Un air angélique se glisse sur mon visage lorsqu’Allen fait mine d’être outré, et me fait comprendre qu’il n’aimait pas les tricheuses. Moi ? Tricheuse ? Naaaan jamais ! Enfin si peu… Mais au moins je l’avoue ! Et faute avouée, à demi pardonnée, pas vrai ? Un sourire étire mes lèvres, mi amusé, mi moqueur envers moi-même. Bon, d’accord, c’était pas drôle, et on aurait dit une gamine de trois ans, mais voilà… Il n’empêche que ça fait du bien de se laisser un peu aller comme des gosses de temps à autres. De pouvoir rire, se laisser guider par ses pouvoirs et son intuition… Sans être assailli par les problèmes, sans ressentir de honte ou de culpabilité. Il faut que j’essaie de ne pas constamment m’en vouloir, au moins pour Allen et Mitsuki. Je vois bien qu’Allen s’inquiète… Alors je ferai des efforts pour continuer à sourire. Essayer de ne pas penser complètement à maman, ne pas penser à ce qu’elle m’a caché, ni à mon père, ni... à tout ça.

- J’essaierai de m’en souvenir, je ris doucement.

Je lui renvoie un sourire éclatant lorsqu’il attrape ma main et l’entraîne jusqu’à l’intérieur.

- Hé, c’est toi qui va attraper froid je te signale… Tu es sûr que tu ne veux pas reprendre ta veste ?

Nous nous dirigeons vers la cafétéria et, une fois à l’intérieur du bâtiment, il desserre sa prise sur ma main – je rougis brusquement. J’avais pas pensé à ça quand je la lui avais proposée tout à l’heure, je le jure ! C’était tout à fait innocent et… et… Mince, quoi. C’est horrible, je dois être écarlate… Pourquoi est-ce qu’il faut toujours que je pense à des trucs horribles sortis du contexte ?
Je sursaute un peu en le voyant soudainement se rapprocher, d’un bond – et ça, littéralement – de la machine à café.

- Je t’ai laissé gagner, tu sais, je ris en lui faisant un clin d’œil complice. Pour que tu puisses te remettre de ta précédente défaite.

Je le rejoins et réfléchissant, me mordillant la lèvre, l’air pensive.

- Hm… Je reste sur un chocolat chaud, tu m’as donné envie tout à l’heure.

Allen se retourne vers la machine à café et je fixe son dos un instant, avant de laisser mon regard courir sur la cafétéria complètement déserte.

- Ca fait longtemps qu’on ne s’est pas fait de vraie sortie avec Mitsuki… je lâche soudain, pensive.

Je rougis un peu. En fait, c’était pas vraiment prévu, je pensais pas que j’allais le dire à voix haute. M’enfin, c’est vrai que ça me manque un peu.

Allen me tend ma tasse, l’air un peu surpris par mes paroles. J’étire un sourire désolé et le remercie en la prenant. J’ai tendance à penser à voix haute quand je suis fatiguée… Même si c’est vrai qu’on fait plus grand-chose ces derniers temps tous les trois. Euh, et même avant en fait… J’avais oublié le léger détail de notre ‘dispute’ qui nous a quand même causé pas mal d’ennuis. Et an un et demi pendant lesquels on s’est fui mutuellement… J’ai une grimace intérieure. Je me sens vraiment bête à chaque fois que j’y pense. Mais j’imaginais pas qu’Allen… enfin. Je pensais qu’il m’en voulait vraiment. Alors forcément j’ai fait ma débile et—Bon, stop, il faut que j’arrête. Cette histoire est réglée depuis longtemps.
Je vais m’installer à la table, écoutant Allen. Je ris doucement lorsqu’il évoque l’hyperactivité de notre Mitsuki nationale. C’est clair qu’elle court toujours partout… Je sais pas comment elle fait, j’aurais jamais le quart de l’énergie qu’elle dépense chaque jour ! En plus de ça, elle est vraiment brillante, et c’est… enfin elle m’impressionne. Voilà c’est dit !

- Je sais pas trop, je lâche doucement, pensive. Il y a le cirque, la salle d’arcade… Sinon on peut toujours aller faire un tour au bar !

Je rougis un peu.

- Enfin pas que j’aime boire ou quoi, mais… Ca pourrait toujours être bien, je sais pas, je bafouille doucement.

