Tournant le médiator entre ses doigts, nerveusement, l'initié ne trouvait aucun moyen pour se pencher sur ses partitions. Même sa guitare était laissée à l'abandon, à ses pieds. Les cordes ne vibraient plus et tapis là dans un coin de la pièce, affalé sur sa chaise, le regard perdu par delà le tableau que lui offrait sa fenêtre, il n'y avait rien ici qui vibrer. Le cendrier débordait de mégots, remplit à ras bord, mais aucune ligne décrit, aucune page ne débordait d'idée.
Il fallait le reconnaître, rien n'allait, plus rien n'était sous contrôle.
Mise à part ses cours, Ys restait le plus clair de son temps enfermé ici, dans sa chambre. Cela fesait un moment qu'il n'avait pas croisé ses amis. Pourtant, il avait tenté de joindre Allen , lui laissant même un message,une raison de sortir et de boire jusqu'à l'aube. Mais aucun signe de vie de sa part. Le peu qu'Ys s'aventurait en dehors son terrier, se rendant en cours, il venait à longer les murs, évitant tout contact. Même lorsqu'il croisait Mitsu, l'apercevant au loin, le garçon fesait immédiatement demi tour, dans la plus grande ignorance.
Les membres de son groupe, notamment Joyce, avait tenté de le contacter pour une répétition mais ce dernier se cachait derrière des excuses du genre "je dois d'abord travailler nos textes".

Oui cela fesait deux semaines bientôt qu'Ys s'était enterré. Pour tout dire, il s'en rendait compte, mais cela lui convenait. Il n'en n'était pas plus malheureux. Seulement il était tracassé. Et ne se terrant pas dans le mensonge, il savait le pourquoi du comment.
Il avait en quelque sorte perdu le contrôle, et ça, pouvoir faire ce que l'on veut tout en ayant la maîtrise, Ys ne supportait pas de le perdre. Entre le fait qu'il en avait trop dit à son sensei, ne sachant plus quel comportement avoir sans que le malaise s'installe, mais maintenant voilà que son père, qui avait toujours ignorait sa naissance, le voilà qu'il réapparaît. Une vraie gangrène ce type! En vérité, ce qui l'embêtait surtout, c'était l'obsession que portait Mitsuki sur son passé. Il n'y a rien d'interessant et puis ça ne valait pas le coup de s'en occuper. Mais non, voilà que cette dernière s'était mis en tête de l'aider. Bien sûr, malin comme un diable, Ys avait gagner du temps avec son fameux défis, mais il ne sera pas éternelle.
Connaissant cet être froid, elle risquait d'avoir des soucis si elle venait à se mêler de leur histoire. Mr Ochikawa ne laisserait jamais son fils jouait dehors sans qu'il suive ses pas. Et si Mitsu s'en mêlait, il n'hésiterait pas à lui faire payer très cher.

Le médiator tomba soudainement dans un bruit sec. Ce qui fit revenir Ys de ses pensées, arrêtant de se torturer l'esprit. Il devait agir, et maintenant! "Pardon Mitsu si je ne tiens pas promesse". Mais qu'importe, même si elle ne lui adresserait plus la parole, même si elle le giflerait, combien il préférait qu'elle lui tourne le dos que de la savoir en danger. Il ne lui faudra pas longtemps au garçon pour bondir de sa chaise et d'attraper sa veste en cuir. Tout était déjà à disposition, cigarettes, portable, porte feuille, il n'aurait pas besoin d'une valise. Se tenant debout , au milieu de la pièce, le regard glissant au sol doucement, dans cet arrêt d'élan, l'espace d'un instant, il douta de lui et de ce qu'il comptait faire. Mais n'ayant trouvé aucune autre solution, fermant les yeux fermement, poings serrés, Ys disparut.

Sa téléportation le mena dans un endroit qu'il connaissait bien, trop bien même. Il aurait aimé oublié ces alentours, tout ce qui s'y présentait. Shinjuku, une ville populaire du Japon et où résidait les hommes d'affaire les plus impressionants. Cependant, Ys ne se tenait pas devant ces grands buildings, mais devant une demeure imposante de par sa taille. Cette impasse était toujours restée aussi calme, personne ne s'y promenait et aucun bruit ne résonnait. Devant ce portail noir mesurant dans les 1m80 environ, on ne pourrait deviner ce qui s'y trouve derrière. Même si Ys ne prenait aucun plaisir à venir ici, il avait garder une clé dans son porte feuille. Une clé qui ouvrait cette demeure et en poussant ce portail une fois le déclic fait, il n'entendit pas "bienvenue chez toi".
Personne ne l'était là pour l'accueillir en même temps de quoi de plus normal?! Il était venu à l'improviste et ce fut avec surprise qu'Alfred le découvrit sous le portillon une fois la sonnette retentit.


