La gosse semble désolée d'être entrée dans la baraque, mais je hausse les épaules. Après tout, à ce point-là, je peux pas vraiment lui reprocher quoi que ce soit. Moi, à son âge, j'aurais fait bien pire je crois. Genre s'il y avait eu des catacombes, j'y serais allé en mode « Oh yeah trop cool ! Vous croyez qu'on tombera sur des zombies ?! »... Ce qui n'est pas franchement plus recommandable. Maiiiis que voulez-vous ! À quinze ans, on est cons ! Genre niveau d'intelligence zéro, hein, vraiment. Heureusement que mon sublime génie arrangeait un peu le coup, ohohoh ♥
Oui je suis narcissique et j'aime mon reflet dans un miroir ; un problème avec ça ?
Je m'apprête à lui répondre quand le gars accroché à mon épaule grommelle un truc complètement débile.

– « Mec » ? « MEC » ? Mais sérieux, c'est quoi cette manière de parler ? je râle en roulant des yeux. Et pourquoi pas « Wesh mec, j'ti jure, jé rien fé moa ! » tant que t'y es ?!

Bordel, les gens parlent mal... Cette jeunesse est en train de foutre en l'air toute la beauté des langues ! (Pas celles-là, bande de pervers.) Je crois que je vais jamais m'en remettre... (Ou « J'crois que j'vé jamé m'en r'mettre bataaar » en version d'jeuns craignos et illettré... Mes neurones saignent rien qu'à cette pensée. Sinon oui, mon accent de wesh s'est vachement développé au fil des ans !)

– Sérieux, vous avez rien d'autre à foutre que vous balader dans la forêt seuls en ce moment ? Je vous rappelle qu'on a posé des consignes au sujet des endroits à l'écart comme ça, c'est pas pour rien.

Ça y est, j'entre en mode prof chiant et grognon. Mais c'est vrai, quoi, déjà qu'y a Aëlita qui court partout en zigouillant tous ceux qu'elle croise, ce serait bien d'éviter d'aller lui offrir sa propre tête sur un plateau d'argent...

– Enfin, je laisse tomber, je soupire. De toute manière, si je vous le dis à vous, y aura forcément d'autres gens pour aller s'éclater ici. Mais vous nous faites du boulot en plus, là !

Je hausse les épaules et continue à servir d'appui pour môssieur, qui grogne qu'il fera attention. Ouais ouais tu parles, il en a surtout rien à branler le p'tiot là. Je sens son agacement d'ici ; et puis, franchement, vous savez quoi ? Moi aussi j'ai hâte de rentrer.

J'ai un long soupir. Lui dire ce qu'il se passe... Est-ce que c'est bien sage ? Après tout, la moitié de l'institut doit être au courant maintenant. Et puis si ça évite des emmerdes par la suite... Je préfère qu'ils soient au courant et qu'ils ne fassent pas de connerie plutôt que de les voir risquer bêtement leur vie en tombant face à face avec cette psychopathe.

– Ben déjà, la maison appartenait à un Master Morphe complètement détraqué qui vit en mode bestiole sauvage. Et dangereuse. Donc évitez un peu de vous en approcher à l'avenir...

Rah j'ai vraiment l'impression de passer pour le prof chiant et moralisateur, même moi je me fais chier ! Mais bon visiblement ce sera un peu utile pour une fois. Ça change de mes coups de gueule en plein cours de maths, et mes abominables jets de craie. Oui, de craie. J'aime frapper les élèves avec, ça me détend. Le but, c'est de voir qui aura le plus de craie sur lui à la fin de l'heure ; celui-là gagne le droit d'assister à deux heures de colle le samedi suivant ! Ehhh oui ! Je suis un prof merveilleux, je sais, je sais. Ne me remerciez pas d'occuper vos journées, je sais que vous seriez désespérés sans moi.

– Sinon, ben... En ce moment, y a une tarée qui a décidé que les habitants de Terrae devaient crever. Cool hein ? Le souci c'est que cette psychopathe possède tous les pouvoirs. On l'appelle l'Avatar. Il ne vaut mieux pas croiser son chemin, beaucoup ont fini à l'hôpital...

Je plisse le nez.

– … ou la morgue. Bref. Vous aventurez pas n'importe où.

Je lève les yeux vers l'institut quand on y arrive, et lâche un petit « Enfin arrivés » soulagé. J'aide le type à monter les marches jusqu'à l'intérieur des bâtiments et nous guide dans le dédale de couloirs jusqu'à l'infirmerie, à laquelle je toque.

– Hep, Nora ! Salut. Euh. Tu as une minute ?

La jeune femme lève les yeux vers moi et plisse le nez en ronchonnant.

– Qu'est-ce que tu as encore fait, espèce de crétin ? Pas encore un entraînement qui a mal tourné ?
– Nan, il a chuté dans les escaliers et la gosse l'a soigné... Et tu sais bien que c'est moi qui finis en mauvais état dans ces moments-là, je soupire. Bref, faut juste vérifier qu'il n'a plus rien.

