Pourquoi j’ai toujours des trucs lourds dans les bras ? Je finis par avoir mal ! Et puis perchée en équilibre en l’air comme ça, je vais finir par me ramasser et me casser quelque chose, maladroite comme je suis. Cela fait peu de temps que je travaille dans cette librairie, mais la boss et moi ne sommes pas tout à fait sur la même longueur d’ondes. Elle est… Exigeante on va dire. Et je suis… Assez calme. Trop calme. Lente on va dire en fait. Soyons clair. Faut dire qu’il fait 40°C dans cette boutique et qu’on étouffe. Surtout avec les uniformes. Entre celui de l’institut et celui du boulot, je ne trouve plus le temps de m’habiller comme je le souhaite…

Enfin, aujourd’hui je dois ranger toutes les étagères. Les réorganiser. La totale quoi. ET C’EST LONG. Et puis, comme je suis petite, je passe mon temps sur ces échelles assez flippantes. Elles grincent. Tremblent. Craquent. Bref, quand je suis dessus, je stresse carrément. Surtout avec 10 bouquins de la taille d’un pavé posés en équilibre sur une main. Ils ont plusieurs fois failli tomber, mais j’ai réussi à les rattraper au dernier moment chaque fois. Jusqu’à maintenant.

Deux choix se sont proposés à moi : ou je m’éclatais lamentablement par terre, ou c’était les livres. Désolée pour la demoiselle qui vient de tous se les prendre, mais j’aurais de toutes manières été plus lourde. Néanmoins, ça ne m’empêche pas de devenir rouge comme une pivoine, paniquer, et lâcher un : « Désolééée ! » avant de reperdre l’équilibre en tombant sur les fesses, à côté d’elle heureusement. Non parce que sinon je crois que je l’aurais achevé la pauvre. Gênée et endolorie, je passe vraiment ma vie à tomber, je balbutie :

« Je… Je suis vraiment désolée… T’es blessée ? »

Je me tourne vers elle. Putain je lui ai ouvert le front. Enfin non, juste égratigné. Mais elle a un peu de sang quand même. J’entends ma boss crier :

« Miss Skily ? Un problème ? »

Mes yeux s’arrondissent et je pose ma main sur le bras de la jeune fille et exerce une légère pression de la main.

« S’il te plait ! Dis rien ! Je vais me faire dégager sinon, et après je saurai plus quoi faire ! Je peux te soigner et tout ça, et même t’offrir un bouquin. Ce que tu veux ! Mais dis rien ! »

La soigner ? Oula, je m’emballe. Bien que mes compétences se soient améliorées, je n’ose pas trop toucher aux autres. J’arrive, heureusement vu le grand nombre que j’ai, à soigner mes bleus, mais guérir quelqu’un d’autre ? Peut-être pas une si bonne idée… Enfin, j’ai proposé, maintenant reste à assumer.

Alice marche lentement dans la libraire qu'elle découvre pour son plus grand plaisir. Enfin libre de s'habiller comme elle veut, elle a pu revêtir sa chemise blanche à motif parapluie tout en couleur. L'endroit est spacieux, les étagères sont hautes, et Alice, toute petite, se dévisse le crâne pour lire les titres des bouquins les plus hauts. Elle arpente les étagères, à la recherche des bons livres. Souvent, elle s'arrête, touche doucement la couverture, lis le résumé, et puis le repose. Elle en prend certains également, mais seulement pour sentir leur odeur.

Ce qu'il fait chaud... Alice est au paradis. La chaleur, l'odeur de papier rempli d'encre, l'atmosphère confortable créée par les livres, le calme de la librairie et... AÏE ! OUILLE ! Mais aïlleuh ! Qu'est-ce qu'il vient de se passer ? Alice se retrouve par terre sous le choc, et vient de se recevoir une pluie de livre sur la tête... Et pas des plus fins d'ailleurs. Alice porte ses mains à sa tête, et frotte fort sur les futures bosses qui vont se créer. Lorsqu'elle baisse ses mains, elle voit un peu de rouge sur son index... Et puis on s'excuse... Alice lève la tête et aperçoit la fautive : la jeune fille a des cheveux bleus, et a l'air totalement paniquée. Alice a envie de rire, puisqu'elle va plutôt bien... Son regard reste posé sur la demoiselle, elle paraît douce, et rassurante.

Alors comme ça, elle s'appelle Skily, et apparemment, elle a un peu peur de sa patronne. La panique de la jeune fille la prend au dépourvue, et Alice ouvre grand les yeux, et tente d'en placer une au milieu de la tirade. Tout va bien, ce n'est pas grave... Oui oui, elle va bien, Alice ne va pas te balancer... Elle se frotte à nouveau la tête, et un sourit amusé apparait sur son visage. Elle chuchote :

« Ne t'en fais pas, je ne vais pas te dénoncer... »

Elle reste assise mais se redresse, et secoue un peu la tête pour cacher son égratinure. Lorsque la directrice apparaît, elle lui envoie un sourire lumineux, et désespéremment calme.

« Bonjour, excusez-moi, je n'avais pas vu l'échelle et je m'y suis cognée. Je vais aider votre employée à ranger, désolée pour le dérangement. »

Elle se relève doucement, et se tourne vers la jeune fille, en ramassant quelques livres. Espérant avoir été convaincante, elle ne se retourne pas pour vérifier si la directrice est partie, et attend de voir la réaction de la fille. Pendant ce temps, elle l'observe... Elle est encore toute rouge, et elle a l'air toute timide... Evidemment que non, Alice n'allait pas lui faire perdre son job, surtout pas celui dans une libraire aussi belle que celle-ci.
Elle a parlé de la soigner... Ce qui veut dire qu'elle connait déjà ses pouvoirs... Alors c'est une camarade à elle !  Mais ce que retient surtout Alice, c'est la promesse de la découverte d'un nouveau livre...

