On lui avait fait mention maintes fois de cet autre monde, où les arbres étaient en cages et les animaux des bijoux. Steppe savait pourtant à quoi s'attendre, avec l'autre visage de la terre. Mais pour sûr, on ne lui avait jamais dit que les animaux aussi y étaient en cages. Il restait devant la vitrine d'une animalerie, contemplatif, légèrement attristé. Des rongeurs couraient sur places, dans de petites roues. Il n'avait jamais vu la moitié des animaux en cages, tous aussi étranges les uns que les autres, à l'image des résidents de Terrae.  Steppe finit par choisir de rentrer dedans, pour fuir le soleil, se disait-il. Comment pourrait-il en être autrement ? Comment pourrais-t'il prendre plaisir à regarder des animaux en cages ?

La fraîcheur du lieu lui prit au nez, et il éternua. La climatisation, quoi de plus étrange que d'avoir trop froid en été et trop chaud en hiver. Il ne parvient toujours pas à s'habituer à tous ces changements contre nature pour ses sens. La courte semaine passée à Terrae lui semblait comme s'il était devenu un personnage à part entière d'une légende, où tout était magie. Tout s'emmêlait, sciences et pouvoirs, pour ne former qu'un seul enfant fantasques. Pourtant, c'était toujours bien le monde qu'il connaissait. Il plonge longuement son regard à travers la vitre, dans le ciel qui lui n'avait pas changé, pour ne pas oublier que ses pieds sont toujours sur terre... De jour, le ciel comme étoile, pour ne pas perdre son chemin. Tandis que de nuit, les étoiles comme chemin, pour se perdre dans le ciel. C'était une des maximes de sa mère qui avait le don d’apaiser les angoisses intimes de Steppe.
Les jappements d'un chiot attrapèrent l'attention volatile du petit bout d'homme. Surtout son pelage, blanc comme un navet bien cuit. Jamais Steppe encore ne s'était surprit à se demander quel goût pouvait bien avoir un animal, il n'en mangeait pas. Il ne comprenait pas pourquoi en manger. Peut-être changeait-il...

Il s'empressa de quitter l'animal du regard, dérangé. Il déambula sans but précis, et c'est alors qu'il tomba nez à nez avec ce qui lui sembla alors être le responsable de l'endroit. Un air détaché, triste, solitaire... Il devait travailler ici depuis longtemps, ce devait être le responsable. Comment ne pas s'attrister du sort de ces animaux ? Il ne devait pas avoir le choix. Bien sûr qu'il n'avait pas le choix. Personne n'aime voir un animal souffrir, et lui, il devait en voir toute la journée, des animaux souffrir. On lui avait donné un peu d'argent, il ignorait quelle quantité. Ses parents lui avaient apprit qu'il existait, dans l'autre face du monde, des gens qui respiraient une grande tristesse et qui demandaient de l'argent en compagnie d'animaux tout aussi tristes. A ne pas s'y tromper, il devait être en face d'un de ceux-ci.

"Tenez! Prenez mon argent, vous en avez besoin, n'est-ce pas ?"

Il lui tendit les quelques milliers de yens qu'il avait sur lui. Il ignorait aussi si ce serait assez, mais d'après ses parents, tout l'argent du monde ne saurait suffire à rendre heureux quelqu'un. Alors autant lui donner tout ce qu'il avait sur lui, si ça pouvait l'aider à retrouver la paix. Ou celle des animaux.

C’est un jour assez calme. Pas des nouveaux venus, pas des gens prêt à prendre sous leurs ailes un des petits habitant de l’animalerie. Quelque parts, ce n’est pas plus mal, le calme me permets de me focaliser sur certains des animaux amenées il y a peu de temps. Eux qui ont toujours en mémoire la vie dans les rues, sans jamais avoir connu un humain gentil, ou le sentiment d’être abandonné par quelqu’un à qui ils s’étaient attachées. C’est souvent le plus grand problème avec les animaux apportés à l’animalerie, le fait qu’ils soient très méfiants. C’est compréhensible, certes, mais cela rend les tentatives de leur aider plus difficiles aussi. Le second problème, c’est de ne pas laisser s’attacher à nous, les employées de l’animalerie, comme à leurs propriétaires. Si cela arrive et quelqu’un décide de les prendre, ils vont se sentir abandonnées de nouveau, et ce n’est pas le but. Le but, c’est de leur aider tout en restant distant un minimum pour qu’ils puissent être vraiment heureux quand ils retrouvent une nouvelle maison et un nouveau propriétaire. Une nouvelle famille.

