Finalement, les promesses rassurantes de Matheo portèrent leurs fruits. Nicolas ne songea bientôt plus au fait qu'il tenait à plusieurs mètres du sol sans autre sécurité que la maîtrise des pouvoirs qu'il n'avait pas, qu'il n'avait pas d'emprise, qu'il était livré à lui. Il jouissait de l'instant, autant de ce qui les entourait que de la présence de son ami. Et ce qu'il lui dit à propos de ses pouvoirs de sensitifs le bouleversa peut-être dans un sens auquel il ne s'attendait pas. Aider les autres. A quoi ? A se livrer comme Matheo l'avait fait ? A prononcer des mots auxquels il ne s'attendait pas s'entendre dire ?... Il l'avait vu, sur son jeune visage ; il avait senti, sa main se tendre sous l'effet d'un sursaut. Il ne sut ce qui, jusque là, l'avait profondément gêné dans cette déclaration et puis soudain, il comprit. Je ne voulais pas l'entendre. Il pinça ses lèvres, fixant Matheo. Était-il égoïste, de vouloir que son ami ne ressente pas de la tristesse, de la nostalgie, à propos de sa vue ? Était-ce trop lui demander, de voir ce que Nicolas voyait de lui ? Était-ce faire preuve d'insensibilité, de se dire que l'humain devait se contenter de ce qu'il avait, dans son présent, sans penser au passé, à se faire des murs si épais et si haut entre le souvenir heureux et cet instant qu'on veut renier ?... Était-il orgueilleux de vouloir se croire si fort ou de demander aux autres d'être ainsi ?

...Était-ce vraiment avec des pensées pareilles qu'il pouvait aider les gens ?

Perdu dans ses questions et ses tourments, il le fixa. Matheo avait le regard tourné vers l'horizon, il se souvint de leur rencontre, de ses yeux-là ; s'ils ne s'étaient pas rapprochés à ce moment, il n'aurait jamais deviné qu'il était aveugle, tellement ses pupilles avaient gardé cette manière de se mouvoir, certes pas tout à fait exacte, d'un homme qui voit. Sa peau blanche brillait sous les éclats des étoiles et de la lune, ses cheveux bien plus légers que des plumes voletaient autour de son visage. Ce visage si jeune que les gens devaient penser qu'il n'avait vécu que la moitié d'une vie, alors qu'il avait seulement vécu celle qu'ils ne connaissaient pas et ne connaîtraient sans doute jamais. Nicolas s'en sentit soudain honoré, de le connaître, d'avoir survécu, d'être là à tenir sa main. Cette gentillesse, cette prévenance, cet humour n'était que le peu qu'il connaissait de cette personne, de cet enfant de la lune,... Mais il était déjà heureux, il l'acceptait tout entier, ravi de devenir ses yeux, une petite partie d'un être aussi formidable, pour le peu de l'existence, un souffle dans une éternité. Il était encore perdu dans ses pensées quand il lui répondit. :

-Magnifique.

Il n'avait pas entendu la question.

Matheo le prévint qu'ils approchaient du lac. Il ne put s'empêcher de lâcher un rire bref. Celui-là décidément, je vais commencer à croire qu'il veut juste jouer avec mes nerfs. Pourtant, l'énonciation d'un nom qu'il ne connaissait pas lui donna de quoi réfléchir, sans plus songer à ce qui l'attendait. :

-Ryu ? il réfléchit un instant, il était certain que ça lui disait quelque chose mais se tut.

Il déglutit à l'approche de l'eau mais ne trembla pas. La nuit, le lac est un étrange miroir pétrole et abstrait. Nicolas vit deux âmes survolant le ciel en se tenant la main et eu un mal fou à les reconnaître. C'était eux dans ce miroir presque sinistre ? C'était eux qui éclataient de lumières et de couleurs dans la nuit ? Trop étonné pour ressentir un quelconque danger, mettant plus que son instinct de survie au placard, mais aussi ses habitudes ancrées dans son corps, il tendit naturellement sa main. Il poussa une espèce de gémissement au contact de l'eau glacé, retira brièvement sa main pour la replonger. L'étrange miroir se déforma un peu plus, les étoiles reflétées dansèrent et une onde, comme un écho de joie, fendit les eaux sur toute leur étendue. Nicolas en ressentit une vibrante joie enfantine, comme lorsqu'on jette un caillou dans une rivière pour entendre un "ploc" satisfaisant, lorsqu'on voit le vent rider les flaques d'eau en automne. Comme si le temps avait aussi de l'emprise sur les éléments. Il eut un soupir étranglé... et il se décida à laisser couler le flot de ses pensées pour lui, pour Matheo, pour ses yeux. :

-C'est froid, ça me prend au corps comme une lame le ferait mais c'est tellement plus doux. Ça fait une onde qui se déploie sur l'eau, on a l'impression que le lac n'a pas de fin, qu'il n'y a pas de rivage avec l'immensité du ciel qui s'y reflète. On ne voit pas le fond, il n'y a plus vraiment de haut et de bas quand le plat de l'eau revient. Il tendit de nouveau la main. J'ai l'impression, après le chant des étoiles, qu'on peut aussi les faire danser... à notre mesure, elles vont tellement vite dans l'espace !... J'ai l'impression de faire parti de l'infini, d'être vraiment libre...

Un souffle. Il tend l'oreille, il n'y a que deux cœurs qui battent, puis il oublie. :

-J'ai perdu l'habitude de me servir de mes yeux la nuit.



HRP : Awais ? Ben pour la peine pavé #tropdelyrismeenmoi ! J'ai aussi de quoi donner à réfléchir au club fan de Matheo/Nico quand je relis...

Je n'entendais à nouveau plus que le silence près de moi. Je tournais légèrement mon visage dans sa direction et, saisissant son énergie, qui m'était devenue si familière en quelques heures, je suivis les contours de son corps, de son visage et je remarquai alors qu'il m'observait. Me retenant de rougir de tout mon possible, j'espérais surtout ne pas avoir une feuille ou autre chose coincé dans les cheveux ou une tache sur le visage. Sachant cela, son silence me laissait pensif et... me gênait presque à vrai dire. Heureusement, la vue du lac me donna une échappatoire.

De ma main valide, je frôlais à mon tour la surface aqueuse, appréciant le contact mouillé du bout de mes doigts. Il n'y a pas si longtemps que ça que j'étais venu et pourtant, j'avais l'impression que c'était il y a une éternité. Le temps passe vraiment différement lorsque l'on ne le voit pas défiler, j'en oublie presque ce que c'est. La question de Nicolas me parvint au même moment. Un grand sourire, incontrôlé, apparut alors sur mon visage.

-Tu l'as sûrement vu lors de ton initiation. C'est le directeur adjoint de Terrae, c'est lui qui appelle les élèves pour leurs passages. C'est un homme adorable, dis-je avec enthousiasme.

Et encore, j'étais loin du compte. Mais mieux valait qu'il s'en rende compte par lui même justement, décrire une personne n'est souvent pas suffisant et c'est mieux de s'en faire une opinion propre. J'avais hâte de savoir s'il se souvenait de lui et ce qu'il en avait pensé.
En attendant, tandis que nous virevoltions au-dessus du lac, j'appréciais son bonheur. Le fait qu'il trouve cet endroit magnifique et que nous le partagions tous les deux, me rendaient heureux. J'avais si peu l'occasion de donner aux gens. Eux avaient tendance à m'aider à toujours vouloir que j'aille bien. La savoir souriant et content de mon cadeau me remplissait de joie.

Un grand éclat de rire m'échappa au milieu de son monologue. L'émotion lui donnait des ailes. Il ne savait pas comment exprimer ses sensations et en même temps trouvait les mots exacts de ce que j'avais ressenti la première fois. C'était assez déroutant une telle connivence, amusant aussi, mais surtout attendrissant.