Ok. On se calme Oksa. La jeune fille n’a pas l’air méchante. D’ailleurs, pendant que ton fessier reste posé au sol, elle, elle se relève et sort une excuse à ta boss.

Ok. On reprend ses esprits Oksa et on arrête de se parler. Debout maintenant.

Les jambes un peu douloureuses, je me relève. Un léger sourire vient enfin illuminer mon visage.

« Merci beaucoup, vraiment. »

Je sais, on pourrait facilement croire que j’ai sur-réagi. Et pourtant non. Je n’ai pas vraiment d’amis hormis Angie. J’ai fini le lycée et ne compte pas tout de suite faire d’études supérieures. J’ai traîné dans ma chambre à ne rien faire pendant 3 ans. Il était temps que je me bouge. Ce job avait été mon fil d’Ariane, le seul moyen de m’échapper du labyrinthe de l’ennui et de la dépression. Alors le perdre m’aurait été fatal, j’en suis convaincue.

Je ramasse avec elle les livres restants et récupère ceux qu’elle a dans les bras.

« Tiens suis-moi, on va te soigner et je vais te chercher un livre. »

Entrainant avec moi les désormais considérés comme armes, j’amène la fille dans la salle du personnel où je l’invite à s’assoir. Après avoir attrapé dans l'armoire à pharmacie coton et désinfectant, je fais de même, tirant une chaise à côté de la sienne après avoir posé les bouquins sur la table.

« Alooors… Tu vas te laisser faire d’accord ? A priori, il ne devrait rien t’arriver de mal ! »

Hum. Le « à priori » super rassurant tu sais… En même temps que nettoie la légère blessure, je lui pose des questions.

« Dis-moi, tu as une préférence dans le genre du livre ? Roman fantastique ? Journal intime ? Roman épistolaire ? Classique ? Recueil de poèmes ? Contes ? »

Bref. Je pourrais continuer comme ça longtemps. Mais il faut que je me concentre. Il est temps de passer aux choses sérieuses.

Néanmoins, je suis perturbée. Aussi près de la jeune fille, et enfin calme, je remarque l’étrangeté de son regard. Il est puissant et déconcentre. Tout de même, la vue du sang me rappelle à l’ordre – moi qui suis si dégoûtée par ce liquide pourpre – et je décide de m’y mettre.

Je glisse doucement le bout de mes doigts sur la peau abimée, l’effleurant à peine. Ensuite, j’y place la paume de ma main à quelques millimètres. Un léger air frais s’échappe de ma peau et vient apaiser les picotements potentiellement causés par l’égratignure. Je ferme ensuite mes yeux et laisse mes doigts se balader sur la blessure dans sa longueur, reliant de leur bout les deux côtés comme si j’y apposais des points. Lorsque je soulève mes paupières au bout de quelques minutes, je réalise que je retenais ma respiration et que mon cœur s’emballe. Je reprends donc un rythme respiratoire normal, par la même occasion s’y accorde mon rythme cardiaque, et observe la blessure. Avec un grand sourire, j’annonce à la blessée.

« Tout va bien ! J’ai réussi ! Aaaah je suis trop contente c’est la première fois que je soigne quelqu’un d’autre ! Troooop bien ! »

Ok là je crois qu’elle va avoir peur en retard en sachant que je n’avais jamais pratiqué ça sur qui que ce soit MAIS BON. L’important c’est que j’ai réussi !

Au fait ? Elle s’appelle comment la jolie demoiselle ? Oups. J’étais tellement paniquée que les présentations sont passées à la trappe j’ai l’impression. C’est malin tout ça, d’abord je manque de la tuer, puis je me montre grossière. Elle va M’A-DO-RER je vous dis.

« Désolée ! J’ai complètement zapper de me présenter et te demander ton prénom ! Je m’appelle Oksa, et toi ? Tu es ? »

En tout cas, moi je suis une nouvelle fois toute rosie, super. J’aimerais quand même que cette habitude de me colorer toute les cinq minutes me passe un jour.

[Hrp : en vrai Alice elle sera là « Oh ? Elle ne l’avait jamais fait ? Bah on s’en fouuuuuut ! » x)]

Alice est quelque peu surprise par la sincérité de la jeune fille. Elle sourit ; très peu de gens réagissent comme ça, avec autant de franchise. Ses yeux la dévisage, et Alice est alors vraiment heureuse d'avoir pu l'aider.

« C'est normal, enfin. »

Elle suit alors sa camarade en silence, de façon docile. Elle aurait préféré rester au milieu des livres et des bibliothèques, mais sa bonne foi l'en empêche et elle s'assoit sur la chaise que désigne la jeune fille.
Elle la laisse approcher sans crainte, et se laisse toucher le visage avec facilité. Elle écoute sa question, et réfléchit, les yeux dans le vague posés sur la jeune femme. C'est une question compliquée. Réellement, Alice ne sait pas. Elle adore la fantasy, la science fiction, les albums pour enfant, la poésie... Hm, que de possibilités... Au bout d'un moment de silence, et juste avant de sentir les picotements du désinfectant, elle glisse, tout doucement.

« Choisis-toi. Offre-moi un livre qui te plaît et que tu aimerais que je lise. »

Elle se rend compte alors que ses yeux sont plongés dans ceux de sa camarade depuis tout à l'heure, et que cette proximité peut être gênante. Et en effet, elle l'est, puisqu'elle voit bien que l'autre n'est pas à l'aise. Alice se presse de détourner les yeux, elle ne veut pas la déranger... Décidément, ses yeux perturbent beaucoup trop de gens...

