Des sports extrêmes. Wahouuu, je ne sais vraiment pas quoi penser de ça, même à présent dans l'avion qui doit nous emmener tout droit jusqu'à Toronto. Petit, mon rêve était de faire du saut à l'élastique, j'espère que ça me plaira si jamais on en fait ! Tes plus bas instincts auraient tendance à dire que tu seras mort de peur, petit. Je fais taire mentalement ma conscience -et James qui n'aurait pas tardé à rajouter son petit commentaire- en perdant mes yeux dans les nuages brillants qui entourent l'avion ; c'est incroyable que des géants pareils restent en suspension dans le ciel, ça semble quasiment magique, comme d'autres choses, et aucune connaissance des phénomènes de condensation ou de différences de pression de l'air ne pourra m'ôter cette idée. Comment encore croire la science alors qu'on est soi-même magicien et que la magie ne semble s'expliquer que par elle-même ?

Ce serait bien, qu'il y aie des choses magiques dans ce monde. A part nous, les gens de Terrae je veux dire ! Un bruit des moins élégants en provenance de mon estomac m'informe gentiment que je meurs de faim, et je grimace une petite excuse gênée à ceux qui m'accompagnent en sortant un paquet de gâteaux de mon sac.
Je connais à peine Ludmila, une jolie rousse à l'air énergique et plutôt sympa, mais les deux autres me sont familiers : Dunkan, ce garçon plus âgé que moi mais qui m'évoque un petit frère insupportablement enthousiaste, et Isis, heu Isis qui... Qui est la princesse faisant battre ton cœur brûlant ♥ Disons, qui active tes hormones de manière excessive.

Je la regarde,  perplexe, en songeant qu'elle est vraiment jolie en short. "Vos gueules vous deux...." Je propose des gâteaux aux autres Terraens puis le voyage se poursuit sans que nous parlions beaucoup, et je finis par m'endormir.

Je m'éveille sans trop savoir pourquoi au milieu de la nuit, à plus de quatre heures de notre arrivée, et me redresse doucement pour ne réveiller personne. Je me sens bien trop réveillé, sûrement à cause du décalage horaire, mais n'ose pas bouger : je suis du côté du hublot, et Isis et Ludmila dorment profondément. Dunkan, lui, est de l'autre côté de l'allée, à côté d'un vieux couple. Je regarde en souriant les visages endormis des filles, à la lumière des veilleuses vertes. Les gens ont l'air serein quand ils dorment...
J'ai envie de prendre la main d'Isis, posée sur l'accoudoir, mais n'ose pas
Comme d'habitude...


"Mesdames et Messieurs veuillez attacher vos ceintures pour la durée de l'atterrissage"
Nous voilà dans l'aéroport, pas très bien réveillés dans mon cas - j'ai vaguement somnolé sur la fin du vol- nos valises récupérées et servant de siège comme nous attendons le taxi qui doit nous emmener à l'hôtel. Il fait beau, chaud, et nous avons une journée entière avant de rejoindre le bus qui nous emmènera aux chutes du Niagara.

Les sports. Quand j'avais vu l'affiche au réfectoire, j'avais pas vu la suite. Du coup, je m'étais énervée seule: Du sport pour les vacances? C'était quoi cette arnaque?! Mais poussée par la curiosité de savoir, qui était les masos qui voulaient y participer, j'avais enfin vu le titre entier, et en cinq secondes, me voilà inscrite pour un voyage sur le thème des sports extrêmes. Forcément, ce n'est qu'après m'être inscrite que j'ai vu que Dunkan serait de la partie. Ahah. Quelle joie... Fuck.

Mais ç an'eut aucun effet sur mon enthousiasme, et en quelques jours à peine, le voyage était organisé, et nous voilà dans l'avion. J'avais rencontré Isis, une jeune fille qui m'avait paru assez sympa comme première impression. Nut l'avait d'ailleurs aussi ressentie ainsi, puisque à peine les présentations furent faîte, que mon ami furet était allé se fourrer dans ses bras. J'avais dû le rappeler à l'ordre.
Avec Dunkan en revanche, tout juste un bonjour soufflé pour la forme, et un accord tacite d'entente cordiale, afin que le voyage se passe plus ou moins bien.
Et enfin, Astel. Un jeune homme à l'allure timide, que je n'arrivais pas bien à sonder. En clair? Aucune bonne connaissance. Les vacances s'annonçaient bien tiens!

