Nicolas, une jeune fille à son bras, retourne dans sa chambre pour profiter du reste de la nuit avec elle. Elle est blonde comme les blés, les yeux d'un bleu très clairs. Malgré les stroboscopes de la piste de danse, il a repéré sa peau blanche qui l'attira comme un papillon vers une fleur. Et fort de son peu d'expérience de Sensitif, il sut dès qu'elle posa les yeux sur lui qu'elle le trouvait un minimum attirant. Il s'était alors concentré uniquement sur elle le reste de la soirée, lui offrant un verre ou une danse au gré des envies de la demoiselle, écoutant bien plus ses émotions que ce qu'elle pouvait bien lui dire, passant pour quelqu'un d'attentionné alors qu'il se noyait délibérément en elle, comme avec la plupart de ses conquêtes d'un soir. Il avait bu un peu lui aussi, surtout de la bière, pour pouvoir être maître de lui-même jusqu'au bout, profiter du moindre ressenti, du moindre frisson de la jeune fille.

Pourtant il se déconnecte totalement quand il remarque, face à sa porte, qu'on a laissé un mot. Il décroche le bout de scotch et lit l'indication laissé par la Miss.


Ça lui tire un gloussement qui fait lever les sourcils de sa compagne de ce soir, intriguée. Dommage, mais elle devra attendre. :

-Désolé, une urgence. On remet ça un autre soir ?

-Mais... J'ai pas ton numéro ! dit-elle alors qu'il commence à s'éloigner.

Il se retourne en levant un sourcil. Non, je ne te donnerai pas mon numéro belle demoiselle. Il s'approche d'elle à pas de loup, se penche en la forçant à s'adosser à sa porte. Visage proche du sien, il glisse un petit sourire et un doigt sur la joue blanche. :

-Tu as ma chambre, c'est bien mieux non ?

Il dépose ses lèvres brièvement sur les siennes, la peau de nacre rougit. Il s'éloigne en lui faisant un signe, plutôt fier de l'émoi rafraîchissant qu'il a créé en elle, puis se dirige promptement vers la chambre de la Miss, dans le couloir des Feux.


Il s'en veut un peu, il l'admet. Après la Russie, la Miss et lui continuaient à communiquer jusqu'à l'Étoilisation, jusqu'à ce qu'il soit trop occupé avec Aria... et puis après ça, il n'y songeait plus, il était occupé à ne plus ressentir de lui-même alors il était passé à côté. Alors il ne refusa pas l'invitation, même si la soirée aurait pu se montrer plus sportive. La Miss lui manquait et il voulait un peu rattraper ce qu'il avait manqué. ...s'il avait manqué quoi que ce soit. Bon, je me doute que si elle fait des cocktails, c'est qu'il y a quelque chose à fêter... ou à noyer dans l'alcool. Il toque à la porte, attend sagement l'autorisation et entre en poussant un soupir. :

-Faut absolument que je t'achète un portable pour Noël, tu pourr-

Il s'arrête. Il la fixe. Elle s'est coupé les cheveux. Il se penche un peu vers elle, la joie d'être une grande tige qui n'a pas fini sa croissance, et inspecte les boucles rousses d'un œil critique, quoi qu'un peu embrumé par la bière. Puis il fait la moue et se redresse. :

-Ça te va très bien. lâche-t-il dans un sourire. Alors ! Passons directement aux choses sérieuses... Que me vaut l'honneur de cette invitation impromptue chère Miss Hamilton ?

Il retire son cuir qui dévoile sa tenue de soirée... Quand il y pense, il aurait peut-être du prendre le temps de se changer avant de venir ici. Sa cravate desserrée laissait sa chemise noire être ouverte sur son torse abîmé, de quelques boutons seulement mais bien assez pour laisser deviner qu'il s'entretenait le bougre... Il avait un jean moulant et des nouvelles chaussures cirées, bref, tout ce qu'il faut pour qu'il paraisse un brin adulte. Sans oublier sa barbe qu'il avait pris la peine de tailler. Bwarf... Qu'elle me vanne, ce sera pas la première ni la dernière. Il sourit de nouveau. :

-Et surtout, quel cocktail me prépares-tu ? Tu as attisé ma curiosité.

Elle a attisé son envie de tiser ouais !

Je sature. Je sature complètement. Ys. Alice. Elwynn. ILS VONT ME RENDRE DINGUE. Et Nicolas qui ne donne plus de nouvelles depuis un bon moment maintenant… Alors que j’ai spécialement acheté un ordinateur et installé Skype pour lui ! Pourtant, nous parlions souvent après le voyage en Russie. Lorsque j’ai découvert ma demi-sœur, j’ai eu envie d’aller le voir. Qu’il s’énerve avec moi contre cette étrangère qui débarquait dans ma vie. Que nous cherchions chacun comment régler cette affaire. Mais lorsque je suis venue toquer à sa porte il n’était pas là. Et depuis, je n’ai pas osé lui en reparler. Pas envie de me prendre la tête je suppose. Quant à Alice… J’aurais pu en glisser un mot en Russie mais je n’y comprends moi-même pas grand-chose. Je ne sais pas ce que je veux. Je ne sais pas ce qu’elle veut. J’aimerais… Oui j’aimerais qu’on se comprenne… Un peu plus du moins. Sauf que j’ai peur de la revoir… Peur d’être une nouvelle fois malade. De passer une nouvelle nuit penchée au-dessus d’une cuvette de toilettes à me vider sans plus pouvoir m’arrêter. De me dégoûter d’avoir été touchée et d’avoir touché… Du coup je fais n’importe quoi. Je reprends mes vieilles habitudes du foyer, la preuve en est avec Ys.

Allongée sur mon lit, je me lasse moi-même à tourner les mêmes pensées en boucle dans mon esprit. Alors je me lève et vais me laver sans même jeter un seul regard au miroir. Je ne veux pas me voir. Je ne veux pas voir cette fille répugnante. Je ne veux plus observer mes joues un peu moins creuses qu’avant le voyage en Russie, mais toujours pas assez pleines. Plus envie de voir ces yeux fatigués qui m’implorent d’aller dormir, et Dieu sait que j’aimerais, dormir…J’y arrive un peu mieux qu’avant, mais je continue de rêver du foyer. Alice parfois remplace ceux qui me touchaient et, certaines nuits, je me revois moi, usant de mon corps pour-

L’eau s’éclate sur mon visage, me sort de mes pensées parce qu’elle est… TROP FROIDE. J’augmente l’eau chaude en grimaçant. Trop loin dans mon esprit, je n’avais fait attention à ce que je faisais. Je me lave rapidement et après m’être séchée enfile le jean et le pull qui me tombent sous la main. Je m’approche de la fenêtre et soupire. Je m’ennuie. Je m’ennuie alors je cogite. Je n’ai pas envie d’aller sortir Ys de sa tanière. Pas envie de chercher Alice pour que nous parlions. Pas plus envie de sortir que cela en fait car pas très envie de croiser l’une de ces personnes, ou El. Envie de rien ? Si. De m’amuser. De me sentir libre. Encore. Comme en Russie. Je me dirige vers mon ordinateur que j’allume. Nicolas n’est pas connecté. Mes épaules s’affaissent à peine.

