## Dim 1 Nov 2015 - 0:31 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Mon souffle se bloque dans ma poitrine, je reste un moment hébété. Mes yeux fixent le mur et je me sens projeté des années en arrière. Presque des mois, en réalité. Les mauvaises nouvelles sont toujours annoncées par téléphone, ou par lettre. Ipiu est rentrée de son voyage en France. Ipiu est rentrée de son voyage en France, mais elle est dans le coma. Vous savez quoi ? J'ai pleuré. J'ai pleuré parce que je ne savais pas si elle allait survivre, parce que je me sentais à la fois coupable de l'avoir laissée partir et coupable de n'avoir pas su la retenir. Coupable de la voir allongée pendant des jours sans rien faire, le cœur en lambeaux, l'esprit ailleurs, tellement ailleurs. Le temps a passé tellement lentement, quand on est assis comme ça, à attendre. Je cherche du réconfort où je le peux. Je cherche du réconfort où j'arrive à en trouver. C'est dur de sourire, de faire comme si tout allait bien. Mais une fois de plus, tout ne va pas bien. Une fois de plus, tout va trop mal. J'aimerais qu'elle soit assise dans mon salon à me dire de fermer ma gueule parce que je fais trop de bruit pour les oreilles sensibles de Blobby. Cette fois, ce n'est pas une mauvaise nouvelle, je crois. C'est à la fois un espoir qui naît et qui se brise lorsque j'ai Norah au téléphone. Elle est réveillée. Elle est en état de choc. Elle devrait tenir le coup. Attends Aaron. Attends. Il faut que je te dise... Tu es sûr de vouloir savoir ? Aaron. Aaron, elle va plus pouvoir marcher. Elle va plus jamais remarcher. Aaron ? Tu tiens le coup ? Aaron ? Aaron ? Et moi j'suis con, et je continue à pleurer. Parce que c'est pas comme ça que je l'ai connue et que je refuse carrément de la voir comme ça. Mais rien à foutre. J'essaie de me calmer et je me fous des claques, je prends ma veste et je cours à l'hôpital. Mal. Mal. Mal au cœur. Ipiu. Ipiu. Toumaï. Ou peu importe comment tu veux qu'on t'appelle. Je m'en fous. Toi. Salope. — Espèce de sale conne, je fais en poussant la porte de sa chambre plus violemment que je ne l'aurais voulu, les yeux brillants d'une lueur indéfinissable. Tristesse, amertume, colère, haine, joie, douleur. Et on recommence. Encore et encore. — Espèce de sale pute... Et je pleure. Je me remets à pleurer. Parce que je sais pas quoi faire d'autre, que je suis démuni, que je sais plus quoi faire. Tu m'as rendu plus fort. Tu me rends plus faible. Qu'est-ce que tu fais de moi ? J'ai eu peur. Je croyais que tu allais mourir. J'ai envie de te serrer dans mes bras, j'ai envie de te frapper. Je n'avance pas. Je reste bloqué à l'entrée de la chambre. — Pourquoi est-ce que t'as fait ça ?! Aaron, les hommes ne pleurent pas. |
## Dim 1 Nov 2015 - 1:39 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
“- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Lun 2 Nov 2015 - 18:45 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Pourquoi est-ce que tu pleures, Aaron ? Mon cœur se serre encore, si fort, tellement fort. Ma poitrine me fait mal, ma respiration est difficile. J'essaie de me calmer, mais le calme ne revient pas. Les premiers mots qui m'échappent sont des insultes, et les suivants en seraient d'autres si je ne m'étais pas contenu un minimum. J'essuie mon visage de ma manche, me retiens de hoqueter comme un enfant. Je darde sur elle un regard douloureux, haineux, trouble. Comment est-ce que t'as pu faire une connerie pareille ? Comment est-ce que tu peux me parler comme ça, comme toujours, comme une grosse conne ? Pourquoi tu souris, pourquoi t'es si sereine ? Tu n'as pas le droit d'être sereine, tu n'as pas le droit de ne pas être triste. Est-ce que t'as pris un coup au cerveau, ou alors t'es juste complètement stupide ? Difficilement, j'essaie de reprendre une inspiration, de ne pas me laisser envahir par tous ces sentiments qui tourbillonnent. Certainement les sent-elle, et j'espère qu'elle les sent