C’est le fait de rester distant qui, ironiquement, me pose problème des fois. Avec des gens, cela me vient naturellement. Mais les animaux, c’est différent. Mon expérience avec Liryo n’aide pas non plus. Grâce à lui, je sais comment m’approcher des nouveaux venus, mais sachant que maintenant Liryo et moi sont des très bons amis et que je l’ai pris avec moi, il est sûr que dans mon expérience, il manque justement le recul pour que les animaux ne s’attachent pas trop. Même mon patron me l’a fait remarquer.

Cependant, en ce moment, le manque de distance n’est pas mon problème. Au contraire, la jeune chienne bien trop maigre vu sa taille me regarde d’un regard tueur et grogne alors que je tente de m’approcher d’elle. Décidemment, elle ne m’aime pas. Mais en même temps, elle n’aime personne. Je sens qu’elle va être une habitante de l’animalerie difficile à accueillir.

J’entends la sonnette de la porte sonner, signalant que quelqu’un est entré, mais je ne me précipite pas vers l’entré. En tout cas pas encore. En général, les clients probables préfèrent regarder autour dans toute tranquillité avant de demander des enseignements spécifiques, alors je me permets de me focaliser sur la chienne pour le moment. Elle grogne toujours et quand je m’approche un peu plus et tends mes mains vers elle pour lui déposer une gamelle avec la nourriture, elle tente de me mordre. Je lui esquive et recule un peu par précaution avant de lui déposer sa gamelle et retraitant un peu plus. Elle me jette un regard méfiant, puis regarde la gamelle du même regard avant que ses yeux ne reviennent sur moi. Elle ne semble pas partante pour manger ce que je lui ai donné bien que je sache qu’elle doit être affamé. Eh bien, c’est pas gagné avec elle…

"Tenez! Prenez mon argent, vous en avez besoin, n'est-ce pas ?"

Je pourrais sursauter tellement je suis surpris par ces paroles inattendues venant de nulle part, mais au lieu de ça, je cligne simplement les yeux avant de tourner la tête pour regarder celui qui a parlé. Cela doit être le client que j’ai entendu entrer tout à l’heure. Mais pourquoi il me tend son argent comme ça ? Et puis il veut dire quoi par ‘j’en ai besoin’ ? OK, il est bizarre, même pour Terrae. Ou du moins il semble bizarre, bien que je sache que c’est simplement moi qui ne le comprends pas.

« Pourquoi prendrais-je votre argent ? A moins que vous voudrez acheter un des animaux ? »

Je demande calmement, malgré le fait que je ne crois pas que cela soit ce qu’il veut. Il n’a pas la tête de quelqu’un qui vient de se décider de prendre un animal avec lui pour lui donner une nouvelle famille. En fait, plus je le regarde, plus j’ai l’impression qu’il a pitié de moi pour une raison ou une autre. Ce qui ne m’aide pas du tout à comprendre la situation, à vrai dire.

C'est étrange comme la vie peut être faite. Toi qui a pris une vie pour arriver ici, te voilà à en sauver une fois sur place. Pour une fois que tu sortais du dortoir, il a fallu tomber dessus. Tu sais pas tellement ce que c'est, comme animal. Mais c'en est un, pour sûr. Juste, de là où tu viens toi, t'en as jamais vu. Ça doit être quelque chose de typiquement japonais ? Du moins, ça ne se trouve pas dans le désert.

Mais ça saignes un peu, à une patte. Et ça n'a beau ne pas être de ton pays, tu sais bien que quand ça saignes, ce n'est pas bon. Tu n'as jamais entendu parler d'animal qui se porte bien quand il est blessé. Donc, il va mal. Superbe déduction. Il faut te pardonner, toi, tu connais que l'électronique. Et encore, pas la totalement moderne comme ici. Une mine, le Japon, pour ça.

