J'ai simplement envoyé un SMS. Pour la prévenir que j'arrivais. Et m'assurer que Lys n'était pas dans les parages. Un truc sobre. J'ai pas dormi de la nuit. J'ai pas bu, non plus. Pas fumé. Enfin. Quelques cigarettes. J'ai peur. Peur de me tromper. Peur de regretter. Peur de la blesser. Parce que je l'aime. Mais je ne l'aime pas. Je tiens à elle. Beaucoup. Mais je ne suis pas amoureux. Je sens que je vais pleurer. Mais j'ai prévu des mouchoirs. Ça va être rapide. J'espère. Comme un pansement que l'on retire. Des marches. Encore des marches. Pour la dernière fois avant un bon moment, je monte au 3ème étage de l'institut. J'aurais trop peur de la croiser. De la faire encore plus pleurer. Parce qu'elle va pleurer, nan? J'aimerais bien qu'elle ne pleure pas. Ça serait plus simple. Beaucoup, beaucoup plus simple.

Me voilà enfin devant la porte. J'ai pris mon temps. Mon cœur bat si fort. Je suis à deux doigts de paniquer. Mais c'est le moment de ma vie où je dois maintenant assumer mes actes. J'avais des doutes sur mes sentiments. Et je l'ai trompé. Ça n'excuse rien. Maintenant je dois assumer. Assumer le fait de m'être trompé. D'avoir espéré. D'avoir dit des choses qui au final ne sont que des mensonges. Je frappe à la porte, comme d'habitude. Et j'attends qu'elle vienne m'ouvrir... Je suis stupide. Elle va ouvrir, comme d'habitude, et elle va vouloir m'embrasser. Comme d'habitude quand je viens frapper. Et comme j'ai demandé si Lys était bien absente, peut-être qu'elle sera très peu couverte... Je. Bordel. Faites qu'elle soit habillée, s'il vous plaît. Ne rendez pas ça plus difficile.

La clé tourne dans la serrure, et j'inspire une dernière fois.

Mon portable vivre, affichant l'adorable bouille de Tifa. Un Message de Riki. Du coup j'attends pas un seul instant pour lire le contenu. Apparemment, il veut passer me voir, si Lys est pas dans les parages. Mouhahaha! Devrais-je me sentir flattée? J'en sais rien, mais un peu de ménage et de l'air frais, en revanche, ferait le plus grand bien à ce logement de fumeurs. Je vide les cendars, jette le paquet de chips, retend vaguement la couette sur le lit et enfin passe un coup de balais pour virer les miettes de mon dernier snack.

J'ai passé le début de journée à pantouflé en pantalon de survêt' et en T-shirt. Je prend donc le temps de remplacer le premier par un jean et d'allumer de l'encens avant d'attendre sagement, quoi qu'un peu impatiente, des nouvelles du monsieur. Bizarrement, je guette les bruits de pas dans le couloirs. T'a un problème, meuf. Je lance donc un peu de musique sur le pc, Weezer pour pas changer. Bien entendu, je monte pas trop le son, bien que l'envie de m'en manque pas, histoire d'entendre on frappera.

Un nombre incertain de morceau plus tard, j'entends le bois de ma porte retentir sous le martèlement de phalanges. Comme une flèche, je file ouvrir. Sans surprise, je trouve Erik, sa bouille de blondinet aux yeux bleus barrés par quelques tourments qu'il ne peut me dissimuler. Je le tire par le bras à l'intérieur, braque mon regard dans le sien avant de le tirer dans mes bras, je sais pas ce qu'il a et immédiatement, j'ai pas bien meilleur réconfort à lui offrir que ma personne et mon attention.

"Tu en tires une de ces tronches Riki. Il s'est passé un truc?"

Ma gorge est un peu serrée, la vie et une chienne, ici comme ailleurs. Un animal écrasé, un accident un truc, n'importe quoi. Du coup, le temps qu'il se décide à parler, moi je m'empêche de me faire des films.

"Tu veux un truc, à boire, à manger?"