À vrai dire, j’ai jamais bu. Et le peu de fois où j’ai goûté, j’ai fini dans un état suffisamment pathétique avec un seul petit verre pour ne pas me donner envie de voir ce que ça fait que de me bourrer la gueule. Puis aller dans un bar, c’est aussi pour discuter, passer du temps ensemble… Et puis y a de la musique !... C’est drôle comme je suis pas crédible au final…

- Sinon j’ai pas vraiment d’idée… Mais on peut toujours se faire une soirée film ? Ça pourrait toujours être bien, au pire… je lâche avec un nouveau sourire désolé. Je ne t’aide pas beaucoup finalement…

Je fais la moue, commence à boire mon chocolat chaud. Ahh… Il est vraiment super bon… Ça fait du bien. Ça me rappelle Maman, après nos entraînements…

J'esquisse une moue boudeuse en voyant sa réaction, que je trouve... disproportionnée ? Ouais, voilà, c'est exactement ça ! C'est bon, je me suis emmêlé les pinceaux, maiiis c'est pas une raison pour rire ! Je suis sûre qu'il me prend pour une ivrogne maintenant, à tous les coups. Peut-être que c'est pas moi qui l'ai fait rire, mais de m'imaginer avec un verre à la main ? Ce serait encore pire ! Je sais pas ce que je suis capable de dire avec un peu d'alcool dans le sang, moi ! En fait, je dirais même plus : je ne veux pas savoir. Si ça se trouve je deviens super méchante, ou au contraire, je pourrais me mettre à ressembler à... maman ! Et sauter sur tout ce qui bouge ! Ce serait horrible ! (En plus, sérieusement, vous imaginez si j'avais la merveilleuse idée de me teindre les cheveux en blond ? Manquerait plus que j'aille bosser dans un cabaret en chantant du Christina Aguilera, tiens...)
Un léger rire franchit mes lèvres lorsqu'il reprend la parole, taquin, et je lui tire la langue pour toute réponse avec une moue boudeuse. Visiblement, il a réussi à ne pas s'étouffer avec son chocolat, ce qui est quand même un bon point – je crois que je lui en aurais voulu, quand même... Je sais pas ranimer les morts moi !
Je hausse un sourcil sceptique alors qu'il évoque les « films de fille ». Ouais mais nan, de toute manière, si c'est pour déprimer devant une pseudo comédie romantique à la noix, c'est même pas la peine... Je crois que je vais finir par devenir dépressive. Par contre, la manière dont il en parle, ça évoque quand même un sacré traumatisme.

– T'en fais pas va, je suis pas encore tout à fait masochiste non plus ! Je suis avec toi. Et si Mitsuki est pas d'accord, je lui saute dessus et on l'attache, d'accord ?!

Rien que d'avoir l'image en tête je peux pas m'empêcher d'éclater de rire. Déjà, allez sauter sur un téléporteur. Ensuite, allez sauter sur Mitsuki. Et maintenant, réfléchissez. Vous comprendrez pourquoi l'idée est aussi improbable à imaginer qu'à réaliser...
Il continue sur l'idée du camping en plein air et je manque de m'étouffer à mon tour avec mon chocolat. Oh mon dieu, pire idée jamais trouvée. Moi, en camping ? Alors que j'ai en horreur toutes les petites bêtes qui grouillent partout, le froid, eeeet tout ça ? Non non non ! Mais je suis d'accord, à la limite, Mitsuki, c'est une warrior, elle pourrait nous trouver de quoi survivre, et même traverser l'Amazonie toute seule ! Je suis sûre qu'on peut faire un super film avec elle, genre Mitsuki Jones, professeur et archéologue, avec son super fouet qui tue tout ! Et qui, évidemment, récolterait avec son sourire innocent d'angelot naïf tous les types qui auraient le malheur de croiser son chemin ! Et voilà, la légende est déjà toute écrite, c'est formidable. (Mitsuki Jones, bientôt au cinéma...)
Ahem.

– Je suis d'accord mais bon, Mitsuki elle nous abandonnerait j'en suis sûre ! Elle se rendra compte de notre nullitude, nous laissera en plan et trois mois plus tard, quand on aura enfin réussi à sortir de la forêt avec un ou deux membres en moins, on arrivera pas à la ramener avec nous parce qu'elle sera devenue la reine des Amazones ! je lâche d'un air parfaitement convaincu et sérieux, avant d'esquisser un sourire en coin, ouvertement moqueuse.

Je marque une pause ponctuée d'un léger rire, amusée par mes propres divagations.

– Enfin peut-être qu'elle nous kidnappera pour qu'on puisse l'éventer avec notre air, faute de servir à autre chose...

Oui oui, je parle toujours de Mitsuki. Mais c'est lui qui a commencé...

– Tout ça pour dire : faudra me motiver !


