Ren'ji Zakuto

Chante petit violon ~
délivre-moi ton son

Leçon de Musique. Mon premier cours à Terrae. Étonnement, les couloirs sont bien notés et je n'ai aucun mal à trouvé la salle. Je ne sais ni chanter - enfin un peu... si l'on compte la chanson déprimante que j'avais inventé pendant ma léthargie - ni jouer d'un instrument. Mais j'aime écouter le violon. Cet instrument qui m'a sortir de ma torpeur alors que j'étais encore chez moi. Mon appartement ne me manque pas le moins du monde. Je ne sais pas comment ils ont fait pour rembourser les dettes - quoiqu'ils ne l'ont peut-être pas fait... - mais on ne m'en a pas reparlé depuis que je suis là, c'est à dire depuis plus de deux semaines.

Je m'installe à une table vide et la classe se remplie peu à peu. Les autres élèves ne font pas attention à moi, ils discutent entre eux ou restent seuls, comme moi. Le professeur commence le cours en nous faisant écouter un extrait de musique classique. Un violon. Je le reconnaitrais entre milles. Je n'en ai pas énormément écouter depuis mon arrivée ici, ni même avant. Mais celui-ci, je le connais. C'est celui que j'ai écouté le jour où je me suis entaillé le poignet en balançant à travers mon appartement une bouteille. Celui qui m'a fait réagir.
Je lève la main, celle qui a son poignet bandé ; le professeur me donne la parole :

- Melody In The World.

- Exact ! Bravo Mr. Zakuto.

Je lui fais un petit signe de la tête et j'aperçois des regards étonnés. Ils sont surpris qu'un mec baraqué comme moi connaisse cet extrait. Je ne fais pas attention et j'écoute le professeur qui parle du compositeur, de l’œuvre. La musique s'est arrêtée. Dommage... Si je trouvais des écouteurs ou quelque chose pour la ré-écouter, je le ferais sans hésitation. Même si elle me rappelle de mauvais souvenirs...

Spoiler:

La fille qui s'est assise à côté de moi. Elle chante. D'une petite voix mal assurée. Puis de plus en plus sûre d'elle. C'est pas mal, c'est assez joli. Un silence de plomb régnait dans la classe. Quoi ? Ils n'avaient pas aimer ? Moi j'aimais bien. Comment allait être mon passage ? Honnêtement je n'avais pas du tout envie de le faire, chanter est bien la seule chose à laquelle je pense ici.

Une fois rassise, la fille se parle pour elle-même, elle pense avoir tout raté. Je me penche vers elle et lui chuchote :

- Te fais pas d'idées. C'était bien.

Cette gamine - qui ne fait pas plus de 14 ans - se sous-estime, pourtant elle a eu beaucoup de courage pour passer la première, plus que moi en tout cas. Avec un peu de chance, l'heure se finirait avant que tout le monde soit passé. Et par tout le monde, j'entends moi.
Pendant qu'un élève chante, le professeur me regarde bizarrement. Quoi ? Il voudrait que je fasse l'élève modèle, que je me propose et que je sorte de ma bouche une voix d'ange ? Il peut crever !
J'aimerais bien qu'on m'explique l'utilité d'un cours de Musique dans une institut où l'on a des pouvoirs magiques.

Je me surprends à froisser une feuille de papier que j'avais sous la main. J'arrête aussitôt et je lance un regard à la fille. Elle a des yeux violet clair magnifiques qui ressortent encore plus grâce à ses longs cils. A premier abord, ça fait un peu peur, mais je suis vite rassuré et à peine plongé dans son regard, je me sens envouté.
Je secoue la tête. Allons, ne nous laissons pas déconcentrer. Son regard a beau être captivant, elle ne m'aura pas.

Sauvé par la sonnerie, comme dit le professeur. Je range tranquillement mes affaires, sachant pertinemment que je ne viendrais pas au prochain cours. Il ne me m'entendra pas chanter, le pauvre.
La fille a côté de moi, qui avait détourné le regard aux premiers mots du professeur, sort et revient dans la classe après lui avoir parlé. À quoi joue-t-elle ? Elle semble chercher quelque chose.
Mes yeux se posent sur une croix ornée d'un opale rouge. Magnifique. Je tends la main vers ce collier, le brandis devant les yeux de la fille :

- C'est qu'tu cherches ?

L'envie de le cacher et de le garder me vient ; cette merveille me ferait gagner un tas d'argent dehors. Mais il lui appartient, je ne peux pas le prendre comme ça et de toutes manières je suis coincé ici. Alors je lui redonnes et continue de ranger mes affaires, comme si rien de tout cela ne s'était passé.

Spoiler:

Les mots du professeur me font sortir de la salle, juste derrière la fille, Kana. Elle semble pressée. Pas moi. Ce professeur me tape sur les nerfs, alors au moment de sortir je frappe la porte du plat de la main. Le choc entre ma main et la porte produit un bruit, répercuté dans les couloirs. Ma soit-disant rage fait reculer les élèves qui attendent pour leur cours avec ce stupide professeur. J'esquisse un sourire.

À quelques mètres de la classe, Kana rentre dans quelqu'un, qui passe son chemin. Elle s'adosse au mur et je lui crie :

- Ren'ji Zakuto !