-Je comprends tout à fait ce que tu ressens, dis-je simplement, avec émotion

Doucement, je remontais dans les airs puis ralentis, avant de nous poser tous les deux sur la branche d'un arbre, près du lac. D'ici il aurait encore une meilleure vue. Et j'avais besoin de me reposer un peu. Je penchais légèrement la tête, puis la relevait, dodelinant mon corps comme un enfant sur uen balançoire. Cela me détendait et me défoulait en même temps. Cette nuit était si belle pour l'instant, je me sentais si libre que j'aurais souhaité que le temps s'arrête, à l'infini.
Je me tournais de nouveau vers Nicolas, mon attention captivé par sa phrase. Je n'osais pas le questionnais davantage dessus. Je savais que ça n'avait pas été très facile pour lui avant Terrae, sans en savoir énormément. Je ne voulais pas qu'il repense à ça, pas maintenant, pas ce soir. Je resserrai alors ma prise sur sa main, et me rendis compte en même temps que je la tenais toujours! Rougissant au possible, je la retirais et tentais de faire comme si rien ne s'était passé.

- La nuit, la nature est différente. Les odeurs et la musique sont partout : dans les airs, l'eau, les bois... C'est ainsi que j'ai toujours connu le monde. Pour moi, la Terre est sombre mais mélodieuse. Elle est faiblement éclairée mais en même temps gorgée de lumière. C'est très dur à expliquer... Il faut le ressentir.

Un doux sourire apparut alors sur mon visage.

-C'est pourquoi, je t'ai emmené avec moi.


Hrp: Je n'aime pas être châtié à coup de pavé T.T

Mais oui. Ryu. Le prof de sport. Nicolas l'aime bien, il a un sourire franc et communicatif. Bien sûr qu'il le connaissait ; déjà grâce aux cours, mais effectivement, comme le lui rappelle Matheo, dans la salle des Masters. Il retient un frisson... Ce n'est pas un souvenir très agréable... Et comme il avait voulu l'effacer de sa mémoire, il en restait quelques flashs désagréables vu qu'il était récent ; quelques questions qu'il avait posé, un morceau de test flou et sa déambulation dans les couloirs, jusqu'à tomber sur Huo par un hasard hasardeux et un mystère mystérieux. Si ça se dit. Dans tous les cas, le fait qu'il ne capte pas de suite de qui il s'agissait s'expliquait aisément par le fait qu'il le voyait beaucoup moins que les autres membres du corps enseignants, et qu'il ne l'appelait jamais par son prénom... Contrairement à un certain prof de maths. Et désormais, il savait qu'il aidait Matheo aussi. Il eut un élan de sympathie pour cet homme qu'il connaissait que de vue et qu'il connaîtrait peut-être pas plus que ça.

Il fit la moue quand Matheo se mit à rire face à son élan lyrique et enflammé. Peuh, je suis un artiste incompris. Pourtant, il continue son monologue, avant de glousser un peu de sa réaction. Son éclat de rire avait été si franc, si soudain, venant droit du cœur qu'il ne pouvait pas lui en vouloir de se moquer un peu de lui... Et puis il l'avait compris lui-même ; Nicolas avec sa maladresse, ses manières et son ignorance attirait les sourires sympathiques et les douces moqueries. Dans le couloir des Tonnerres, il en ratait jamais une et ça devint bientôt une petite joie hebdomadaire que de se faire remarquer... Chose qui aurait été impensable à son village, là où quoi que l'on fasse, on subissait les mauvaises "plaisanteries" et les quolibets, vrais ou faux d'ailleurs.

Mais il était loin de tout ça. Il était avec Matheo, qui s'approcha doucement d'un arbre pour les poser sur une branche et une joie enfantine irradia de Nico : grimper dans les arbres, il adorait ça et puis, là, il aurait ses appuis ! Il serait dans son élément ! Un Tonnerre, un Loup dans un arbre... What else ? Ils avaient vu sur le lac qui redevint sous ses yeux d'argents, une surface plane et calme, noire de nuit et brillante comme l'univers qui s'y reflétait. Matheo se balançait doucement, Nicolas lui ne bougeait pas. Il tendait l'oreille par habitude, pour capter des mouvements au sol, dans les airs autour d'eux, ou il levait la tête pour sentir le vent et les odeurs qu'il apportait, jouant un peu plus avec ses trop longs cheveux. Il sentit le regard de Matheo posé sur lui, bien qu'il ne puisse le voir, puis le corps de son ami se tendre tout entier avant de retirer sa main. Tiens... Je la tenais encore ? Il rougit lui aussi, un peu moins que Matheo toutefois. Il rougit de son oubli, pas de la proximité. Et puis son ami évite son regard et fait comme si de rien n'était lui parlant de comment il sentait le monde.

Ayant ses deux mains libres et ne sachant plus quoi en faire, Nicolas les posa un peu derrière lui, en appuis sur la branche pour s'étendre un peu. Il songea à la façon dont lui voyait le monde, et puis aux mains qu'il n'arrivait plus à retirer de sa tête. :

-Comment je ressens le monde...

Le regard perdu dans l'immensité, sa voix n'avait été qu'un murmure mais il ne douta pas une seconde que Matheo l'ait entendu ; on entend mieux un soupir dans le silence que dans les brouhahas de la foule, on voit mieux l'étincelle dans la nuit qu'en plein jour... Il se le disait bien souvent. Il se redressa soudain et reprit la main de Matheo... Elle était sans cales et toute douce comparé aux siennes creusés et à la peau épaisse par endroit. Il déplia les doigts du jeune Air et posa les siens aux creux de sa paume, frottant sa peau contre la sienne. Le geste lui réchauffe le bout des doigts mais aussi le torse. Il inspire. :

-La peau, c'est la terre où l'on marche. Quand on creuse, on perce la peau, le sang coule et la chaleur de la terre s'échappe... Un peu façon magma mais en volute d'air.

Il lève la tête et regarde Matheo dans les yeux, il est prêt. Il pose son index sur ses lèvres, très légèrement, comme un papillon atterrit délicatement sur une fleur. :

-Le vent, c'est la bouche de la terre. J'entends des notes et je vois des paysages, je sens des odeurs... Le vent me dit que la terre est humide, qu'il y a eu une averse il y a deux ou trois jours. Il me dit que les animaux ont soif, quand je sens les fortes odeurs des prédateurs qui marquent leur territoire. Il tends l'oreille. Il y a des chauves-souris autour de nous, l'humidité du lac attirent les insectes dont elles se nourrissent... Il y a un hibou aussi... ou une chouette, dans le coin. Elle survole le ciel en quête de proie, les rongeurs au pied de l'arbre couinent de peur. Le vent porte tout ça, comme si la terre parlait.

Il continue ses comparaisons de la terre avec le corps humains... Il passe ses doigts sur le visage de Matheo, doucement, comme si lui était aveugle et qu'il cherchait à le connaître. Il frôle les fins sourcils en évitant soigneusement les paupières. :

-Pour les yeux je dirais... Je dirais que la terre n'en a jamais eu besoin.

Il a un sourire avant de hausser les épaules. Il a toujours une main qui tient celle de Matheo. :

-Mais si on veut insister, je dirais les astres : le soleil, la lune, les étoiles. Car on peut voir où l'on est, et la terre sait où elle se trouve. Il regarde au loin. Pour moi la terre est toujours ainsi, de jour comme de nuit, mais comme je dis toujours : on voit mieux l'étincelle dans la nuit la plus noire que dans le jour le plus lumineux.

Je radote je crois. Alors d'un coup, il lâche Matheo et se lève, debout sur la branche... Nicolas fait rarement preuve d'équilibre ou de souplesse... Mais la nuit, il était le Loup Noir, et chaque muscle de son corps s'en souvient. :

-Ressens-moi... puis il précise. Enfin, suis-moi des yeux.