Dans l'avion, soulagée que celui-ci ne fasse pas une chute comme la croisière avait finie en naufrage, je m'étais endormie, assise à côté d'Astel et d'Isis. J'avais remarqué le regard d'Astel sur celle-ci, mais n'en pipa mot. Ce n'était pas mes affaires.

Enfin, on amorça la descente, tous plus  ou moins réveillés mais assez engourdis par les heures de vol.
A la sortie, je retrouvai Nut, qui me lança un sale regard, n'ayant visiblement pas aimé le voyage en cage dans la soute. Moi non plus j'avais pas aimé le laisser là, mais Toto et lui n'avaient pas eu le choix...
Nos valises arrivèrent enfin, et je bénis le ciel (en lequel d'ailleurs, je ne croyais absolument pas depuis trois ans...) de ne pas avoir à rejouer le fiasco de Mexico. Mes vacances ayant été depuis le début un vrai carnage, et bien qu'elles en soient tout de même de bons souvenirs, j'espérais que cette fois, cela se passerait bien. Notez ici que vu que je les passais avec des inconnus et Dunkan, on pouvait pas vraiment dire que ça partait bien, ni que je pouvais être rassurée.

Nous avions un jour à attendre avant de rejoindre les chutes du Niagara. Alors... Puisse le sort nous être favorable? Comment ça c'est pas la bonne formule? Ah oui c'est vrai! D'ordinaire, on dit "Bonnes vacances".

Le short, mais quelle idée... Je crois que cette pensée a occupée une bonne partie de mes pensées pendant un bon paquet de temps. Devant Astel en plus, en short... Ça faisait tellement longtemps que je n'avais pas vu mes jambes sans un bout de tissu pour les protéger que je n'avais pas remarqué à quel point elles étaient devenues fines et chétives. Pourtant j'avais pris soin d'étirer mes muscles tous les matins et tous les soirs, de marcher de temps en temps avec l'exosquelette pour qu'elles n'oublient pas les mouvements... Peine perdue, mes jambes maigrissaient comme si elles s'asséchaient. Quelle idée de mettre un short, déjà qu'en fauteuil j'ai pas l'air super en forme...
Mon fauteuil en a d'ailleurs embêté plus d'un. Déjà que pour l'aéroport il faut arriver tôt, mais alors avec un handicapé... J'avais un peu honte devant tous ces gens qui me regardaient comme si j'allais faire échouer leur entretient d'embauche, mais pire que ça, Dunkan ne cessait de me demander "comment ça va ? Tu as mal ? Tu veux que je t'aide ?", tellement qu'il en devenait lourd. J'ai toujours aimé cette partie de lui hein, mais dans ces moments là je préférerai qu'il se taise. Quoique, quand il ne faisait pas ça, il jetait des regards tueurs à la fille aux magnifiques cheveux roux avec moi. Ludmila, il m'en avait longuement parlé, sa camarade de sciences. Entre nous, le simple que fait que Duky se souvienne d'un nom ou d'une personne -quand bien même ça serait pour se plaindre d'elle- me prouve qu'il a un minimum d'estime. Il ne me parlerait jamais de ses ennemis, par exemple.
En plus, désolée mais cette fille a un furet. Qui d'ailleurs a du directement sentir que j'avais de l'affection pour les animaux puisqu'il s'est bien détendu en ma présence. Je regardais par contre Toto du coin de l’œil, l'intimant de ne pas se montrer aussi agressif que son maître, sinon on allait pas s'en sortir. Mais parfois, Toto est plus lucide que Dunkan, au pire on risquait qu'il titille un peu l'autre animal, pas plus. Et au pire du pire, Astel serait là... J'espère.
Je ne parlais pas beaucoup du voyage, l'esprit encombré par le short et bien sûr par l'épreuve qui allait suivre. Un saut à l'élastique en haut des chutes du Niagara ? Je n'avais pas hésité une seconde. Après tout, si voler avec Aoi m'avait fichu la frousse c'est parce que je ne tenais sur rien de scientifique, un élastique c'est déjà différent : c'est solide et réel, pas d'hésitations à avoir, donc.
A l'arrivée des bagages, il ne fallut pas deux minutes pour que les animaux soient hors de leurs cages et cajolés sur les épaules de leurs maîtres respectifs, tandis que je regardais Astel du coin de l’œil. C'était sa première sortie depuis... Depuis que j'étais allée le chercher là bas. Il n'avait pas l'air d'avoir peur mais je m'inquiétais quand même, n'arrivant pas à oublier l'état dans lequel je l'avais récupéré...
Une fois à l'hôtel, je me bourrais de cachets pour m'endormir tandis que les deux garçons semblaient avoir un problème pour la chambre (enfin surtout Dunkan, je savais bien que dans la même pièce qu'Astel ça collerait pas...). Mais du moment qu'il s'en prenait pas à Ludmila en même temps, ça allait.