Décidément, cette institue pour gens ayant beaucoup souffert a beau me paraître bizarre, j'ai le chic pour m'y faire des amis. Ou du moins pour apprécier les élèves. Les jeunes élèves.

Cette proposition me surprend, mais Kana doit être comme ça avec tout le monde. Très sociale. J'accepte, et alors que je commence à marcher, je l'entends qui crie aux autres élèves de partir. Ils ont été surpris de ma réaction contre le professeur. Lui aussi a dû l'être et il ne manquera pas de me sermonner au prochain cours. Il aura une belle surprise en ne me voyant pas venir.

C'est le moment de faire connaissance, je me dis. Je n'ai pas envie de parler de mon arrivée ici, ou même de la sienne. Je regarde le ciel où le soleil commence à se coucher, tout doucement, très lentement. Le silence se prolonge et je cherche en vain quelque chose à dire. Finalement je décide de revenir sur sa prestation de tout à l'heure :

- Tu chantes bien, le professeur avait l'air content de toi. Mais toi non, par contre. Tu n'as pas confiance en toi.

Là je suis sûr de marquer un point. Le manque de confiance qu'elle a en elle est évident, je l'ai vu dès qu'elle a rouvert les paupières et murmurer pour elle-même, même si je n'ai pas entendu ce qu'elle se disait.

« Un certain jour ». Je comprends tout à fait ce qu'elle veut dire. Aucun de nous d'eux n'est disposé à parler de ça.

Je souris à la suite de ces paroles, ses mots révèlent sa déception et son comique. En passant la porte qu'elle me tient, je réponds :

- Moi ? Chanter ? Non... non...

Je me souviens de la chanson que j'avais inventée quand j'étais dans ma léthargie. Je ne sais si je chantais bien, mais en tout cas je n'ai plus aucune envie d'utiliser ma voix de cette manière, maintenant. Ça me rappelle trop de mauvais souvenirs, et ne sommes-nous pas censés nous construire une nouvelle vie ici ? Des fois on dirait qu'ils font tout pour nous rappeler nos passés...

Je n'ajoute donc rien, quand soudain une voix retentit dans les couloirs :

- Ren'ji Zakuto est attendu en Salle des Masters !

Qu'est-ce que c'est que ça encore ? Qu'est-ce que j'ai pu faire pour qu'ils me convoquent dans leur Salle des Machins ? Akari ne m'en avait pas parlé ; elle avait juste prononcer leur nom. Ça ne peut pas être le Professeur de Musique, on l'aurait vu passer sinon. Et puis, on ne convoque pas un élève juste parce qu'il a frappé la porte !
Je lance un regard interrogateur à Kana, en lui demandant ce que sont des "Masters".

Ainsi donc cette histoire de pouvoirs n'est pas une plaisanterie ? Après tout, peut-être que je suis en train de rêvé ; je me suis tellement entaillé la main que j'ai perdu connaissance et je rêve de l'institut qui a tué mes parents ? L'institut qui m'a emmené dans ma léthargie et qui, maintenant, prétend vouloir m'en sortir.

Où est la Salle des Masters ? Je réfléchis quelques secondes ; l'un des rares avantages ici est que les salles sont bien indiquées. Je devrais donc m'en sortir, néanmoins j'accepte que Kana m'accompagne. Elle a l'air d'avoir retrouvé toute sa bonne humeur, en parlant de l'Initiation. Et bien qu'intrigué par ce qui m'attend, je lui rends son sourire.

Nous marchons dans les couloirs et je m'interroge. Je devrais peut-être m'intégrer dans leurs papiers et essayer de trouver des renseignements ? Ou me venger ? Non, ça serait beaucoup trop rapide, et puis, je suis ici pour une nouvelle vie, je n'ai jamais prévu de faire quoique ce soit de mauvais envers Terrae, alors autant profiter de cette tranquillité temps que j'en aurais.
Je dois trouver la directrice, voilà, c'est ça. Et puis ensuite... j'improviserais. Soit je lui pose directement mon problème et mes questions, en risquant de me faire virer, arrêter ou que sais-je encore. Soit je ne dis rien. Bon, on verra. Quelque soit ma décision, je la verrais à mon Initiation et à l’acquisition de mes pouvoirs.

Avant que je puisse faire le moindre geste pour la rattraper, Kana se prend une poutre, bascule et tombe en arrière. Je vis son embarras, qu'elle ne cache pas ou alors qu'elle n'arrive pas à cacher, car elle se traite d'idiote en expliquant que ça lui arrive tout le temps.

Je ne lui demande pas si ça va. Question idiote. Bien sûr que non, ça ne va pas. Elle venait de se prendre du bois dans la figure et même si elle assurait que "oui oui tout allait pour le mieux", il faudrait que je traduise ça par "non non j'ai trop mal".

Je lui aurais bien donner une bouteille d'eau froide à plaquer contre ce qui la fait souffrir (sur son visage, tout rouge notamment), ou mieux des glaçons, mais je n'avais rien de tout cela pour le moment.

- Masse là où tu t'es cognée. Ça te fera surement mal mais ça t'évitera les bleus. Par contre, tu auras quand même une bosse.

Spoiler: