J’étais enfin descendu de ce maudit avion. Je m’étais senti mal tout le long du trajet, une vraie catastrophe. Et du coup bah je me retrouvais encore plus blanc que je ne l’étais en temps normal. La jeune femme qui était venue me chercher m’avait aidé à porter quelques trucs, mais j’avais dû me supporter la plus grosse valise et mon sac à dos plein à ras bord. Et ma basse, mais c’était loin d’être le plus lourd.

Elle m’avait laissé avec Whisky dans une cour après m’avoir donné deux ou trois instructions afin que je ne sois pas paumé dans ce nouvel établissement. Pour de nouveau me retrouver seul avec plein de sacs. Déjà que j’étais complètement mort (pas vraiment, hein, façon de parler !) et que j’avançais super lentement, mes affaires me faisaient encore plus souffrir. C’est dans ce genre de cas que je me dis que j’aimerai être plus fort, ou alors avoir moins d’affaires. Je m’arrêtais un petit moment pour reprendre mon souffle, et je constatais que je n’avais vraiment pas beaucoup avancé. Au pire une vingtaine de mètres. Nul. Je m’écroulais sur le sol au milieu de mes valises en soupirant de désespoir alors que plusieurs personnes passaient à côté de moi sans prêter attention ou en me lançant juste un regard. Certains jeunes s'arrêtaient pour regarder mon chien.

Alors je sortais mon briquet et je regardais la flamme pour passer le temps. C’était fascinant. Et pourtant, il n’y a rien de plus con qu’une flamme. Ah si, une chaussure. Mais bon bref. Cette flamme était superbe et tout à fait banale. Du moins, jusqu’à ce qu’elle commence à prendre des formes pas du tout normales, que même le vent ne lui aurait pas donné. J’étais vraiment étonné et même effrayé, tellement que j’eu une réaction un peu brusque qui fit sursauter Whisky :

« Oh putain c’est quoi ce bordel ? »

J’avais lâché mon briquet devant moi et reculé en faisant tomber mes sacs. Mais en même temps, comment resté de marbre après ce que je venais de voir ?

J’avais cru mourir pendant un instant. Ou alors être sous l’emprise de drogues, ou quelque substance illicite que ce soit. J’ai même failli tomber dans les pommes. Bah c’est pas parce que je suis un homme à la belle musculature que je suis pas fragile mentalement ! Mais sérieux, il y avait du gaz dans l’air pour que ça prenne des formes comme ça une petite flamme ? Eh beh… On pouvait dire que mon premier jour allait pas être du gâteau, franchement à peine arrivée j’ai l’impression d’avoir atterri chez les fous ! Et qu’accessoirement, ça avait déteint sur moi. Mais le pire du pire du pire, c’est que personne ne réagissait, comme si c’était tout à fait normal ! Je voyais Whisky sur ses gardes en train de grogner en direction d’un buisson ou je sais pas trop quoi comme truc du genre. Alors pour éviter de me tuer les yeux à regarder le feu (mais aussi pour essayer de ne pas plus me ridiculiser devant les autres à crier comme une fillette) je regardais dans la même direction que lui. Je voyais pas pourquoi il s’énervait. Et quelques instants après, je voyais quelqu’un sortir de ce dit endroit. D’ailleurs, cette maudite flamme allait vers lui et se transformait en serpent puis redevint une simple flamme qu’il… gardait entre ses mains ? Ouais, remarque, je crois qu’après tout ce que je venais de voir, plus rien ne pouvait me choquer. Puis l’homme s’avança vers moi. Il était bizarre, faut bien l’avouer. Puis il fit une courbette et me dit :

-Bonjour, ou plutôt bonsoir. Mais si le jour fût bon pourquoi est-ce que le soir ne le serai point ? Avant de débattre sur ce sujet, je me présente. Aïsurendo Shitsu chi, l'un des masters de Terrae contrôlant le feu et croque-mort de profession.

OK. Méga étrange dans ses propos le mec. Mais ce qu’il avait dit en dernier me permit d’éclaircir tout ce qui venait de se passer. C’était donc lui qui s’était amusé à me faire peur ! Du coup, j’étais légèrement énervé vu que je savais le visage de celui qui m’avait embêté. Sinon, j’allais me présenter à mon tour, mais je fus coupé quand il retransforma la flamme en phénix qui s’envola devant mes yeux émerveillés cette fois. Puis il ajouta :

-Et...Vous êtes ? Enfin, j'ai cru comprendre que vous étiez nouveau en ces lieux mais j'ai grand hâte de connaître votre nom, voire votre histoire si ce n'est trop demandé. Je suis terriblement friand de récits voyez vous....

Je le regardai un moment, presque effrayé, avant de lui répondre en me relevant :

« -Je m’appelle Stan Salamander. Et ouais je suis nouveau ici et mon histoire n’a rien d’intéressant. Par contre, comment vous faites pour contrôler le feu ? C’est trop fort, bien que super flippant… »

J’étais encore pas mal déboussolé après ce que je venais de voir. En même temps tu viens d’un environnement parfaitement normal, tu vois du feu qui bouge… ah non pardon, qui est contrôlé par quelqu’un, faut dire que ça fait assez bizarre…

Plus je le regardais, plus je trouvais que ce mec était super étrange. Il commençait à me touner autour, bien un truc qui rend super mal à l’aise. Puis il me dit :

- Salamander...Hu...Comme la salamandre, créature de feu. Intéressant....

Puis après ça, il partit dans un discours d’une plombe, un truc que si il l’avait écrit, ça lui aurait pris au moins quinze pages. Mais aussi c’était bizarre sa façon de changer de sujet méga subtilement pour passer du fait qu’une histoire peut toujours être intéressante à tout un truc qui englobe cet institut méga étrange. Mais en fait, même si il faisait des pauses de temps en temps pour que je puisse capter toutes les infos qu’il me sortait, à partir du moment où il m’a dit qu’un jour j’allais avoir des pouvoirs, mon cerveau s’est mis en mode OFF et j’ai plus rien suivi. Mais alors rien de rien ! mais il s’est quand même rallumé à la fin de son spitch, quand il me dit :

Et puis...Tu n'es pas au bout de tes surprises si tu décides de rester ici ! As-tu d'autres questions ou est-ce que j'ai répondu à toutes ?

Je le regardais avec un air d’abruti. Franchement il pensait quoi, que j’allais tout comprendre du premier coup ? Je sais que je suis intelligent, mais j’ai quand même mes limites, surtout après un long voyage en avion accompagné d’un magnifique mal des transports. Puis je le voyais fouiller dans sa poche pour sortir des sorte de gateaux, puis il m’en proposa un. Je lui répondais calmement et le plus poliment possible :

« Heu… Non merci, je me sens pas super bien après l’avion là… »

Puis je me souvins qu’il m’avait parlé longtemps pour finir par me demander si j’avais d’autres questions. C’est alors que je lui dis en me passant une main dans les cheveux, un peu embarrassé :

« Heu… Vous savez tout à l’heure, je dois vous avouer que j’ai absolument rien compris de ce que vous m’avez dit… »

Sur le coup, je me sentais un peu con. Ma mère aurait été là, elle m’aurait direct sorti un truc comme quoi ne pas écouter c’était mal, que c’était pas comme ça qu’ils m’avaient éduqué et tout le baratin qui va avec.

Je crois bien que ça lui faisait pas super plaisir que j’ai pas compris toutes ses explications, mais c’est pas grave. Pas ma faute si je suis malade en avion. Puis il m’avait dit que j’étais pas le seul à avoir eu une vie à chier ici. Une vie à chier ? Moi ? Il déconne ou quoi ? J’ai juste eu une vie trop cool ! J’étais prêt à lui répliquer que j’avais eu une vie super, mais il rajouta rapidement en zieutant mes affaires :

-Ah oui c'est vrai que tu vas avoir l'immense plaisir de passer tes nuits aux dortoirs jusqu'à ce qu'il y ai montée en grade...Et bien tu devrais te dépêcher d'y emmener tes affaires...Je puis te conduire si tu le désires. J'ai un peu de temps alors autant l'utiliser ainsi plutôt que d'aller me goinfrer de sucreries toute la soirée...

