Un truc me réveille. Je sais pas quoi. Ma tête pèse une blinde, ma bouche est sèche et mon estomac se retrouve partagé entre appétit intense et nausée grandissante le tout sur fond d'acouphènes. D'instinct, je tends la main vers le lieu supposé de ma bouteille de manzana. Pour ma plus grande surprise, accompagnée d'un couinement grave et infâme de gens ivres, une main attrape mon bras et me tire vers le haut, faisant par la même tourner le monde autour de moi. J'essaie d'ouvrir les yeux mais je me ravise un instant, ceux ci sont blessés par la lumière, pourtant faible, de la pièce. Un second essaie et je découvre la moue inquiète de Lys. Je lâche pâteusement :

"Hey."

sur la table, je découvre de l'eau. je fais un rapide aller-retour entre le verre et la demoiselle, comprenant rapidement le lien de cause à effet et m'en saisie pour le boire d'un traite avant de m'éclaircir la gorge, un peu grippé par le tabac.Et pas que.

Tient... le film tourne toujours.

"Tu rentres tôt dis-moi?"

Et c'est bizarre. Lys est plutôt sérieuse au boulot. Sauf si... Il aurait pas fait ça quand même? Dans le doute, je cherche mon téléphone, que je trouve enfoncé dans le canapé et constate, après avoir esquivé mon fond d'écran que j'ai des appels ratés de Ma Reine.

"Désolé pour ça.... Comme tu peux le voir, je m'étais dévoué à une tout autre activité. Tu veux jouer? C'est facile, un à chaque accident, une gorgée à chaque fois que les mots "Glace" "bobsleigh" ou "Sanka" sont prononcés. Un vrai défi d'endurance si tu me demandes."

Dans le doute, tu joues au chien con. Peut être qu'elle avait besoin de me dire un truc. Comme ça tu vas continuer à ignorer ton problème.

"Tu roules?"

Diversion.T'es consciente que tu as encore les traces de sel sur ton visages? Lol.

J'adore Lys, sa franchise, son honnêteté, sa générosité et tout ça. Pourtant je peux pas me retenir de la maudire un peu dans ma tête de ramener Riki sur le tapis. Respirons un coup, on ravale le sel des yeux et on se contente de noter que le crétin a jouer les lanceurs d'alertes en oubliant que Lys se faisait de soucis pour les gens. Son sourire me semble presque triste tant il est doux alors qu'elle souligne les inquiétudes qu'elle a conçu à mon égard. Qu'est-ce que je disais? Ma Reine, c'est un diamant brut. Je murmure ma contrition :

"Encore pardon ! Avec le mal qu'il s'est donné pour passer en ton absence, je pensais pas qu'il te préviendrait."

Puis va savoir ce qu'il lui a dit exactement.... Il en faut pour ramener deux Lys d'un coup. Ah oui le film, les joints la boisson, le jeu et la... non rien. Mon cerveau trouve rapidement une distraction quand je constate que effectivement, de l'air frais et vicieusement pur pénètre dans la pièce.

"Mais! C'était le but meuf. L'aquarium, tu t'enfumes la tronche tel une blatte. La dératisation de tes neurones. C'est à peine si tu réalises que tu comprends que t'es stone ."

J'ai dû m'égarer quelque part dans l'explication parce que ça me semble aussi clair que mon esprit. Ou la pièce. Ou le contenue de mon verre. Pourquoi le contenu de mon verre est marron? Qu'ai-je foutu? Des clopes qui aurait infusé dans du rhum? J'éluciderai ce mystère une autre fois. apparemment Lys n'a pas l'ensemble des informations ou elle me travaille comme un flic en garde à vue. Ou alors mon sentiment de détresse vient d'ailleurs. Je désigne du doigt le mug à peine entamé que j'ai pas rangé après qu'elle m'eut tiré les vers du nez d'un marque d'affection de ma tête.

"Riki est passé me voir. Il voulait parler de choses importantes."

Me saisissant de l'alcool de pomme et d'un shooter je m'en sers une rasade, la bois, rempli le verre à nouveau et reprend.