passer. J'espère que ma colère et ma tristesse l'assommeront. En même temps, je suis tellement heureux. Heureux qu'elle soit en vie. J'ai eu tellement peur. Pourquoi elle veut pas le comprendre ? J'ai pas envie de plaisanter maintenant. Pourtant, j'en ai tellement besoin. J'ai envie de sourire, de rire. Pourquoi est-ce qu'elle aussi a failli mourir ? Je ne voulais pas. Elle pense jamais aux autres ou quoi ? C'que j'aimerais surtout savoir, c'est ce qu'il s'est passé. Et c'est pas d'Hideko ou Nikkou que je veux entendre ça. ... De toute manière Nikkou a un peu de mal avec moi depuis que je l'ai collé à un mur, quand on m'a appris qu'Ipiu était à l'hôpital. J'étais tellement en colère... Il a suffi que je croise son regard, qu'il me dise "Arrête Aaron, ça sert à rien, je suis désolé ok" pour que je le prenne au col. Il n'a rien dit et m'a laissé lui vociférer dessus qu'il était qu'un con, qu'il aurait dû être là, qu'il aurait dû l'empêcher de faire des conneries. Mais je dis ça... au final, je sais que j'aurais jamais été capable de la sauver, moi aussi. Et ça me fout encore plus le cafard. Parce que quoi qu'on aurait fait, ce serait arrivé. — Une grognasse a décidé que ce serait cool de bouffer un arbre et a joué à la belle au bois dormant pendant deux putains de longs mois. Je chope une chaise et la ramène à son chevet, m'installe en terminant de sécher mon visage. Mon cœur bat trop vite. Sa voix. Ses yeux. — Arrête de te foutre de ma gueule. Ces deux mois étaient abominables. Blobby s'est senti délaissé. Moi aussi. — C'est toi qui est moche, de toute manière. Ça devrait être interdit de montrer une telle tête en public. Faudra mettre une cagoule pour sortir de ton trou, je lâche, acerbe. Un silence s'étire, je me passe la main sur le visage. Je ne veux pas penser à toutes ces nuits où j'ai fini par laisser tomber l'idée de la revoir. Maintenant, ça devrait aller... ça devrait aller, pas vrai... — Je suis content que tu sois réveillée. Même si t'es en kit. Elle est vivante. Elle est vivante, putain. Elle respire. |
## Lun 2 Nov 2015 - 20:54 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
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## Mar 3 Nov 2015 - 18:32 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Calme-toi, Aaron. Tout va bien se passer. Il faut juste que tu te calmes. Ça sert plus à rien de paniquer maintenant. Ça ne pourra qu'aller mieux, pas vrai ? Pas vrai ?... Ipiu est là, elle est allongée dans son lit, avec sa gueule de zombie bienheureux, et elle me regarde. Elle a pas l'air de tout capter, ou alors elle fait exprès de pas tout capter, je comprends pas bien ; elle a toujours été comme ça. À rejeter l'éventualité qu'on puisse l'apprécier. Mais Ipiu, un jour tu seras bien forcée de l'admettre : si tu mourrais, ça ne changerait pas "rien". Ce serait un trou béant, une absence déchirante. Je me masse la tempe doucement, alors qu'une migraine repointe le bout de son nez. C'est pas dit que j'arrive à lui faire comprendre c'que je ressens de toute manière. C'est pas qu'elle s'en fout, mais elle est bornée, et elle écoute jamais rien quand on lui explique un truc. Si c'était pas un génie, on aurait pu croire qu'elle était débile. Un soupir m'échappe. Le pire, c'est que son jeu de mot est drôle. Mais elle me fait pas rire. J'renchéris quand même, en espérant réussir à me distraire : — Ta blague me scie en deux, je soupire. Puis je relève les yeux vers elle. Essaie de ne pas trop la détailler - parce que j'ai suffisamment eu l'occasion de l'observer pendant qu'elle dormait. Pas besoin de songer au fait qu'elle a perdu quelques kilos. Vous me direz, elle a dû perdre une taille de bonnet, elle doit être contente ! Ce sera plus pratique pour dormir sur le ventre. Ahah. Lol. Elle attrape un mouchoir et m'essuie la joue, normal. Je bug un peu quand elle le fait, mais ne l'en empêche pas. J'ai pas la force de me battre, aujourd'hui, et je suis trop