Bon. Aux grands maux, les grands remèdes. Il ne donne plus de nouvelles ? Je vais aller le chercher, moi ! Après une rapide recherche sur Internet, une liste de course griffonnée rapidement, j’enfile mon manteau, des chaussures, et me dirige d’un pas rapide vers Terrae village. Vais-je trouver ce que je cherche ? Vodka, simple. Jus de Cranberry aussi. Citrons verts rapidement attrapés ainsi que Get 31. Je farfouille un peu plus pour trouver le triple sec et un long moment de recherches intenses passent avant que je ne mette enfin la main sur le curaçao bleu – celui-ci me tirant une grimace face au prix. M’enfin. Il le faut, ok ? Je prends aussi un paquet de verres en plastique, et direction la caisse.

Une fois rentrée, je me dis que tout de même, avant d’embarquer Nicolas dans cette soirée cocktails que nous avions évoqué à l’anniversaire d’Ariana, je pourrais éventuellement voir si je sais réellement en faire. J’étale mon attirail et passe un petit moment à verser – un peu au pif je dois le reconnaitre, je n’ai rien pour doser – les différents liquides. Je goûte. C’est fort. C’est sucré. Cela va saouler. N’est-ce pas là l’essentiel ?

J’attrape une feuille sur laquelle je note rapidement un mot à l’attention du Tonnerre avant de monter à son étage et de le scotcher à la porte de sa chambre. Après tout, il y a plus de chance qu’il le voit là que sur Skype je crois… Je redescends ensuite et passe le reste de la journée à attendre.

Une partie de la soirée passe. La nuit tombe. Je suis allongée. Je me sens seule. Je crois qu’il ne viendra pas. Je me sens… vexée.

- Ah il ne veut pas venir ? marmonné-je. Plus d’alcool pour moi, voilà.

Je me lève et me serre un verre. J’attrape mon ordinateur et lance une série quelconque, la boisson serrée dans ma main. Tant pis. Encore une fois, au moins, je serai saoule… Trouveriez-vous cela pathétique ? Moi aussi. Cela ne m’empêche pas de le faire. Rage et tristesse se mêlent à l’alcool.

A la fin de l’épisode, j’ai fini deux verres. Mon visage s’est un peu décrispé. Mais pas encore assez à mon goût. Alors j’en refais un. Et je lance un second épisode. Ce troisième verre me fait tourner la tête, et je me mets à rire sans trop comprendre pourquoi devant mon ordinateur. C’était prévu. Sucré et fort. Parfait.

Je ressers un quatrième verre, quand des coups se font entendre à la porte. Je jette un œil au réveil.

- Est-il sérieux ?

J’invite tout de même le garçon à entrer après avoir fermé mon ordinateur, et me surprends à néanmoins éprouver de la joie en voyant mon ami. Un portable ? Mais il ne finit pas sa phrase. Il me fixe sans plus bouger.

- Qu-

Le Tonnerre s’approche et se penche sur moi – damn, a-t-il toujours été si grand ? – avant de se redresser et m’assurer que cela me va bien. De quoi parle-t-il ? Ah. Mes cheveux. Avant que je ne puisse réagir, il enchaine en me demandant la raison de cette invitation et de retirer sa veste…

Un sifflement m’échappe – l’alcool, c’est mal.

- Mais quel beau gosse ! lâché-je avec une pointe de sarcasme, balayant sa tenue de mon regard taquin.

Non parce que, classe ou pas classe, il se pointe quand même en plein milieu de la nuit au lieu de venir en fin de soirée comme beaucoup le font – non, ça ne se fait pas ? ok, je le saurai. Pourtant, je ne lui en veux pas réellement. Je n’avais juste pas envie d’être seule, et je me suis sentie seule longtemps aujourd’hui. A sa dernière question, j’attrape le verre que je m’étais servie, coloré d’une jolie teinte bleue, et le lui tends.

- Et un Kiss Cool pour le mec classe, un !

Je lui adresse un gigantesque sourire, amusée par le nom du cocktail, avant de me servir un autre verre que je porte à mes lèvres.

- Et de mon côté, un Cosmopolitan. J’ai eu envie de me la jouer, ce soir, ajouté-je avec un petit rire.

Je me retourne ensuite à nouveau vers lui et le dévisage un moment. Je m’approche et me hisse sur la pointe des pieds, les sourcils froncés, attrapant sa joue entre mon pouce et mon index – l’alcool, c’est mal, mais au moins cela me libère un minimum.

- N’aurais-tu pas grandi ? Ou bien la vieillesse m’atteint et je me ratatine…

Je hausse les épaules et recule d’un pas.  

- Et qu’est-ce qui te vaut l’honneur ? N’avions-nous pas évoqué cette merveilleuse idée qu’est cette soirée cocktail durant l’anniversaire d’Ariana ? Il fallait bien que nous nous la fassions, un jour ! Et puis… Tu sembles habillé pour la circonstance.

Je te la dirai, la réelle raison. Mais laisse-moi d’abord retrouver cette relation de confiance qui nous lie habituellement, Nicolas. Parce que là, je t’observe, et si je vois mon ami, je le vois différent. A peine, mais un peu quand même.

Elle siffle et... elle le vanne. Évidemment. Il lui donne pour toute réponse une moue amusée avant de s'asseoir sur une chaise. Il s'empare du verre qu'elle lui tend ; réflexe, il le sent d'abord avant de boire. Pourquoi ? Il ne le sait pas vraiment lui-même mais l'odeur sucrée le tente bien finalement. Il trempe ses lèvres et il sait déjà que le cocktail est trompeur ; on ne sent pas l'alcool du tout. Je vais encore être déter demain. Pourtant à force de sortir, il sait quand est-ce qu'il va gérer... et pas du tout. Là, il se sent bien pour le moment. La Miss à l'air joyeuse. Elle lui a tripoté la joue de son plein gré, il sait qu'elle est à l'aise ou du moins, détendue par la boisson... peut-être même par sa présence mais il n'ira pas jusque là. Il tente autant que possible de bloqué les flux d'émotions qui viennent à lui, par ce respect qu'il a envers elle, par son côté pudique qu'il ne montre plus.

Pourquoi ? Pourquoi... Il revoit la maigreur -bien qu'elle soit moins prononcé qu'en Russie- de la Miss et il se souvient. Il tait ses inquiétudes et lui offre un sourire alors qu'elle se plaint de sa taille. :

-Oui, j'ai encore grandi. Je suis en pleine croissance tu sais.

Ou bien c'était à croire qu'il rattrapait des années de malbouffe... Il ne se souvient pas de la taille de son père. Quand on est petit, n'importe quel adulte est un géant, et Nicolas ayant tout fait pour oublier jusqu'aux traits de son paternel n'avait aucune idée de la taille qu'il pourrait avoir à cause, ou grâce, à lui.

Il secoue brièvement la tête. Voilà. Comme il ne se noyait dans personne il songeait de nouveau à lui, à son passé. Il fait de son mieux pour se concentrer sur la Miss. Elle lui rappelle qu'ils avaient parlé d'une soirée cocktail lors de l'anniversaire d'Aria. C'est vrai. Il a un haussement de sourcil pour toute confirmation, mais d'un autre côté, ça lui paraît tellement loin à cause des derniers événements qu'il ne sait plus trop s'il doit se fier à sa mémoire ou à celle des autres. Oh putain enchaîne... Enchaîne ! :

-Si je suis habillé, comme tu dis, c'est que j'étais en soirée figure-toi. J'ai vu ton mot et j'ai pas pris le temps de me changer...