Tu as dû parler à des gens aujourd'hui pour savoir où amener cette petite bête. Terrible épreuve mais pour un animal, tu as accepté de faire ce douloureux sacrifice. Parce que qu'importe ta difficulté face à celle de l'être entre tes bras. Tu l'as enveloppé dans ton pull pour qu'elle n'est pas froid. Ou éventuellement froid. Rappelons-nous que tu ne sais pas si ça a froid, cette bête-là.

C'est pour ça que tu es ici, à pousser cette porte d'une épaule, que tu te présentes dans cet espace qui de prime abord n'a l'air rempli que d'animaux. Flèche dans le coeur, en voyant toute ses bouilles d'amour. Tu te sens idiot avec le pauvre blessé dans tes bras. Parce qu'au moins avant, il était libre. T'hésites à repartir, à te débrouiller tout seul ou à le relâcher. Ça s'est déjà vu, des animaux qui survivent même en étant blessé ?

Tu ne sais pas. C'est ce qui fait que tu restes planté là, dans l'entrée. Puis, tu entends vaguement une voix, plus loin. T'as cru distinguer le mot "animaux" dedans. Peu étonnant, vu le lieu. Une seconde se laisse entendre un peu après. Bon, au moins, tu sais qu'il y a des gens, même qu'ils discutent. Ou essayent du moins, mais ça, tu ne peux pas le deviner.

T'avances donc, ta bestiole serrée contre toi. Tu contournes les espaces pour distinguer enfin les deux personnes. Parfait. Tu finis de t'approcher, sans trop faire attention à ce qu'il se dit, regardant plutôt ce que tu as entre les bras. Puis enfin, tu arrives à leur niveau. Ils tournent la tête vers toi. Alors, tu prend ton courage à deux mains et te lances.


Non, vraiment ? Incroyable déduction Tjay Ahmès. Ça n'avance pas grand monde.


On progresse, déjà. Tu alternes ton regard sur les deux individus, espérant de l'aide quant au nom au moins.


Tu baisses ton regard vers la petite bête. Tu le trouves mignon.


... Hein ?




[HRP : Trouvez ce que vous voulez, comme animal. J'ai trouvé ça plus drôle ainsi... 8D
Aussi, si jamais, ça se passe juste un peu avant le RP avec Ipiu, donc, pas de brûlures ou quoi, vu que je sais pas comment ça va se terminer. Je mettrais la mise en page plus tard, pas l'temps, RP. Des bisous !]

Steppe hoqueta de surprise! Il a raison, c'est blessé. L’écureuil avait fine allure, dans l'immense pull de l'homme. L'image était attendrissante, en soit. Mais Steppe ne le voyait pas de cet œil. L’œil de Steppe lui disait que s'il ne bougeait pas beaucoup, c'était parce qu'il était terrifié. Une boule de vif argent, de quelques dizaines de centimètres tout au plus. Ses deux yeux fusaient comme deux balles de revolvers fugitives, Steppe se sentit mal. Il l'apportait pour l'achever ? Il n'était pas sûr de lui. As de pique, c'était un nom de repas ? Il y avait beaucoup d'animaux ici, mais... Un rapide coup d’œil lui sembla être la confirmation de ses craintes. Aucun animal convalescent dans les alentours, ou quoi que ce soit qui en donne l'impression. Il n'était pourtant pas idiot, ou si peu. Il avait bien remarqué que l'homme était naturellement enclin à aider son prochain et autres espèces, quand il en avait les moyens. Mais sa crainte était plus forte, dans ce nouveau monde, aux nouvelles cultures. Ici, on mange les animaux.

"Vous allez le tuer pour le manger ?!!" Il mit dans la main de Kurei tout l'argent qu'il avait. "Ne le faite pas! Je m'en occuperais." Sa voix témoignait une réelle inquiétude. Il avait oublié la question de tout à l'heure, ses préoccupations étaient nouvelles. La paix intérieur du morne humain pouvaient bien attendre. Qui sait comment les deux interlocuteurs allaient prendre la nouvelle ? Mais ce n'était pas le moment d'hésiter, ce petit avait besoin de l'aide d'un homme qui aime la terre. Il planta avec détermination ses yeux dans ceux de l'homme à peau d'ébène. "Je ne te laisserais pas faire. Dit moi ce que tu veux en échange de l'écureuil ?"