Tout le corps de Nico pencha lentement, puis il sauta de la branche. Il l'attrapa d'une main et s'y pendit. Un peu plus bas, il repéra une autre branche et aidé de son élan, il s'y jeta. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, son cœur ne s'affola pas. Il ne craignait pas la chute et l'effort physique n'était pas important jusque là ; même son souffle au cœur était infime. Il s'accrocha à son nouvel appuis puis grimpa, une, deux, trois branches au-dessus de Matheo... Il se fondit dans les feuillages, le corps tendu cette fois, son palpitant pulsa. Le yeux fouillant lentement son environnement. Nicolas avait été moins qu'un animal et malheureusement, on ne pouvait plus lui retirer ça... A moitié couché sur sa branche, il avait l'air de chasser une proie sans défense invisible tout au bout d'un point qu'il fixait sans sourciller. Puis d'un coup, il glissa sur le côté. La tête à l'envers, seulement accrocher à ses bras et à ses jambes, il tomba nez à nez avec Matheo. ...et il tira la langue. :

-Bouh... Je suis un paresseux. dit le Loup.


HRP : Genre... Avoue tu kiffes mes pavés.

Nicolas restait très calme sur sa branche. Moi, je ne pouvais m'empêcher de gigoter. Vosu savez que même aveugle on peut avoir le vertige ? C'est encore plus effrayant en fait car on sent vraiment le vide au-dessus de nous, plus fortement que si on l'observait car nous devons tout ressentir. Pourtant je ne redoute pas la chute. Je sais que je ne pourrais que m'envoler. Je n'avais pas peur, je balançais tranquilement mes jambes sur ma branche, profitant du grand air. A cette hauteur, on respire mieux, comme si l'air venait directement se loger dans nos poumons, de son plein gré, comme si le vent ne demandait rien d'autres que de venir caresser notre visage.

Bien qu'il ne bouge pas, je sentais qu'il était heureux. Son énergie était plus active, comme s'il avait un regain de force ou de vigueur. Etre dans un arbre lui faisait si plaisir que ça ? De toute manière, il ne resta pas immobile bien longtemps. Surement parce que j'avais ouvert mon coeur sur ma perception du monde, il éprouva le besoin d'en faire autant. J'étais curieux moi aussi, sa vision du monde était-elle la même que tout les autres ? Ou chacun l'appréçiait avec sa propre sensibilité ? J'allais vite comprendre que c'était la seconde option qui faisait sens avec Nicolas.
Il s'empara à nouveau de ma main et, au contact de nos peaux, de ses doigts sur ma paume, un violent rougissement me prit. Je ne retirais pas ma main pour autant, mais on pouvait nettement sentir une certaine chaleur émaner de mon visage. Mon coeur aussi battait à tout rompre. Je me demandais bien pourquoi. Ce n'était pas la première fois que j'entrais en contact direct avec un autre garçon, ça ne m'avait jamais fait ça auparavant. Là, je me sentais tout ramolli et en même temps, curieusement plein d'entrain. C'était étrange comme sensation. Puis tout changea. J'oubliais le contact de ses doigts, même lorsque ceux-ci touchèrent mon visage à la manière que j'utilisais pour épouser les traits d'un inconnu, même lorsque son doigt se posa délicatement sur ma bouche, si doucement que je ressentis tout juste des chatouillis sur les lèvres par sa proximité... J'oubliais tout ça, entièrement concentré sur ses paroles. C'était comme un déluge d'image qui déferlait en moi, un mélange de sensation dû à au tracé de ses doigts et d'imagination par ce qu'il évoquait dans mon esprit. Ce dernier était guidé par ses paroles et s'évadait sans frontières. j'en oubliais presque de respirer. Ce n'est que lorsqu'il me lâcha à nouveau que je pris une grande inspiration. j'avais manqué de m'étouffer j'ai l'impression.

En écoutant sa demande, j'acquiesçais d'un doux sourire, prenant soin de le suivre à la trace comme il l'avait souhaité. Je contemplé son ballet sylvestre grâce aux émantions de son énergie, c'est tout juste si je ne voyais pas un corps de lumière se déplaçait parmi els branches. Lorsqu'il fut au-dessus de moi, je revins à ma position normale, regardant droit devant moi. La suite ne me surprit pas vraiment et un sourire amusé étira mes lèvres lorsque je sentis son visage face au mien. Sans vraiment réfléchir, je passais délicatement ma main dans ses cheveux, les caressant avec douceur, effleurant la peau de son visage par moment car je distinguais mal ses traits. Mais ça m'était égal.

-J'aurais plutôt dit un petit singe... un singe très habile, je l'admets!

Un petit rire m'échappa. A mon tour, je me laissais tomber de la branche, lévitant au dernier moment pour flotter dans les airs. Je m'élevais en quelques secondes, prenant tout mon temps pour savourer les sensations anciennes que je n'avais pas retrouvé depuis si longtemps. Tout en douceur, je m'assis sur la branche que lui, attendant qu'il reprenne sa position initiale. De mes doigts, je fermais mes paupières, inutilement ouvertes. Je m'en étais rendu compte en m'envolant. je n'aimais pas les avoir ouvert, j'avais l'impression d'afficher mon infirmité au monde. Et puis mes yeux devaient être laids ainsi, je ne voulais pas qu'on les voit dans cet état.

-Tu es comme moi, murmurais-je

La tête levée vers les étoiles. je repris pour préciser ma pensée.

- Nous voyons le monde de la même manière. Mon univers est fait de sensations, de ténèbres mais aussi de douceurs. Lorsque tu me parles des insectes et de l'humidité de l'air, je les sens aussi. Lorsque tu me parles des astres, je les sens aussi , le picotement de la lune et des étoiles. Lorsque tu me parles de la terre, je l'entends aussi.

Je baissais alors la tête, rougissant par avance de ce que j'allais dire.

-Et lorsque tu me sens, je te sens aussi. L'inverse est aussi vrai j'ai l'impression.

Secouant alors la tête, j"essayais de faire le tri dans mes idées. J'avais vraiment besoin d'eau froide on dirait. Moi qui m'exprimais d'habitude sans problèmes, j'avais peine à retrouver mes idées et à parler comme elles me venaient. Etait-ce la présence de nicolas qui me troublait à ce point ? Ou juste une fatigue passagère ? Un petit rire me secoua en repensant à ses paroles.

-En tous cas, tu as l'âme d'un poète. Je n'aurais jamais imaginé que quelqu'un puisse saisir le monde de manière si... sensible, dis-je avec douceur.

J'étais aussi un peu étonné il fallait dire, mais ça je ne le lui dirais pas. Je savais que sa vie n'avait pas été facile, sans pour autant connaître les détails. J'étais surpris qu'une personne ayant connu autant de difficultés puissent voir le monde d'une si belle manière. J'avais rencontré beaucoup de gens à Terrae, dont certains avaient vécus des moments durs. La plupart d'entre eux n'attendaient rien de la vie et voyait juste le monde comme un enfer à vivre à perpétuité. Je les comprenais, sans les comprendre. Malgré ce qu'avait été ma vie, je n'avais jamais vu les choses à leur manière. Peut-être parce que la nuit réveille une face cachée du monde... Une face qui nous fait voir les choses autrement.

-Tu m'as même rappelé ce que j'avais tant aimé auparavant dans la nuit... Tu sais lorsque je suis devenu aveugle, ce monde de silence et de ténèbres, il m'a terrifié. Je ne savais pas comment m'en sortir et si je me la jouais fort, en réalité, j'étais mort de peur, tout le temps.

Je me dandinais sur ma branche à nouveau, gêné par les paroles que je prononçais. Personne ne les avait entendu jusqu'à présent, je les avais soigneusement caché au fond de mon coeur. Mais ce soir, sous le regard de la lune et de Nicolas, mon coeur s'ouvrit peu à peu.

-Mais à force de rencontrer d'autres gens, de retrouver ceux que je pensais avoir perdu, grâce à l'aide de tout le monde... j'ai fini par retrouver ce qui m'avait manqué lorsque je sortais faire mes ballades nocturnes. Tu me l'as rappelé toi aussi. Les choses non plus été aussi vivantes pour moi que ce soir.