Il boit une gorgée de son cocktail trompeur et ajoute. :

-Tu m'as manqué. Je suis désolé de pas avoir pris de nouvelles récemment.

Il était foncièrement sincère, ça se voyait à travers ses yeux. Ses yeux d'argent qui retrouvaient leur éclat chaque fois qu'il parlait avec son cœur, comme la dernière fois, avec Aaron. Ça me fait mal. Il tente de retrouver ce masque d'un Nicolas "qui gère", d'un Nicolas qui fait semblant, mais bizarrement il ne peut pas avec elle. Il sent, quelque part, qu'elle est la seule avec qui il peut partager son "lui" paumé, cet ado en recherche d'émotions, et c'est ce qui le pousse à ne pas fouiller dans les siennes. Il boit une autre gorgée. :

-Damn, c'est vraiment bon ! Il y a quoi dedans ?!

Il sourit et me répond qu’il est en pleine croissance. Petit – grand ? – chanceux !

Ses réactions s’enchainent en silence. Il secoue la tête. Fugacement. A peine assez longtemps pour qu’on le remarque en l’observant correctement. Puis un sourcil haussé m’apprend que sa mémoire est probablement moins fiable que la mienne. Et enfin, il me répond de vive voix.

En soirée, hein ? Je porte mon verre à mes lèvres en continuant de détailler son visage de mes yeux verts. Ses cernes rivalisent largement avec les miennes, les battant même à plate couture. Je m’apprête à lui répondre, quand il continue dans sa lancée.

-Tu m'as manqué. Je suis désolé de pas avoir pris de nouvelles récemment.

Le masque est posé. Mais inutile je le sais. Je ne montre pas les émotions que m’apportent ses paroles, mais leur puissance doit être telle que le Sensitif ne peut que les ressentir. J’avale une gorgée de mon cocktail, puis une seconde, comme pour mieux faire passer les sentiments qui m’agitent. Son regard argenté, lorsqu’il a parlé, a soudain retrouvé une lueur qu’il n’avait pas lorsqu’il est entré. Il est sincère. Je le sais. Et c’est bien là le souci.

Une joie étrange m’envahit soudain et noue mon estomac. Je n’ai jamais eu l’estomac noué ainsi – ou en tout cas pas depuis longtemps. Un bonheur pur, est-ce cela ? C’est… La première fois que je retrouve cela depuis la phase dépressive de mon père… Mon visage n’en montre rien, mais mon cœur a accéléré imperceptiblement : je lui ai manqué. Si l’on manque à quelqu’un, c’est qu’il y a de l’affection réelle.

- Tu m’as aussi manqué, je souffle du bout des lèvres.

Et j’ai la sensation de ne pas avoir retrouvé « mon » Nicolas. Il semble moins sûr. Moins stable ? Je ne sais pas vraiment. Je ne sais pas exactement ce qui cloche, mais il y a quelque chose qui n’est pas comme avant.

Mais le Tonnerre me sort de mes pensées confuses en me parlant du cocktail. Je lui offre un sourire fier tout en lui répondant.

- De la vodka, du Get 31 et du Curaçao bleu ! Voudras-tu goûter le Cosmopolitan ?

Oui j’enchaîne rapidement les cocktails, mon verre est déjà aux trois-quarts vide. Je ne suis pas en pleine forme, et cela se voit sur ma descente. Mon regard fatigué – restant tout de même joyeux – rejoint celui du Tonnerre.

- Alors ? Ta vie ? Mis à part les soirées… Tout va bien ?

Je ne sais pas comment lui annoncer que j’ai une demi-sœur et une… Une quoi ? Une amie et plus si affinité ? La nervosité rattrape mon bonheur passé trop vite. Parle-moi un peu de toi, Nicolas, et je délierai peut-être un peu plus ma langue de plomb.

Le cœur de la Miss s'emballe, ses émotions aussi. Il connaît cette sensation alors il sourit. Il sourit de tendresse et de compréhension, de la sagesse d'un vieil homme qu'il n'est pas. Sa réponse, il la connaît avant même qu'elle ne traverse ses lèvres et il s'en veut un peu ; parce qu'il aurait voulu avoir la surprise, parce qu'il n'aurait jamais du deviner. Sensitif ; pouvoir maudit. On en voit des vermeils et des bleus, des vertes et des biens mûres. On en voit de ces choses qui font exister et qui font regretter d'exister.

Et puis le sourire fier qu'elle aborde l'achève de ne plus y songer. Il regarde son verre étonné. ;

-Je connais pas le... cu... curaçao ? bleu... Mais ouais ! Je goûte de tout ce que tu veux bien m'offrir ce soir !

Il a l'alcool joyeux, pour l'instant, il en profite pas mal le bougre.

Elle paraît fatiguée mais elle reprend, demande ce qu'il y a de neuf dans sa vie. Il a un instant d'hésitation puis se décide à être franc. Je ne peux pas faire autrement quand elle me regarde comme ça. Et elle semble si nerveuse d'un coup... elle a peut-être besoin de ça, pour se livrer aussi. L'échange d'égal à égal, ça faisait parti d'eux après tout. :

-Oh si tu savais.

Bois Nicolas, ça aide à délier la langue. Trois bonnes gorgées plus tard, il reprend. :

-J'ai passé l'Étoilisation, youpi ! J'ai level up... en apprenant qu'une... bonne amie à moi était enceinte. Elle a avorté, j'ai du l'aider à traverser ça. Elle était si seule... C'est pour ça que je t'ai pas donné de nouvelles en fait, j'étais avec elle.

Il prend une inspiration. :

-J'ai fumé. J'ai bu. Et j'ai fait l'amour... dans cet ordre. lâche-t-il avec un sourire blessé. Je sais que c'est pas bien, mais ça me permet de ne plus être moi, ce qui me va très bien en ce moment.

Boire. Ne pas penser à Matheo. Boire. Ne pas penser à Matheo. Boire. Sa tête tourne légèrement, il a été trop rapide sur la boisson. Son verre est déjà vide. :

-J'ai eu droit à une leçon de la part de mon prof de maths et on prévoit de retourner en France, voir ma mère... Parce que voilà... Je m'inquiète pour elle il paraît.

Il fixe le fond de son verre vide. :

-Enfin voilà. C'était Nico Info News ! Sers-moi à boire tu veux ma belle ? J'en ai besoin là.

Et puis ça lui permettra de rouler une clope en attendant.

Sa main tremble quand il s'empare d'un filtre. Sa raison s'égare un instant. Le Loup Noir lui paraît tellement loin quand il est sous l'emprise de l'alcool mais, quelque part, il aimerait qu'il soit là ; pour l'éveiller, lui donner un coup de fouet, le rendre vivant. Mais il sait que la colère et la rage ne l'aideront pas à ce moment, il en a déjà fait l'expérience lors des combats de rue. Il préfère se concentrer sur le visage de la Miss. Elle va mieux, c'est indéniable comparé à Saint-Pétersbourg, mais elle paraît encore si faible et si fatiguée. La détresse dans le corps sans qu'elle puisse faire un pas en avant, bien qu'elle arrive à le toucher, à accepter son contact. Encore un peu plus loin... songe-t-il soudain, comme s'il était capable de percevoir l'avancée qu'elle faisait au fur et à mesure de ses rencontres avec elle.