"Mais la question a été vite pliée et il est parti."

J'ai pas trop envie de le dire à voix haute. J'ai la sensation que ma voix va se briser si je le fais. Je préfère prendre une moue faussement boudeuse et regarder Lys pour lui lâcher sur le ton d'une peluche en guimauve :

"Tu slack !"

Elle s'est même pas mise à l'ouvrage ouesh! Je décide de vider mon second shooter en signe de protestation. Avant de tapoter la barre espace du pc pour relancer le film. Je baisse cependant le son. Je sais que j'vais pas échapper à l'attention de Lys. J'en ai pas vraiment envie de toutes façons.

"J'crois que j'étais vraiment amoureuse...."

C'est bien la première fois que je me marre pas devant "un Sanka t'es mort?".... Shooter quand même. J'en remplie un pour Lys au passage.

Je me sentais un peu comme de la merde, j'avoue que me sentir infantiliser ça aide pas. Je sais que c'est pas du tout son intention, mais j'arrive pas à me cribler de positivisme. Impossible. Ça m'empêche pas de rejeter en bloc cette sensation et de plutôt m'atteler à rassurer les deux beaux yeux inquiets qui me couvent.

"Promis, je ferai attention. J'ai pas l'intention de finir aussi bêtement. Je veux au moins une statue à mon effigie dans toutes les capitales du monde avant de me laisser un jour partir."

Essayer d'être léger et désinvolte. essayer de faire que tout aille bien, c'est ce à quoi je m'attache pendant que je digère la rappel des faits. Je me fais littéralement pelucher et je me laisse faire, m'enfonçant profondément dans les bras de Lys. Ma tête calée contre son épaule, je réceptionne et allume le joint alors qu'elle referme son étreinte sur moi, m'incitant à vider mon sac. Mais je sais pas trop ce que j'ai à vider en fait. Je tire de longue taffes avant de le tendre à Lys.

"Je comprends pas. J'pensais que tout allait bien... J'me suis bien maquillé comme il fallait, je faisais attention à pas l'écraser, j'faisais en sorte d'être exemplaire juste pour pas qu'il s'inquiète jamais pour moi... Et il me regardait si...."

J'aimai sme sentir spécial sous son regard. L'entendre murmurer mon nom. Je me pelotonne un peu plus contre Lys et la regarde dans les yeux avec un demi sourire un peu crétin :

"J'crois que j'vais sangloter pendant une ou deux minutes si t'y vois pas d'inconvénient. Fait comme si de rien était, j'irai noyer ça dès que je peux tenir un verre."

Intuitivement, je m'accroche à ses vêtements quand je viens chercher refuge dans ses cheveux. Je me sens toujours en sécurité près d'elle. Faut dire avec l'entrainement que l'autre barbare lui fait subir, c'est pas surprenant. J'm'attends bientôt à la voir boxer des ours moi. Oui j'essaie de pas trop penser alors que mes joues ruissellent et et que je trempe le haut de ma protectrice. Faut pas s'encombrer de questions superflues. Quelques minutes de retard sur le planning, mais entre deux reniflement, je parviens quand même à lui demander, après avoir chipper le joint :

"E.. Et toi? ça va? ta journée?"

C'est possiblement un peu laborieux niveau phrasé mais l'intention y est. La tentative de diversion aussi.

Chose étrange, le regard et la voix de Lys parviennent presque à me convaincre qu'elle fera de sa blague une réalité si elle en ressentait suffisamment l'envie. Faut dire, c'est pas le sens de la mesure qui nous étouffe. en prime, elle parvient presque à me faire rire.

"Puis ça serait le moment d'étendre ton royaume à ces dites étoiles, ma Reine."

Le carcan protecteur de ses bras m'enserre d'avantage alors que je me laisse aller à parler. Sa réponse m'aurait fait sourire en d'autre circonstance. Oui, ma Reine est une femme qui sait ce qu'elle veut. Un peu incorrigible sur les bords, j'adore.

