Elle acquiesça. Celia était décidément une personne compréhensive, gentille qui avait de bonnes intentions. Ses mains étaient aussi chocolatées que les miennes. Une crêpe plus tard, elle s'excusa:

- Pardon, je me suis trompée!

Il n'y avait pas de quoi s'excuser, c'était sans doute de ma faute si l’ambiguïté s'était installée.

- Ton ami d'enfance... il est à Terrae?

Avant même que je puisse répondre, elle me bondit dessus pour étirer mes joues comme si elles étaient élastiques. Cette fille avait de drôle de passe-temps. Mais cela l'amusait beaucoup apparemment. Ma mère me tirait aussi les joues, soi-disant que c'était mignon lorsqu'elles étaient roses... Je n'avais jamais compris pourquoi elle le faisait, mais bon.

- Je ne savais pas que Na-kun pouvait rougir et bégayer! C'est vraiment trop mignon~

Comme s'il s'agissait d'une expérience scientifique, elle déforma mon visage de diverses manières, chaque figure était sujet à un examen minutieux. J'imaginai les scientifiques qui nous menaçaient nous torturer et tester nos capacités avec la même méthode. L'image était plaisante.
Néanmoins, son jeu m'exaspéra légèrement. Je pris subitement ses mains et lui lança un regard assez expressif. Je lâchai entre mes dents:

- Je ne suis pas une poupée!

Non, je n'étais certainement pas une poupée... et encore moins ''mignon''. Bien que mes paroles paraissaient agressives, elles n'étaient pas méchantes – jamais je n'aurais été méchant avec une fille, c'était un de mes principes. Mais pourquoi avais-je réagi de la sorte? Je lâchai les mains de Celia.

- Désolé, je me suis emporté.

Je venais de me rendre compte que Celia était devenue mon amie. Oui, j'avais confiance en elle et elle dégnait m'aider. Je lui souris pour lui signifier que je n'aurais pas fait d'autres mouvements brusques et inconvenants.

Celia sursauta presque lorsque son interlocuteur lui prit subitement les mains, avec un regard assez... enfin, qui en disait très long sur ses pensées, en fait. Il lâcha:

- Je ne suis pas une poupée!

Celia le fixa, surprise et triste à la fois. L'avait-elle blessé? Celia n'aimait pas blesser les gens, au contraire. Elle aimait les voir sourire et les rendre heureux. A ses yeux, Naoki semblait si renfermé sur lui-même, si distant, qu'elle avait voulu en apprendre un peu plus sur lui, et peut-être réussir à le faire sourire au moins une fois. Il lâcha les mains de l’Étoile, avant de dire:

- Désolé, je me suis emporté.

Ses yeux s’écarquillèrent lorsqu'elle le vit sourire. Ce n'était peut-être pas un sourire radieux et énorme, mais c'était un sourire quand même. Elle lâcha ses joues, silencieusement, baissa la tête, et après un petit blanc elle murmura:

- Pardon, je ne suis vraiment pas mature pour mon âge...

Elle l'avait dit sur un ton un peu défaitiste et exaspéré. Celia était une personne qui n'avait pas confiance en elle, et qui ne s'aimait pas réellement. Elle releva ensuite la tête, et avec un léger sourire, elle déclara avec sincérité:

- En tout cas, ça me rend vraiment heureuse de t'avoir vu sourire!

- Pardon, je ne suis vraiment pas mature pour mon âge...

Étrange venant d'une fille qui s'était occupée d'un inconnu toute la journée. La différence d'âge n'était pas si grande. Celia avait son charme. Comment dire... Elle semblait se nourrir du bonheur des autres, apprécier chaque moment qu'elle passait avec moi. Elle donnait bien plus qu'elle ne recevait.
Avec plus d'assurance et en me regardant droit dans les yeux, elle me dit armée d'un charmant sourire:

- En tout cas, ça me rend vraiment heureuse de t'avoir vu sourire!

- C'est grâce à toi.

Je lui laissai la dernière crêpe par courtoisie. Le ciel était noir et la fatigue commençait à se faire sentir. Je me levai et tendis une main à ma nouvelle amie.