Elle s'avançait sur le même chemin que lui. En mieux.

Elle était en route vers la lumière tandis qu'il avait prit un détour compliqué.

Sans être confiant, il savait qu'il donnerait tout pour ne pas qu'elle le rejoigne.

Je ris doucement devant l’air étonné de Nicolas.

- Je ne connaissais pas non plus. C’était une tentative. Réussie apparemment !

Mais soudain, l’atmosphère heureuse s’éteint, sa flamme soufflée par les paroles du garçon et l’obscurité qu’elles amènent. J’écoute. J’écoute le moindre mot qui passe les lèvres du Tonnerre, tentant d’intégrer chaque détail. Parce que je sens que ce qu’il me dit est important. Que je sens qu’il ne le dira pas plusieurs fois.

J’encaisse ce qu’il me dit, ce qu’il confie plutôt. Je voudrais garder mon regard accroché au sien, mais ses yeux sont baladeurs. Ne pas être lui ? Mais, Nicolas, as-tu déjà été toi ?

Le Tonnerre vide son verre et me dit qu’il va retourner en France voir sa mère. Une légère peur, à peine perceptible, vient s’insinuer en moi. Il faut que ce voyage l’aide, pas qu’il le détruise plus. Et je crains que la dernière option ne prenne le dessus.

Je vide à mon tour mon verre et attrape le sien sans un mot. Je lui sers un Cosmopolitan et moi un Kiss Cool. Je suis lente dans mes gestes. Je ne me concentre pas. J’essaie de desserrer les dents, d’articuler quelques mots, mais je n’y arrive pas. Je me sens… Impuissante. Mon ami n’allait pas bien. Mon ami avait besoin de quelqu’un. Et je ne m’en suis pas aperçue. Je m’en collerais des baffes.

Je lui tends son verre, le regard soudainement éteint. Comme lui, je me roule une cigarette. Mes gestes sont calmes, méticuleux, posés. Toujours soigner l’apparence, peu importe le désastre intérieur. Vieux réflexe.

Merde. Je ne sais pas quoi faire. Que font les gens dans ces cas-là ? Un câlin ? Un bisou ? Quelques mots ? Je me lève pour ouvrir la fenêtre et m’appuie contre le rebord. J’allume nerveusement ma cigarette, consciente que beaucoup trop de temps est passé entre les paroles de Nicolas et cet instant, et que mon silence devient inquiétant. Mes yeux si vides se posent sur le Tonnerre. Mon inquiétude, à quel point la ressens-tu ?

- Je… Je n’ai jamais été douée, pour écouter, pour conseiller. Parce que je n’en ai jamais eu l’occasion peut-être. Ou bien parce que je n’ai pas été élevée comme cela. Je ne sais pas très bien. Quoi qu’il en soit, je n’ai jamais su comment faire.

Je tire une taffe anxieuse, chacun de mes muscles tendus.

- Mais je n’en avais jamais eu l’envie non plus. Tu… Tu me donnes envie de t’écouter, et de t’aider. Si cela ne va pas. Si tu en as besoin.

Nos yeux sont ancrés l’un dans l’autre, je ne le lâche pas du regard.

- Es-tu sincère lorsque tu dis que cela te va de ne plus être toi ?

Mes sourcils se froncent un peu. J’ai hésité à le lui demander. Et soudain cela m’a paru une question essentielle. Je ne peux pas décider de moi-même que Nicolas va mal et a besoin d’être secoué. Je ne peux pas choisir que ce qu’il fait est mal. Car en soi, il est possible de fumer par envie, de boire par amusement ou de faire l’amour par pur désir. C’est lorsque ces trois choses sont réunis par le dégoût, la tristesse et le vide que cela devient dangereux. J’ai peur que cette deuxième option ne soit la bonne – cet éclat de vie dans son regard qui était éteint lorsqu’il est entré me pousse à le croire, mais aussi ce sourire blessé qu’il a laissé échapper, sa descente trop rapide, sa main tremblante – néanmoins je ne veux lui tendre la main que lorsqu’il aura envie de la saisir. Rien ne sert d’aider quelqu’un qui ne souhaite pas s’en sortir.

Il la connaît. Il pourrait des monologues extatiques auxquels elle ne répondrait que des "oui", "d'accord" ou autre "je vois". C'était très simple, ça lui allait très bien. Il ne s'en offusquait pas ; c'était sa façon de communiquer et il n'avait pas besoin de plus. Ni de moins d'ailleurs. C'était parfait et concis. Mais là, allez savoir... Elle s'abîmait à réfléchir. Peut-être qu'elle cherchait d'autres mots, pour essayer au moins de paraître... concernée. En même temps après un résumé pareil, il y a de quoi. Certains ont préparé une corde pour moins que ça... Ohoh. AHAH ! Alors ouais mais... non mec, je te conseille de garder ton humour noir à propos du suicide de ton père pour toi hein. C'était drôle mais ça  plaît pas à tout le monde. Il s'empare soigneusement du verre qu'elle lui tend. Il y trempe ses lèvres. C'est... bon, aussi. Ça lui paraît un peu plus frais, sans doute à cause du goût agrume.

Il ne peut retenir une onomatopée de douleur face à l'inquiétude et à la légère panique de la Miss. Il ne le capte pas très bien, mais il sait que ça tambourine ses protections mentales qu'il n'a plus l'habitude de garder levées. Alors il serre les dents, prêt à garder aussi longtemps que possible ses défenses... ce minimum qu'il peut se permettre de faire en la présence de son amie. Elle se lève, il la rejoint à la fenêtre en allumant sa cigarette. Le geste que la Miss fait pour allumer la sienne est nerveux, à peine perceptible. J'ai pas besoin d'être Sensitif pour comprendre... Comprendre oui, mais rester vivant... c'était différent.

Tendue, elle paraît s'excuser d'abord, pour ne pas trop savoir quoi faire dans cette situation. Nicolas garde une expression neutre mais au fond de lui, il est agacé. Bon sang mais de quoi tu te justifies hm ?! Et puis elle ajoute qu'elle est prête à l'écouter. Leurs yeux se sont accrochés, comme souvent lorsqu'ils se parlent à cœur ouvert. Comme s'ils savaient tous les deux que chacun pouvait juger de la sincérité de l'autre rien qu'à travers ce fameux miroir de l'âme. Elle pose sa question... ou plutôt, elle la lance, ni vraiment par hasard, ni en la transformant en ultimatum. Tiens, c'est gratuit. Répond si tu veux. Le visage neutre de Nicolas se fissure, il est amusé. Un semblant de sourire naît un instant sur ses lèvres avant de le cacher derrière son verre. :

-J'ai jamais dit que je savais qui j'étais non plus.

Ah ça. C'est bien de l'admettre déjà. :

-Miss... reprend-il aussitôt.

Il tend sa main pour la placer au-dessus de celle de la jeune Feu. Il attend une seconde, en la regardant dans les yeux, ayant toujours en tête cette partie d'elle qu'il avait aussi autrefois puis dépose délicatement sa main calleuse sur la sienne. :

-J'ai fait des conneries. Oui. Mais ça m'est passé... un peu... Disons que j'apprends à doser les excès maintenant.