"Jeune Maître? Mais... Comment... vous....??"

"Tout va bien, je ne fais que de passer."

Lui affichant un agréable sourire pour rassurer le vieil homme, le majordome laissa entrer ce dernier. Il ne pouvait cacher un sourire de compassion tant il savait que pour son maître, entrer ici était une dure épreuve. Quelques pas suffirent pour découvrir une bien vaste villa. Le plafond était d'une incroyable hauteur orné d'un magnifique escalier marbré. Malgré la beauté de cette décoration, tout était froid ici. Aucune chaleur humaine, aucun cris de joie, cet homme, Mr Ochikawa, avait rendu ces lieux égales de sa personne.
Bref, de toute manière Ys n'était pas là pour une visite des lieux. Il reporta son attention sur son vieil ami qui s'était empressé à lui oter sa veste.

"Il est là? "

"Hum, évidemment monsieur. Il se trouve dans son bureau mais, hum, pardonnez ma curiosité, mais pourquoi êtes vous venu?"

"Tu m'avais envoyé un message je te signale! Alors voilà, je suis là!"

Dit il comme si cela lui paraissait normal tout en récupérant sa veste.

"Oh oui mais vous n'aurez pas préfériez que je vienne à vous avant toute chose?"

"Pas besoin, je ne compte pas rester de toute façon.

Portant son regard sur le couloir qui menait à cet homme, Ys posa sa veste sur son épaule et fit deux pas avant de se retourner de nouveau vers Alfred subtilement.

"Ah au fait, Alfred? Vous n'avez pas besoin d'une excuse pour venir me voir, vous le savez?!"

"..... Je suis heureux de vous revoir jeune Maître...."

D'un doux sourire partagé, les deux hommes se séparèrent. Ils n'avaient pas besoin d'en dire plus, ils se connaissaient bien assez pour savoir ce que l'autre pensé. Ils n'avaient pas le même âge, mais ce n'était qu'un détail en fin de compte. Ys aurait aimé passé sa journée à ses côtés, discutant du dernier match, jouant aux échecs, mais il y a avait ici une menace qui l'avait toujours repoussé hors de ces murs.
Et cette menace même, il allait devoir l'affronter malgré lui. D'un soupire échappé, Ys prit le pas en direction du bureau. La couleur des murs était rouge sombre, très peu d'éclairage. Tout comme dans ses souvenirs, rien n'avaient changés, malheureusement. Et à chacun de ses pas, il avait l'impression qu'il brûlait de plus en plus. Inutile de s'imaginer comment finirait leurs retrouvailles, le scénario est toujours le même.

Devant cette porte en bois foncé, et à la poignet dorée, Ys vint écraser son poing dessus. Son père l'a toujours réprimander d'entrer sans attendre que l'on l'y invite. Et parce qu'on garde les mauvaises habitudes, surtout que cela avait le don de l'agacer, Ys fit comme toujours, il entra sans attendre son nom.

"? Alors là, ça doit être un honneur de te compter parmi nous. Ou peut être un mauvais présage...."

"Moi aussi je ne saurai mesurer ma joie ..."

Sans enlacement, ou une poignet de main ,la guerre entre les deux coqs étaient lancés. Un homme de grande taille, d'une posture très droite, se redressa de son siége. Il avait gardé ces mêmes traits qui hantaient les souvenirs du jeune homme. Ces dessins sur son visages qui disaient combien ils n'étaient pas fier du petit garçon, combien ils le rabaissaient à chaque acte. Coiffé d'une chevelure argenté tirant le cendré, même dans sa démarche, dans son regard, cet homme était confiant et d'une sur estimation à toute épreuve.

"Je t'en prie, expliques moi la raison de ta présence. Assez rapidement tout de même, j'ai un dossier très intéressant qui m'attend..."

*Oui, ne changes pas surtout. Exprimer combien ma présence t'agace n'a jamais changé.* Ce n'était pas un sourire, mais un rictus qui anima le visage du jeune homme. Ce dernier cessa de marcher et inconsciemment se retrouva au centre de cette pièce froide, comme s'il se trouvait devant un juge et venait implorer non coupable. Sans le quitter du regard, le défiant de tout son être, exprimant au mieux tout le dégoût qu'il pouvait lui inspirer, Ys s'élança.

"Je ne vais pas gâcher votre temps, juste vous le faciliter. Ne le perdez pas à tenter de savoir ce qu'il se passe, surtout pour votre argent. J'ai récemment emprunter un grosse mais vous savez combien coûte les études. On ne devient un gros mangeur sans avoir goûter aux luxes avant!"

Mr Ochikawa releva ses petits yeux noirs perçants sur son fils, et le bref instant d'un silence, il éclata de rire comme pour se moquer de son fils, sans y aller le dos de la main.