Avec toute la confiance du monde, elle la laisse poser sa main sur son front, et faire des gestes étranges, qu'elle semble pourtant maîtriser. Elle ressent toute la concentration de la jeune tellement elle est consciencieuse. Elle se laisse faire, et sent seulement que sa peau est apaisée, elle ne sent plus d'élancement à cette blessure. Une fois qu'elle a retiré ses mains, Alice passe le bout de ses doigts délicatement sur son ancienne blessure.

« Tu es très douée ! C'est aussi la première fois qu'on me fait quelque chose comme ça ! »


Elle rit doucement, et semble totalement rassurée. Alice est tout à fait calme et ne montre aucun signe de peur ou de méfiance : il faut une première fois à toute chose !
Elle sourit tout en penchant un peu la tête sur le côté.

« Enchantée Oksa. Je m'appelle Alice. Je suis arrivée il y a peu, et je voulais absolument passer à la librairie. »

Alice a cette manie d'envelopper d'une façon tendre les gens qu'elle apprécie sur le moment de son regard. Ses lèvres s'étirent en un sourire amusé.

« Ne t'en fais pas, moi je trouve que tu es très mignonnes quand tu rosies. Tu n'as aucune raison d'être gênée. »


Elle voit bien qu'Oksa est terriblement gênée, à la fois de tout faire dans le désordre de la forme, et d'être toute rouge. Pour Alice, ce sont deux choses tout à fait secondaires et qui importe peu sur sa vision des choses.

Je me sens gênée qu’elle me dise que je suis très douée. Bien sûr, c’est gentil de sa part mais elle ne sait pas vraiment de quoi elle parle. Lorsque je vois les Etoiles et les Masters, je trouve qu’ils font des choses magnifiques. Même leur manière de soigner est belle. J’ai tellement hâte d’être capable d’agir de cette façon… Néanmoins, j’ai encore besoin d’entraînement j’en ai bien conscience. C’est donc un léger « Merci » qui s’échappe de mes lèvres, rien de plus démonstratif.

Qu’est-ce qu’elle raconte la jolie Alice ? Moi, mignonne ? Je suis surtout trop enfantine dans mon physique ! De plus, elle a un léger sourire amusée. Se moquerait-elle de moi ? Je détourne le regard et murmure d’une manière à peine audible.

« Merci. C’est gentil. Mais tu n’as pas besoin de faire semblant, j’ai l’habitude. »

Oui j’ai l’habitude de trop rougir et de m’en sentir gêné, tant pis. Alors je n’ai pas envie qu’elle dise ça juste pour me rassurer. C’est même encore pire en fait. Et je ne vois pas d’autre raison justifiant qu’elle me dise cela. Il ne me viendrait pas à l’esprit qu’elle est simplement sincère.

Je décide de changer de sujet. Je me lève et range cotons et désinfectant. Mon visage est fermé et c’est d’une voix distante que je reprends la parole.

« Je vais aller chercher le livre. Tu peux rester ici ou me suivre, comme tu préfères. »

Qu’est-ce que je vais pouvoir lui offrir ? De nombreux livres me plaisent, et je ne sais lequel choisir. Quelque chose de sérieux ? De beau ? De drôle ? Un sujet de réflexion ? Trop de possibilités… Je me souviens alors d’un qui m’a marquée l’année précédente. Un splendide roman qui fait voyager dans le temps comme dans le monde. De Dai Sijie. Le titre était Balzac et la Petite Tailleuse chinoise. Cette histoire se passe en Chine sous le règne de Mao Zedong, en plein régime communiste donc, lors de ce qu’ils appelaient la « rééducation ». Dans ce roman deux garçons vont tenter d’éduquer une tailleuse chinoise inculte lors de leur rééducation. Il y est question de violon, de Balzac, du pays, de l’éducation… et tout cela d’une manière si belle.

Je me lance donc à sa recherche et finit par le trouver. L’attrapant délicatement j’en cherche le prix pour aller mettre l’argent en caisse ensuite. Une fois trouvé, je tends le précieux livre à Alice.

« Tiens. Ce roman est beau. Il fait passer le temps et tu auras la sensation d’être ailleurs. »

Et Dieu sait que j’en avais eu besoin, de me sentir loin de tout, l’année précédente. Il y a un an, c’était le début de la fin de ma dépression et de mon ermitage total. Ce livre m’avait donné envie de voir le monde. Il m’avait donné espoir que quelqu’un, quelque part, me verrait comme cette petite tailleuse chinoise et voudrait me venir en aide. Pas m’éduquer dans le même sens que les deux garçons éduquent cette enfant, mais m’apprendre à vivre dans ce monde, trop rempli à mon goût. Et j’avais rencontré Angie, qui avait commencé sans s’en rendre compte à me montrer comment aller vers les autres. Avec lui j’ose dire ce que je pense, j’ose rire, j’ose parler, j’ose vivre en fait. Je ne me cache pas, et cela fait du bien de se sentir libre.

Mes yeux viennent recroiser ceux d’Alice, timidement. D’elle, j’ai dû mal à ne pas avoir envie de me cacher. Elle m’intimide et m’inspire un sentiment étrange. Peut-être sa franchise me désarçonne-t-elle. Je n’arrive pas à savoir si elle est réellement sincère ou si c’est juste pour paraître être quelqu’un d’autre, pour ne pas que je me méfie d’elle. Alors je m’en méfie. Paradoxal n’est-ce pas ?