Quant à savoir si ça va mieux... mnnnneeeh. On est là pour s'amuser oui ou merde ? Il retire sa main et lui offre un petit sourire. Il n'était même pas sûr de savoir s'il irait mieux un jour, vu ce qu'il avait f- Changeons de sujet ! :

-Je préfère le Kiss Cool n'empêche. lâche-t-il. ...Sinon et toi la Miss ? Quoi de neuf depuis la dernière fois ?

Le visage de Nicolas est neutre. Et soudain, amusé. Amusé ? Je ne peux retenir un sourire qui vient étirer mes lèvres – à peine, mais assez pour qu’il se voit – alors qu’il me répond. Je suis heureuse qu’il l’admette. Enfin, heureuse est un grand mot. Rassurée serait plus correct. Il reprend sur un « Miss » et je suis des yeux cette main qu’il tend au-dessus de la mienne. Ma respiration change alors que je me demande ce qu’il fait, que j’appréhende. Elle est d’un calme forcé pour que mon cœur ne s’emballe pas. Mais en sentant son regard, je lève mes prunelles vertes qui rejoignent celles d’argent du Tonnerre. Et nos paumes se rejoignent. La peau abimée de Nicolas sur la mienne plus douce. Sa grande main sur la mienne aux doigts si petits, si fins à côté des siens. J’appuie imperceptiblement la mienne, pour une fois apaisée par le contact. Pour toutes réponses, je cligne doucement des yeux. D’accord. Mais je serai là pour veiller sur toi, là pour t’épauler lorsqu’il le faudra. Tu n’es pas seul.

Le contact est coupé et les lèvres de Nicolas s’étirent en un petit sourire. Il part sur un autre sujet. D’accord, je te suis si tu veux passer à autre chose.

- Oui, et puis la couleur est plus jolie !

Je m’apprête à porter mon verre à ma bouche quand il enchaine en me questionnant sur ma vie. Je grimace.

- Mmh… Veux-tu vraiment savoir ? lancé-je avec un petit rire gêné.

Je n’ai jamais parlé de ma vie, Nicolas. Jamais pu raconter les « derniers scoops » comme on dit. J’ai l’envie, mais cela est tout nouveau.

Je lui accorde un petit sourire concis et bois enfin une bonne gorgée de mon Kiss Cool avant de tirer une taffe de ma cigarette. Mes yeux rejoignent le plafond alors que je cherche mes mots. Par où commencer ?

- Alors… Alice ? Elwynn ? Les deux en même temps ?

Un rire fatigué m’échappe. Tout se mélange.

- Commençons par la famille, puisque c’est censé être si important… J’ai une demi-sœur. Oui, oui. Ici même. A Terrae. Une rouquine qui répond au doux nom d’Elwynn Evrard. Je l’ai rencontrée… malencontreusement, en novembre. Ce fut… Intéressant ?

Je soupire. En réalité, cette rencontre me semble si inutile. Nous n’avons rien appris d’autre que l’existence de chacune. Enfin, peut-être savait-elle que j’existais ? Je n’en sais rien. Je ne sais rien. Cela me frustre. Trop de questions. Pas assez de réponses. Mon regard retrouve celui de Nicolas et un nouveau rire triste vient naître de mes lèvres pincées.

- C’est… Trop flou pour être plus précise.

Je hausse les épaules et bois une gorgée de mon cocktail.

- Mais tant pis.

Et une taffe. Pour que le goût âcre de la présence de ma demi-sœur dans l’établissement passe mieux et s’évapore dans la fumée de la cigarette.

- Ah… Et Alice… Alice. Aha !

Je souris. D’un coup. De la joie pure, à nouveau à l’évocation de ma douce. Qui tombe quand le dégoût de moi-même revient. Mon visage se transforme en un masque éteint.

- Elle est… particulière. Je… Elle m’a fait un câlin. Et moi aussi je lui en fais un. Nous avons regardé un coucher de soleil ensemble… Elle m’a empêchée de…

De quoi ? De me suicider ? C’est un peu violent, non ?

- Elle m’a aidée à aller mieux quand cela n’allait pas.

N’est-ce pas plus simple ainsi ?

- Sauf que cela m’a rendue malade. Et je-

C’est trop dur à avouer. Je ne comprends rien. Je me sens de plus en plus perdue. Je n’ai jamais cru pouvoir avoir envie de contact. Et aujourd’hui, je voudrais qu’Alice me prenne dans ses bras sans que mon corps ne la rejette. Je détourne le regard, soudainement gênée d’être si faible devant Nicolas. D’autant m’ouvrir. Alors je tire une taffe, la main tremblante.

- Oublie s’il-te-plait… lâché-je du bout des lèvres.

C’est horrible de se confier. Cela fait se sentir si vulnérable. J’essaie de retrouver mon visage blasé, indifférent, mais c’est plus complexe qu’usuellement. Cela sonne faux. J’en ai trop dit pour qu’il y croit. Je ressens trop d’émotions pour qu’il ne s’en rende pas compte. J’ai envie de taper dans quelque chose pour avoir l’air énervée au lieu de triste. Ce serait déjà mieux. Moins pitoyable.

Si je veux vraiment savoir ? Nicolas lève un sourcil en faisant la moue. C'était comme elle le voulait hein, il est pas du genre poussif... mais quand une jeune demoiselle t'invite à boire un coup, c'est pas pour parler du beau temps généralement... ...Pourquoi je pense à Aaron en disant ça ?! Brr. Please ! Concentration ! Quand elle sourit, il se dit que ça risque d'être long... et fichtrement intéressant. Il décide de s'appuyer à la fenêtre tout en tirant une latte sur sa clope, attentif au moindre mot, au moindre geste de la Miss.

Il ne connaît ni d'Alice, ni d'Elwynn, ni d'Éve, ni d'Adam. Lawl. Alors il la laisse prendre le temps de continuer, sirotant son cocktail, tirant sur sa cigarette, lâchant une onomatopée en entendant que "la famille, c'est important" puis reste totalement silencieux en apprenant la suite... Une demi-sœur. Même père ? Même mère ? Oui, une question importante comparée au reste, genre, d'où c'est qu'elle vient et surtout comment t'as fait pour ne pas savoir que t'avais une demi-sœur avant ?! *tousse* Elle semble désabusée et en colère quand elle en parle. Ça l'a quand même secouée. Et son peu d'information à ce propos doit l'agacer un peu plus... et s'heurter à son orgueil, au point de pas pouvoir faire un pas, en apprendre plus sur elle. Elle tire nerveusement sur sa cigarette. Bien... passons.

Ensuite, c'est au tour de cette Alice. Et rien que l'évocation de son nom créait de l'émoi en la Miss... qui s'éteint brutalement, s'écrase violemment d'un coup pour être remplacé par un écœurement qu'elle cache derrière un visage neutre. Nicolas frotte une main sur son visage lentement, comme s'il venait de recevoir une bombe d'eau froide dessus mais que cela ne l'atteignait pas. Il inspire et expire avec cette même lenteur... Oye oye oye bon sang de coude. Particulière. Un câlin. Aidée. Mal-... WAIT UN CÂLIN ? Nico se redresse d'un coup mais ne l'interrompt pas. Soudain statufié, il repasse le cours des émotions de la Miss dans sa mémoire, se rendant compte d'ailleurs qu'il a abaissé ses barrières sans se rendre compte. Il a pas le temps de s'en sentir coupable toutefois, trop occupé qu'il est à percevoir, à comprendre ce qu'il se passe. C'est compliqué... Mais il pense avoir mis le doigt dessus.