Sans m'en rendre compte, emporté par ma fougue, j'avais décollé de ma branche. Je pouffais légèrement en m'en rendant compte, trouvant cela un peu ridicule. A moins que mes pouvoirs soient contents pour moi eux aussi. Toujours dans les airs, je m'approchais de Nicolas, toujours sur sa branche. Une fois à proximité, environ la même que lui lorsqu'il jouait au paresseux, je lâchais un :

-Bouh... Je suis un fantôme!



Hrp: ah tu crois ça ? Ben tiens! Bouffe le pavé <3

Nicolas savait ce qu'était un singe, il n'était pas stupide, mais il n'en avait jamais vu en vrai... Le collège organisait parfois des sorties au zoo (qu'était aussi un parc d'attractions) le plus proche mais il n'y allait jamais... Ce qu'il savait des animaux, il le savait grâce aux documentaires à la télé ou aux livres de la bibliothèque qu'il avait épluché au hasard de ses envies. Mais ce qui le fait rire, ce n'est pas la comparaison que Matheo fait, mais bien son rire, encore. Il est bien plus mignon quand il sourit... Nico fait aller ses muscles pour se reposer de manière plus normale sur la branche. De nouveau assis, il put voir son ami le rejoindre pour s'asseoir à côté comme un peu plus tôt... C'était vraiment cool d'être Air en fait... et terriblement pratique. Il le regarde alors qu'il ferme ses paupières et qu'il pose ses doigts dessus. Il se demande ce qu'il adviendrait de lui s'il était aveugle... Sa paranoïa serait sans doute décuplée au point de l'empêcher de sortir. Je suis bien moins courageux que Matheo. Sa conclusion, loin de le faire déprimer, le fit sourire. Puis il leva un sourcil quand son ami affirma qu'il était comme lui... Son regard se perdit au loin. Oui, il aurait aimé être aussi bon que lui.

Matheo précisa alors, il ne pensait pas à la même chose que lui évidemment, il parlait de leur façon de voir le monde. Le monde comme quelque chose de vivant, quelque chose qui vibre autour d'eux comme une personne, une conscience éveillée, un être rempli d'émotions. Il sourit à nouveau quand Matheo comprend qu'il ne le voit pas qu'avec ses yeux, lui aussi, il a une façon particulière de ressentir ; bien moins comme un homme, mais qui passe par ses autres sens que la vue, lui aussi. Par contre, il fait la moue quand il parle de poésie... C'est qu'il était compliqué d'exprimer une telle vision du monde sans se lancer dans toute une prose magnifiée. Après, peut-être Nicolas avait été influencé par ses lectures. Baudelaire, Rimbaud, tout ça... Et tout ces poètes qui ont fait une hymne à la lune, à la beauté de la nuit... Au point de te donner envie de vivre de manière nocturne. Toutefois, Nicolas s'empêcha de répondre... S'il faisait preuve de "sensibilité" avec son environnement, c'était parce qu'il n'avait pas eu le choix. Toutefois, il ne savait pas qu'il avait cherché cette sensibilité, cette douceur dans la nature aussi parce qu'il en manquait cruellement, dans son passé et son quotidien. Il prit une inspiration comme s'il était sur le point de dire quelque chose, puis se ravisa.

Et il avait bien fait... Matheo s'ouvrit un peu, comme une belle de nuit, cette fleur éphémère qui ne s'ouvre que la nuit tombée pour faner au petit matin. Il lui avoue qu'il a eu peur, il lui avoue qu'il a été triste, il lui avoue qu'il est content de l'avoir rencontré... Que ce soir était vivant comme jamais à ses yeux aveugles, à son cœur vibrant, à son âme. Et pendant qu'il lui dit tout ça, dans un flot calme de paroles, Matheo s'élève doucement comme emporté par ses mots... Il rit et s'approche de Nicolas qui recule à peine son visage en rougissant... Il n'était pas plus près que lui ne l'avait été et pourtant... Ah ouais, c'est vachement proche quand même. Puis il lâche sur le même ton que lui un peu plus tôt, alors qu'il faisait le "parresseux-singe", qu'il est un fantôme. ...Nicolas éclate de rire. :

-Un fantôme bien beau et palpable !

En le disant, il pose délicatement sa paume sur la joue de ami. Il ne songea pas un instant qu'il se montrait vraiment tactile d'un coup... Ni même aux choix malheureux de ses mots. Pour lui Matheo était vraiment beau ; il se confondait à la nuit, et la nuit était l'une des choses les plus belles que le monde leur avait offert... Ça et le chocolat. Mais sans comprendre, il retire bien vivement sa main. Il a chaud le petit Nico et il change bien vite de sujet. :

-Je reviendrai te voir cet été. J'aurais plus de temps et il y aura de nouvelles odeurs, de nouvelles sensations ! J'adore les nuits d'été, c'est celles qui me rendent le plus vivant.

Il hésite un instant puis ajoute. :

-Dans mon village, je sortais plus souvent la nuit. Et quand je pouvais pas me balader dans les rues parce que j'étais blessé ou toute autre raison, j'allais sur le toit de mon immeuble, je me posais sur les tuiles et je regardais le ciel... Comme on était dans une espèce de vallée, des fois au loin, on voyait l'orage qui arrivait... et j'étais bien.

Il sourit, penchant sa tête sur le côté. :

-Faudra qu'on se fasse ça !


HRP : *nom nom le pavé*

Proche de lui, je ne me rendais pas compte de la distance qui nous séparait et qui était... infime. Je ne le sus vraiment qu'en sentant sa chaleur et en l'entendant parler. Rougissant un peu, je me décalais en même temps que lui, sans toutefois m'éloigner loin. Je sentis alors son geste, puis son toucher à nouveau. Mon rougissement s'intensifia. Il devenait de plus en plus tactile. Je me souviens encore de la tension qu'il avait ressenti lorsque j'avais touché son visage dans le parc, combien ça semblait lui être douloureux. Mais là, il parvenait à le faire sans mal. Il arrivait à être... tactile au sens propre du terme sans ressentir de tension ou des tremblements. J'étais très heureux pour lui. Il avait les mains chaudes en plus, c'était agréable.
La chaleur augmenta au centuple lorsque j'entendis ses paroles. Perturbé, j'en perdis ma concentration et, pendant une fraction de seconde, je descendis de quelques centimètres en l'air.

-Ah! Euh... Là, voilà. Pardon de t'avoir fait peur!

Je lui offris un nouveau sourire, mais ne pris pas la peine de lui expliquer comment c'était arrivé. Je ne voulais pas qu'il se moque de moi, ou pire, se sente gêné de quoique ce soit. Je repris donc ma place sur la branche, sans aucun commentaire, en silence. la chaleur était passé et je respirais à nouveau correctement. Je me rendis compte alors que j'avais coupé ma respiration lorsqu'il avait posé sa main et m'avait complimenté. Je secouais la tête pour dissiper mes rougeurs et fit souffler un petit vent frais sur mon visage. Je soupirais.
Pourtant, les choses reprirent vite leur cours normal. Un sourire joyeux s'épanouit sur mon visage en l'entendant évoquer l'été.

-En vrai, je n'aimais pas beaucoup l'été chez moi. Le soleil restait très longtemps et je ne pouvais sortir que très tard. Et comme il se levait tôt, au final, je n'avais que peu de temps pour me promener. Du coup, je restais enfermé dans ma chambre, à m'ennuyer ou à bouquiner.

Cette parenthèse n'était pas follement joyeuse aux premiers abords, mais j'avais ménagé mon effet et la suite promettait d'être un peu plus guillerette.

-Malgré tout, je dois reconnaître que la nature en été est très différente. Les odeurs sont plus fortes, les fleurs embaument de partout, il y a beaucoup d'insecte aussi...