Alice sent la gêne d'Oksa, une fois seulement après qu'elle lui ai répondu... Oh, voilà. Elle réagit comme les autres maintenant, elle est froide. Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas simplement être sincères, on ne se méfierait pas... Enfin, Alice comprend la jeune fille et n'en dit pas plus, elle ne veut pas lui faire de mal ou paraître agressive, ce n'est pas du tout son but. Alice a pensé ce qu'elle a dit cependant, et au fond, ça l'embête qu'Oksa ne l'ait pas comprit. Ce n'est pas grave, elle retentera, plus tard. C'est encore trop tôt. Ce que c'est fatiguant de devoir faire attention à ce que l'on pense.

Alice se redresse lorsqu'Oksa s'éloigne pour reposer les cotons et... Oh... Le ton de sa voix est devenu tout refermé... Ne serait-elle pas un peu lunatique ? Ou alors, elle n'a vraiment pas confiance en elle... ou un peu des deux. Elle décide la suivre, mais elle se tait. Elle ne prend pas mal son changement de comportement rapide, mais n'ose pas la brusquer, alors elle reste avec elle sans rien dire. Elle la regarde piocher dans les étagères, et lui tendre le livre. Elle le prend entre ses deux mains, l'ouvre doucement, et l'approche de son nez pour en sentir l'odeur. Elle ne se pose même pas la question de si elle a l'air normale ou pas. Le livre sent bon, les pages ne sont pas toutes neuves mais ne sentent pas le vieux livre pour autant. Il a une odeur douce. C'est agréable...
Alice retourne le livre et lit le petit résumé. Elle sourit.

« Je te crois sur parole. Il a l'air beau. Et pas forcément facile. Ca me plaît, merci. »

Elle fait glisser ses doigts sur la couverture du livre, puis le rouvre, et lit seulement la première phrase. Elle redresse la tête vers Oksa, et sourit. Pourquoi est-ce qu'elle a choisi ce livre ? Que veut-il dire pour elle ? Comment l'a-t-elle lu ? Comment l'a-t-elle vécu ? Oui, toute ces questions viennent en bloc. Une personne ne conseille jamais un livre qui ne l'a marqué, d'une façon ou d'une autre. Si ce roman est beau, c'est qu'Oksa y a trouvé une sorte de paix, quelque chose qui lui a fait du bien, qui l'a reposée, qui l'a fait réagir. C'est ça qu'Alice cherche en lisant.  Elle espère qu'Oksa aussi.

Leur regard se croisent. Oksa se méfie... Oui elle sait, son regard est étrange... Et puis beaucoup se méfient d'elle, sans raison. Oksa aussi est un peu différente. Alice ne sait pas trop comment réagir, c'est une chose qui lui arrive rarement. Elle sourit à Oksa, tout doucement. Elle parle tout bas, en la regardant sous les cils.

« Je t'intimide pas vrai ? Hm... Je suis désolée. »

Alice se passe la main dans les cheveux, et pose le livre contre son ventre. Elle regarde Oksa, et lui sourit, avec une expression tendre et un peu... Timide ?  Oui, Alice a l'habitude, et souvent, elle réagit avec franchise et tout simplement mais cette fois-ci... Oksa a l'air plus... Déterminée à se méfier. Alors elle ne sait pas trop quoi faire. A part être franche.

J'observe Alice prendre le livre. Cette fille est étrangement toujours souriante. Elle est particulière. Un léger sourire s'affiche sur mon visage lorsque je remarque son amour de la littérature. Elle a cette manie de véritablement plonger le nez dans le bouquin. On dirait un peu moi, sauf que je n'ose le faire devant des gens. Mon regard une nouvelle fois se voile. Peut-être est-ce aussi cela qui m'intimide chez cette fille. Elle est elle-même, fait ce qu'elle veut, dit ce qu'elle veut, sans se soucier du regard d'autrui. Une once d'admiration vient naître en moi.

Elle me sourit après avoir lu un morceau de la première page. Pourquoi ? Est-ce un choix qui l'amuse ? Je ne peux m'empêcher de me sentir attaquée. Je suis bien trop sur  la défensive. Il faut que je me détende.

Oui enfin c'est pas gagné. Je crois que je vais mettre Alice et Angie dans la boîte « Le tact est perdu ». Mon regard se fait d'autant plus fuyant. ARG OUI ELLE M'INTIMIDE PAS LA PEINE DE REMUER LE COUTEAU DANS LA PLAIE. Ah et en plus elle est mignonne quoi là avec sa tête de chat qui demande des caresses. Je soupire légèrement. Elle est franche, et j'apprécie cette franchise autant que je la crains.

« Tu ne m'intimides pas particulièrement. Pas plus que n'importe quel inconnu je veux dire. Mais il faut avouer que tu as une honnêteté surprenante. »

Mes yeux retrouvent les siens. Je serais presque prête à lui dire clairement que j'ai passé trois ans, si ce n'est plus – on finit par perdre la notion du temps – en ermite et que ce bouquin m'a aidée à en sortir. Néanmoins, c'est trop tôt pour ça. Je ne vais pas révéler tous mes soucis à une parfaite inconnue. Je hausse les épaules.

« Et ne t'excuses pas. Tu n'as rien fait de mal. »

Je rejette machinalement une mèche bleue venue m'embêter. Mon sourire est parti depuis un moment maintenant, et je ne sais plus trop quoi ajouter. Je me sens mal à l'aise. Le regard d'Alice donne l'impression de passer aux rayons X. Lorsqu'elle pose ses yeux sur moi, j'ai l'impression qu'elle peut lire mes pensées, me connaître, tout savoir de moi. Je lâche un rire nerveux.