content de retrouver ma p'tite blonde. Quel que soit son nom. — Tu ferais faire une crise cardiaque aux gosses, je lâche en attrapant le mouchoir pour me lever, le rouler en boule et le jeter dans la poubelle, perdue dans un coin de la pièce. Ça me permet de ne pas répondre tout de suite. Un sourire las, alors que je retourne mon regard vers elle. Puis retourne m'assoir. — Ouais. Deux mois. C'est Halloween, et t'as eu ton... accident (le mot m'est arraché de force) en août. Fin août. J'sais pas si tu t'en rappelles. Est-ce que ça changerait quelque chose, si elle se rappelait ? Si elle ne se rappelait pas ? J'sais pas vraiment. J'hésite, sais pas comment m'y prendre. J'ai envie de lui poser des questions, de lui demander à elle pourquoi elle a été aussi imprudente. Ce qu'il s'est passé. Pourquoi elle ne t'a pas demandé de l'accompagner. Mes yeux se baissent sur les draps et se perd dans le vague. Quelles questions lui poser ? Est-ce que je dois lui en poser ? Est-ce que ce serait pas plus simple pour tout le monde d'ignorer, d'être simplement là, de- — Ipiu, te remets plus en danger comme ça... je souffle à mi-voix, la gorge serrée. J'me penche, m'affale sur son lit comme on s'affalerait sur sa table, en cours, la tête posée sur les bras. — J'sais pas si pour toi ça signifie vraiment quelque chose, mais je suis sérieux, je soupire en fermant les yeux. Comment est-ce que tu te sens ? |
## Mar 3 Nov 2015 - 20:03 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
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## Jeu 5 Nov 2015 - 20:49 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Toujours, elle ne comprend pas. Elle me fixe, un peu à côté de ses pompes, sans vraiment réaliser. Sans réaliser que ça fait effectivement deux mois qu'elle dort. Deux mois qu'on attend de savoir si elle va se réveiller. Elle doit penser que je m'en fous ; que c'est pas possible. Parce qu'elle me répond pas, qu'elle reste profondément silencieuse, profondément enfermée dans son mutisme. Son cœur balance. Le mien fait de même. Finalement, je m'affale sur son lit. Lui demande de ne plus faire ça. De ne plus me faire ça. S'il te plaît. Mes yeux se ferment un instant, et je soupire. Puis, quelque chose se produit. C'est quelque chose de doux et de terrible à la fois ; un cœur qui se réchauffe, qui s'illumine, et ce pincement qui l'accompagne, ce pincement à la fois douloureux et rassurant. Ce pincement qui finit par s'accompagner d'un reniflement, et d'une respiration plus rapide. Je lève les yeux, la fixe sans comprendre, le cœur battant. Ipiu... Ipiu, mais qu'est-ce qui t'arrive ? Elle se met à pleurer. C'est la première fois, je crois, que je la vois dans cet état. Un instant, je panique. Attrape la boîte de mouchoirs pour en tirer un, l'aider à essuyer son nez qui coule. Mon autre main caresse ses cheveux doucement, et je lui souris, légèrement. C’est bancal, comme toujours, j’ai l’impression ; mais sa réaction est… je sais pas. Elle réchauffe mon cœur aussi, quelque part. Peut-être parce que maintenant, elle a enfin compris. — Hé, Piu, pleure pas comme ça… La situation est étrange. Parce que je ne l’ai jamais vue si fragile, si profondément humaine. J’ai envie de la serrer dans mes bras, de lui dire qu’elle a pas de raison de pleurer et que de toute manière, c’est pas une nouveauté, que j’aurais été là peu importe le moment. J’aurais préféré qu’on ait pas à se montrer tout ça, pourtant, qu’on soit pas là, dans cette chambre d’hôpital, et même si ça me fait plaisir, ça me fait aussi tellement de mal. À quel point a-t-elle été ébranlée par ce voyage, pour finir dans cet état-là ? Habituellement, c’est elle qui me ramasse à la cuillère. Peut-être qu’il est temps de lui montrer qu’on peut échanger les rôles sans trop de souci ? Moi aussi, je sais que tu tiens à moi. C’est suffisant, tu ne crois pas ? Je roule le mouchoir en boule et le pose sur la table de chevet, en reprend un autre pour continuer à lui essuyer le visage, en essayant de ne pas l’empêcher de respirer. Enfin… vu comme elle sanglote, j’me doute que ça doit déjà pas être génial. — Dans ce cas, tant mieux, si ça va, je lâche d’une voix plus douce. Tu vois, moi aussi je suis là pour torcher tes merdes. Trait d’humour. J’ai toujours pas digéré cette fois où elle m’a ramassé, mais je sais surtout que je lui en suis reconnaissant. Parce que j’aurais pas pu me relever de la même manière si elle ne l’avait pas fait. — Moi aussi je suis content de te revoir, abrutie. |
