besoin de les contrôler. Je souris, ça fonctionne ! Gardant ma concentration, je continue à modeler les courants de la pièce et une légère brise se lève. Je sens le souffle caresser mes joues et balayer mes cheveux. C'est agréable.

À cet instant, je comprends la remarque d'Aoi sur la fatigue. Oui, là je sens mes forces s'amenuiser. Je relâche mon pouvoir et laisse les particules d'air reprendre leur cours habituel. Le vent s'arrête.

J'ouvre les yeux et constate que mon coeur bat la chamade. Ma respiration s'est accélérée aussi. Est-ce la fatigue qui se manifeste ou l'excitation de la réussite ?


[hrp : pas de soucis ^^]

– C'était bien. Très bien, même.

Je souris.

– Tu constateras bien vite qu'il est plus facile de déplacer d'importantes masses d'air que de n'en contrôler qu'une petite partie, avec précision. Mais tu devrais d'abord commencer par continuer à t'entraîner à maîtriser ton élément dans l'ensemble, puisque tu avais du mal avec.

J'écoute attentivement les conseils de ma professeure. Je me demande jusqu'où je pourrai aller avec mon pouvoir une fois que je le maîtriserai, tout ce que je pourrai faire. J'ai de l'imagination, je sais d'avance que je vais m'amuser à faire plein de choses différentes. Je me réjouis déjà d'essayer, d'expérimenter et surtout, de me familiariser avec mon pouvoir.

– La dernière fois, j'ai essayé de créer des aiguilles d'air, très petites et très fines. C'est assez difficile de leur donner une certaine forme déjà à la base, mais alors lorsque la taille diminue... C'est encore pire. Il faut y aller progressivement. Pas trop gros, mais pas trop petit non plus, sinon tu n'arriveras pas à contrôler les particules.

Je hoche la tête. Pas trop gros, mais pas trop petit... hum, c'est plutôt vague. Tant pis, je verrai bien ! J'espère juste que je ne créerai pas quelque chose que je ne pourrai pas contrôler par la suite. J'imagine déjà la catastrophe si je forme une tornade comme celle qu'Aoi avait faite tout à l'heure et que je la laisse s'échapper dans Terrae. Bon, on en est pas encore là... et puis je me connais. Je suis plus que très prudente, donc ça ne devrait pas arriver. J'espère...

– Tu veux qu'on fasse une pause ? Tu as l'air plutôt fatiguée.

- Merci pour tes conseils. Je tâcherai de les respecter.

Je marque une courte pause.

- Oui, volontiers. Je commence à sentir la fatigue.

Je lui souris.

- Est-ce que tu serais d'accord de me montrer ce qu'on peut faire avec l'air ? Pour me donner envie.

J'éclate de rire. J'espère qu'elle acceptera.