Le lendemain, c'était l'excitation totale. plus qu'une petite demi heure à peine et on y serait ! C'était plein et touristique mais je n'avais qu'une hâte, sauter, voler... Dunkan partageait de façon encore plus démonstrative mon envie en sautant de partout (il avait un numéro d'acrobate, la hauteur ne lui a jamais fait peur, à l’instar de ses parents), et Astel n'avait pas l'air trop embêté non plus.
La cascade géante faisait un bruit d'Enfer, si bien qu'il fallait crier trèèèèès fort pour s'entendre. On voyait les touristes en bas dans leurs bateaux, ils paraissaient tellement petits... personnellement je trouvais ça quelque peu effrayant que la ville soit juste à côté d'un pareil phénomène naturel. On avait par contre du laisser nos animaux en cage, en bas, et je trouvais ça plus sécurisé, tout de même. Quoique l'image d'un singe ou d'un furet sautant des chutes du Niagara aurait fait un carton sur le web, vous pensez pas ? Vade retro, idée stupide...
Tournant mon fauteuil roulant avec un petit sourire pétillant, je regardais notre petit groupe mal formé.

_ C'est la première fois pour tout le monde, je suppose, personne ne prend peur maintenant pas vrai ! Qui veut faire le saut de l'ange en premier ?

Je me proposerai bien mais pour le coup, ils vont mettre plus de temps à m'installer avant de me jeter dans le vide. Et je ne voudrai pas faire attendre mes amis.

Le site était grandiose, je dois l'avouer. Le bruit était tel qu'on devait crier pour se faire entendre. Mais on était là pour ça non?
Je n'avais jamais vraiment voyagé. Du coups, il était facile pour moi d'être émerveillée par la beauté du spectacle. Il n'y a pas de mot pour décrire que j'ai vu. C'était juste magique.

Dunkan me faisait rire à sauter partout et dans tous les sens. Il avait l'air monté sur ressors. Quand à Isis, bien qu'elle fût plus calme, on voyait nettement son excitation à peine contenue. Finalement, le plus calme restait Astel, un bien mystérieux jeune homme. J'avais appris qu'il était d'affinité terre, tout comme Isis.

Finalement, nous étions tellement obnubilé par les lieux que nous en avions oublié la raison de notre venu.
La jeune Terre pourtant nous le rappela avec conviction et envie.

_ C'est la première fois pour tout le monde, je suppose, personne ne prend peur maintenant pas vrai ! Qui veut faire le saut de l'ange en premier ?

Euh...? J'étais venue pour ça, et je ne le regrettais pas. Jamais. Personne ne se dévouait. Je crois que nous étions tous un peu sonné par les lieux, la raison de notre présence, l'épreuve à venir, l'excitation et le miracle de pouvoir sortir de Terrae. C'était tellement inattendue.
Comme il falalit bien que quelqu'un se lance un jour, j'ai avancé d'un pas.

- Bon, il faut bien un sacrifié pour vérifier la fiabilité du matériel non?

Oui, j'avais une façon rassurante d'annoncer que je me dévouais; Osef, j'étais en vacances. Un moniteur m'expliqua grosso-modo ce qu'il allait se passer tout en m'harnachant dans un enchevêtrement de harnais et de cordes assez hallucinant. Pourtant, en quelques minutes, je me retrouvai attaché à un élastique. Je vous assure que quand on vous prouve que c'est la seule chose qui vous maintiens en vie à l'instant, vous priez pour qu'il ne fasse pas comme l'élastique qui vous a explosé entre les doigts ce matin en vous coiffant!
Je m'avançai au bord et jetai un rapide coups d’œil. C'était exactement LA chose à ne PAS FAIRE. Oui j'étais idiote, je sais.
On me demanda si ça allait aller, puis on me précisa que j'y allais dés que je me sentais prête. Oh le merdier. Mais où étais-je allée chercher l'idée de sauter dans le vide?!
Je me tournai vers mes compagnons. Même Nut m'avait abandonné sur ce coups-là. En voyant Dunkan, je l'accusai mentalement de vouloir que l'élastique lâche au moment de ma chute. Je leur adressai un sourire.

- Bon ben... On se retrouve après.