« Quand tu regardes les gens, on dirait que tu peux deviner leurs moindres secrets. C'est à la fois effrayant et étrangement beau. »

C'est à mon tour de me la jouer franche. Mais je l'ai toujours été en réalité, plus timidement voilà tout. Seul Akira et Angie sont parvenus à me sortir de mon mutisme étrange, me poussant à leur crier dessus, leur faire la morale, faire en sorte qu'ils parviennent à vivre libérés de leur culpabilité. C'était seulement là que j'étais parvenue à m'exprimer complètement. Dans des situations d'urgence.

Malgré le fait qu'Alice face attention, elle remarque aussi le sourire léger d'Oksa quand elle inspecte le livre. Alors que le regard d'Oksa devient plus fuyant, Alice continue de la regarder. Elle voit bien qu'Oksa est partagée... Pourtant Alice ne veut pas lui faire peur ou quoique ce soit. Elle écoute Oksa avec attention quand elle lui parle... Alors elle est timide ? Ca doit être pour ça qu'elle se méfiait d'elle... Ah! La franchise... C'est vrai, il paraît qu'elle est vraiment très honnête en permanence et que ça surprend. Pourtant Alice a toujours été comme ça. Depuis son plus jeune âge, Alice a toujours dit comment elle voyait les choses, sans pour autant brusquer les gens. Alice a toujours le courage d'assumer ses choix et ses pensées. C'est une de ses plus grandes qualités, selon sa mère. Elle sourit un peu alors qu'Oksa vient se confronter à nouveau à son regard. Mais serait-ce de l'hésitation dans son regard ? Cette fois-ci ce n'est pas par rapport à elle mais plutôt à quelque chose qu'elle veut dire, qu'elle ressent. Alice attend un peu. Elle sourit en entendant Oksa et murmure directement après.

« Je n'aime pas ça, c'est pour ça. Mais je m'en souviendrai. »

Elle croise ses bras, au moins Oksa paraît avoir moins peur maintenant. Son regard toujours posé sur Oksa, elle s'attend à une autre remarque...
Elle ouvre grand les yeux quand Oksa lui dit cela avec autant de franchise, et puis elle sourit pour laisser échapper un rire léger, doux. Elle regarde Oksa avec bienveillance, ce regard rassurant des mamans quelques fois.

« Merci de me l'avoir dit. C'est l'effet qu'ils font depuis que je suis toute petite... Rassure-toi, je ne devine pas, même si je voudrais comprendre le plus possible les autres. C'est pour ça que je regarde souvent dans les yeux... et que ça impressionne. »

Alice sourit un peu moins franchement à la jolie Oksa. C'est une part d'elle qu'elle n'apprécie pas trop, impressionner les autres... Cependant, on lui aussi déjà dit que son regard pouvait être d'une douceur agréable et apaisante. Elle sourit souvent, et cherche à comprendre, et les personnes l'ayant fréquentées ont toujours étaient très claires sur cela. Cependant... Elle sait que parfois, les rares fois où elle se met en colère, son regard devient réellement dérangeant et violent pour celui qui est visé. C'est pour cela qu'Alice n'aime pas impressionner les autres.

Elle caresse distraitement le livre. Elle déjà hâte de le lire, de comprendre un peu plus Oksa, pour qu'elle se sente plus à l'aise avec elle. Attendez un peu... Alice ne serait-elle pas en train d'espérer se faire quelques amis ?

Alice semble touchée par mes remarques sur ses yeux. Je me mordille nerveusement la lèvre inférieure, je ne voulais pas la gêner. Si son regard est pénétrant, il est aussi d'une grande douceur. Et la couleur de son iris est magnifique, envoûtante. Peut-être est-elle comme moi avec mes cheveux. Peut-être est-elle aussi d'avis de se dire que ses yeux sont beaux mais que les multiples remarques qu'elle reçoit par rapport à eux la fatiguent. Je la comprendrais si c'était le cas. Je n'arrive pas à croire que j'ai fait ce que je déteste tant qu'on me fasse…

Je décide qu'il est temps de changer de sujet, en espérant que cela soit qu'elle veuille réellement. Sinon, elle risque de mal prendre le fait que du tac au tac je parte sur autre chose. Néanmoins, en regardant l'heure, je réalise qu'il serait temps que je retourne au travail. Un mince sourire étire mes lèvres alors que je pose mes yeux violets dans ceux si bleus d'Alice.

« J'ai ma pause dans quinze minutes. Tu peux m'attendre ici ? Je t'apporte un café ou un thé si tu veux. Tu as l'air de beaucoup aimer les livres. On pourra en discuter si tu as envie ? »

Vous n'imaginez pas le courage qu'il m'a fallu pour prononcer ces mots. Proposer à quelqu'un de discuter me paraissait avant impossible. Je ne sais pas ce qui a changé en moi. Ma rencontre avec Selvi aurait-elle fait avancer les choses ? Serais-je en train de… grandir ? Quoi qu'il en soit, cela se voit sur mon visage que cette proposition m'a coûtée et j'en suis presque à espérer qu'elle refuse finalement.

Néanmoins, au moment où la jeune fille me répond, la voix de ma patronne s'élève dans un ton froid et cinglant.

« Mlle Skily ? Il y a du monde qui attend ! A quoi cela sert que je vous paye si vous ne faites pas votre travail ? »

Je grimace légèrement et me tourne vers Alice.

« Désolée il faut que j'y aille… Je te rejoins dans un quart d'heure avec quelque chose à boire ! Profites-en pour regarder un peu ce bouquin, il te plaira je pense. »

Un mince sourire timide s'affiche sur mon visage avant que je ne tourne les talons et retourne travailler. Je me sens nerveuse, inutile au possible. Pendant tout le temps où je travaille, je ne parviens pas à me concentrer sur autre chose que le fait que quelqu'un attend ma pause pour que l'on discute… C'est dans mon esprit quelque chose qui ne peut être vrai.