- Il serait sage que je rentre à présent, avant qu'ils ne paniquent complètement.

Nous marchions un moment en silence pendant lequel j'admirais la fille. Je lui avais causé tant d'ennuis, il fallait que je réfléchisse à un moyen de me faire pardonner. De plus, elle avait accepté de l'aider à rechercher Noah. Ma dette s'allongeait.

- J'ai passé une agréable après-midi en ta compagnie.

Nous séparer si vite me rendait presque triste. L'envie de la revoir me pesait déjà.

- Et si je passais te rendre visite lorsque je serais rétabli?

L'occasion de me racheter. Je réfléchissais déjà à plusieurs façons de la remercier. Un cadeau peut-être? Je n'étais pas doué pour ces choses là. Ryu m'aurait bien aidé, malheureusement je ne l'avais pas vu depuis un moment. Tomoyo ne souhaitait sûrement pas me revoir vivant... Il restait Alicia, cette fillette qui ne savait arrêter de parler. Elle aurait su me conseiller au moins.

- C'est grâce à toi.

Le ciel commençait à s’assombrir. Naoki se leva et tendit la main à la jeune fille, légèrement surprise. Mais elle finit par sourire, très contente. Elle attrapa sa main et se releva:

- Il serait sage que je rentre à présent, avant qu'ils ne paniquent complètement.

Ah oui, elle avait complètement zappé leur existence. La Directrice allait en fait tout un plat si jamais elle l’apprenait. Et si jamais ça parvenait à ses oreilles, elle ne gronderait sûrement Celia, puisqu’elles s’entendaient plutôt bien, et après tout, ça partait d’une bonne volonté, non ? Ils commencèrent à marcher en silence. Celia allait dire quelque chose, mais Naoki la devança :

- J'ai passé une agréable après-midi en ta compagnie.

Celia rit légèrement. Elle aussi. C’était assez drôle, et elle avait adoré tirer les joues de son ami. Oui, de son ami. Et puis, découvrir les dorayaki ou dorakayi était une expérience enrichissante au niveau de la pâtisserie ! Encore une fois, Naoki la devança. Il était devenu plus bavard qu’à l’hôpital, chose qui plût à Celia. Il n’était plus si renfermé, et ça la rassurait. Elle espérait le revoir très bientôt.

- Et si je passais te rendre visite lorsque je serais rétabli?

La jeune fille hôcha la tête, et lui dit, encore et toujours avec un sourire :

- Tu as intérêt ! Par contre, inutile de me rapporter quoique ce soit comme cadeau ! Car le simple fait qu’un ami te rende visite est un grand cadeau, tu ne pense pas ?

Elle ajouta la dernière phrase avec un clin d’œil. Perspicace, mais aussi parce-que Naoki était ce genre de personne. Celia était le genre de personne qui se contentait de peu, en effet. Elle continua :

- Moi aussi, j’ai passé un super après-midi ! Merci beaucoup.

Elle sentit alors quelques gouttes tomber. Ah, il pleuvait. Et c’était génial parce qu’ils n’avaient ni de manteaux, ni de parapluie. Elle demanda alors à son interlocuteur :

- On devrait peut-être utiliser la téléportation, tu ne crois pas ? Tu commences à être fatigué, et tu va tomber malade si on continue.

Toujours à s’inquiéter en premier pour les autres.

- Tu as intérêt, dit-elle d'un air taquin. Par contre, inutile de ma rapporter quoique ce soit comme comme cadeau! Car le simple fait qu'un ami te rende visite est un grand cadeau, tu ne penses pas?

Elle me fit un clin d’œil. Heureux de constater que nous avions la même conception quant à notre nouvelle relation, je répondis à son magnifique sourire. C'était la première fois depuis mon arrivée ici que je me sentais réellement attaché à quelqu'un, plus à l'aise également. Je lui offrirais quand même un cadeau, pour mon plaisir autant que le sien.

- Moi aussi, j'ai passé un super après-midi! Merci beaucoup.