Sauf que c'est pas là dessus que mon cerveau accroche, cmais sur le mot "Trésor". Instinct de rapine? peut-être.... Et la voilà qui ignore parfaitement ma question sur sa personne pour me couvrir d'un élan d'affection de compassion alors qu'elle m'installe sur elle, vautrées ensemble dans le canap', ma tête sur son torse, sa main dans ma tignasse alors que sa déclaration me réchauffe le cœur, pratiquement littéralement.

Parce qu'elle imagine un seule seconde que je pourrais ne plus vouloir d'elle dans ma vie?  Je me redresse en m’appuyant sur mon bras droit pour pouvoir la regarder en face, sans que sa (sublime) poitrine ne me cache ma coloc.

"Tu sais, je sais pas ce que j'ai fait dans cette vie pour avoir le droit d'avoir une personne aussi généreuse près de moi et surtout avec moi. Je suis sincèrement reconnaissant à l'univers, Dieu ou quelque soit la force supérieure ou pas qui a fait en sorte que nos chemins se croisent. Tu es douce et patiente, tu éclipses les astres de ton sourire. Peu importe ce que tu en penses, j'me suis pas encore montré à la hauteur de ton amitié ma Lys. " Je lui montre la bague qu'elle m'a offert il y a quelques mois de cela. " Mais je vais changer ça. Le trésor d'une Reine ne saurait lui faire défaut."

Je lui tire la langue pour essayer de montrer des signes d'améliorations de mon état. bon avec les yeux rougis et la voix un peu cassée ça doit rendre moins bien que dans mon esprit, mais l'idée y est.

"Merci de faire partie de ma vie, Lys."

[Hrp : ~ ._. *tousse* ]

Je lâche un léger soupir, un sourire qui se veut doux étirant mes lèvres. Je l'observe un instant, redressée pour me faire face. Ses yeux gonflés par la fume et les pleurs ; ses joues rougies et striées de traces de sel ; ses cheveux qui partent dans tous les sens en petits épis cuivrés. Elle dit que j'éclipse les astres de mon sourire. Mais du coup, pourquoi je la vois encore ?
Mon sourire s'agrandit un peu plus quand elle me montre cette fameuse bague et je rougis malgré moi.

" Merci de faire partie de ma vie, Lys. "

Je rigole et replace son atebas avec délicatesse.

" Si je te disais que c'était un peu intéressé ? "

Ma main se retrouve sur sa joue, puis la seconde et je la tire un peu vers moi, sans forcer.

" Si je dois étendre ce maudit Royaume quelque part, j'aimerais continuer de le faire avec toi. Avec tes grands airs fourbes et charmeurs du Abe; tes joues rouges d'Aby gênée; ton esprit fabuleux, simplement. Je pense, sincèrement que si Dieu existe, il a su voir en toi toutes ces choses que tu refuses d'assumer. Tu es au moins aussi douce que tu le dis de moi : regardes comment tu sais prendre soin des autres et t'inquiéter pour eux, pour ce qu'ils pensent, quoi qu'il se passe ; tu as une incroyable patience : combien de fois je t'ai ennuyée avec cette horrible idée de chèvre de compagnie ?  "

Je rigole doucement.

" Depuis qu'on s'est rencontrées, on a passé tellement de temps toutes les deux. Depuis qu'on s'est décidées à travailler... Bah tu me manques beaucoup et je trouve ça difficile de devoir me séparer de toi aussi longtemps. Mais j'aime bien me lever le matin pour te tirer du lit, parfois t'accompagner pour tes cours. J'adore me dire qu'en rentrant on pourra manger un bout ensemble et que je te verrais te concentrer avec violence sur tes exercices. J'adore t'entendre raconter tes journées, râler ou m'exposer tes idées farfelues. J'adore encore plus trouver des moyens de les réaliser, voir les petites paillettes de satisfaction dans tes yeux. "

Je prends une petite pause, le temps de sentir mes joues se réchauffer encore un peu. Je dois me faire du mal pour ne pas cesser de la regarder dans les yeux.