Des dortoirs. Quand il avait dit ça, j’avais l’impression que mon cerveau bugait royalement. Franchement, quand t’es moi, les dortoirs, c’est pas pour toi. Je haussais un sourcil, et demandais :

« Des dortoirs ? Sérieux ? Et je vais devoir attendre combien de temps pour la montée en grade ? »

Puis je me résignais à le suivre, un peu contre mon gré quand même. Je trainais mes valises à bout de bras, en me lamentant parce que ça pesait des tonnes et que c’était méga chiant. Bah ça faisait mal, aux épaules. Et tous les dix mètres, je m’arrêtais en posant toujours cette question qui peut énerver le plus calme des hommes :

« On arrive quand ? C’est encore loin ? »

J’avais presque envie de m’écrouler de nouveau par terre à chaque fois que je m’arrêtais. Et à chaque fois que je reprenais mes sacs, je soupirais en me disant que c’était pourrit de devoir marcher.

Franchement, le coup des dortoirs, c’était pas sympa… Enfin, je me disais que tout le monde ici devait passer par là et que j’étais pas le seul à devoir subir ça. Et quand j’avais demandé combien de temps je devrai attendre pour monter en grade, et donc avoir une chambre pour moi tout seul, Aïsurendo m’avait répondu que tout dépendrait de moi et de mon comportement. Génial. Il avait pas mieux comme indication, genre le temps moyen qu’un élève doit attendre ou un truc comme ça. En plus j’avais l’impression qu’il se fichait un peu de moi en parlant de « susucre », et il était pas mal flippant avec son sourire étrange. Et puis il passait sa vie à manger des bonbons ou quoi ? Il devait couter cher en dentiste si c’était le cas. Mais je ne disais rien, tellement j’en avais marre de porter mes affaires.

Quand je demandais si on était bientôt arrivé (ce qui, je pense, devait plutôt l’agacer) il restait silencieux, ce qui me poussait à redemander encore et encore. Mais au bout d’un moment, il se retourna d’un coup, me fit un peu sursauter, et me dit :

« Demande moi cela encore une fois et je te fais roussir le poil... Qui plus est, plus tu t'arrêtes et plus ton rythme de marche est saccadé, donc tu seras plus fatigué que si tu avances d'un pas actif. C'est donc tout à ton avantage d'avancer et de te taire ! »

Ce type était vraiment flippant. Sérieusement, il m’inspirait pas confiance, loin de là… Mais je reprenais mes affaires et me remettais à marcher pour ne pas le perdre de vue. Et c’est après un laborieux chemin arpenté dans la souffrance et le silence, suivi de Whisky, que nous arrivâmes devant ce qui semblait être la porte du dortoir. Je posais un peu mes affaires pour gratouiller la tête de mon seul ami. Aisurendo me dit alors :

« Nous y sommes...Tu peux à présent aller poser tes bagages. Mais je crois que tu ne peux y laisser le canidé qui t'accompagne, du moins seul...Il va donc devoir t'accompagner. »

J’imaginais bien que je ne pouvais pas le laisser seul. En fait c’était logique. J’entrais après que mon accompagnateur ait ouvert la porte. Whisky m’avait presque bousculé pour aller sauter sur un lit qui paraissait libre au fond de la pièce. Je me disais que j’allais prendre celui-là alors. J’allais pas laisser ce lit à quelqu’un d’autre vu que Whisky avait l’air de beaucoup l’apprécier. Je commençais à poser mes affaires en faisant descendre Whisky du lit. La nuit était en train de tomber, et je commençais à être bien fatigué, par le décalage horaire, l’avion et les escaliers. Je dis à Aïsurendo :

« Merci de m'avoir accompagné. »