## Sam 7 Nov 2015 - 13:01 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
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## Lun 9 Nov 2015 - 23:01 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Tout a changé, d’un coup. Ipiu se met à pleurer, et j’essaie de la consoler sans trop savoir quoi répondre, sans trop savoir quels mots employer. Plus je parle, plus elle pleure ; c’est horrible, on dirait que ça va jamais s’arrêter. Je prends plusieurs mouchoirs, m’occupe de lui essuyer consciencieusement le visage et le nez, gentiment. J’essaie d’être présent pour elle, lui montrer que moi aussi je peux être là, qu’elle est pas toute seule, qu’elle sera plus jamais toute seule. Mais je sais pas quoi faire, je panique, j’ai l’impression de pas bien m’y prendre, je sais pas si je la rassure ou lui fais encore plus de peine, je sais pas si j’ai pas l’air d’un gros débile ou pas, je suis tellement dépassé par les événements que je me retrouve à faire de mon mieux sans que rien ne s’arrange. C’est un peu l’histoire de ma vie, là. Ne panique pas, Aaron, ça va, tu vois que ça va, putain, Ipiu est juste en train de te chialer dessus, c’est normal, tout est putain de normal. Elle se met à pleurer de plus belle et, sans que je comprenne comment, je me retrouve penché sur elle, elle accrochée à ma chemise. Mes bras se referment autour de son corps trop maigre et je ferme les yeux en la berçant. J’essaie de ne pas lui faire mal, j’ai trop peur de la brusquer, de la briser, elle a l’air tellement fragile et ce n’est définitivement pas normal. On reste comme ça un moment, jusqu’à ce qu’elle se calme d’elle-même, et j’ajoute rien au début. Je me contente d’essayer de la rassurer maladroitement, comme le bon gros boulet que je suis. Je l’entends presque me dire « Regarde comme on est pitoyables tous deux, à pleurer comme des loques. » Parce qu’elle pleure, mais j’crois que je pleure aussi. Pas avec la morve et tout, c’est juste que mes yeux piquent, que ça me fait du bien de la retrouver, que je suis heureux de ne plus avoir à me demander tous les soirs si elle va survivre au jour qui suivrait. Je ne voulais pas avoir à me dire, pour la deuxième fois cette année, que j’allais devoir porter le deuil d’une de mes amies proches, alors qu’on avait partagé autant de trucs. Je voulais pas… Je reprends une inspiration tremblante et douloureuse, la gorge serrée. — Arrête de t’excuser. Je te ferai payer tout ça, alors arrête de t’excuser. Mes yeux se ferment, je la garde contre moi. — J’me démerde comme une quiche quand t’es pas là pour m’aider à traduire mes énoncés d’exam, je lâche d’une voix qui se voudrait enjouée mais n’est qu’enrouée. Doucement, je m’éloigne, fait mine de la recoiffer un peu. J’ai un sourire doux, tordu, étrange. Mais il exprime mon affection, ma douleur, ma joie, mon inquiétude. Si elle savait à quel point ces deux mois ont été longs. Si elle savait à quel point j’ai pété les plombs. Gaetano m’a ramassé à la petite cuillère, et j’ai tenté de sourire, d’écouter les élèves, de dire des conneries, de tout faire, toujours, pour que tout ait l’air de bien aller dans ce monde de merde. Mais ce monde était trop silencieux, bien trop terne ; j’avais besoin d’une petite couleur violine et de cheveux blonds, d’une voix de casse-couilles qui me reprenne dès que je faisais un pas, qui me traitait de gonzesse quand j’avançais pas. Ça