Pris dans mon élan de souvenirs, je partageais avec lui toutes mes impressions que j'avais accumulé au cours de mes années de solitude nocturne.

-Oh et la nature après la pluie aussi! Les couleurs dont je me souviens sont plus intenses, surtout le vert, et les odeurs de terre mouillée, j'adorais ça aussi, racontais-je tout excité.

Je trépignais sur ma branche à l'évocation de mes souvenirs français. Je n'avais pas vécu grand chose en terme de vie sociale, les jeunes de mon âge connaissait davantage le monde que moi. Sauf que je ne percevais pas les choses de la même façon, aujourd'hui encor emoins qu'avant. Ma cécité m'aura au moins permis de retrouver ses sensations infimes que l'on pense perdu. Mais notre corps à une mémoire aussi, je remarque ça jour après jour. Des gestes automatiques, des mouvements rodés par l'usage... Comme si notre corps voulait de lui-même se sentir en harmonie avec la nature. Du moins, le mien, c'est ainsi qu'il semblait fonctionner.

-Oui, il faut que l'on fasse ça...

Je baissais la tête alors, assaillis par diverses pensées. Mes récentes conversation avaient tournés autour d'un thème en particulier et, si Nicolas était peut-être un peu jeune maintenant, je souhaitais lui en parler tout de mêm.

-Dis-moi Nicolas... Que comptes-tu faire si jamais tu deviens master ? Je veux dire... est-ce que tu comptes rester à Terrae pour toujours ?

Matheo rouge tomate. C'est quelque chose à voir franchement. C'est peut-être à cause de sa peau très pâle que, lorsqu'il rougit, on peut le voir même de loin. Bon, là, non seulement il est près, mais Nicolas à sa main sur sa joue, donc il le sent aussi. Il sourit, parce que c'est attendrissant mais aussi parce qu'il ressent une pointe de fierté à le faire rougir comme ça... D'où pourquoi de hein comment ? Il cligne des paupières et son esprit se vide. Il n'arrive plus à réfléchir, n'ayant plus de quoi aligner ses pensées inexistantes. Puis Matheo s'éloigna alors qu'il retirait sa main et bégaya pour lui répondre. :

-Ah. Beh- Mais non.

Conversation passionnante.

Il se raccrocha aux souvenirs que Matheo avait de l'été. C'est vrai que les jours sont plus longs et par conséquent, les nuits courtes... Hin... Sans blague ? Ce devait pas être évident pour quelqu'un qui devait fuir la lumière du soleil. Mis à part cela, il avait l'air lui aussi d'apprécier la puissance de la nature lors de cette saison. Tout était en éveil, du plus petit des insectes au plus majestueux des arbres, les sons sont omniprésents dans les bois et les senteurs décuplées tout en étant harmonieuses. L'été, c'était le cœur de l'activité, la vie bourdonne, quand l'hiver tout est repos, le moindre son devient écho. Ça ranime même Nicolas qui a un grand sourire à l'évocation de l'odeur de terre mouillée. :

-Owi ! Dans les sous-bois, avec la mousse, les nuits de pluie ! C'est frais et à la fois, on sent la chaud qui se dégage de la terre ayant absorbé la chaleur de la journée !

Il aimait beaucoup le contraste des deux sensations. S'il avait eu de la peine à se remémorer le chemin qu'il prenait les soirs d'été pour rejoindre le quartier général du gang pour aller y couper la beuh avec de la fougère ou la cocaïne avec du lait en poudre, il se le cacha même à lui de la meilleure des manières ; en y pensant tout simplement pas. Il secoua vivement la tête quand Matheo confirma qu'ils devront se retrouver pour l'été, il n'y avait plus que ça d'important.

Il y eut un petit silence durant lequel il profita à nouveau du paysage, n'hésitant pas à regarder le sol, avant que son ami ne reprenne la parole... Et sa question le laissa sur le cul. D'abord, il le regarda sans rien dire, choqué par le début de sa phrase... Puis il éclata de rire. :

-AHAH ! Moi ? Master ?!! Aahahah !

Il avait déjà du mal à se voir Étoile, avec le peu de progrès qu'il faisait avec son côté Sensitif alors Master, c'était impensable, impossible, inimaginable... tout ce que vous voulez mais pas dans l'ordre de l'envisageable ! Il en rit à en pleurer. Toutefois, il ne tarde pas à se calmer, essuyer une larme au coin de son œil et soufflant fort. La question méritait réponse malgré tout. :

-Oui, je pense rester à Terrae... Je n'ai rien qui m'attend ailleurs. Il y a ma mère mais...

Le regard fixant un point sur l'horizon, toute trace de joie le quitta. Ce qu'il ressentait pour sa mère était d'une neutralité presque terrifiante. :

-Je n'aime pas ma mère. Enfin si, je l'aime mais en tant que femme qui m'a donné la vie, pas en tant que m-... maman. Il remarqua qu'il y avait bien des années qu'il n'avait prononcé ce mot. Je ne peux plus affronter l'endroit où j'ai grandi rien que pour ses yeux... Ses yeux qui sont morts avec mon père, d'une certaine façon.

Il n'en ressentit aucune tristesse, aucune honte. C'était la vérité. Il ne pouvait plus, il avait subi pour trop d'années et se sentait bien incapable, aujourd'hui, d'aimer qui que ce soit au point de vivre de nouveau des horreurs telles qu'il les avait vécues. Il eut un sourire. :

-Pourquoi tu me demandes ça ? Tu as des projets toi ?

L'enthousiasme dont il fit preuve lorsque j'évoquais la terre après la pluie ne me surprit pas. après tout, je l'avais écouté parlé de la chaleur, de la nature entière et du temps de l'été. Chaque fois on aurait dit qu'il décrivait un paysage qui faisait écho à mon esprit, que je pouvais représenter sans problème. Ses descriptions étaient si justes, me ramenaient tant en arrière, mais dans le bon sens du terme. La mousse dont il commença à me parler, l'odeur des fougères dans les sous-bois... Je me représentais ça clairement, bien que n'étant jamais allé dans les bois. C'était trop dangereux la nuit. Une sorte de bulle de bonheur s'était créé autour de nous et nous dorlotait. Je me sentais bien, apaisé et serein. L'air du soir et l'humidité du lac renforçait encore ce sentiment de sérénité. Tout allait bien.

Son rire me sortit de ma rêverie . Je le regardais, surpris. J'avais dit quelque chose de drôle ? Sans comprendre, je penchais la tête sur le côté, jusqu'à ce qu'il s'explique enfin, entre deux sacades de rire. Un petit sourire éclaira mon visage, mais je secouais la tête.

-Cela ne veut rien dire tu sais.

Je le regardais à travers mes paupières closes. Je suivais son énergie entraînante à travers tout son corps, observant la boule de lumière qu'il formait dans mon esprit. J'étais sûr qu'il deviendrait master, je sentais qu'il en serait un puissant. Son énergie était folle, elle ne demandait qu'à grandir et s'épanouir.

-Quand j'étais initié, j'arrivais à peine à déplaçais un courant d'air et la moindre utilisation de mon don de guérisseur me donnait l'impression d'être passé dans une machine à laver... Heureusement, Ryu a accepté de m'aider et j'ai pu m'améliorer. C'est entièrement grâce à lui que j'en suis là.

Lui aussi s'améliorerait. Tout seul ou accompagné, ce n'était pas important. Il ne pouvait que progresser dans tous les cas et , au vu de son caractère, il ne stagnerait pas longtemps à ce stade contrairement à ce qu'il croyait.

-Mon étoilisation fut le pire de ma vie. Il a fallu que mes parents se fassent attaquer par les scientifiques pour que ça arrive...

