Faut dire que la journée passe comme des milliers d’autres depuis qu’elle est arrivée à Terrae. Elle aurait pu continuer ainsi et être semblables à celles qui passent et à celles à venir sans un menu détail, un tout petit détail. Elle avait froid, et comme quand elle avait froid elle avait décidé de se mettre sous une douche chaude. C’était logique, et cela ne venait pas d’elle mais d’un garçon qu’elle avait rencontré quelques temps plus tôt. Combien ? Elle l’avait oublié, le temps passait sans qu’elle ne l’appréhende, les saisons avaient changé mais combien avaient passé ? Elle ne saurait le dire et le souvenir du jeune homme s’effaçait, de lui ne restait qu’une promesse, celle qu’elle lui avait faite de lui raconter un jour une histoire.
Elle n’oubliait jamais une promesse, même quand elle savait qu’elle ne pourrait pas les tenir. C’était le cas de la promesse la plus importante du moins, celle faite à Adjambo, celle qui disait que vous vieillirez l’une à côté de l’autre. Les choses avaient passé et vous ne parliez plus même par lettres, elle ne savait pas lire mieux que toi lors de ton arrivée et tes lettres étaient lues par le chef du village quand il y consentait, tout comme il écrivait quand il le voulait bien. La distance était devenue nécessaire pour les deux jeunes femmes qui savaient leurs courriers lus. Alors elles ne s’écrivaient plus que rarement, une fois par an tout au plus.
Elle se prélassait sous la douche quand soudainement l’eau devint glaciale cela arrivait de temps en temps, aussi elle dirigea prudemment la pomme de douche contre le mur et attendit que l’eau chaude revienne. Cela ne se fit pas, quand elle le comprit elle sortit de la salle de bain où la buée constellait encore le petit miroir et se sécha, elle s’habilla et partit à la recherche d’informations.
A qui demander ? Elle n’en avait pas la moindre idée, aussi elle déambula dans les couloirs avant d’avoir une brillante idée : et si elle se rendait au centre de l’agitation étudiante, là où les gens se retrouvaient pour discuter. Ce lieu qui pour elle avait la même place à Terrae que l’arbre à Palabres dans son village.
En arrivant dans la salle elle reconnait nombres de visages qui lui sont devenus familiers à force de les croiser dans les couloirs des gens avec qui elle n’a pourtant jamais réussi à parler. Ils parlent entre eux et elle a mal à saisir ce qu’il se passe au travers de brouhaha ambiant. Une histoire de chaudière en panne, ou d’explosion ? elle ne comprend pas tout, les choses sont bizarres ici.
Un seul visage lui est connu, aussi elle se rapproche de lui dont le temps a effacé le nom. Il lui reviendra en parlant elle en est certaine.

« Dis tu sais ce qu’il se passe ? »

Choux, cailloux, hiboux.

C’est qu’elle a une tête de hibou qui ressemble à un chou, de chou qui voudrait ressembler à un hibou. Chouette, elle tord son long coup quand elle incline pensivement la tête sur le côté et le regarde avec de grands yeux remplis d’incompréhension. Sa réaction est trop vive, et comme toujours ils ne parlent pas de la même chose.

« Qu’est-ce que tu caches ? »

C’est sorti avec beaucoup trop de naturel femme chouette. Elle ne sait pas ce qu’il lui passe par la tête mais elle a l’impression d’avoir surpris un enfant en train de faire une sottise. Comme ceux qui volent dans les réserves quand les adultes ont le dos tourné. Elle n’a jamais fait partie de ceux-ci, bien trop habituée à la faim pour la combattre. Pourtant elle les voyait sursauter quand on les appelait.
Elle demande sans jugement, par curiosité, car deux énigmes peuvent être liés, est-ce que le retour des douches froides serait lié à cet homme dont le nom lui échappe encore. Elle n’est même plus certaine qu’il le lui ait dit la dernière fois. Qu’importe elle attend une réponse.

C’est la deuxième fois en quelques mois que l’eau chaude vient à manquer, vers noël au plus froid de l’hiver la chaudière avait rendu l’âme. Certains disaient qu’elle avait été sabotée. Elle pensait qu’il y avait toujours de mauvais génies pour saboter les choses, rien ne tombait en panne de soi-même. Seulement, allez leur expliquer à tous ces gens qu’ils ne récoltaient que ce qu’ils semaient, elle s’était résolue à ne pas le faire et si elle s’astreignait elle-même à ne jamais froisser un esprit volontairement, elle ne pouvait forcer les autres à faire de même.

Deux mystères donc, sans doute une coïncidence, pourtant il arrive parfois, souvent, que les liens ne se voient pas, elle était loin de se douter être dans ce genre de situation. Alors elle le regarde toujours avec autant de curiosité, cherchant des liens qui n’existent pas, voulant comprendre ce qui est irrationnel et le mettant comme souvent mal à l’aise. Le pauvre homme bambou n’est pas au bout de ses peines, il essaie de tergiverser, de noyer le poisson, et n’y arrice ne pouvant pas se soustraire aux yeux lunaires de la grande noire, ses yeux crédules qui attendent une réponse, quelle qu’elle soit.