ne changera pas, hein ? Déjà avant son départ, elle s’était éloignée, un peu. Elle disait qu’elle voulait surtout pas déranger ou risquer de me retrouver encastré avec mon mec (l’image est plaisante n’est-il pas) mais j’sais pas si elle avait déjà prévu de faire de la merde, ou si c’était effectivement un accident. J’essaie de laisser ça de côté, on en parlera plus tard, c’pas le moment. Mais quand je l’ai dans mes bras, là, je pense à tellement de choses à la fois, tellement de choses que j’aimerais lui demander et lui dire, que je sais pas bien comment j’arrive encore à distinguer la moindre pensée claire dans tout ce fatras. Je reprends un mouchoir pour reprendre mon ouvrage. — Tu as faim ? Ou soif ? On se fait un dîner aux chandelles ce soir s’tu veux. Ça fait longtemps. L’électrocardiogramme comme musique, les ampoules au plafond comme chandelles et tes perfs comme vin. Nos soirées à nous, elles ont toujours été mémorables, pas vrai Ipiu ? |
## Mer 11 Nov 2015 - 1:21 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
“- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Dim 15 Nov 2015 - 21:02 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | On se calme, on se calme Aaron. Comme ça. Lui essuyer consciencieusement le visage, lui sourire comme je peux, tenter de parler, de pas faire attention à mes yeux qui doivent ressembler à ceux qu'un vampire typé film d'horreur. Rouges d'avoir pleuré, les paupières gonflées peut-être, au moins un peu. Alors je ris, parce que j'ai pas grand-chose à faire de plus. Je ris, de mon rire faible et étranglé, parce que c'est comme ça que ça devrait se passer. — Eh, si je te le disais, ce ne serait pas drôle. J'trouverai bien une manière de te le faire regretter. Ma main passe dans son dos pour le frotter gentiment, avant de l'aider à se rallonger, parce que je sais pas si rester dans cette position lui fait mal ou quoi. Mieux vaut prévenir. Je hausse les épaules, ignore sa phrase sur les programmes de lecture. J'le faisais déjà, mais ça m'empêche pas de trouver ça plus plaisant quand c'est en sa compagnie. J'aime bien les machines, mais elles ne remplaceront jamais l'homme. (C'est exactement pour ça que je ne me suis pas marié avec mon ordi ; honnêtement, le porno, ça va cinq minutes, mais j'ai des besoins, tout d'même.) Allez, concentrons-nous. C'est l'heure de bouffer, mais j'ai pas vraiment faim. Elle si, peut-être ? J'interroge, avec elle c'est bien le seul moyen d'avoir une réponse claire. Et encore, même en posant des questions, elle trouve le moyen de les contourner. Elle est comme ça, Ipiu. Ce n'est pas un mal, mais ce n'est pas toujours un bien non plus. Je souris. Faiblement, encore, parce qu'elle a l'air tellement fatiguée en te parlant. J'me demande si je devrais pas la laisser un peu seule, pour qu'elle se repose, et j'me dis que si elle avait envie de dormir elle me jarterait probablement. Ou peut-être qu'elle aurait peur ? Cette pensée se fraye un petit chemin dans ma tête, et je la balaie d'un battement de cil, alors qu'une infirmière entre. Je me lève, me pousse dans un coin de la salle pour ne pas déranger, avec l'impression de ne pas avoir le droit d'être là. Mais la femme ne me dit pas de partir, se contente de vérifier si tout va bien. Puis elle ressort, avec un petit regard qu'elle me lance et que je ne lui renvoie pas, me contentant de hocher la tête avec lenteur pour la remercier. J'allais revenir m'assoir, relancer une vanne, ou bien me diriger vers la porte pour aller lui chercher de la bouffe, je sais même plus, quand elle dit ce qu'il ne fallait pas dire. Quelque chose se bloque dans ma gorge et je détourne douloureusement les yeux, comme pris au piège. Puis je retourne m'assoir près d'elle, après hésitation, dans le silence le plus complet. Cette fois, je ne souris pas. — Si tu es trop fatiguée, je peux te laisser dormir. Je repasserai, de toute manière. Est-ce que j'ai vraiment envie d'entendre