Je préférais ne pas m'en souvenir. Ce moment fut si dur pour moi. J'avais soigné ma mère, blessé les scientifiques avec une tornade avant que Ryu et mademoiselle Honda ne me retrouvent. Ma peur et mon désir de sauver mes parents m'avaient même pousser à blesser le gardien, Chris. Quelque soit la manière dont j'y pense, ce jour avait été funeste à bien des égards. Mes parents... Je ne les avais pas revu depuis, je ne leur avais pas dit pour ma cécité. J'attendais, encore et toujours. Et plus j'attendais, plus c'était difficile.
A nouveau, mon attention fut attirée par lui. Il me parla de sa mère. Je ne dis rien, je l'écoutais seulement. C'était le premier qu eje rencontrais à ne pas aimer sa mère. Ys détestait son père lui, il ne s'en cachait pas. Nicolas non plus apparement mais il était jeune, il évoquait ça avec une certaine pudeur, un certain détachement qui au fond devait bien le toucher. Lorsqu'il eut fini, je posais une main sur la sienne, sans rougir cette fois-ci.

-Pourquoi tu en veux à ta mère ?

Avec ce qu'il venait de dire, je pensais pouvoir deviner mais je voulais l'entendre de sa bouche. Surtout, je n'attendais pas forcément de réponse. Il pouvait en parler s'il voulait, je ne le forçais à rien, je comprendrais.
Pour éviter que l'atmosphère ne s'alourdisse davantage, je saisis la perche qu'il me tendait.

-Oh c'était pour faire la conversation hein... Aussi parce que ça me taraude surement...

Ca c'était le moins que l'on puisse dire. J'étais troublé car tout le monde pensait au futur, me demandant comment je l'envisageais, me montrant comment eux voyaient les choses. Je leur répondais avec ce qui me venait à l'esprit mais en vrai, c'était difficile d'imaginer un futur dont on ne ferait pas parti. Je savais bien que je n'appartiendrai pas au futur de Terrae. Je serais déjà parti, depuis longtemps... Mais je ne pouvais pas lui répondre ça. Reprenant alors mes esprits, je réfléchis une seconde avant de répondre.

-Je pense rester ici. Je ne vois pas ma vie à l'extérieur bizarrement... Peut-être que je travaillerais à l'infirmerie ou à l'hopital, je ne sais pas encore...

C'est ça, je ne savais pas encore.

Quoi que pouvait dire Matheo à ce sujet, non, Master c'était vraiment pas pour lui. Autant il aimait accueillir un novice de temps en temps, autant il se sentait bien incapable de faire la moitié du travail qu'ils accomplissaient... Parce qu'on a beau dire, ils en faisaient des choses... Et d'autres choses que des glaces à l'orange, oui, c'est vrai. Déjà la plupart étaient profs... ou faisaient des études... ce qui étaient quand même remarquable, de base. Ensuite ils aidaient des élèves ici avec leurs pouvoirs. Nicolas, il pouvait pas s'aider tout seul, et il était certain qu'à l'avenir, bon ça pourrait pas être pire, mais ce serait sans doute pas mieux. Que Matheo ait appris à gérer, oui. C'était limite normal vu comment il était doué et que son affinité lui allait particulièrement bien. Et lui ben... Lui, Sensitif... brrr. Voilà, tout était dit.

Toutefois il tiqua en entendant son ami parler de son étoilisation... Les scientifiques. Il tourna des yeux inquiets vers lui, une montagne de questions le bousculait. Ses parents ont été attaqué ? Il était tout seul pour faire face à ça ? Il avait été blessé ?... Il a pas perdu la vue à cause de ces enfoirés quand même ?!! Son corps vibra malgré lui et il se tassa. Non. C'est pas le moment d'être en colère. Chut. Il était tellement concentré à ne pas exploser qu'il fut pris au dépourvu par la question de Matheo. Son enchaînement d'émotions allait si vite qu'il utilisa peut-être un ton un peu trop dur pour lui répondre, les sourcils froncés. :

-Non. Je n'ai pas dit que je détestais ma mère.

Étonnement. Il ne reconnut même pas sa propre voix. Il toussa difficilement, comme s'il avait vraiment quelque chose coincé dans la gorge et reprit. :

-Erm... En fait la nuance est là. Je la déteste pas, mais je ne l'aime pas non plus. C'est un peu une inconnue à mes yeux. Elle n'a rien fait de mal, elle était juste... inactive. Et quand il n'y a rien en face de soi, c'est un peu dur de... de ressentir quoi que ce soit pour cette personne.

MAIS BREF CHANGEONS DE SUJEEEET ! Il se lancent des perches pour ne plus en parler c'est beau. Le sujet de l'avenir de Matheo est bien meilleur de toute façon. Il rit doucement, se rappelant les paroles d'un sage prêtre du Blob à propos de l'avenir. :

-Quelqu'un m'a dit, à Terrae j'entends, qu'on avait le temps. L'avenir m'a longtemps terrifié aussi, avant parce que j'avais pas de choix, maintenant parce que j'en ai. On a toujours les moyens de changer de voie, d'avoir de nouveaux projets, de nouvelles idées... Et on n'est pas seul. On a des amis qui sont là hein !

Il posa sa main sur l'épaule de Matheo... Mais... Mais merde mais pourquoi je le touche ?! Il la retira vivement pour la placer sous son menton... Il déclara d'un coup, songeur. :

-Ça fait mal ? L'étoilisation ?

Il gesticulait près de moi. J'avais dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? Je m'apprêtais à l'interroger lorsque son ton me coupa l'envie de poursuivre. Etonné, je me recroquevillais légèrement sur ma branche, ne comprenant pas sa réaction. Ses paroles m'éclairèrent un peu. Il avait mal compris ma question. Je n'ai jamais dit qu'il détestait sa mère, je lui ai simplement demandé s'il lui en voulait... Mais sûrement avait-il mal entendu ou parce que le sujet le perturbais trop, il avait interprété mes paroles d'une autre manière. Je savais que jamais je ne pourrais me permettre de juger quelqu'un ou sa famille. Tout le monde avait son histoire, ses sentiments, ses relations, il n'appartenait à personne de les juger et je ne le ferais jamais. Du coup, je craignais qu'il ne soit en colère.

-Désolé...

Je ne savais pas bien pourquoi mais c'était sorti tout seul, sans que je puisse me retenir. Ca l'énerverait surement encore plus d'ailleurs, il m'avait déjà fait des remontrances dans la chambre sur ma tendance à m'excuser tout le temps. Je n'y pouvais rien. En le sentant si remonté, même si'l s'était calmé, j'avais l'impression d'avoir fait une erreur, quelque chose de mal et je voulais réparer, même si ce n'était que prononcer un petit mot.
J'entendis les paroles qu'il prononçait et acquiescais en silence. Mon sourire revint peu à peu sur mes lèvres alors que je lui répondais avec douceur.

-Il a bien raison. Nous ne sommes pas déterminé à quoique ce soit, du moins je ne le crois. C'est pour cela que tu ne dois pas partir du principe que tu ne seras jamais quelque chose ou tu ne feras pas telle chose. Nous sommes libre et nous avons le choix et le temps. Quoi de plus beau ?

C'est vrai, nous avions le temps... Lui avait le temps bien sûr. Moi cela faisait bien longtemps que le sablier s'était retourné et que chaque grain perdu équivalait à une parcelle de ma vie qui s'éteignait. Mon monde était ainsi et je n'y pouvais rien, je ne voulais rien faire contre d'ailleurs. Je profitais de ma vie et de mes amis plus que jamais. Je connaissais un bonheur plus grand que je n'en avais connu de toute ma vie. N'était-ce pas beau ça aussi ?
Sa question sur mon étoilisation me prit un peu au dépourvu. Je pris un air songeur, cherchant la meilleure manière de répondre à sa question. Au bout d'un moment, je me décidais enfin à briser le silence qui s'était installé.

-Tout dépend ce que tu appelles avoir mal.

C'était un peu mystérieux comme réponse, mais c'est en partie ce que je désirais lui dire. Je savais comment les gens entendaient la douleur pour la plupart, l'étoilisation... c'était autre chose.