Il hésita un instant... Depuis qu'il était à Terrae, quasiment tout ce qu'il disait mettait les gens mal à l'aise ou se retournait contre lui. Peut-être cette fois aussi, serait-ce le cas... ? Peut-être que cette fois-ci, il serait bien d'insister, pour en avoir le cœur propre. Si ce n'est pas aujourd'hui, ce ne sera jamais. Car la vie d'un petit en dépendait.

"J'ai TOUJOURS aimé les écureuils." Outre l'insistance marqué sur toujours, il lançait le regard le plus sincère et le plus candide qu'un navet des champs puisse lancer. Il était confiant, personne n'allait faire du mal à ce petit tant qu'il sera là. Il se risqua même à un demi sourire, maladroit, pour mettre ses interlocuteurs en confiance. Et pourtant, tout le monde sait qu'un navet, ça ne sourit pas. Ils ont sûrement leurs raisons, d'ailleurs.

J’entends la sonnette de la porte sonner à nouveau. Eh bien, il n’y avait personne toute la journée et c’est maintenant qu’ils arrivent tous ? Mais nom de Dieu, les gens ne peuvent pas apprendre à arriver un par un au fil de la journée ? Bien sûr que non, ils préfèrent arriver tous en même temps. Et après ils se plaignent comme quoi ceux qui travaillent ici ne sont pas libres pour leur aider.

Le nouveau client nous retrouve et approche, expliquant sa raison d’être venu même avant que l’autre jeune homme ne puisse répondre à ma question. Ou peut-être il ne s’attendait pas à ce que je lui pose une telle question et il ne sait pas quoi répondre ? Enfin bref, peu importe. Je décide vite que le second nouveau venu est plus important, vu qu’il a amené un animal blessé.

« Enlevez votre pull un peu, s’il vous plaît, pour que je puisse le regarder. »

Une fois l’animal dans mon champ de vue, je remarque que c’en est un dont on ne s’occupe pas ici normalement, puisque ce n’est pas un animal domestique.

« On l’appelle pteromys momonga. Ou tout simplement écureuil volant. »

Je réponds à la question du jeune homme à peau curieusement bicolore. Mon attention reste sur le petit, ceci dit. Normalement, les écureuils sont pleines de vie, rapides et n’apprécient pas trop les tentatives d’approche. Elles s’échappent encore plus vite et plus tôt que Liryo. Si celui-là reste dans les bras du jeune homme et se laisse faire, ça veut dire qu’il a vraiment très mal. Ça n’a pas l’air bon du tout…

« Laissez-moi le voir, je vais voir ce que je peux faire… »

"Vous allez le tuer pour le manger ?!!"

Je tends mes bras pour prendre l’écureuil et l’examiner, mais au lieu de l’animal, je me reçois de l’argent de l’autre jeune homme présent.

"Ne le faite pas! Je m'en occuperais."

Ouh là, c’est quoi cette réaction ? Et puis, qui a dit quoi que ce soit de manger le pauvre petit ? Déjà de base, à ce que je sache, des écureuils ne se mangent pas. Au moins pas par les humains. Et même si ce n’était pas le cas, moi, j’en mangerait pas. Mais apparemment je n’ai pas l’air de quelqu’un qui aime bien les animaux aux yeux du jeune homme. Surtout qu’il continue à parler comme si j’avais déjà affirmé qu’effectivement, je vais tuer le pauvre écureuil. Secouant légèrement la tête, je luis rends son argent et lui parle calmement, essayant de le rassurer. Sa peur pour le petit et bien sans appui, après tout, bien que je suis certain qu’il en pense le contraire.

« Clamez-vous, je ne vais pas le tuer. Au contraire, j’ai l’intention de voir si je peux le soigner. »

Je crois que c’est la première fois que ma façon d’être, le fait que je ne montre pas ce que je pense et ressens, est pour une fois pratique. Au moins je ne m’importe pas, j’ai toute la patiente qu’il faut pour gérer le jeune homme bizarre. Enfin, je crois. On verra bien. D’abord, faut s’occuper du petit. Cette fois-ci, je ne tente pas de le récupérer. Au lieu de ça, je me dirige vers une des tables près de nous où je pourrais examiner calmement le petit et où les deux autres pourront me regarder sur les mains. Surtout celui qui pense que j’ai envie de tuer le pauvre rongeur.

« Venez, posez-le ici. Je vais voir ce qu’il a et si je peux faire quoi que ce soit. »