ses réponses, au final ? Mais quelque part, j'ai besoin de comprendre ce qu'il s'est passé. Je joue avec sa main, ses doigts, sans vraiment m'en rendre compte, et plus parce que j'ai besoin de m'occuper que parce que j'aimerais la rassurer. Ça aussi j'le sais ; c'qui est fait est fait, maintenant ça sert plus à rien de pleurer. Mais elle sait ce qu'il s'est passé, je crois, et pas moi. De toute manière, pas la peine de me justifier à ce niveau-là, elle sait me comprendre. Je crois. Même si jusqu'ici, elle a été complètement à côté de ses pompes… — Je sais pas trop quoi te poser comme question. Je crois que j'ai juste besoin de comprendre ce qu'il s'est passé. Tu as envie de m'en parler ? La raison pour laquelle tu es partie en pleine nuit ? J'ai hésité, et ça se sentait. Mais c'est vrai, qu'est-ce que je peux lui demander ? Si c'était délibéré, quand elle s'est foutue dans ce platane, ce qu'elle comptait faire, si elle avait tout planifié depuis le début, sa fuite, tout ça ? Toutes ces questions sont déjà comprises dans celle que je lui ai posée. Et encore, ce n'est pas une interrogation. Juste une invitation. J'aimerais qu'elle puisse me faire suffisamment confiance pour tout déballer, maintenant. Elle en est pas obligée ; de toute façon j'ai jamais réellement pu la forcer à faire quoi que ce soit. C'est triste, hein ? |
## Dim 15 Nov 2015 - 23:10 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
“- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Jeu 3 Déc 2015 - 22:20 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Mes doigts jouent toujours avec sa main. C'est un geste doux, que j'espère ne pas être trop intrusif. Si ça la dérangeait, elle me le dirait de toute manière, du moins je pense. Comme pour tout. Ca me déstresse un peu, me permet de pas me concentrer sur ce qu'elle s'apprête à me dire. Là, ça ne veut pas dire que je ne l'écouterai pas ; j'y serai attentif, mais il faut que je me contrôle. J'ai le coeur comme une patate et la tête comme une citrouille, il manque juste un coup de moulinet et ça donne de la purée. Moi, je dis non à la purée. Et non à la soupe, aussi. Ipiu a l'air épuisée, elle. J'ai vraiment envie de la laisser dormir, pour qu'elle soit un peu au calme, mais elle n'a pas l'air déterminée à me laisser partir. Dans ce cas, je préfère la laisser parler, sans la presser. Elle ne tarde pas à te raconter, parce parce qu'elle en a envie, mais parce que c'est mieux comme ça. Plus vite ce sera dit, plus vite ce sera derrière nous, c'est ça hein ? Je ne partage qu'à moitié le point de vue, mais soit. C'est son choix, alors j'écoute. Doucement, j'acquiesce. Je sais qu'elle n'est pas incassable, tout comme je sais qu'elle a des failles, elle aussi. Elle se donne l'air d'être inébranlable, mais chaque être humain cache une faiblesse, quelque part. Parfois, même l'absence de faiblesses est une faiblesse en soi. Qu'est-ce qu'on est après tout ? Des êtres humains, mais c'est quoi un être humain, au juste ? Quand on voit tout ce qu'on est capables de faire, la manière dont on peut réagir, la manière dont tout peut s'arrêter, si rapidement. Qu'on le décide ou qu'on ne le décide pas, d'ailleurs. Je préfère me dire qu'on a pas le choix. Ca évite d'avoir à songer à faire une connerie, parfois, quand on est au fond du gouffre... On aurait pas pu connaître les bonheurs que l'on vit dans notre vie de tous les jours si tout s'était stoppé avant, certainement. Son récit me serre le coeur, parce que, quelque part, je comprends cette impression de fausseté, cette trahison profonde. Je ne l'ai pas vécue, du moins je crois, mais il me suffit de fermer les yeux et de l'imaginer. Je me mordille la lèvre. Compréhensif. Sans doute aurais-je réagi de la même manière. Tonnerre : actif, malin, changeant et impulsif. Doucement, j'entrelace nos doigts, dans un geste qui se veut innocent et à l'image de ce que je ressens pour elle - de l'affection, simplement, et une