"Tu ne t'écoutes jamais? Emprunter? Je suis heureux que tu le mentionne. Ainsi tu ne serai plus un voleur mon fils? Ta visite en valait le coup! Mais dis moi, vu l'importance des sommes, tu vas finir par obtenir un très beau diplôme qui, selon moi, te permettrais de tenir un poste tout aussi intéressant que je ne l'ai déjà?!"

Ys le voyait, dans ces petits yeux de vipère, il cherche à détecter une vérité et surtout, un mensonge. Il n'attend que ça et remarque tout; Que se soit dans sa respiration ou dans la direction où il regarde, Ys est sous pression comme s'il avait été branché sur une machine à détecter les menteurs. Fort heureusement pour lui, le martinet l'avait bien dressé, et il mentait ben mieux qu'à ses 16 ans. Et d'une arrogance égale à lui même, il repondit sans se démonter:

"Vous devrez pourtant être le premier à être au courant, non? Il me semblait que rien ne vous échapper."

Le sourire amusé du ministre disparut devant l'impertinence du garçon. Surtout qu'en plus de cela, il n'aurait su dire son fils jouait. Lassé de son comportement, il retourna se rasseoir à son bureau, et reprit d'une voix séche et autoritaire.

"J'aimerai recevoir un rendu de ton année. Ou peut être qu'un professeur se déplacerait, évidement à mes frais. Après tout, si tu es si bon que tu n'ose l'étaler, il doit y avoir un professeur qui te suit comme si tu étais son poulain. Penses y, mes déplacements sont difficiles à planifier mais rien n'est impossible."

Tout comme son père, la petite lueur de surexcitation dans ses yeux s’éteigne pour que son regard roule au sol quelques secondes. Cet homme pouvait mettre à exécution ses menaces, Ys le savait que trop bien. En pensant au professeur imaginaire, Ys vit de suite Mitsuki. Ce pourquoi il était là, éviter que cette rencontre n'arrive. Relevant son regard de braise, une boule dans sa gorge se forma. Il se força à ne pas hurler, évitant de soulever tout doute.

"Le jour où je serai grand, vous, vous saurez tout en bas et je n'hésiterai pas, je vous le jure, de vous écraser comme un simple insecte...."

Serrant son poing, il rassembla tout son courage pour faire ce qu'il n'avait encore jamais fait. Il lui tenait tête certes, mais il n'avait jamais exprimer toute sa haine qu'il lui portait. Et peut être qu'aujourd'hui, il était temps de laisser échapper cette boule qui le consumer de l'intérieur.

"Sortez de ma vie. Je vous le conseille fortement..."

Son père l'observa sans rien dire comme s'il venait de découvrir un nouveau fils. Pour lui aussi, c'était une première et il se douta bien que s'il venait à en arriver à ce stade, c'était qu'il arrivait à bout de nerfs. "Que t'arrive t il? Tu ne joues plus?" L'homme ne se lassa pas de le fixer et un sourire machiavélique apparut.

"Tu pleures là? Tu m'implore ta pitié? Haha!! Mais tu es faible mon pauvre enfant! Tu es aussi faible qu'elle ne l'avait été!"

"La ferme!" Grinça Ys entre ses dents.

"Regardes toi! Tu es là, devant ma moi, dans ma maison, et tu essayes de m'insulte? Mais tu es de la même lignée, tu ne tiendrais pas plus longtemps qu'elle n'avait tenu!"

"J'AI DIT DE LA FERMER!!!"

C'était comme hurler pour repousser une tempête. Se vider de ses forces pour lutter contre un vieux démon. Pourtant l'homme cessa d'en rire et le fixa sans relâche. Son fils avait osé se réveillé, mais lui, il savait où appuyer pour que ça fasse mal. Un jeu facile, il gagnerait infiniment. Et pour sa part, Ys sentait une pointe brûlante dans sa poitrine. Comment pouvait il parler ainsi, comment pouvait il la salir de cette manière?! Qui était cet homme? Dans le fond, Ys se moquait de la réponse, tout ce qui voulait, c'était d'entendre son dernier souffle.Dans ce silence particulier, Mr Ochikawa prit le temps de regarder ce jeune homme devant lui qui serrer des poings, le visage baissé. Il voulait lui faire payer son injure, sa confiance soudaine pour n'être que ce petit agneau qu'il l'avait toujours écrasé parce que c'est ainsi qu'il se sentait grand et fort. Le vieux lion ne donnerait jamais sa couronne.

Joignant ses mains entre elles devant son visage, laissant apparaître ces petits billes sombres, sa voix résonna une dernière fois avec beaucoup de calme.

"J'aurai tant aimé que vous disparaissez ensemble, cette nuit là..."