M'occuper de lui est un bon début je suppose, je l'invite donc à s'installer comme chez lui, le place dans le fauteuil et allume la cafetière. On est un peu pareil là dessus, du coup j'anticipe au cas où et en profite pour m'en faire couler un mug.

Elle est habillée, c'est déjà une petite victoire, en soit. Enfin, ça c'est ce que j'aurais pu penser si elle ne m'avait pas prise dans ses bras immédiatement après avoir ouvert la porte, et après s'être rendue compte que ça allait pas fort. Forcément que ça ne va pas fort...

"Ouaip, comme tu dis."

Soit j'ai pas parlé assez fort, soit elle a pas entendu, soit elle m'ignore. Dans tous les cas, elle me traîne par la main jusqu'au fauteuil, le sacro-saint fauteuil réservé habituellement à la Reine quand elle glande pas au milieu de sa pile de coussins et d'oreillers. Mphf.

"Je euh. Juste un café, s'il te plaît. Je compte pas rester très longtemps, de toute façon."

C'est tellement compliqué, comme situation. Je ne sais pas comment m'y prendre, moi, et c'est pas toutes les séries que j'ai vu qui vont m'aider... Je ne peux m'empêcher de triturer mes mains dans tous les sens pendant que le café coule dans les mugs, lentement, mais j'attends qu'elle soit en face de moi pour ouvrir la bouche à nouveau. Bouche asséchée par le stress, au passage. Mais le café est trop chaud pour y remédier, alors j'utilise discrètement mes pouvoirs pour créer un peu d'eau dans ma bouche et l'avaler. Le regard d'Abe se fait plus insistant, plus curieux. J'ai pris ma décision, mais pourtant j'hésite. Ça serait si simple de faire comme si de rien n'était. De continuer à lui dire je t'aime alors que c'est faux. Non. Il faut que j'assume.

Je redresse ma tête vers la jeune Air, cherchant son regard, que je n'ai aucun mal à capter, et je me lance.

"Je sais pas vraiment comment te dire ça. Je. Mh. Je crois que je ne t'aime pas. Voilà. Je ne t'aime pas, et je ne t'ai jamais aimé. J'ai beaucoup d'affection, beaucoup d'attirance pour toi, aussi, mais... Je ne suis pas amoureux de toi."

Je n'arrive pas à maintenir mon regard dans le sien plus longtemps. Pourtant, je retiens mes larmes. Je n'ai pas le droit de pleurer. Et il faut que je finisse rapidement de dire ce que j'ai à dire. Avant qu'elle ne puisse vraiment réagir, j'enchaîne.

"Je ne suis pas amoureux de toi, et c'est pour ça que j'aimerais que nous ne sortions plus ensemble."

"J'aimerais qu'on reste amis." Ça, je le garde pour moi. C'est sans doute trop. Mes mains, jointes, tremblent légèrement, et mon regard fini par s'humidifier légèrement. Mais je tiens bon.

"Voilà."

Bon, il est clair que Monsieur n'est pas dans ses pompes. Il a la mine basse, l'air hésitant (enfin plus qu'à l'habitude) et j'ai presque l'impression de le tirer de force jusqu'au fauteuil. Un peu plus et je me dis qu'il a absolument aucune envie d'être là et il le confirmer de lui-même, sa visite va être brève et pour ne pas aidé, il semble déterminé a attendre que j'ai fini de bricoler dans mon coin pour m'adresser la parole. Une angoisse sourde commence à naître dans ma gorge.Tu connais cette attitude, ce ton.

Je m’appuie donc des fesses sur le plan de travail et reporte mon attention sur Erik, cherchant à capter ce qu'il va dire dans son regard. Quand enfin je rencontre ses yeux, alors que je lui propose un sourire mal assuré. Mon café, dans sa tasse craint sans doute pour sa sécurité car il danse dans son mug alors que j'encaisse les mots qui me sont adressés.