volonté de l'aider à traverser ça. Pas toute seule, en tout cas. Ma tête va du haut vers le bas en acquiesçant. Je ne suis pas heureux qu'elle s'ouvre mais je suis rassuré. Je n'aurais pas aimé qu'elle m'invente une histoire à dormir debout. Elle n'en aurait pas été capable dans son état de toute manière, je crois... — T'es pas conne, je souffle. Sinon, on est tous cons. T'es… humaine ? Un sourire embarrassé s'agite sur mes lèvres en disant ça. — T'étais une espionne, la plus douée, ou l'une des plus douées, je m'en tape. Mais t'es aussi Ipiu, ou Toumaï, ou je sais pas. T'es toi, t'es celle qui dit "je" dans ta tête. Et ce petit "je" est humain, et il existe, tu te trompes. C'est horrible ce qu'il t'a fait, mais... Mais quoi ? Mais ne te remets plus en danger pour quelqu'un qui ne le mérite pas ? — Maintenant, je ne sais pas si ça sert encore à quelque chose de te tourmenter avec ça. Tu vas te faire du mal. Là, elle va me regarder et me dire de ses yeux vides "Merci pour le conseil débile, Ronron." C'est dire à quel point c'que je viens de prononcer est maladroit. Mais malgré tout, ça part d'une bonne intention. Et je suis pas psy, moi. — Ca passera, je souffle, un peu piteux. Comme beaucoup de choses... Pas tout, malheureusement, je songe en pensant à ses jambes. Un petit silence s'étire. Je soupire, désespéré par ma connerie. — Désolé, je sais même pas comment te consoler... Qu'elle ne me dise pas le contraire. Je sais qu'elle est triste. |
## Lun 7 Déc 2015 - 23:10 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3719 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 28 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! |
“- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Dim 20 Déc 2015 - 19:30 | ||
Aaron Williams Messages : 3927 Date d'inscription : 28/02/2011 Emploi/loisirs : Prof de maths et papaaaaa ♥ Humeur : Aha ! ... Attendez, c'était une vraie question ? | Elle sourit. Pourquoi est-ce qu'elle continue à me sourire comme ça ? Parce que ça l'apaise ? Que je l'apaise ? J'aimerais bien. Juste pouvoir la laisser respirer un peu, parce qu'elle aussi le mérite ; un peu de calme, de douceur, un peu d'amour, d'amitié, un peu de tout, juste le bonheur, pourquoi pas. Mais le bonheur, c'est quoi ? Est-ce que ça s'atteint comme ça ? Est-ce que c'est pas simplement vain ? Quand je la vois sourire comme ça, brisée comme jamais, j'aimerais me dire que oui. Et je repense à moi, à ceux que j'aime, à celui que j'aime, je repense à tout à tout ça, tout ce qui fait que je suis moi, et je souris aussi. Parce que sourire est une arme dans la bataille de la vie, que si on est pas armé, on réussira jamais à vaincre, de toute manière. On peut pas attendre sans prendre les armes, on peut pas vivre sans sourire ; on peut pas gagner si on abandonne. Abandonner c'est pas notre genre, et c'est surtout pas le sien. Je sais qu'elle abandonne jamais une bataille si elle sait qu'elle a une chance de la gagner, et c'est en ça qu'elle est une battante. C'est pour ça aussi qu'elle m'a ramassé, plusieurs fois, qu'on s'est soutenus, un peu, dans cette maladive tristesse et ce vide qui ronge. Ronger quoi ? Le corps ou l'esprit, la raison ou les sentiments ? Les deux peut-être, est-ce que c'est pas lié aussi ? Est-ce qu'on peut pas penser avec le coeur et ressentir avec son cerveau ? Parce que c'est aussi comme ça que ça marche, c'est pas totalement dénué de sens, non ? Elle ne dit rien, pourtant, et elle garde ce sourire. Elle reste armée, même quand elle glisse dans le sommeil. J'reste un moment, avant de devoir partir, jarté de la chambre par l'infirmière qui me dit que je devrais aller manger, moi aussi. Alors je souris. Je m'arme aussi, de mon courage et de ma foi. J'sais que les temps seront durs mais ils seront jamais plus sombres que ceux qu'on a vécus. Alors je sais qu'on y arrivera. Je sais qu'on y arrivera tous ensemble. |
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