*ASSEZ!* S'en était trop! Son coeur s'était resserré sur lui même comme pour l'éviter qu'il batte. Il avait perdu tout contrôle, son être s'emporta, son esprit était flou. Et c'est dans un élan de rapidité qu'il se retrouva par dessus le bureau, au nez de son père, l'arrachant par son col, son poing brandissant au dessus de son visage. Les mains tremblantes, retenu par une force intérieure, Ys n'alla pas au delà de son geste brutal. Jamais ils n'étaient arrivé à ce stade. Tout n'avait été qu'un jeu où l'on se met plus bas que terre, mais aujourd'hui, une chose nouvelle était née. Peut être que la peur de cette rencontre avait poussé le garçon à ressortir cette rage. Il allait pourtant le frapper, cogner son visage jusqu'à ces traits autoritaires disparaissent sous son sang. Mais il n'en fit rien et se compta de le fixer au plus profond de son âme. Sa respiration lente, tenant de retrouver un minimum d'humanité; Ys ne voulait plus être ce garçon qui résolut tout par la violence. Même si l'envie le brûlait de l'intérieur, il cessa.
Quant à son père, ce dernier ne bougeait plus et fixa de grands yeux ce qui autrefois ne voyait comme un misérable insecte. Il comprit qu'il pourrait être un danger pour lui. Mais lorsque le chien montre les dents une fois, il ne faut plus lâcher prise! Ceci dit, il n'en dit rien, suivant du regard ce poing s'abaissait doucement vers le bas.
Brisant cet instant, une voix basse mais dure résonna:

"Vous devriez savoir.... après tout ce temps... que je peux tuer pour le plaisir....juste pour le plaisir...."

Oui, Ys le fou, Ys le violent, le Ys d'autrefois dormait, mais il n'était jamais partis. Encore une seconde à le fixer dans les yeux, et d'un geste vif, Ys lâcha ce qui autrefois devait être son père et sans se retourner, le téléporteur quitta ce bureau. Une fois derrière la porte, sentant son coeur battre à vive allure, Ys se téléporta subtilement, quittant ces lieux à jamais.  Il se trouvait désormais dans une ruelle, pas loin de Terrae. Il n'était pas de ce qu'il présumait aujourd'hui être "sa maison". Cependant il ne trouva pas la force de rentre de suite.
Il allait exploser, tout allait enfin sortir. Il plia des jambes, la tête en bas, pensant qu'il allait vomir, mais il se redressa aussi vite. Il ne tenait plus en place et ne contrôlait plus son corps. Des grésillements autours de ses mains jaillissaient peu à peu. Sa respiration était difficile à retrouvé, il avait du mal. Cette boule au fond de sa gorge le brûlé. Elle devait sortir. Fesant les cents pas sur lui même, il baissa les bras et laissa échapper ce qui le dévorait depuis bien trop longtemps. Dans un hurlement de colère, se déchirant, la pauvre victime qu'il se servit pour évacuer cette puissance n'était autre qu'un mur. De ses poings, il frappa sans relâche, augmentant à chaque coup la rapidité. Des éclairs jaillissaient de plus en plus, prenant tour à tour un important volume et plus il frappait plus sa puissance s'évadait. Il la laissa enfin sortir. Comme si la foudre venait s'abattre dans cette petite rue sombre, sous la force inhumaine de ses poings, le mur s’effondra, laissant apparaître la rue voisine. Heureusement il n'y avait à cette heure aucun témoin.
Comme vidé de ce qu'il venait de se produire, incapable d'en avoir le contrôle, Ys recula pour  se laisser glisser contre le mur de derrière. Au sol, dans une respiration saccadée, Ys fixa sa destruction. Une main se serra à l'intérieure de sa poitrine, le brûlant dans ses entrailles. C'était à la fois douleur et familière, resté là, tapis en lui. Fronçant les sourcils, Ys n'aurait su dire si son regard avait changé, il ne pouvait apercevoir cette lueur dans ses yeux. Les pupilles étaient bien plus dorés qu'à leurs habitudes, comme si la lumière du soleil y résidait. Même ses poings qui étaient en sangs, des plaies assez profondes, il ne ressentait rien de cette douleur futile. Non, la douleur était quasiment tout en lui. Elle était générale.
Il ne cacha pas cette larme au coin de l'oeil, mais il sentait mieux à présent. Comme si des années de souffrances venaient enfin de se libérer, de le libérer. Mais la voix de son père résonnait encore dans son esprit, et il regretta de lui avoir fait subir la même chose que le mur. Désormais, tout était différent, et ils avaient tous deux pris conscience.

Mais pour l'instant, tout va bien. Même s'il prendra encore quelques heures avant de se lever et retrouver Terrae, il y avait une sensation étrange, une aura en lui qu'il ne connaissait pas. Et vidé de ce qu'il s'était passé, il ne se sentait pas épuisé, juste en paix....