Et sans un regard en arrière, je basculai dans le vide. Je crois que mes cris résonnent encore dans les chutes de ce qu'ils ont été puissants. Le vide. L'air vous giflant le visage. La pesanteur vous attirant vers le sol. Vos cheveux fouettant le vent. L'adrénaline parcourant chaque millilitre de votre sang. La peur se déversant dans vos veines. Et finalement, la délivrance. La liberté ressentie au moment où la peur s'évanouie. Le plaisir du moment succédant la panique. Le bonheur de l'instant et la paix intérieure. Et finalement, le silence qui poursuit vos cris intenses.
Ce que je ressentis ce jour-là, n'était rien d'autres que le plaisir. J'avais sauté. Et je ne regrettai pas.

HRP : On va pas attendre Astel pour le moment, j'essayerai de la bouger plus tard xD


Mais mais c'était une catastrophe ! Mon amie d'enfance et parfaite acolyte, mais non pour pas que ça soit parfait, il fallait qu'il y ait l'autre intrus et ma... Camarade de cours, je suppose, aucune idée de comment je dois la considérer. Elle m'a giflé, puis aidé, puis - ouais bref c’est compliqué ! Du coup Toto montre un peu les dents devant son furet -non mais c'est quoi cette idée d'adopter un furet ?! Ça pue ces trucs là en plus !- tandis que j'essaye de répondre à chaque regard doux d'Astel par un regard furieux. Non mais, comme si j'allais le laisser s'approcher d'Isis, arriviste ! Je sais que c'est profondément injuste, mais je n'arrive pas à m'y faire, ils ont l'air de tellement bien s'entendre sans moi... OUI je suis jaloux quoi ! Oui je boude !
Enfin visiblement Isis s'en est rendue compte et Ludmila aussi du coup j'essaye d'éviter les coups tordus. Mais dès que je peux je lui dais un croche pâte, juré.
Alors que nous sommes au dessus des flots, de la cascade, je laisse échapper un ricanement entre l'excitation et la nervosité. Excité, parce que ça fait un sacré moment que je n'ai pas sauté, que j'ai vraiment envie de le faire, même sans corde, même si c'est complètement suicidaire. Je veux ressentir ce vent dans mon visage, cette tension dans mes tripes... Et nervosité. Combien de temps ça fait, depuis la dernière fois ? Est ce que ça n'est pas trop haut ? Est ce que je ne vais pas avoir peur ? Est ce que je ne vais pas avoir...
Un coup d’œil vers les autres me rassure. Eux ils ne l'ont jamais fait et pourtant ils n'ont pas la moindre appréhension, je vais passer pour une mauviette quoi ! Je serre les dents et grimace. Allez, je suis sûr que j'ai pas trop perdu !
Mais c'est Ludmila qui se "sacrifie" en première, et je me surprends à penser que ça serait bien que ça soit un vrai sacrifice. J'aimerai bien lui crier un truc méchant mais je suis sûr qu'elle l'entendrait même pas à cause du bruit. Alors je la regarde hésiter avec un sourire vilain, puis se jeter en hurlant de toutes ses forces. Non mais regardez la quoi... J'espère que je vais pas hurler comme ça.
Elle se fait lentement remonter pendant que je me propose énergiquement pour prendre sa suite. Parce que j'en peux plus d'attendre, à me remuer sur la passerelle comme un gamin. C’est moi, il FAUT que je saute, ça fait tellement longtemps que je n'ai plus ressenti ça, tellement longtemps que j'en avais eu envie.
Je m'attache, et à peine Ludmila détachée, je me dirige vers le ponton, alors que que toutes les protections ne sont pas encore attachées. Je regarde en bas. L'humidité est énorme, pas sûr que j'y vois grand chose et je vais finir trempé. Je souris. C'est haut. Wow, c'est haut.
A peine installé, je saute.
Pas vers le bas, vers le haut.
Je saute du ponton.
Sans un cri. Juste avec un grand sourire.
Je rigole de plaisir.
Ce vent, cette prise de risques, cette impression de tomber, de voler ! Je quitte tout, mes pseudos pouvoirs, ma pseudo vie, je laisse tout ça, je vais trop vite pour que tous mes problèmes puissent me suivre. Je rigole, je ris putain ! Ça faisait tellement longtemps que je voulais revivre ça.
Je pleure, lorsque je sens les cordes me remonter. Je pleure de bonheur. Suspendu dans le vide, j'attends qu'on me remonte, lentement.

_ JE VEUX LE REFAIRE ! Je veux trop le refaire, putain...

Et je pleure de bonheur.