« Tout dépend, tu sors de ta chambre le reste de l’année ? »

Elle n’était qu’à moitié sérieuse en posant cette question. Elle savait bien qu’il devait sortir de sa chambre au moins pour manger… Le fait qu’ils ne se croisent pas… C’était tout de même bizarre, elle croisait toujours les mêmes têtes à la cantine et il n’en faisait pas partie. Elle croisait toujours les mêmes têtes dans les couloirs et il n’en faisait pas partie. Elle croisait toujours les mêmes têtes. Tout ça pour dire qu’il devait bien se cacher.

Il prétend ne rien avoir à cacher, elle n’est pas dupe mais elle laisse filer pour l’instant. Il arrivera bien un moment où il lâchera des informations. Les enfants en disent toujours trop. Pourquoi le considère-t-elle comme un enfant soudainement ? Cela doit être dû au petit sursaut auquel elle a eu le droit en arrivant. Elle a le sentiment qu’il ne dit pas tout et cela l’intrigue. D’un autre côté elle est encore et toujours la même étrangère pour lui. Elle n’a rien le droit d’exiger.

Il lui offre des chocolats et la timide ne se montre pas si timide qu’elle a su l’être. Elle a gagné en confiance tout au long de l’année. Elle a trouvé des gens pour l’encourager, pour lui dire que ce qu’elle faisait était plutôt bien. Elle s’est créé quelques liens, elle va mieux. Tranquillement.

« Je suis touchée par tes sentiments, je suis désolée mais nous ne sommes pas assez proches pour que je sois ta valentine. »

Si elle appris beaucoup tout au long de l’année sortant de sa petite bulle pour apprendre de la nouvelle culture où elle a été immergée, il reste des choses qui ne changeront sans doute pas. Elle interprète encore tout de travers. Pour notre plus grand plaisir et le plus grand malheur d’Allen.
Elle a appris cette année l’origine sanglante de la saint Valentin mais aussi les coutumes qui y étaient liées. Il l’avait mise sur la piste, elle avait complété ses connaissances à charge de questions et de recherches. Elle comprenait même si comme pour noël elle ne comprenait pas l’intérêt de ne célébrer qu’en un seul jour l’amour que l’on avait pour une personne. C’était absolument étrange. Triste aussi. Chaque jour devrait être une fête pour ceux qui s’aiment. Chaque jour ils devraient avoir de petites attentions. Un jour ne suffisait pas à montrer son amour.

"Hm, c'est vrai que je ne sors pas tant."

Autant le reconnaitre, puis elle passait aussi un temps certain en cuisine... Et fuyait de manière générale tous les rassemblements estudiantins. Elle ne se sentait pas à sa place dans cette foule... Et pourtant elle se sentait bien quand elle se trouvait avec ses membres. Elle ne se rendait qu'à peine compte des choix qui la poussaient à s'isoler, et sans doute moins encore de ceux qui la poussaient finalement à retourner vers les autres.

Elle sourit au jeune homme qui ne devait pas s'attendre à une telle réponse. Il doit la prendre maintenant pour une otaku, mais ce terme ne fait pas parti du vocabulaire de l'africaine.

Elle le regarde bafouiller et lui offre un sourire mesquin. Il est facile à berner, elle ne peut que rire de son embarras qu'elle a sciemment provoqué. Il n'est pas le premier à lui offrir ses chocolats cette année, elle a donc compris que l'on pouvait offrir des chocolats par amitié ou par respect pour une personne. Ses recherches n'ont pas été vaines ! Si elle savait qu'il lui aurait suffit de lire des mangas pour acquérir ce genre de connaissances la jeune femme serait bien déconcertée...

"Si ce ne sont que des chocolats pourquoi tu rougis ?"

Je vous jure, d'habitude Afya n'est pas une peste, mais les réactions du jeune homme sont tellement parlantes qu'elle ne peut se retenir de le taquiner. Le pauvre devrait comprendre, elle est peut-être moins innocente que lors de leur première rencontre. Même s'il lui arrive bien trop souvent de se faire avoir... Elle accepte bien trop facilement les choses. Par exemple, quand il y a eu cette nouvelle élève bruyante dans le dortoir des eaux, personne ne voulait la chambre à côté d'elle... Elle était trop... vivante ? Afya s'était donc proposée de prendre la chambre mitoyenne, ce qui au final lui plaisait bien, elle trouvait le silence de ce dortoir pesant. Elle qui avait grandi dans un village où l'on entendait le bruit de la vie toute la journée n'appréciait pas l'isolement des chambres particulières. Elle n'en appréciait que plus Aria qui rompait son isolement sonnore...