Bizarrement, j'ai presque l'impression d'un certains détachement, comme si je constatais de l'extérieur la brûlure dans ma poitrine, ma gorge qui ne laisse passer que de l'air et mon estomac qui tente de forcer le passage vers le haut. Pour sécuriser ma tasse, et fuir un peu la confrontation, je me tourne vers le plan de travail, pose le contenant et m'appuie dessus. Je reste ainsi un instant et me retourne vers lui. J'ai besoin de savoir pourquoi. Pourtant, le "voilà" m'enflamme, comme si c'était un simple constat, que ça n'impliquait rien de plus.

"Je suppose que tu es bien sûr de toi pour venir me le présenter comme ça. Je peux me permettre de te demander ce qui t'a permis d'obtenir cette "fabuleuse" révélation?'

Je voulais juste poser une question! Pas laisser échapper mon amertume.... Est-ce bien vrai? Je me retourne vers lui, pas une larme, pas un sourire non plus. je souffre, c'est convenu et pourtant pas une larme. Je suis hors de moi et pourtant je grince pas des dents. Je l'aime et j'ai envie de le voir partir.

"Et donc tu as fini par céder à une de tes nombreuses admiratrices? En même temps, qui peut résister à monsieur la barman attentionné. C'est un peu comme ça que je me suis fait prendre après tout."

J'aime pas mon ton, il est acerbe, incisif. Je fini par lui lâcher avec un haussement d'épaule.

"Bah écoute, promotion spéciale d'humanisme aujourd'hui. Chacun étant libre de chercher de bonheur, si nous ça te convient pas, je vais pas te forcer. D'autres corrections de ta vie qu'il faudrait effectuer pour que tu te sentes mieux?"

ça sent le sarcasme non? En tout cas, j'attends tout ouïe ce qu'il a à me répondre.

Au fur et à mesure que je parle, je la vois qui se tend, se raidit. Jusqu'à me tourner le dos et empoigner le plan de travail. Voilà. La réponse ne se fait pas attendre longtemps. Et elle est amère. Douloureuse. Puis elle se tourne vers moi. C'est une question. À laquelle je ne sais pas vraiment quoi répondre. Je peux lire la colère, la peine dans ses yeux. Alors j'essaie de faire l'effort, de retenir mes larmes. J'y arrive. Mais les mots passent difficilement mes lèvres.

"Je... Euh... Je me suis simplement rendu compte que... Comment dire ... J'ai envie de d'autres filles, pas juste de toi..."

Elle enchaîne sur le même ton, je ne sais même pas si elle a entendu ou écouté ce que j'ai dit. Mais ça fait mal. Je pensais pas qu'elle pouvait réagir comme ça. Mais de toute façon. Je ne l'aime pas. Alors il faut que je mette fin à notre relation. Aussi pénible et douloureux que ça soit. Pourtant, j'ai envie de la rassurer, de la prendre dans mes bras... Ce qu'elle dit c'est méchant. Cruel. Mais en même temps... Elle a raison. J'allais la tromper, si Elisha ne m'avait pas arrêté. À moins qu'embrasser c'était déjà tromper?

"J'ai pas d'admiratrice. Dis pas des trucs comme ça. Je me suis juste rendu compte que j'étais pas amoureux, malgré toute l'affection que j'ai pour toi..."

Cette fois si, les mots sortent de manière fluide, sous le coup de l'énervement. Parce que oui, son ton ne me plaît pas. Même si elle a ses raisons. Même si j'ai grave déconné. Ça me plaît pas. Pourtant elle continue. Pourquoi. Arrête... J'esquisse un sourire triste en essayant de garder mon calme. Cet air accusateur. Pourquoi. ma voix se fait plus sourde, presque menaçante, mais je garde mon sang froid.

"Non. C'est bon. Merci pour le café."

Il en reste la moitié dans la tasse. Mais tant pis. Je me lève, lui faisant face. Un instant, j'envisage de la prendre dans mes bras. Mes yeux sont toujours humides, mais j'ai décidé de ne pas pleurer. Pas encore. Quand je serais loin d'elle. Quand je regretterai. Mais pas maintenant.