Elle lui demande d'oublier, il lâche un rire. Aucune chance Miss Hamilton ! Il termine sa cigarette et jette le mégot avant de revenir à l'intérieur, c'est qu'il fait pas chaud. Il retourne s'asseoir, ne pouvant s'empêcher de sourire, il remonte le fil des aventures de son amie aux cours des dernières semaines. :

-Ta s-... demi-sœur. Tu dis que c'est trop flou et après "tant pis". Mais si t'en parles, c'est que ça doit te travailler quand même.

...Quel fin psychologue. T'en as d'autres comme ça Sherlock ? :

-L'idée de la voir pour avoir des réponses à tes questions te rebute-t-elle ?

Il connaît déjà la réponse. Elle était évidente dans un sens... La connaissant, la Miss aurait déjà mis les points sur les "i" dès la première rencontre. Mais que voulez-vous ? C'était un sadique dans l'âme, un poil maso, et on ne se refait pas. Il voulait l'entendre de sa bouche. :

-Et malheureusement pour toi, je risque pas d'oublier cette Alice... Tu lui as fait un câlin ! Tu te rends compte ? C'est important ça ! Je parle d'expérience, je suis passé Étoile à cause d'un putain de câlin !

Oui, oui. A cause. Parce que. Nicolas se redresse, un air moqueur sur le visage mais la position d'un prêtre en train de prêcher la bonne parole. :

-Je demande une seconde de silence pour cette mystérieuse et respectueuse Alice qui aura aidé la Miss à faire un pas de plus vers la guérison. Aaaah~ !

Il glousse, il s'attend à un juste retour de bâton mais il s'en fout. Ils ont VRAIMENT quelque chose à fêter ce soir ! Il lui sourit. :

-Tu as fait la moitié du chemin, la deuxième est plus dure et ne dépend que de toi, pas des autres. C'est sur ce mal qu'il faut travailler maintenant... et je suis sûr que ça viendra à force de fréquenter cette grandiose Alice.

Clin d’œil et hop, gorgée de Cosmo. Nico, le grand frère de secours tavu ?!

Le rire de Nicolas m’apprend vite que non, il n’oubliera pas. J’étouffe un soupir alors qu’il finit sa cigarette et rentre. La mienne n’en est qu’à sa moitié, et l’air frais – glacé ? – de la nuit m’apaise un minimum, alors je ne bouge pas. Je ne saurais pas dire pourquoi, mais son sourire m’agace. Néanmoins je passe outre, l’écoute, attentive.

Oui, cela me travaille. Logique. Mais… J’aimerais oublier. Que cela ne se soit jamais passé. Sa question me noue l’estomac. La revoir… Discuter avec, réellement. Lui poser des questions.

- Je refuse d’aller vers elle.

Je suis butée. Trop butée. J’en ai conscience et je m’énerve moi-même pour cela. Mais aller vers elle, ce serait accepter qu’elle soit une part de ma vie. Lui accorder une place importante. Créer une relation, bonne ou mauvaise, cela reste une relation que je ne veux pas. Et puis… J’ai fui une fois. J’ai été faible. Prise par surprise. Je ne m’y attendais pas. Je ne pensais pas la voir si tôt. Pas juste après avoir appris son existence. La croiser ici, c’était trop.

Et puis Nicolas se lance sur Alice. Je finis mon verre et ma cigarette avant de m’avancer vers lui après avoir fermé la fenêtre. Important… Oui, ce câlin l’est. CES câlins. Nos mains liées l’une à l’autre. Nos corps l’un contre l’autre. Sa nudité pure, et la mienne si sale. La nausée me revient, et je déglutis difficilement. Je m’apprête à m’assoir à mon tour quand le Tonnerre se redresse, ses traits devenus moqueurs. Je me tends immédiatement. Pourquoi ? Pourquoi cela le fait-il rire ? Ce n’est pas drôle. Non, moi je ne ris pas, Nicolas, lorsque je revois les violeurs, ceux qui me touchaient impunément, alors que la jeune fille ne me veut que du bien.

Un pas de plus vers la guérison… Un rire sarcastique m’agite nerveusement. Ah, cela te fait marrer hein… Mon regard se durcit, se fait froid, créant soudain un mur entre mon ami et moi. Même le terme « grandiose » me reste en travers de la gorge. Je sens mes poings se serrer en un geste anxieux, chacun de mes nerfs douloureusement tendus.

- Arrête de te marrer Nicolas, lâché-je froidement.

Je n’aurais pas cru que cela m’énerverait à ce point. Je n’aurais pas pensé poser mes yeux glacés sur le visage amusé du garçon. Peut-être trouve-t-il cela stupide. Peut-être pense-t-il que c’est futile. Que je suis idiote de me prendre la tête pour si peu. Et cela m’agace.

- Si tu penses que je suis débile, dis-le tout-

Je me coupe alors qu’une boule se forme dans ma gorge. Je suis épuisée. J’ai envie de pleurer. Putain. Je n’avais plus pleuré depuis si longtemps, et l’épisode avec Alice aux thermes a débloqué quelque chose en moi que j’avais enfoui. Je suis une pleurnicharde de base. Une gamine pourrie gâtée qui n’a pas été habituée à ne pas avoir ce qu’elle voulait avant longtemps. Alors quand j’ai dû apprendre à retenir mes larmes lorsque celles de mon père coulaient si fort, j’en ai profité pour m’endurcir. Mais aujourd’hui, la carapace a été fendue par la jeune Terre, par la douce qui l’a fait fondre grâce à sa douceur. Ou à cause ? Je ne sais pas.

Mes yeux rejoignent le sol et le fixent intensément. Mes joues sont rougies par la gêne, l’embarras et la colère. Mon regard s’embue. Putain. Non. Je ravale mes larmes, les enfouies dans ma gorge. Je veux qu’elles disparaissent, que ma poitrine ne soit plus ainsi oppressée. Je voudrais claquer dans les doigts, et tout faire disparaître, y compris le sourire qui étire les lèvres de Nicolas.

La Miss est butée, elle dit qu'elle refuse d'aller vers sa demi-sœur. Nicolas hoche simplement la tête. Elle fait bien comme elle veut, après il faut qu'elle se rende compte que, malgré sa taille, Terrae n'est qu'un petit monde où il est facile de croiser n'importe qui. ...surtout ceux qu'on a pas envie de croiser en fait. Il inspire et lève une main, lui signifiant qu'il se rend à ce sujet. Si elle veut en parler, pas de soucis, mais qu'elle sache qu'il n'est sûrement pas un pro des relations familiales ; il n'en a pas eu.