" C'est bête, mais parfois - souvent - je pense à tout ce temps qu'on a déjà passé ensemble; toutes ces choses - bêtes ou fantastiques - qu'on a fait à deux; en pas si longtemps finalement... Mais de mon point de vue ce sont mes plus vieux souvenirs ? De tout ce dont je me souviens, tu es la personne qui a le plus partagé ma vie. Et j'aimerais que ça reste le cas. "

Je me mords un peu les joues et finis par craquer en détournant légèrement les yeux.

" C'est égoïste tout ce que je dis là. Tu es encore larmoyante, je fais glisser mon pouce sur la trace d'une larme, et tu as sûrement le cerveau dans le vague avec tout ce que tu t'es mis dedans. Mais j'ai la sensation que si je ne dis pas tout ça maintenant je ne le dirais jamais. Je continuerais à t'offrir des bagues de "la super amitié top moumoute" en espérant que ça ai un effet magique. J'ai un peu l'impression d'abuser en te demandant, en plus, d'écouter tout ça mais, je veux que tu le saches. Tu es tellement adorable et incroyable, j'ai vraiment peur, maintenant, que tu t'assures du contraire, parce que ça s'est mal passé. J'aimerais que tu comprennes à quel point tu es importante pour moi, à quel point ton bien être fait partie du mien et que je ne pourrais me passer ni de toi ni de ton rire. "

Je pose mon front contre le sien.

" Tu es mille fois à la hauteur, quoi que tu en penses. Tu es parfaite comme tu es, tu es parfait pour moi, pour la vie que j'espère avec toi. "

Je m'éloigne à nouveau. Un petit peu et admire une nouvelle fois la Sonore en face de moi et c'est sûrement la fois de trop. Vous avez déjà eu la sensation que votre cerveau convulse ? Se relance ? Il s'éteint quelques secondes et une impulsion prend le dessus ?

Je laisse mes lèvres tomber doucement sur les siennes, l'espace de quelques instants.

[Actual mood]

Les joues rosies par les compliments et le contact de sa main et gonflés par une moue boudeuse, je ne peux m'empêcher de lui rétorquer :

"Je suis pas sûr que tu sois très objective, c'est pas moi la patiente de nous deux. Pis j'ai jamais rien eu contre Tagueule...."

Puis à mesure qu'elle parle et exprime la place que j'occupe dans sa vie, mon estomac et ma gorge se serrent de concert. Est-ce que je ne l'empêche pas de s'ouvrir au monde et quid de si elle retrouve la mémoire? Elle me dit que je suis à la hauteur, bague de "l'amitié" à l'appui. Je me laisse porter par ses mots, la boisson, la fume et ses gestes, le contact réconfortant de ses câlins verbaux et tactiles. Une douce confusion se traîne dans mon cerveau léthargique. Ce que je recherchais avant que Lys n'entre dans la pièce.

Front contre front, un peu hagard, je reçois l'ultime déclaration qui échauffe un peu plus mon cœur pourtant déjà cuit. Ce contact ne dure guère le temps de l'échange alors que, pantelante entre les mains de Lys, je la laissais m'éloigner d'elle, le regard détourné par la gène d'être dévisagé de si près.

"Tu sais des fois j..." La suite ne se fit jamais entendre, scellé dans la boite à connerie par des lèvres douces, rosées, sucrées, chaudes. Un contact que je souhaite pas rompre, que je rend avec ardeur.

Puis le retour à la réalité.

Alors que Lys s'éloigne de moi, je me redresse. Je suis à cheval sur elle et mon cerveau analyse ce qu'il vient de se passer et les signaux que mon corps lui envoie. Le coeur est supplice avec une tension à tout rompre, l'estomac profite de la remontée pour signaler que je l'ai un peu trop chargé. Déduction de centre névralgique.

"Je... J'crois que je devrais aller me coucher."

Je pose donc pied à terre, ce qui se révèle être une mauvaise idée et décide plutôt de ramper jusque là bas. Une fois hissée, je me retiens de lancer un regard vers la demoiselle, redoutant ce que je risque d'y lire. Sans trop savoir quoi ajouter je m'allonge et regarde le plafond tourner.

"Merci." Elle prend quand même le temps de s'occuper de mon cas... à sa façon je suppose.