-Il ne s'agit pas d'une douleur physique, pas vraiment. Moi oui car j'ai dû me battre mais c'est surtout émotionnel. C'est un peu comme atteindre une limite que tu dois franchir à tout prix. Tu as l'impression de devenir fou, de te sentir acculé sans pouvoir avancé et tu sais que si tu ne le fais pas, il se passera quelque chose d'horrible.

Ma voix s'éteignit à ce moment-là. Je les revoyais encore tous les deux, j'entendais encore la voix de ce scientifique qui me poussait à sortir de l'enceinte de Terrae pour sauver mes parents, pour m'échanger contre eux... Un frisson me parcourut en m'imaginant sur une table d'opération, déchiqueté par ses monstres qui voulaient comprendre mes pouvoirs.

-C'est la plus dure des choses à subir, murmurais-je. Cette nuit-là j'ai bien cru perdre mes parents... Et si je n'avais pas réussi à dévoiler mon potentiel, je serais aux mains des scientifiques, en train de me faire disséquer à l'heure qu'il est.

C'est vrai, cette douleur est plus violente que n'importe quelle autre. Elle se rapprochait plus du désespoir que d'une vraie douleur. C'est ce que j'avais ressenti.

-Mais ce jour-là, j'ai compris que si je le voulais, j'étais capable de me surpasser et de venir à bout de tout si je le voulais... ça m'a permis de m'affirmer.

Nicolas a une absence, il ne veut pas penser à sa mère. Pourquoi il y penserait d'abord ? Elle ne pensait pas vraiment à lui. Et puis, quand est-ce qu'elle a eu un geste pour lui ? Bon une fois, parce qu'il était blessé à l'épaule... Mais sinon ? Tout seul durant des années, il justifiait sa conduite égoïste ainsi. Il justifiait le fait qu'il voulait l'oublier, son "elle" avant la disparition de son père, pour éviter de se faire du mal éternellement pour une femme morte depuis longtemps, pour une âme, hors du cercle de l'ombre de son propre fils qui gît flottante sur le plancher et qui ne pourra plus s’élever, plus jamais. Il ne parlait plus, il n'entendait plus. Nicolas était au creux de lui-même, dans sa fournaise d'émotions comme Héphaïstos dans son enfer personnel. Il arrachait un bout de sa tristesse à un être tout aussi semblable que lui, enfermé dans une cage de fer blanc. Il lui déchirait la peau pour lui enlever la peine, préférant la douleur physique à celle qu'il s'imposait dans sa pensée, il déchiqueta un bout de souvenir, un bout de sa mère, puis il l'avala pour le mastiquer, le transformer en purée avant de le cracher dans un four brûlant, bouillant, tumultueux de flammes à te crever les yeux par l'intensité de la lumière... Le bout de souvenir tomba dans les braises blanches dans un chuintement pathétique et explosa d'une matière plastique noire purulente et poisseuse. Nicolas, forgeron de ses propres oublis, battant le fer et le peu d'humanité qu'il avait hors de lui...

-Mal ?

Il ne revint de son escapade intérieure qu'à ce moment de la discussion. Il s'en voulut un peu puis oublia de nouveau... A la place, il réfléchit à ce que c'était avoir mal. Mais ça aussi, il l'avait oublié.

L'étoilisation de Matheo l'avait aidé dans un sens, à se découvrir bien plus fort qu'il ne le croyait... Il s'était défendu, il avait défendu ses parents. Malgré ce qu'il put dire sur le fait de devenir fou, Nicolas n'y voyait qu'une réaction normale, quelque chose qu'il aurait pu vivre au village. Derrière un mur, devant tout un gang près à le tuer. Peut-être qu'il devra finalement y retourner pour briser son sceau. Il ne voyait pas d'autres moments de sa vie où il put ressentir une chose pareille, se dit le menteur. Mais Matheo, lui, l'avait vécu, avait survécu, et il avait sauvé ses parents et sa propre peau par la même occasion. :

-Eh beh...

Tu manques pas de ressources... T'es vraiment incroyable... Tu as tellement de potentiel... Non, c'était bête. Il n'avait rien d'autre à dire tellement il s'était éteint tout seul. Il ramena ses jambes contre lui, n'ayant plus rien en lui qu'un désert sec. Il avait envie de fumer... Depuis combien de temps étaient-ils partis ? Combien de temps ils leur restaient ? Nicolas revenait petit à petit... Et il avait vraiment envie de fumer maintenant. :

-Matheo.

...Sérieux mec finis tes phrases. :

-...Je rêve où tu t'es encore une fois excusé pour rien ?

La menace était dans la voix bien qu'il sourit. Il lui planta son index dans sa joue comme si c'était une punition bien suffisante. :

-Bon, je te pardonne pour cette fois, mais la prochaine fois qu'on part en escapade comme ça, je prends mon blouson même s'il fait chaud... J'ai oublié mon tabac dans mes poches.


HRP : J'ai cité du Poe. Je peux mourir en paix désormais.

J'entendis son "Eh beh..." très distinctement, et l'étonnement que je perçus dans sa voix me fit à nouveau rougir. Ce n'était pas un étonnement du style "on dirait pas que tu es fort " mais du genre " tu m'impressionnes " et si ça me faisait extrêmement plaisir, je ne pouvais m'empêcher d'en rougir. Je n'avais rien fait de si extraordinaire, vraiment! N'importe qui aurait fait la même chose et aurait développé son potentiel dans de telles circonstances. Il n'y avait vraiment rien à féliciter.

Je tournais la tête dans sa direction à mon nom et commença à bégayer. Il avait entendu que je m'étais excusé en fait ? Moi qui avais espéré que non, en plus comme il n'en avait pas parlé avant, je me disais que je serais sauf. Le ton de sa voix me fait frémir. Je sens que je vais me faire taper... Je me recroqueville, attendant le choc sur ma tête ou mon épaule, comme Ys ou Huo ont l'habitude de faire. Un doigt se presse alors sur ma joue et je sursaute, m'attendant à bien pire. Je finis par rire, me massant distraitement la victime de Nicolas.

-Si c'est mon châtiment, je devrais me retenir moins souvent! Moi qui m'attendait à quelque chose de terrifiant!

Je préfèrais me taire alors, ne voulant pas lui donner de mauvaises idées à appliquer.
Je me levais alors, comprenant que son tabac lui manquait cruellement. La nuit avançait vite en plus, ça faisait déjà un bon moment qu'on était ensemble. Je tendis ma main vers lui et attendis qu'il la saississe pour décoller de nouveau. Un grand sourire fendit mes lèvres, lorsqu'une idée me vint. Une vengeance parfaite.

-Maintenant que tu sais voler, je vais pouvoir aller plus vite hein ?

Sans attendre sa réponse, j'accélérais un peu, sans toutefois aller jusqu'à la vitesse maximum, autrement je craignais un peu pour sa santé. Mais cette fois, j'allais tout de même bien plus vite que tout à l'heure et il devait s'en rendre facilement compte. Le vent fouettait mon visage en une sensation qui m'était maintenant parfaitement connue. Je sentais qu'on s'approchais de plus en plus de Terrae. Je tournais la tête vers l'arrière, faisant mes au revoirs au lac qui nous avait accueillis ce soir. En même temps, je me promis d'y revenir bientôt, ne serait-ce que pour me remémorer cette soirée. Ce lieu était décidément le point de merveilleux souvenirs. Peut-être étions-nous fait l'un pour l'autre au final ?

Je sentis la façade de Terrae droit devant, et freina tranquilement juste avant que nous la percutions. J'offris un merveilleux sourire à Nicolas, espérant que, tout au fond de lui, il avait apprécié la ballade.

-C'était bien hein ? Avoue!

Je levais alors mon visage vers le ciel. A partir de maintenant, je ne pourrais pas trop y arriver seul, heureusement qu'il serait là pour m'aider.

