Alice remarque vite que les yeux d’Oksa sont enjoués. Elle ne tarde pas à apprendre pourquoi cela : la jeune femme tente de la rassurer. Ce geste, tout petit soit-il, fait extrêmement plaisir à Alice, qui de plus a bien comprit que l’Air avait du mal à s’ouvrir aux autres. Effectivement, devenir initiée sera un gros changement pour Alice, et bien qu’elle l’appréhende, il lui tarde de découvrir ce qu’elle pourra faire avec ses pouvoirs, comment deviendra son corps. Découvrir pourquoi elle est si particulière.

Elle se laisse faire, docile, nouant ses doigts avec ceux d’Oksa. Ses yeux s’émerveillent devant la magie que crée Oksa. C’est une magie douce, pure, fragile et éphémère et pourtant si jolie. Elle paraît encore fasciné par la magie, pourtant si courante à Terrae : à son arrivée, quand elle déambulait dans les couloirs des tonnerres, les lumières grillaient une fois sur deux, cette magie, bien qu’amusante, n’était pas aussi douce que celle d’Oksa, et sûrement pas aussi spectaclaire.

« Oui, c’est magnifique ! C’est génial, il me tarde de savoir ce que je peux faire ! »

Son rire tout doux accompagne celui d’Oksa. Elle ne lui en veut absolument pas, et cela se voit, elle en rit de bon coeur, ses yeux bleus plissés à cause de l’amusement.
Elle se demande comment Oksa était avant son initiation. Comment elle était avant d’arriver à Terrae. Alice a bien comprit qu’usuellement, on ne se posait pas de questions sur le passé, qui on était avant. Alors elle ne pose pas de question. Elle se contente de sourire à Oksa, parce qu’elle est heureuse de la conversation qu’elle entretient avec elle, parce qu’elle est contente de parler à quelqu’un de sympathique.

Alors comme ça, elle a entendu parler de Pauline Alphen ? Intéressant !

« Oui, je te le recommande vivement ? Et toi Oksa, est-ce que tu as un auteur favori ? C’est quoi ton univers préféré ? »

Alice a de nouveau ce sourire curieux, sa soif d’en apprendre plus sur l’autre pour mieux le comprendre, mieux lui parler.

Alice ne bronche pas alors que nos doigts se lient. Ses yeux s’illuminent même face à mon petit tour, et j’en suis ravie. Elle semble désormais impatiente de découvrir ses propres pouvoirs.

« Tu ne sembles pas Feu ou Tonnerre déjà. Ils sont… Disons plus… Hum… Hyperactifs on va dire ! »

Je ris légèrement. Je n’en ai rencontré que peu en même temps mais la jeune fille me semble bien trop calme. Feu encore pourrait passer mais… Je ne sais pas, elle ne dégage pas cette aura typique qu’ils ont habituellement.

Elle me sourit, et je le lui rends bien volontiers avant de lui répondre.

« Hum… J’ai beaucoup de mal avec cette question… Il y a en a tellement aha ! J’aime voyager à travers mes lectures en fait. Me sentir ailleurs pendant un temps. C’est hyper important pour moi. Sinon je…

- BON ALLEZ VOUS M’EXPLIQUER CE QUE VOUS AVEZ AUJOURD’HUI A FAIRE ATTENDRE LES CLIENTS ? VOTRE PAUSE EST FINIE DEPUIS CINQ MINUTES, JEUNE FILLE. »

Je grimace alors que ma patronne m’interrompt. Posant un regard désolé sur Alice, je soupire et me lève.

« Désolée… Il semblerait que je doive y aller. J’ai été enchantée de te rencontrer en tout cas. »

Je me sens un peu triste, de la quitter alors que nous discutions. J’aimerais la revoir, parce qu’après tout c’est la première personne avec qui j’ai accroché aussi vite. J’hésite quelques secondes avant de me diriger vers l’intérieur, me tournant vers Alice.

« Attends juste un peu s’il te plaît ! »

Rapidement une fois dedans j’attrape un papier sur lequel je griffonne mon numéro. Je ressors et le tends à la jeune fille.

« Tiens ! Tu me tiendras au courant de ta lecture ? »

Je lui souris avant d’entendre ma patronne m’appeler, plus fort qu’auparavant si c’est possible. Je lève les yeux au ciel et repars travailler sur un dernier signe de main à Alice.

Effectivement, Alice ne se sent ni Feu ni Tonnerre. Cependant les trois autres classes défilent dans son esprit, elle n’a vraiment aucune idée de ce qu’elle pourrait être. Cette question lui trotte dans la tête depuis un moment, mais pourtant, elle le prend avec un certain détachement. Elle verra bien. Et pourtant, elle ne peut s’empêcher de s’impatienter légèrement, elle a très envie de savoir ce qu’elle est. Peut être que, comme Oksa, elle sera Air, et qu’elle pourra soigner les gens. Physiquement. Alice a déjà pour habitude de soigner l’esprit des gens, en tout cas à l’aider à se rétablir.

Elle se concentre à nouveau sur les paroles d’Oksa, Oksa qui a d’ailleurs l’air apaisée et bien plus à l’aise qu’il y a un petit moment. Elle parle de ses lectures, et le regard d’Alice se fait étincelant et doux, elle adore connaître les avis des autres, ce qu’ils en pensent et comment ils vivent leurs lectures. C’est ça aussi qui fait qu’elle adore les histoires et les livres. Et puis… Elles se font couper par la patronne d’Oksa. Même si elle n’en dit rien et que c’est très rare chez elle, Alice est un peu irritée par la façon de parler de la libraire. Elle pourrait parler de façon plus courtoise, ou même carrément faire preuve de compréhension non ?
Cependant Alice adresse un large sourire encourageant à Oksa. Elle comprend tout à fait.

« La joie est partagée Oksa. »

Alice est quelque peu déçue, elle aurait aimé pouvoir discuter avec plus longtemps. C’est la première personne avec qui elle a une réelle discussion depuis son arrivée à Terrae et elle espère pour voir la revoir. Elle accepte sans broncher sa demande d’attendre, et reste debout sur les escaliers, le livre à la main, attendant qu’Oksa revienne. Elle attrape le bout de papier, et comprend alors que la jeune femme lui confit son numéro de téléphone, et un rire enjouée échappe à Alice. Bien sûr qu’elle la tiendra au courant, elle reviendra même à la librairie. Elle hoche simplement la tête pour signifier son accord chaleureux et lui rend son signe de la main. Elle reste quelques instants à regarder l’entrée de la librairie, et puis, tranquillement, elle descend les marches, et retourne vers l’institut, les dortoirs, son petit lit, et va continuer tranquillement sa lecture, espérant revoir rapidement la timide demoiselle aux cheveux bleus.