"Si tu n'as rien de désagréable à ajouter, je vais y aller. Et. Une dernière fois. Je tiens à toi, et à ton amitié."

Puis je tourne les talons, me dirigeant vers la porte d'entrée. Vers ma porte de sortie.

"Ah...."

Il me semble m'être déjà dit que l'honnêteté pouvait être désarmante. Une vérité si simple que j'ai pourtant bien du mal à entendre. Je me sens blessée, l'orgueil frappé en son centre d'une direct de l'aveu.
Ma mine de sel à dû s'effondrer sur lui, car il est maintenant un peu sur la défensive, il se protège de mon amertume.Il fait bien. Mais il fait erreur quelque part et étrangement, je me sens un peu chagrine à cette idée. L'entendre parler d'affection m'étrangle, je trouve même pas le courage de protester. Je me sentais spéciale dans ses bras. C'était p'têt pas justifier finalement.

Il fini par s'affranchir de son café, et se redresse pour partir. Me faisant face un instant, je cherche ses yeux. Ce regard dans lequel je me suis oublié cette année. Il est triste, ses yeux sont embués. Alors pourquoi putain? J'te suis pas!

Alors qu'il tourne les talons, j'ai juste envie de jouer les demoiselles en détresse, de tirer sa manche et me blottir contre lui, me réfugier contre son torse, l'entendre me dire que tout va bien. Mais je m'y refuse. Par contre, je lui dois la vérité. Avant qu'il arrive à la porte je lui lance :

"Tu as tort. Tu as bien une admiratrice. T'es un gars généreux, honnête à en crever de bêtise. Sans déc' tu me donnes envie de me taper la tête contre les murs des fois. Mais j'adore ça."

Loin de me soulager, les mes pensées qui filtrent entre mes lèvres emportent avec elles la force de mes jambes. Je me laisse glisser au sol pour m'adosser au plan de travail et me tire une cigarette que j'allume avec le briquet à l'intérieur du paquet.

"C'est une première pour moi aussi. Je sais pas comment gérer ça. Tu m'as apporté tellement, j'crois pas avoir été aussi heureuse que cette année. J'pensais pouvoir t'en rendre suffisamment."

Ah, de l'eau sur ma clope. Je pleure. Merci de m'avoir prévenu le cerveau.

" Je t'aime Erik. Et je vais avoir du mal. Je sais pas à quoi cela dit. Vas y file. J'suis pas sûr que t'ai envie de voir la suite."

Gage-dé avant que le barrage ne cède, esquinté comme il l'est par cette stupide honnêteté que je pense lui devoir. Par pitié mec.

Je me fige, la main à quelques centimètres seulement de la poignée. Son ton a changé, et ça m'empêche de sortir. Parce qu'elle est plus calme. Et parce que ses mots, que je mets une poignée de secondes à comprendre, me touchent. Cependant, je reste silencieux. Mon corps tout entier et paralysé. À l'image de mes doigts au dessus de la poignée de la porte, je n'arrive pas à ouvrir la bouche. Et elle continue de parler, après un bruit que j'identifie comme celui d'un corps glissant contre un mur, puis un autre, de briquet. Cependant, je n'ose toujours pas me retourner. Peut être par peur, je sais pas. Je suis incapable de penser correctement. Puis elle m'achève, en prononçant ces quelques mots que j'ai déjà entendu, plein de fois. C'est mots que je n'entendrais plus jamais venant d'elle. Qui me touchent, mais qui finissent de m'achever. Deux énormes larmes roulent sur mes joues, finissant leur course sur le sol, et ma main termine de franchir la distance qui la séparait de la porte, que je tire, et que je franchis d'un pas.

Je suis arrêté dans le couloir, devant la chambre de celle qui est maintenant mon ex petite amie. La porte est encore entrouverte. Plein de choses se bousculent dans mon esprit, et j'agis plus par instinct que de manière réfléchie. Alors je me retourne et pousse légèrement la porte, en regardant le sol pour préserver l'intimité d'Abe, pour qu'elle puisse continuer de sangloter tranquillement, et je m'adresse à elle calmement, un sourire franc sur le visage.