Le quart d'heure me paraît long. Terriblement long. Enfin, ma patronne me donne ma pause. Je passe récupérer deux thés et rejoins Alice.

« Hum… Je t'ai pris un thé finalement… J'espère que ça te convient… Tu veux qu'on aille s'asseoir sur les marches dehors ? Il fait bon ça pourrait être agréable... »

Je me sens assez gênée en fait. Je lui ai dit de m'attendre ici mais maintenant je ne sais pas quoi dire. Embarrassée, je replace derrière l'oreille dans un geste machinal une mèche bleue qui me chatouillait la joue.

Oops, Alice vient de la gêner à elle aussi... Bon, au moins, elles se comprennent, c'est déjà pas mal ! Alice jette un nouveau regard à Oksa, et puis elle se rend compte que ses yeux sont mauves. Comme à chaque fois qu'Alice rencontre une personne avec cette couleur dans le regard, elle sent la petite chaleur au crue du ventre. Sa mère avait les yeux mauves, tout comme Yang. Deux personnes qui comptent énormément pour elle, et cette couleur leur est associée. Elle sourit intérieurement, et se confirme qu'Oksa est réellement jolie, avec ses yeux certes fuyant, mais si beaux à la fois. Oksa est comme une biche, timide, incertaine, mais terriblement jolie et forte à la fois. C'est amusant, Alice apprécie beaucoup ce genre de personne.

Elle sourit gentiment à sa proposition, et retrouve son expression calme et douce. Elle a bien vu qu'Oksa voulait changer de sujet, ce qui n'est pas pour lui déplaire. A la demande la jeune fille, Alice est un peu surprise, vu son comportement d'avant, mais cela lui fait très plaisir. Ca a dut lui en coûter, puisqu'elle vient de dire que parler avec les gens, ce n'est pas du tout son fort.

Avec plaisir. Si ça ne te dérange pas, bien entendu.


Alice aurait aimé répondre comme il se doit à Oksa, mais la libraire assez peu sympathique l'apostrophe, et elle a à peine le temps de hocher la tête avec un grand sourire qu'Oksa s'est déjà volatilisée. Cependant, le dernier sourire qu'elle lui a envoyé est un bon signe, est-ce qu'Oksa aurait fini par réussir à la voir comme elle est ? Ce serait une très bonne nouvelle.

Alice s'en va donc lire sur une chaise, dans un coin frais et un peu à l'écart, au fond de la librairie. Elle avance rapidement le livre avec voracité, Alice adore découvrir les livres aimés de ceux qui les offrent. Plongée dans sa lecture, Alice ne voit pas le petit quart d'heure passé. Absorbée par les mots, c'est à peine si elle entend Oksa la rejoindre. Elle lève la tête plus à cause de l'odeur du thé qu'autre chose. Elle adresse alors un sourire radieux à Oksa, celui qu'elle a souvent en faisant quelque chose qui lui plaît. Elle se lève rapidement, et se rend compte qu'Oksa balbutie de nouveau. Elle sourit et hoche la tête.

« D'accord, allons-y. Laisse-moi porter ma tasse, tu seras moins encombrée. »

D'un geste doux, elle ferme le livre et le glisse sous son bras, puis vient attraper la tasse dans la main d'Oksa en faisant attention à ne pas la laisser tomber, et en faisant attention pour ne pas planter ses yeux dans les siens en étant trop proche. Elle suit Oksa jusqu'au dehors, se faisant la remarque silencieuse que les cheveux d'Oksa ont presque la même couleur que ses yeux quand le ciel est noir. Elle s'assoit sur le bord d'une marche, laissant le choix à Oksa pour ce qui est de la distance entre elles.

« J'ai commencé le livre, et effectivement, il est terriblement bien pour le moment ! »

Ma main rencontre la sienne l’espace d’une fraction de seconde. Je me tends instantanément. J’ai réussi à faire un câlin à Angie, mais c’était particulier. C’était un évènement, quelque chose qui ne reproduirait probablement pas de sitôt. Je ne dis pourtant rien. Que pourrais-je dire ?

C’est donc sans remarque que je viens m’asseoir à ses côtés, assez proche pour que nous puissions nous entendre sans devoir crier, mais assez éloignée pour que nous ne nous touchions pas, même en bougeant. Oui, j’ai besoin de cet espace vital, cette petite bulle autour de moi qui me donne la sensation de pouvoir respirer librement. Lorsque je suis trop proche d’une personne, j’ai l’impression d’étouffer, d’être prisonnière de cette proximité. Intérieurement, je remercie Alice de s’être placée ainsi. De cette manière, j’ai pu choisir l’endroit où je m’installais. L’a-t-elle fait exprès ? Je ne le saurais qu’en le lui demandant, ce que je ne compte malheureusement pas faire. Tant pis.

Elle aborde le sujet du livre, qui apparemment lui plaît assez pour le moment. Même beaucoup si j’en crois ses dires. Je souris doucement. J’espère qu’elle est sincère, cela me ferait plaisir que ce roman qui m’a tant marquée marque quelqu’un d’autre grâce à moi. Une petite victoire personnelle peut-être. La sensation d’avoir accompli quelque chose.