-Ok, maintenant c'est à toi de jouer ton rôle de co-pilote. Peux-tu m'indiquer comment me rendre jusqu'à la fenêtre de ta chambre, s'il te plait ?

Eh oui, c'était ma surprise de fin de soirée. S'il voulait rentrer chez lui, ou dans sa chambre plutôt, il allait devoir assurer et être précis. Je n'accepterais que les indications claires. Oui, j'aimais le taquiner.

Matheo rit en massant sa joue, Nicolas le regarde interdit. Il s'était attendu à bien pire ?... Nan mais genre... Pire comment ?! Il avait déjà été violent, il l'admettait mais pourquoi il le serait envers lui juste pour ça ?! Il fronce les sourcils et fait la moue. Il sait qu'il est un monstre eh, pas besoin de lui rappeler ! Il poque à nouveau la joue de son ami, une fois, deux fois, puis il la mitraille. :

-Ah mais attends-toi à pire ! Tu fais bien de te méfier ! Même moi j'me méfie de moi-même c'est dire !

Il a un rire bref, comme fatigué, ponctuant sa déclaration avant qu'il n'arrête de s'en prendre à la joue de Matheo. Sans un mot, ce dernier lui tendit sa main. Il était temps de rentrer hein ? Il pousse un soupir, il avait pas le choix de toute façon alors... c'est reparti pour un tour ! Il tangue un instant quand il ne sent plus la branche puis se réhabitue bien plus facilement que ce à quoi il s'attendait. Et puis Matheo déclare qu'il compte aller plus vite. :

-Eh ?

C'est tout ce qu'il a le temps de répondre puisqu'il part, d'un coup. Tellement vite qu'il a pas le temps de fermer les yeux. Bientôt de petites larmes naissent au coin de ses yeux à cause du vent, alors qu'il voit le paysage défiler... Il serre les dents mais il apprécie la vitesse. Et puis le mur de l'Institut approche vite, très vite... TROP VITE ! :

-AAAAAAAAAAAHAAAAAAAAAAAAAAHaaaaaaaaaah... ah.

Dernière voyelle n'étant qu'un souffle alors qu'ils viennent de freiner de justesse. Le corps de Nicolas n'arrivent pas à se détendre et il tremble furieusement, d'un seul coup, comme si sa frayeur venait tout juste d'être expulsée. :

-'spèce de... Il soupire. La fenêtre est un peu plus basse... Là. Stop... A ta gauche... Encore, encore, encore, encore STOP ! C'est juste en face.

Ils pénètrent dans la chambre de Matheo et sitôt les pieds au sol, Nicolas se jette dans le lit, face dans la couette en poussant un énorme soupir. :

-J'te jure... Ne fais plus jamais ça. marmonne-t-il, sa phrase étouffée par le lit.

Bon à l'évidence il ne s'est pas tant amusé que ça. je me demandais bien pourquoi. Peut-être que le freinage était trop brusque à son goût. Je lui demanderais en détail tout à l'heure. Je suis ses indications, me retenant de dire par moment. Pour être précis il était précis! Je ne me décalais que de quelques centimètres à chaque fois, de peur de louper la fenêtre. Son "STOP" interrompit ma manoeuvre, je le déposais sur le rebord avant de m'y poser à mon tour. L'odeur de ma chambre m'emplit à nouveau les narines. Même si j'y reste enfermé toute la journée, c'est parfois bon d'y revenir après une ballade nocturne.

J'entends un petit pouf. Je me tourne dans la direction et souris largement en sentant Nicolas affalé sur mon lit. Ses paroles, étouffées, me parviennent tout de même aux oreilles.

-Qu'est-ce qui t'as gêné ? C'est le... ah !

Je pensais avoir vu juste tout à l'heure, et il semblerait que ce soit vrai. Je n'étais pas convaincu que la vitesse soit un problème. J'étais allé un peu plus vite que tout à l'heure c'est vrai mais il avait eu l'air d'apprécier ça au début. Il ne restait donc qu'une seule solution.

-C'est à cause du freinage ? Désolé, je ne m'étais pas rendu compte que le mur était si près, dis-je avec amusement.

Quoi dangereux ? Ca ne l'était pas du tout, la preuve, on ne s'était pas écrasé. Et puis, les meilleurs pilotes doivent savoir improvisé aussi, sinon ils ne pauvent jamais se sortir des situations pénibles. En plus, c'était lui le co-pilote, il n'avait qu'à prévenir plus tôt.
Je m'installais à côté de lui et m'allongeais à mon tour. Mine de rien, j'étais fatigué, j'avais dépensé beaucoup d'énergie pour nous amener et nous ramener. En plus à deux, J'étais plutôt fier de ma performance, et je ne manquerai pas d'en parler à Ryu. Je me tournais vers Nicolas et frottais doucement sa tête de ma main pour qu'il sorte la tête de l'oreiller. Je me penchais un peu pour qu'il entendu, au cas où.

-Ca t'a plu sinon ? De découvrir le monde des airs ?

Je voulais m'assurer qu'il avait passé un bon moment. Nous avions abordé des thème parfois difficiles, pas toujours évidents à parler mais en même temps, j'avais le sentiment que ça nous avait rapproché. C'était plus évident de se sentir libre avec une personne qui partage un peu les même choses que vous. D'un geste de la main, je fermais la fenêtre à l'aide du vent, avant de m'allonger à mon tour sur l'oreiller libre.

-Pfiu... c'est plus confortable qu'une branche d'arbre quand même...

-Oui, c'était à cause du freinage... Bien vu l'aveugle.

Nicolas, toujours affalé sur le lit, lève alors son pouce vers son ami sans pour autant voir où il se trouve réellement. Ce n'était pas la première fois qu'il utilisait cette expression avec Matheo, mais comme c'était un truc bien à lui, il se doutait qu'il ne le prendrait pas mal. Il pivote un peu la tête afin de le regarder, alors qu'il s'installe à ses côtés et frotte doucement sa tête... Ça lui changeait de l'ébouriffage habituel mais ce n'était pas désagréable. Il se rendit à nouveau compte d'à quel point il était sensible du cuir chevelu. :

-Bien sûr ! fit-il en répondant à sa question. C'est un tout nouveau monde à explorer et de nouvelles sensations que j'adore découvrir... même avec des freinages intempestifs !

Il sourit avant d'ajouter. :

-En vrai, la seule raison pour laquelle j'étais mal à l'aise, c'est parce que ce n'était pas moi qui maîtrisait tout ça. Je me laisse jamais faire et être tout à toi c'était nouveau. Mais ça n'a en rien gâché mon plaisir et finalement, c'était loin d'être désagréable.

...Nicolas bordel (l'auteur n'a plus les mots pour expliquer combien il trouve son personnage stupide). Il gloussa quand Matheo dit qu'un lit est bien plus confortable qu'une branche. Il était bien d'accord, là n'était pas la blague, mais c'était drôle -pour lui- de se dire qu'il y a quelques mois, il aurait été incapable d'avoir un avis sur le sujet. Oh il avait déjà dormi dans un lit de camp au QG de gang de son village ou en garde à vue, mais il connaissait surtout le tapis qui lui servait de matelas dans son ancienne chambre-placard. :

-Je n'te l'fais pas dire. lâcha-t-il en soupirant. Maiiiiiis les meilleures choses sont les plus courtes, et je vais devoir me lever pour fumer, rentrer et dormir un peu.

Une seconde passe, il n'a pas bougé. :

-Là. Je suis debout.

Silence. :

-Bonne nuit Matheo ! Je suis parti. Pyjama, laver les dents et au lit !

Un nouveau silence, un peu plus long, avant qu'il n'imite un ronflement sonore qu'il interrompt presque aussitôt tellement il est fier de sa bêtise, le rire secouant le lit. :

-Ahah ! Désolé j'ai pas vraiment envie de partir.

Même s'il avait carrément envie de fumer.