"J'étais heureux, moi aussi. Et j'ai passé une très bonne année en étant ton petit copain. Alors merci pour ça."

Je m'arrête un instant, cherchant mes mots, cette fois ci, et je chasse une larme de ma joue d'un revers de la main avant de continuer.

"Je- ... Je vais avoir du mal aussi. Mais je préfère être honnête avec toi et qu'on en reste là plutôt que de t'imposer une longue dégradation de notre relation. Parce que tu aurais fini par t'en rendre compte. Et je n'ai pas envie de te mentir. Vraiment je... Je tiens trop à toi pour avoir envie de t'imposer ça. Et... À bientôt, j'espère."

Un dernier sourire, et je recule, laissant finalement la porte se clore, comme un point final à notre relation. Je l'ai blessé. Elle pleure. Mais je ne peux pas la réconforter. Ça serait trop malvenu. Maladroitement, toujours debout sur le pas de la porte, je sors mon téléphone portable et j'adresse un message à Lys.

Ta colocataire a besoin de toi. Je suis désolé

J'efface les derniers mots que j'ai tapé de manière hésitante. Non. Ça aussi, je crois que ça serait malvenu.

J'expire. Presque une minute s'est écoulée depuis que j'ai envoyé le SMS. Et enfin, je me mets en marche vers. Vers je sais pas où. Vers loin d'ici, loin de la peine que j'ai causé. Je suis sincèrement désolé, Aby.

La porte s'ouvre et Erik entame sa fuite. Il prend pourtant le temps de l'écouter, de me répondre. C'est plus fort que moi, je craque. Loin de me soulager, l'entendre dire qu'il a était heureux transforme mes pleures en sanglots. J'ai du mal à y prêter fois. J'ai du mal à comprendre, si ça allait bien, pourquoi? Une part de moi tente bien de me convaincre de lui hurler d'arrêter de penser avec sa queux, que ce que l'on a est précieux.

"Mais on voit pas la chose de la même façon." Me dis-je à moi-même, constatant le fossé que vient de se creuser entre nous.

Dégageant mes yeux de leur humidité, je lève la tête et aperçois Riki, à travers l'ouverture. Il pleure et me dit qu'il veut pas que je douille, que je suis importante pour lui. Alors pourquoi tu me fais ça gros? Pourquoi tu m'en as pas parlé avant de me quitter? Genre autrement que le fait accompli ! je grimace un peu à la sensation des ongles qui se crispe dans mon bras alors qu'il me laisse seul, le souffle court et la nausée aux lèvres.

Même pas foutue de rager correctement.

Je sens mon téléphone vibrer dans ma poche. Machinalement, bêtement, je le débloque pour vérifier le contenu du message. Erreur de débutant puisque qu'il me faut plus de cinq minutes pour survivre à mon fond d'écran.

Lys ,Erik et moi autour d'un feu de camp, un squelette de cabane dans perdu dans la pénombre des bois derrière nous. Putain.