« Tant mieux s’il te plaît. J’espère que ce sera pareil pour la suite. »

Je bois une légère gorgée de thé, pour ne pas montrer que je ne sais pas quoi ajouter. Je ne veux pas qu’un silence gênant s’installe, cela me mettrait bien trop mal à l’aise. De quoi pourrions-nous parler ? Arg je ne suis pas douée pour trouver un sujet de conversation. Ce n’est pas moi. D’ailleurs, ce n’est pas moi non plus de proposer à quelqu’un de boire un thé ensemble. Qu’est-ce que j’ai fait ?

Mais, heureusement, je me souviens que je lui avais dit que nous parlerions littérature. Mon soulagement est intense, le silence n’a duré qu’une ou deux minutes, pas plus.

« Du coup… hum… Tu as un auteur en particulier qui te plaît? »

Je sais, la question est banale, mal amenée, trop souvent posée. Mais je ne sais pas quoi dire. Je suis totalement perdue à l’idée de devoir tenir une conversation. Comment les autres font-ils ? Cela semble terriblement fatiguant. Trop. Je ne sais pas combien de temps je vais tenir. J’espère qu’Alice parlera un moment, assez longtemps pour que je trouve quelque chose à ajouter. J’aurais presque eu envie de poser cette question un peu comme un énoncé scolaire. « Quel auteur vous plaît ? Justifier la réponse. ». Ainsi, j’aurais été certaine de ne rien avoir à dire avant un moment. C’aurait été reposant, mais peu naturel, il faut le reconnaître.

Alice sourit, et ne fait même pas attention à la distance que prend Oksa en s'asseyant. Elle sourit et hoche la tête. Oui, elle aussi espère sincèrement que la suite lui plaira, mais intimement, elle est persuadée qu'elle aimera, ne serait-ce que parce que ce livre est un cadeau. Alice boit sa gorgée de thé, et puis un silence s'installe. Cela ne la dérange pas, elle regarde devant elle, et boit doucement son thé. Elle savoure simplement la chaleur du soleil sur son visage, sans se soucier du silence, et tente de ne pas provoquer plus de gêne que ça à Oksa.

Alors elle tourne rapidement la tête vers elle, et s'aperçoit que la jeune femme cherche à tout prix quelque chose à dire. Elle se rend compte qu'Oksa a vraiment un souci avec les autres, et elle a réellement envie qu'elle se sente à l'aise avec elle. Finalement Oksa pose sa question. Une classique, une difficile aussi, puisque trop large. Mais tout ça, Oksa le sait déjà bien sûr, et puisqu'Alice a envie de l'aider, elle lui envoie un joli sourire puis lève les yeux vers le haut et réfléchit en cherchant des auteurs  qu'elle apprécie.

« Il y en a beaucoup, tu dois t'en douter. Je ne sais pas... Des auteurs que j'ai vraiment appréciés... Hm, Rowling, évidemment. Dans le genre pour les jeunes, il  y a également Cate Tiernan que j'apprécie beaucoup, pour son univers très magique... Ses personnages sont souvent des êtres normaux qui découvrent un pouvoir, ou la magie. »

Les livres de cette auteures sont souvent liés à la magie, aux pouvoirs qu'auraient certains humains naturellement... Un peu comme les gens de Terrae. En y repensant, cela amuse Alice. Jamais elle n'aurait cru faire partie des gens spéciaux, comme Wicca ou Immortels.
Elle réfléchit de nouveau, elle cherche d'autres auteurs de d'autres styles.

« En dehors des classiques... J'adore certains auteur-illustrateurs français, comme Rebecca Dautremer. Son univers est formidable, très déjanté, c'est quelque chose que j'aime beaucoup. Et dans une littérature plus adulte si je peux dire cela, j'adore Salinger, et Pennac, pour les mêmes raisons. En fait j'aime bien tout ce qui sort un peu des règles. J'aime les connaitre, les lire, puis découvrir ceux qui jouent avec. J'adore lire de tout pour tout connaitre en fait. »

Elle tourne la tête vers Oksa, et sourit un peu amusée en pensant à quelque chose. Peut être Oksa ne vient pas du tout de France après tout, et qu'elle ne connait pas ces auteurs.

« Peut être que tu ne connais pas certains auteurs dont je te parle, ça ne me choquerait pas, beaucoup sont français. Et mon auteure fétiche est franco-brésilienne, je ne sais pas du tout si tu la connaîtras. »

Elle sourit à Oksa, et se rend compte qu'elle n'avait pas du tout fait attention à quelle langue elle parlait. D'ailleurs, Alice a beaucoup beaucoup parlé d'un coup. Elle adore parler de littérature.

Alice sourit doucement avant de réfléchir. Elle m’énumère des auteurs que je connais plus ou moins. Rowling je vois bien sûr qui elle est, mais Cate Tiernan moins. Je comprends en tout cas que la jeune fille aime particulièrement les univers magiques. Terrae doit pour elle être un petit paradis !

Néanmoins elle se lance ensuite sur des auteurs moins classiques, que je ne connais que de noms. D’ailleurs, Alice se tourne vers moi et me dit qu’elle ne serait pas choquée que je ne les connaisse pas tous.

« Je viens aussi de France à vrai dire mais il y en a beaucoup que je ne connais que de noms. Et puis, j’ai la fâcheuse tendance de lire sans retenir les titres et noms d’auteurs, c’est un petit problème que je règle en notant beaucoup de choses dans un carnet mais je ne l’ai pas sur moi là. »

Je ris doucement. Mon côté tête en l’air se remarque même à travers mes lectures, je le sais bien. En tout cas, la jeune fille a eu cet air passionné que j’apprécie temps lorsqu’elle a parlé de littérature. J’enchaîne sur ses réponses.