HRP : Je... je... pardon... J'ai craqué... *est sur son post depuis hier et a fini par ne marquer que de la merde*

Visiblement, Allen a tiré les mêmes conclusions que moi. Ou alors je lui ai fait super peur... Je vote pour la seconde option, vu la manière dont il me prend par les épaules pour me secouer légèrement. Ma tasse manque de déverser son contenu sur la table sous le coup de la surprise. Ok. Allen me fait flipper là. Il a mis un truc dans le chocolat ? Non ? Parce que je commence à en douter sérieusement, là. Si ça se trouve, c'est le sucre que la machine met dans le chocolat chaud... Peut-être même que c'est pas du sucre, en fait ! Genre on s'est fait droguer sans le savoir. Et peut-être que le coupable, c'est Mitsuki qui a fait rejoindre son clan à ce maudit distributeur, pour pouvoir nous kidnapper ensuite ! Et nous emmener en Amazonie. Tout se tient !
Je sursaute encore lorsqu'il repose sa tasse avec force sur la table. Mais qu'il arrête, il me fait peur en plus ! Et c'est quoi cette histoire de tigres du Bengale en Amazonie, là ?! Ça existe pas dans ce pays ! Enfin je crois... Pas vrai, hein ?!
Puis je hoche vivement la tête. Une autre idée, une autre idée... Quelque chose de normal, de pas dangereux et tout ! La plage semble effectivement une bonne idée – surtout que je n'ai jamais quitté le Japon, à part pour aller en Inde. Et disons que ce n'était réellement pas une partie de plaisir...

– Ce serait super ! je m'exclame. En plus, à part nous noyer et dresser des crabes, elle pourra rien faire. Et les Tonnerres sont faibles face à l'eau, donc en fait... Si jamais elle a envie de jouer à la petite sirène, on devrait être un peu protégés. Du moins je crois.

Le soleil... La plage ! Ce serait tellement bien. Et on pourrait s'y amuser tous ensemble... J'imagine pendant quelques secondes les coups de soleil que l'on y attraperait. Le sable, la mer chaude et belle, scintillant sous les rayons solaires... Ça donne tellement envie d'y être. On pourrait jouer au volley, et je pourrais leur montrer toute l'étendue de mes capacités sportives ! C'est à dire quasiment inexistantes. Mais ça pourrait être drôle, après tout...

– Dis, tu sais jouer au volley ? je l'interroge en continuant à boire mon chocolat, jusqu'à le finir avec une moue gourmande.

Je jette un petit coup d'oeil sur l'horloge au mur. Il est déjà tard, je ne pensais pas. J'ai le cœur léger, pour la première fois depuis un certain temps.

L'espace d'un instant, j'imagine Allen en joueur de volley tyrannique... et un sourire amusé naît sur mes lèvres. C'est sûr, il n'a pas du tout le profil de crier sur ses coéquipiers, et sûrement sur qui que ce soit d'autre. En fait, je crois qu'à part avec moi, lorsqu'il avait trouvé les lettres, je ne l'avais... jamais vu en colère. Ce n'est plus arrivé depuis, heureusement. Allen est quelqu'un d'assez conciliant, je crois que c'est pour ça. Mis à part Matthew, son demi-frère, je doute qu'il soit capable de détester quelqu'un. Et je pense que même de cette manière, il... eh bien, il resterait calme. Enfin je crois. J'avoue que je suis presque curieuse, maintenant, de savoir où se situent ses limites. Pas que je veuille jouer avec, loin de là ; simplement... Oui, voilà. De la curiosité, ce doit être ça finalement.

– J'espère bien, je suis tellement nulle que tu risquerais de perdre patience, je ris doucement.

Puis nous terminons tous deux nos tasses de chocolat et Allen me propose de me raccompagner. J'ai un nouveau sourire amusé. En tant que voisin de chambre, ça aurait été difficile qu'il ne me raccompagne pas, tout de même... J'acquiesce pourtant et lui fais un clin d’œil.

– Difficile de vous dire non, très cher.

Je me lève et attends qu'il en fasse de même pour le suivre après avoir débarrassé nos tasses, afin de nous diriger vers les dortoirs des airs. Discrètement, j'étouffe un bâillement. Je sens que je vais être lessivée demain ; mais tant pis. Au moins, je ne déprime plus ! C'est un bon point, je trouve.
Nous arrivons devant ma chambre et j'offre un sourire rayonnant à Allen.

– Merci d'être venu, tout à l'heure. Ça m'a vraiment fait plaisir.

Avant d'oublier, j'enlève sa veste de mes épaules et la lui tend doucement.

– Et merci aussi pour la veste, et le chocolat.

Je lui fais un petit signe de la main pour le saluer d'une voix douce.

– Bonne nuit Allen. J'espère qu'on se verra demain.

Sur ce, je déverrouille la porte de ma chambre pour y entrer et me change, puis m'affale sur mon lit. J'ai un regard furtif vers la fenêtre encore ouverte et esquisse un sourire doux, avant de tomber bien rapidement dans un sommeil profond.