Celia leva le nez vers le ciel. À mon tour je fus surpris par la pluie. Les gouttes filtraient à travers mes vêtements et infiltraient mes brûlures malgré les bandages. La pluie sur des plaies ne faisait pas bon ménage et provoquait des démangeaisons, des picotements, etc. Celia proposa une téléportation.

- Tu commences à être fatigué, et tu vas tomber malade si on continue, argumenta-t-elle.

Cela dit, elle n'avait pas tort. Et je détestais être cloué au lit plutôt que dehors à apprécier le vent et l'odeur de l'herbe fraîche.

- Toi non plus il ne faudrait pas que tu tombes malade, lui fis-je remarquer.
Sur ces paroles j'entourai les mains de mon amie par mes mains et fermai les yeux, prêt à être téléporté. Un fort parfum de chocolat se dégageait encore d'elle.

- Toi non plus il ne faudrait pas que tu tombes malade.

C'était pas faux. Lorsque Naoki entoura les mains de Celia des siennes, elle se sentit prête pour la téléportation. Elle ferma les yeux. Elle propagea son energie dans son corps, et dans celui de Naoki (histoire qu'elle ne l'abandonne pas pendant le processus, hein... elle serait parfaitement capable de faire une telle bourde). Lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle était dans la chambre dédiée à son ami. On entendait dans les couloirs des personnes courir. Finalement, le même infirmier en charge de Naoki apparût au seuil de la porte, visiblement essouflé et... furieux. Oups...

- Monsieur ! Où étiez-vous donc passé? On vous a cherché partout! Et vous mademoiselle, qu'avez-vous tenté de faire? -s'exclama-t-il.

Celia lâcha les mains de Naoki, et s'arma de sa super hyper dangereuse arme : son sourire colgate blancheur rayonnant et eblouissant.

- Monsieur l'infirmier ! Vous êtes là !

Elle prit un air absolument désolé, limite chien battu. Elle s'inclina (chose que les anglais ne font pas d'habitude, mais Celia avait appris les coutumes japonaises) :

- Pardon, c'est de ma faute ! Na-kun semblait très mal à l'aise, ici. Et il avait faim. Alors... alors... j'ai voulu lui faire manger des choses délicieuses pour qu'il retrouve sa bonne humeur !

La sincérité avec laquelle elle argumentait désarma l'infirmier.

- Est-ce mal de vouloir aider son ami, monsieur ? A la rigueur, punissez-moi, mais pas Na-kun ! S'il-vous plaît...

L'infirmier réfléchit pendant deux bonnes minutes, plongeant la salle dans un silence complet. Il finit par soupirer, et répondre :

- Bon, je laisse passer ça pour cette fois !

Celia soupira de soulagement, tandis que l'infirmier aida Naoki à reprendre sa place dans son lit. Il s'absenta ensuite pour aller prévenir les chefs que le patient était de retour. Pendant ce temps, Celia dit, encore et toujours avec un sourire :

- On a eu chaud ! J'ai vraiment cru qu'il allait nous donner une sanction ! En tout cas, sur ce coup là, on a été chanceux !

HRP: En retard, désolé! T.T J'avais pas vu que tu avais répondu! owo

Tandis que Celia gardait contact avec mes mains, son odeur et sa couleur me contamina – je ne parle pas de maladie. Pour la seconde fois, j'étais étourdi et un peu perdu en ouvrant les yeux. Peu de temps après je reconnus la chambre d'hôpital baignée dans le noire. Le lit avait été refait. La lumière s'alluma subitement et mon infirmier attitré déboula dans la pièce, l'air sévère. Nous allions passer un sale quart d'heure!

- Monsieur! Où étiez-vous donc passé? On vous a cherché partout! Et vous mademoiselle, qu'avez-vous tenté de faire?

Qu'il s'en prit à Celia me froissa. Comme si cette fille était capable de kidnapper quelqu'un! Elle avait même insisté pour que je reste tranquillement dans cette pièce froide et qui me paraissait hostile. Encore une fois, j'avais causé des soucis à Celia. Décidément j'étais le pire ami qui puisse exister.
La fille feint d'abord l'innocence:

- Monsieur l'infirmier! Vous êtes là!