Elle roule des yeux et propose de s'occuper du garçon, examinant sa blessure et remerciant chaleureusement Kaori de son excellent travail. Souriant en coin, je m'étire un peu.

– Bon, c'était un plaisir Kaori. Et toi aussi, là, euh... Je sais pas ton nom. Le boulet.

L'infirmière m'assassine du regard et j'ai un sourire embarrassé.

– … Mais sinon je peux rester jusqu'à ce que tu aies fini hein !
– J'aimerais mieux pas. Raccompagne-la.
– Mais...
– Williams.

En grommelant, je soupire et fais signe à la gosse que je l'attends à l'extérieur de la pièce. Une fois sortie, je l'interroge :

– Tu devais aller quelque part ? Je te raccompagne et je file, j'ai des... trucs à faire. Mais elle va pas me lâcher si je le fais pas, j'ajoute à voix basse.
– Je t'entends, Williams !

Misère... Foutus air et leur ouïe accrue, hein.


HRP : Bon, je pense qu'on peut clore bientôt si ça te gêne pas :) Il peut encore l'accompagner pendant quelques posts si tu y tiens, mais sinon, tu peux conclure pour toi au prochain, et je finirai le topic comme on avait prévu !
Voilà voilà ♥

Je m'éloigne un peu de l'infirmerie quand Kaori revient enfin, et acquiesce lentement à ses mots. J'espère bien qu'elle me demandera pas de l'accompagner, parce que j'aurais l'air un peu con sinon... « Ouais, en fait, je la connais pas, hein, mais sinon j'accompagne une mineure faire son shopping ! Non, bien sûr que non, je suis pas un pédophile voyons, qu'est-ce que vous me chantez ! » Enfin bon, on va laisser tomber hein. Je laisse un sourire en coin étirer mes lèvres et lui fait un signe lorsqu'elle me dit qu'elle va aller voir Hideko. Je suis tenté de lui dire qu'elle se fera de toute manière appeler d'ici pas longtemps, mais préfère hausser les épaules.

– Bonne aprem', va. Et bon courage pour la suite, gamine.

Je m'éloigne et reprends le chemin en sens inverse, m'étirant légèrement. Il me reste plus qu'une chose à faire maintenant. Et je peux plus laisser traîner ça. La motivation de la petite à avancer est contagieuse, on dirait... Perdu dans mes pensées, je tente de me concentrer et me motiver un peu. Chose difficile à faire. Surtout quand on prévoit d'avoir l'air du type le plus stupide de tous les temps. Je descends les marches menant à la cour comme dans un rêve et la traverse avec lenteur, inspirant longuement. Courage. Courage, Aaron. Dans le pire des cas, tu te feras juste remballer. Ce sera pas si horrible, hein ! Allez. Courage.
J'inspire profondément en arrivant devant la porte de ma collègue et sonne. Elle semble étonnée un instant de me voir. Puis un peu gêné quand je m'excuse auprès d'elle. Avec un sourire, je le lui dis. Comme ça. Naturellement. Un peu trop peut-être. Je la vois rougir, bafouiller un peu ; la gêne et le trouble de son cœur menacent de m'être transmis. Et même lorsqu'elle me rejette, avec cet air désolé si adorablement douloureux, même lorsqu'elle m'attrape la main pour me dire qu'elle ne veut pas que quoi que ce soit change, même lorsqu'elle me demande, devant mon manque de réaction, si ça va, je continue à sourire. J'ai un rire léger, un visage lumineux. Je l'embrasse sur la joue et la remercie de m'avoir écouté, en lui disant que de toute manière, il fallait juste que ça sorte.
Peut-être que c'était pour le mieux.
Sa porte se referme alors que je m'éloigne. Ma gorge nouée me fait un peu mal, mais je l'ignore. J'essaie de ne pas repenser à ce qu'elle m'a dit, de ne pas me dire que je viens de me casser à nouveau littéralement la gueule.
Comme un frère, hein...
Je m'adosse à un mur, un peu à l'écart, le regard trouble et le visage bas. Mais je ne peux pas toujours regretter. Il y a certaines choses qui sont pour le mieux.
J'attrape mon téléphone et sélectionne un numéro dans mon répertoire.

– Hey, salut ! je lâche d'une voix à demi enjouée. Ça va ? Mais ouais, moi ça va, ça va...

Un temps d'attente, de son côté. J'ai un sourire triste aux lèvres, alors que je me passe la main sur le visage.

– Nan, en fait, ça va pas top... Je peux passer, dis ? J'ai une folle envie de crever ce soir, je ris doucement.
– Toujours aussi dramatique, Aaron.
– Y a des choses qui changent pas au moins...
– Sérieux... Ramène-toi.

Merci Gae.



HRP : Bon désolée du coup la partie utile au topic est super courte, mais je savais pas quoi dire >O< Puis comme t'étais au courant je me suis permis de m'étendre sur la fin xD