Le flux des émotions est bien différent quand il parle d'Alice, il fluctue, il balance, comme sur un bateau qui tangue au gré des marées. Nicolas rit, mais il déglutit aussi. C'est puissant et il reconnaît cette sensation. Ah... c'est bon j'en suis sûr maintenant. Quand elle lui demande de s'arrêter, il le fait aussitôt. Son sourire tombe, ses bras aussi. Mais il n'est ni choqué, ni en colère. Il regarde la Miss en proie avec elle-même ; il reconnaît cette fureur de se sentir idiot et désarmé, il reconnaît ces vagues de bonheur qui entrecoupent par intermittence le dégoût, la peur et le chagrin. Il ne reconnaîtra par contre jamais le fait que tout ça ait pu le traverser un jour... Il s'effondrerait. Est-ce qu'elle le supporterait ? Peut-être pas... Mais elle devait s'en rendre compte... sinon elle ferait les mêmes erreurs que lui. :

-Tu n'es pas débile. Je ris parce que je suis heureux pour toi. dit-il doucement.

Il boit encore tandis qu'elle rougit, les yeux embués d'embarras. :

-Tu sais que tu peux me parler de tout et n'importe quoi, je t'écoute et si je peux t'aider... Après tout je te l'ai déjà dit : avec ou sans masque, je suis ravi de te rencontrer à chaque fois.

Nicolas regarde un instant le fond de son verre, pensif. Il fait tournoyer le liquide avant de terminer son cocktail d'une lampée. Pour moi, c'est mortel. C'est quelque chose qui ne mène nulle part et qui blesse, qui déchire et qui fait bien plus mal que n'importe quelle blessure physique et pourtant... La Miss est debout. J'imagine qu'elle a le cœur comprimé rien qu'à y penser mais elle est là, vivante, elle ressent. Il décide de prendre le risque. :

-Tu es amoureuse.

...Elle va m'frapper. Elle va M'FRAPPER ! Pourtant il continue, le regard vide. :

-Tu la vois et tu la trouve si pure, si belle et si gentille, comme jamais on a pu l'être avec toi. Tu veux la chérir, la garder que pour toi... Mais tu t'en sens incapable, tu te sens sale. Tu as peur de la perdre mais d'être loin d'elle, ça te fait souffrir tout autant. Et tu te dégoûtes.

On sent... pas du tout... le gars qui sait de quoi il parle... Brref. Nicolas lève son verre jusqu'à ses lèvres avant de se rappeler que son verre est vide. Il pousse un soupir.

Le sourire disparait enfin du visage de Nicolas. Je sens son regard sur moi, et relève doucement les yeux vers lui. Heureux pour moi… Il est heureux pour moi… Pourquoi ? Je me sens si mal. En quoi est-ce bien ? Arg trop d’émotions. J’ai l’impression que mon cerveau a été sorti de ma tête, retourné et piétiné. Je suis fatiguée du masque, j’ai envie de l’enlever complètement ce soir, et les paroles du Tonnerre ne m’y encourage que trop. Alors pour une fois, je le fais tomber totalement, laissant la tristesse et l’incompréhension se peindre sur mon visage.

Je perds les yeux du garçon qui rejoignent le fond de son verre qu’il finit. Par automatisme, je termine aussi le mien. Et puis il lâche une bombe en me disant que je suis amoureuse. Mes doigts se crispent sur mon verre, et je suis prête à me mettre à crier ma protestation, quand il enchaîne, le regard éteint. Ma colère tombe instantanément. Les larmes viennent une nouvelle fois embuer ma vue. Je ressens ma douleur, mais je ressens aussi celle de Nicolas à travers ses paroles. Il sait. Il connait.

J’essuie du revers de ma manche mes yeux, la mâchoire contractée pour ne pas pleurer. Il a raison. Bien trop raison. Je m’approche lentement de lui, sans un mot, et attrape doucement son verre. Je rejoins le bureau où sont posées les bouteilles et nous sers à chacun un Kiss Cool avant de retourner vers Nicolas.

- Tiens, lui dis-je d’une voix rauque.

Je bois une gorgée sans reculer, restant près de Nicolas, rassurée par cette proximité. Je lève mes yeux vers lui, clignant des paupières pour faire disparaître les dernières larmes qui voulaient s’échapper.

- Je ne peux pas être amoureuse… Je ne peux pas avoir ce genre de relation…

Et je ne veux pas imposer à Alice ce genre de sentiments. Et puis… Elle ne peut pas en avoir pour moi non plus. Ce serait idiot, imbécile de sa part. Trop dangereux, pour l’une comme pour l’autre. Je m’approche un peu plus de Nicolas, ne laissant que quelques centimètres entre nous.

- Je ne peux pas être amoureuse, mais tu as raison sur le reste… Elle est si… Si différente. Elle est mon opposée, la pureté même. Je voudrais qu’elle ne se casse jamais, et j’ai si peur de la briser… comme on m’a brisée. On m’a fait trop de mal, et je ne sais pas comment les choses sont censées être… J’aurais peur d’agir comme avant, comme j’étais au foyer, ou de faire les mêmes choses qu’on me faisait… Je n’ai jamais rien connu d’autre…

Ma tête tombe sur le torse de Nicolas, alors que les larmes sont revenues. Elles jouent au yoyo, me détruisant peu à peu, achevant de m’épuiser. Je renifle un peu, avant de reprendre, presque dans un murmure.

- Tu avais l’air de savoir de quoi tu parlais, Nicolas. Je me trompe ?

Je n’ai pas bougé. Ma tête est toujours contre lui. Je ne veux plus bouger. Il est chaud, grand, rassurant. Nous pouvons parler comme cela, non ? Dans des chuchotements tout doux, l’un contre l’autre. Tant pis, si nous avons l’air idiots. Moi, mon front contre le garçon, les bras ballants, un verre remplit dans une main. Tant pis, je veux juste ne plus être seule.

Silence. Bouleversement. Tempête. L'orage qui faisait rage dehors lors de leur rencontre semble avoir pris vie en eux. Nicolas se lève pour remplir son verre, en se disant qu'en occupant ses mains ça devrait passer... Mais la Miss le lui prend des mains. Il fixe les siennes, prenant les bouteilles, préparant sa nouvelle boisson. Un Kiss Cool vue la couleur. Il a mal au cœur même s'il ne pense à rien de particulier, même quand il reprend son verre pour boire une gorgée, synchrone avec elle. Elle est proche, il voit le chagrin en plus de le ressentir mais il n'ose pas fermer les yeux.

Il comprend avec une force étonnante le cheminement de pensée de la Miss. Ils sont si... si... Mauvais. Sales. Pourris en dedans... Il n'a aucune idée des mots qu'il doit prononcer pour ne pas qu'elle s'attarde sur ça, pour qu'elle tente malgré tout. C'est le cordonnier qui est mal chaussé... La tête de la Miss rencontre son torse. Il devine ce qui s'échappe de ses yeux, ce qui déborde de son cœur. Il reste immobile. Sa respiration est calme et égale, même quand elle lui pose la question, même quand elle a compris. :

-Oui. chuchote-t-il simplement.

Une déferlante de peines et de douleurs le sonne à l'intérieur de lui. Dans son âme, il est emporté par ses sentiments, ses erreurs et ses regrets qui forment une vague si immense qu'elle détruit tout sur son passage. Il se débat dans le vide, tentant de repousser cette douleur trop grande pour lui, cette meurtrissure qui laisse une plaie béante et purulente sur son torse. Lui qui pensait ne pas avoir de cœur comprend soudain à quel point il avait tort... Mais même s'il savait qu'il était capable d'aimer, il le refusait, il le repoussait encore et encore... Il ne voulait pas souffrir comme ça, quitte à emporter les autres dans sa monstruosité. Il ne voulait plus de sentiments, il voulait ceux des autres.