Elle s'inclina à la japonaise, un angle parfait comme les jeunes n'en faisaient plus de nos jours! L'infirmier ne put ignorer son geste, il était même... ému...?

- Pardon, c'est de ma faute! Na-kun semblait très mal à l'aise ici. Et il avait faim. Alors... alors... j'ai voulu lui faire manger des choses délicieuses pour qu'il retrouve sa bonne humeur! Est-ce mal de vouloir aider son ami, monsieur? À la rigueur, punissez-moi, mais pas Na-kun! S'il-vous-plaît...

Toujours pliée, elle suppliait l'homme. Ses cheveux roses cachaient son visage mais je devinai bien l'expression qu'il portait. L'infirmier soupira et déclara:

- Bon, je laisse passer ça pour cette fois!

La partie était gagnée grâce à Celia la sauveuse du jour! La fille se détendit et l'infirmier vint m'arracher à elle pour m'installer dans le lit en prenant mille précautions. Il s'excusa et parti dans les couloirs silencieux.

- On a eu chaud! J'ai vraiment cru qu'il allait nous donner une sanction! En tout cas, sur ce coup là, on a été chanceux!

Même si nous avions reçu une sanction je ne l'aurais pas accepté, j'aurais pris l'entière responsabilité. Il n'est pas correct de laisser quelqu'un porter le chapeau.

- Oui, heureusement que tu as le don de persuasion. Le pauvre avait un cas de conscience et ne savait plus s'il devait nous punir ou non.

Ma bouche s'ouvrit grande et je baillai de fatigue. C'était le pris de notre escapade alors que j'étais déjà faible physiquement. Les draps remontés jusqu'au coup, je les repliais pour qu'il laisse cette dernière à l'air – La fenêtre était encore ouverte et le vent frais s'engouffrait dans la pièce. Tous les éléments étaient réunis pour me permettre une longue nuit de sommeil. À un détail près que notre discussion sur le banc le revint en mémoire.

- Le sommeil me tombe dessus mais on se reverra. Ce jour-là je te donnerais la photo de mon ami et on le cherchera ensemble. Et puis tu me verras dans une meilleure santé surtout. Merci encore d'avoir accepter de m'aider.

Baille.

- Rentre bien à l'institut, il est tard, les autres doivent se demander où tu es passée.

- Oui, heureusement que tu as le don de persuasion. La pauvre avait un cas de conscience et ne savait plus s'il devait nous punir ou non.

Celia sourit. C'était dans cette même chambre où Naoki avait agit avec distance, et le voilà qui semple s'ouvrir un peu plus. Elle hocha la tête, et étouffa un petit rire quand elle le vit bailler. Il était décidément fatigué. Ça ne l'étonnait pas vraiment parce-qu'il avait reçu tout de même pas mal de dégâts, on va dire.

- Le sommeil me tombe dessus mais on se reverra. Ce jour-là je te donnerais la photo de mon ami et on le cherchera ensemble. Et puis tu me verras dans une meilleure santé surtout. Merci encore d'avoir accepté de m'aider.

Elle hocha encore une fois la tête. Elle était ravie de pouvoir aider un ami. Et elle était surtout piquée par la curiosité: qui était son amoureux? Oups, son ami? D'ailleurs, elle était vraiment trop hâtive dans ses conclusions! Au point de s'imaginer un amour interdit dramatique, c'était du n'importe quoi ! Il bailla une fois de plus.

- Rentre bien à l'institut, il est tard, les autres doivent se demander où tu es passée.

En effet, en particulier son frère et sa sœur. De toute façon, elle était grande maintenant, et elle savait être autonome ! Attendez, elle a quand même 16 ans, voyons ! Toujours en arborant un sourire, elle dit :

- Je te promets qu’on retrouva ton prétendu « amoureux », fit-elle avec un clin d’œil et un léger rire avant de continuer, rétablis-toi vite ! J’espère te revoir bientôt Na’-kun !

Et c’est sur cette dernière phrase qu’elle quitta son nouvel ami, en espérant le revoir bientot.