J'ai bien fait, hein? Oui. L’auto-persuasion en cas de doute, il y a que ça de vrai. J'ai bien fait. Après tout, entre les lèvres d'Abe et celles d'Elisha, il n'y avait eu aucune différence. Je renifle et j'allonge mes enjambées en même temps. Je n'ai pas envie que quelqu'un me voit dans cet état. J'ai pas envie que quelqu'un me pose de question, surtout. De toute façon, là, le premier qui m'adresse la parole il va regretter. Pourquoi est ce que je suis autant énervé. Pourquoi est ce que je suis autant en colère. Contre qui. Contre moi? Pourtant, j'ai fait ce qu'il fallait... La main un peu tremblante, je sors une cigarette de son paquet, et je l'allume au milieu du couloir. Au pire, si ça déclenche l'alarme incendie et les trucs automatiques là, on verra pas que je pleure. Peut-être que j'aurais dû la consoler? Non. Vraiment, ç'aurait été la pire des choses à faire. J'inspire une grande bouffée de fumée. Elle est où, la salle d'entraînement, déjà? Je vais aller me défouler un coup. Un bon gros coup. Genre jusqu'à ce que j'ai trop faim pour continuer. Me changer les idées. Fuir mes interrogations qui de toute façon vont se transformer en regrets. Mais j'ai bien fait. Je ne l'aimait pas. Plus. Je sais pas. Mais de toute façon j'ai pris ma décision. Mais. Mais. Beaucoup de mais. Pourtant, j'y ai réfléchit... Pourquoi la voir dans cet état là ça compliquait tout? À quoi est ce que je m'attendais bordel... Une autre taffe et je sors enfin du batiment. Il y avait du monde que je connaissais, dans la salle d'entraînement. Aucune envie d'affronter ça. Pas envie d'imposer ça, non plus. À personne. Pas même Tifa. La maison c'est mort, Ipiu va me sentir arriver à 200 mètres. Je vais aller faire une balade en forêt. Et y rester jusqu'à ce que je sois en état d'affronter le reste du monde. J'ai même pas envie de boire, ou de fumer. J'ai l'impression de pas avoir le droit. Me faire oublier pour le reste de la journée, c'est le bon plan. Tant pis pour le boulot ce soir. Un sms au patron pour lui dire que je suis malade, et je coupe le téléphone.

[...]

J'ai pas trouvé de réponses à mes questions. J'ai juste honte de moi, de mon comportement. J'ai honte de l'avoir fait pleurer. De la faire pleurer, peut-être, même. Adossé à un arbre, je regarde les dernières étoiles disparaître lentement du ciel pour laisser place aux premiers rayons de soleil. Il faut que je bouge. Je dois filer un coup de main à Onee-chan. Elle a pas à subir la répercussion de mes actions. Si j'allume pas mon portable je pourrais juste dire qu'il avait plus de batterie et puis voilà... Elle va le sentir direct. Mais avec un peu de chance elle essaiera pas d'en parler, si elle voit que j'ai pas envie. Enfin, il faudra bien que je la mette au courant à un moment. Plus tard. C'est pas le moment.

Je me sens effroyablement seule. C'est injuste mais j'ai le sentiment qu'Erik m'a abandonné. Je pensais, bêtement, qu'il ne me ferait jamais souffrir. C'est beaucoup attendre d'une personne quand on y pense et c'est peut-être pour ça qu'il a raison et que c'est une bonne chose. On était bien, mais est-ce qu'on s'épanouissait l'un avec l'autre?

Cette pensée me vole quelques larmes de plus, retardant bien d'avantage encore le moment où je parviens à me redresser. Ma cigarette est un souvenir aussi je vais allumer son cousin qui fait sourire. Du frigo je sors ma bouteille de manzana et quelques shooter que je dispose à portée du canapé et fonce lancer Brave Heart. Un mort un shooter. Je sors donc ma bouteille de secours. D'ici 228 minutes, version longue oblige, j'aurai oublié cette journée, mon prénom et peut-être même d'aller vomir aux toilettes.

Bon, en fait non. Je change de film. Le héros qui perd sa femme tout ça tout ça. J'ai craqué et il m'a fallut pas mal de boisson pour le faire passer. Okay, éviter les histoires d'amours pendant un moment... Un film sans romance.... Putain c'est pas facile cette merde. Sur lequel je peux me faire un jeu de boisson con...

Rasta Rocket ! Internet me fournit une poignée de règle et je fonce donc noyer mon chagrin devant une bonne comédie....

Plusieurs fois au cours du film, je regarde mon téléphone. J'ai envie qu'il m'envoie un message. Qu'il me dise qu'on l'a forcé à le faire, qu'il s'est trompé, qu'il était ivre ! Peu importe le motif, j'pourrai oublier et faire comme si de rien ne s'était passer.

J'm'endors sans voir le message, le fond de la deuxième bouteille ou même la fin du film. Ya bien trop cul de joint dans le cendrier et pas mal d'alcool dans mes veines, la machine à trouver de quoi s'enrayer.