« Si tu aimes particulièrement les univers un peu fantastiques, je te conseillerais de lire Everworld, de K.A Applegate. C’est un des rares bouquins – enfin c’est une trilogie mais bon – dont j’ai retenu titre et auteure parce que je l’ai lu pas mal de fois à vrai dire ! et sinon je dois reconnaître que l’univers de Rowling est juste génial et carrément absorbant. J’aurais bien dit que ça donne envie de vivre dans un monde magique mais… ici c’est un peu le cas. »

Ah la magie… Cette chose que j’ai toujours cru inexistante et qui m’a été offerte ici. Merci Terrae pour ce cadeau précieux. Je retourne côté littérature, suivant Alice.

« Quant à ton auteur fétiche, non je ne pense pas la connaître ! Mais tente toujours, pour voir. Va savoir, il se pourrait qu’un éclair de génie me rappelle que j’ai lu un bouquin d’elle… »

Eh oui, on ne sait jamais… Des fois que ma mémoire revienne en trombe.

Hrp : Mon post est nul, désolée ._. J’essaierai de faire mieux la prochaine fois, love ♥

Alors Oksa vient elle aussi de France... Alice ne l'aurait pas deviné, son nom de famille ne laissait pas présager. Alice rit à sa phrase, son père était pareil, il devait tout noter sur un carnet, et il avait beaucoup, beaucoup de carnet. Alice elle retenait tout de tête, et ne notait que très rarement, n'aimant pas spécialement écrire sur ses lectures, mais préférant en parler.

« Mon père faisait exactement la même chose que toi. J'adorais l'odeur de ses carnets. »

Elle rit de nouveau et hoche la tête avec conviction lorsqu'elle écoute Oksa lui parler de la trilogie. Trilogie qui figure d'ailleurs parmi les nombreuses saga qu'Alice rêve de commencer, mais essaie d'abord de terminer celles qu'elle a en cours.

« Oui j'ai entendu parler de cette saga, elle a vraiment l'air génial ! »

Elle fait remarquer qu'à Terrae, c'est un monde magique, un monde particulier, un monde qui ne ressemble pas à celui dans lequel elle vivait avant. Son regard se voile quelques secondes avant de redevenir doux, et souriant. Oui, elle a encore un peu peur de la magie, c'est quelque chose qu'elle connait peu... Et elle ne connait même pas la sienne. Pas encore.

« Effectivement, ici, c'est magique... Pour tout t'avouer, ça me fait un peu peur, j'appréhende un peu ce que je vais devenir après mon initiation. »

Elle sourit, de nouveau enjouée quand Oksa lui demande de parler de son auteure préférée. C'est vrai, qui sait ? Même si Alice émet de sérieux doute quand à la connaissance d'Oksa sur son auteure, qui est déjà très peu connue, elle espère néanmoins que la jeune Air en aura entendu parler, ou en tout cas qu'elle tentera de livre sa saga favorites :

« Elle s'appelle Pauline Alphen, elle a écrit plusieurs livres pour enfant, et une saga qui s'appelle Les Eveilleurs. Elle est autant pour les adultes que pour les enfants... Et elle est géniale. »

Elle regarde Oksa avec une passion nouvelle, celle des vrais lecteurs qui considère l'histoire comme quelque chose de réel, comme une personne aimée. Quelque chose qui les fait vivre.

Je souris lorsqu’elle parle de son père, mais note dans un coin de mon esprit l’utilisation de l’imparfait. Son père serait-il, comme le mien, décédé ? (Hrp : Oui deux de mes persos ont plus de papa, je sais j’ai un souci ._.).

Néanmoins, Alice rit et semble enthousiasmée par Everworld. J’ai une sensation étrange. Partager mes connaissances littéraires me fait tout bizarre. Et surtout… Voir l’intérêt que peut y porter une personne qui m’était quelques heures avant totalement inconnue. C’est la première fois je crois. Non, j’en suis certaine. Ça me rend heureuse en tout cas !

Mais ensuite la novice perd un peu de la vie présente dans son regard qui se voile légèrement. Je m’inquiète, néanmoins elle retrouve vite le sourire. Elle m’avoue craindre ce qu’elle sera une fois initiée. Mes yeux se font amusés. Elle me rappelle moi avant.

« Tu n’as rien à craindre. L’initiation n’est pas si terrible. Tu verras, avoir des pouvoirs te fera un peu bizarre au début, ton corps aura peut-être du mal à s’habituer mais ça viendra. Et puis, après, tu pourras faire des trucs cools… Regarde ! »

J’attrape la main d’Alice, mes yeux rejoignant les siens pour vérifier qu’elle est d’accord. Je noue ensuite nos doigts entre eux et me concentre pour créer un tourbillon d’air entre nos paumes, que je détache lentement sans que nous nous lâchions. Alors, une mini tornade apparaît entre nos peaux. Je ris doucement.

« J’ai mis du temps à savoir faire ça… Mais tu as vu c’est chouette ! Bon, ok, pas très utile… enfin c’est joli non ? Et puis tu as déjà pu comprendre qu’on peut faire des trucs utiles de toutes façons. Par exemple quand on fait malencontreusement tomber des livres sur une pauvre cliente, on peut la soigner au moins… »

Mes joues rosissent légèrement mais un nouveau rire soulève ma poitrine, amusée de ma maladresse après coup.

Ensuite, Alice me parle de son auteure fétiche, à nouveau enjouée. Même passionnée en fait. J’adore cette vie qu’elle dégage ! Ça me fait me sentir carrément heureuse, c’est génial !

« Je connais de nom la saga mais j’ai jamais eu l’occasion de mettre le nez dedans je dois le reconnaitre ! Quand j’aurai l’occasion, je le ferai avec plaisir. »

Je lui souris, heureuse de cette conversation que nous avons.