Puis tout s'évanouit.

Nicolas renifle. Il n'a pas pleuré. Il n'y arrive plus. Il baisse la tête, la Miss est toujours contre lui... Que pouvait-il bien dire pour qu'elle ne traverse pas ce qu'il était en train de traverser ?... Il ferme les yeux. :

-Je suis pas... pro, hein, mais... Il faut que tu lui parles de ça, de ce que tu ressens avant de... faire quoi que ce soit. Il faut que tu l'écoutes aussi. Car tu ne le sais pas mais elle peut t'apprendre quelque chose, qu'elle partage tes sentiments ou non. Je sais que... c'est pas facile... Mais c'est tout ce que je peux te dire.

Ses yeux se perdent dans un coin de la chambre... Il murmure toujours sans même se rendre compte des mots qu'il prononce. C'était une nuit sans lune... :

-Moi, je n'ai rien dit. Et je n'ai pas compris. Je me suis contenté du désir en me disant que pour une nuit, on serait bien tous les deux... Je l'ai souillé sans m'en rendre compte.

Il ne déglutit pas, il n'a plus la nausée... Il est bien plus que vide. :

-J'ai... été aveugle.

Pardon, mais l'ironie de cette phrase m'a bien fait rire. Même le Loup Noir a un rictus en l'entendant prononcer ça. Pour dire à quel point... Nicolas inspire et expire doucement. :

-Alors ouais. Je sais de quoi je parle.

Conclusion fade d'une expérience faite de sueurs et de cendres.

Nicolas confirme dans un murmure. Sa voix m’apaise. Un simple mot qui calme mon cœur trop rapide. J’entends son reniflement. J’ai peur qu’il ait pleuré, alors je recule à peine la tête pour la relever légèrement, glissant rapidement mon regard sur le visage du Tonnerre, mais je me suis trompée, ses yeux sont secs, et mon front retrouve son torse. Puis il se remet à parler.

Il a raison. Il a douloureusement, encore raison. J’inspire profondément et laisse échapper un soupir. Il me raconte un peu, toujours en chuchotant, toujours doucement. Nos peines sont profondes, mais sa plaie est profonde, béante, alors que la mienne n’est que superficielle. Je comprends. Il s’est blessée violemment, je me suis pour le moment simplement écorchée et c’est à moi de trouver comment panser l’ouverture avant qu’elle ne s’approfondisse.

Lentement, mes bras viennent entourer le torse sur lequel ma tête était appuyée. Je ne le serre pas contre moi, mais je tente de lui donner un peu de ma chaleur, comme il m’a donné la sienne par le simple contact de nos corps.

- Tu peux encore y arriver. Je ne connais pas toute l’histoire. Je ne sais pas tout. Mais tu en es capable. Si tu sais être sincère avec toi-même, tu sauras trouver les mots. Je ne dis pas que cela sera simple. Je ne dis pas que cela sera rapide. Laisse-lui le temps de te pardonner, d’accepter que tu aies pu commettre une erreur, aussi grande ait elle été.

Une nouvelle fois, j’inspire profondément. Je sais que c’est bête de ma part de dire cela, car à ce moment-là, il me faut aussi tenter, même si je commets une erreur. Elle aussi saura me pardonner. Je commence à le saisir.

- Nous sommes humains. Nous pouvons faire des erreurs. C’est même une étape obligatoire, non ? ajouté-je avec un petit rire triste. Nous en ferons toujours, Nicolas. Surtout en tant d’handicapés sentimentaux que nous sommes, et les personnes qui nous entourent le savent.

Je redresse ma tête sans lâcher son torse et mes yeux rejoignent les siens.

- N’aie pas peur de te tromper. Tu y arriveras, peu importe le temps que cela prendra.

J’abaisse mes bras pour ensuite lever l’une de mes mains et la poser sur sa joue. Je souris, doucement mais n’ajoute rien.

Un frisson me parcourt et je grimace en laissant échapper un petit rire déçu.

- Bon cela suffit pour ce soir je crois, lâché-je en reculant d’un pas.

J’ai atteint ma dose de contact possible je pense. Et l’ambiance est carrément retombée. Quelque chose pour relancer, vite…

- J’ai une idée !

J’attrape mon ordinateur et lance une musique, My Generation de The Who – oui j’ai récemment découvert YouTube et les musiques des années 60, j’apprécie beaucoup – avant de me retourner vers Nicolas.

- Et si on relançait le Je n’ai jamais ? A mon avis, nous avons assez d’alcool dans le sang et à ajouter pour que cela soit drôle !

Un sourire hésitant étire mes lèvres. Est-ce que cela va être si simple de redonner un peu de joie à notre soirée ?

Nicolas tente de revenir. Je reviens. Perdu dans ses ombres, dans ses autres qui l'étouffent tout autant qui le font vivre, qui restent au fond de sa mémoire, dans les tiroirs de sa raison qui s'égarent, ce boulevard de souffrances et de révolutions qui suivent le fil de ces rencontres ; salvateurs, délires, catastrophes... Aria et sa bonne humeur qui s'étiole, Matheo qu'il fait souffrir autant qu'il tente de supporter la vie sans vue, Aaron heureux dans ce qu'il lui reste de famille, Tahia pas si seule mais trop, Huo son frère qui n'en est pas un, Ipiu cette tante qu'il n'a jamais eu et qu'elle n'aura jamais sans doute, Gae qu'il respecte tellement, Aoi, Oktober, Sam, Boubou, Mitsu, Ludmila, Afya,... Sa raison qui se perd et s'envole au gré des émotions des autres... Rencontres au cœur de sa rue, cette avenue de sa douleur.

Inspire. Inspire dans cette raison qui s'égare. Accroche-toi à ce qu'il te reste.

A cette Miss qui a compris que tu n'es pas bien.

Miss qui ose utiliser le verbe "aimer".

Quand toi tu ne peux l'envisager.

J'ai jamais...

"J'ai jamais" ! Perds-toi dans cette solution qu'elle t'offre, ne t'arrête jamais de sourire et de rire car c'est ce qui plaît, ce qui permet aux autres de te supporter. Inspire. Elle te donne les mêmes conseils... Qu'elle est mignonne... et se redresse soudain, comme si le contact devenait insupportable... Pour lui, non. Il ressentait mieux en touchant. Mais il ne pouvait pas trop lui en demander, pas vrai ? Il lâche un rire, complètement faux, complètement travaillé, avant d'hocher la tête sur The Who. Du classique à ses yeux. Sourire un peu plus sincère quand il retrouve un peu de ses amarres. :

-Ok. Dans ce cas, je commence ! J'te fais une fleur, j'ai pas d'idées d'habitude.

Il fait tourner l'alcool au creux de son verre.

Perd-moi. Noie-moi dans ton dérisoire jusqu'à mes moments de candeur si je ne peux m'abandonner dans ceux des autres. Les siennes...

Inspire. Clin d’œil. :

-J'ai jamais fait l'amour en dehors d'une chambre à coucher.

Oui, il tape fort dès le premier tour. Ça lui permet d'oublier, et maintenant qu'il connaît la chose, il pense être capable de relativiser un minimum l'expérience de n'importe qui.