Il s'exclame qu'il n'y pas d'arrières pensées et elle se met à rire. Il est si drôle ! Elle pioche un chocolat et le porte à ses lèvres. Ils sont bons, peut-être un peu plus sucrés que ceux qu'on lui a offert plus tôt, mais ils semblent similaires :

"C'est bon ! Merci ! Dis tu les as acheté où ?"

Avec un peu de chances il en reste encore et elle pourrait en acheter pour la white day afin d'en offrir à sa voisine qui avait pris soin d'elle aujourd'hui.

Elle rit doucement de son embarras, elle n’arrive pas encore à rire à gorge déployée quand tant de monde l’entoure. Elle a changé mais pas au point de vouloir être le centre de leur attention. Elle reste une timide qui se refoule, mais une timide tout de même ! Il a l’air surpris du changement, s’attendait-il à retrouve un souvenir, il doit le savoir pourtant que les gens continuent d’avancer quand on ne les regarde pas. Il n’a pas l’air d’être ce genre d’enfants qui croient que les autres personnes n’existent que lorsqu’ils sont là pour leur parler. Un monde autocentré et peu évolutif en somme, la faille apparait rapidement quand on leur raconte des expériences que l’on a fait en leur absence, mais là encore certains plaisantins s’imaginent que les gens ne les ont pas vécu réellement mais juste imaginé pour leur en faire part. Les enfants pouvaient être si drôles… Si égoïstes.

« Oh j’ai raté ça ! »

Elle ne pourrait donc pas faire d’aussi bons chocolats pour Aria. D’un autre côté c’était peut-être mieux, elle ne maitrisait absolument pas les feux à induction… Plus habituée au bec bunsen quand elles avaient assez d’argent pour acheter une bouteille de gaz et au feu de bois dans les autres situations… C’était étrange pour elle de se rendre compte qu’elle n’avait pas cuisiné depuis son arrivée à Terrae. Savait-elle encore le faire ? Il faudrait qu’elle vérifie cela à l’occasion.

« Il y a encore plus d’eau chaude, je venais voir s’il y avait des nouvelles… »

Sinon elle ne serait pas sortie de son antre, elle était encore en train d’arrondir la légende qu’elle avait inventée avec Selvie. L’histoire en elle-même était finie mais le texte n’était pas assez puissant, elle le modifiait mot par mot, lui apportant une musicalité qu’elle était peut-être la seule à saisir, une profondeur autre que celles de quelques mots portés par le vent. Elle essayait depuis des jours de le rendre parfait, mais elle avait encore des problèmes.

« J’écris des histoires en ce moment ! Et le matin très tôt avant que les autres ne se lèvent je nettoie les classes ! Voilà, c’est à peu près tout ce qui a changé en un an… Et toi ? »

Les choses changent lentement pour Afya, elle a du mal à s’intégrer dans un monde dont les règles et les dictats ne sont pourtant pas si éloignés du sien.

« Tu as fait des progrès avec ton pouvoir depuis l’année dernière ? »

« En fait j’étais sous la douche quand c’est arrivé… ça doit encore être des réparations… D’habitude ils préviennent. »

Le « ils font chier » n’est pas prononcé mais on le sent bien qu’implicite. Elle est trop polie pour avoir du tels propos, du moins c’est ce que l’on pourrait croire. Elle aime particulièrement les expressions qu’elle n’a pas compris d’emblée… Autant dire que les grivoiseries sont celles qu’elle saisit le moins, et de ce fait celles qu’elle prend le plus de plaisir à ressortir au moment opportun, et avec Aria comme professeur le vocabulaire de la jeune africaine était en nette expansion.

« J’écris en français. »

Elle n’écrit pas en japonais bien qu’ayant appris à écrire ici… Elle n’aurait sans doute pas pu s’en sortir si elle avait dû apprendre une langue en plus de la manière de l’écrire. Cela n’avait déjà pas été de tout repos il faut en convenir et presque trois ans plus tard tu faisais encore de nombreuses fautes d’orthographe… Mais certaines personnes comme les enseignants et les bibliothécaires qui parlaient et lisaient couramment acceptaient parfois de te relire.
En réalité Ipiu aimait particulièrement tes contes et insistait pour que tu la laisses en publier quelques-uns dans son journal. Elle te sollicitait et ça te faisait un peu peur, tu avais beau lui expliquer que les contes n’étaient pas faits pour apparaitre dans un journal mais pour être lues à voix haute, d’une mère à son enfant, d’un ami à un autre… Elle ne voulait rien comprendre ! Elle était tellement borné. Saoulante si on entendait tes pensées.

« Je n’ai pas progressé d’un yen, enfin j’arrive aux mêmes choses avec moins de difficultés… Parait que je ne suis pas assez instable pour être étoilisée… Mais au fond ça m’arrange comme ça je peux me concentrer sur mes histoires. »

C’était une théorie qui avait émergée dans une de ses conversations, elle n’aurais plus sur dire avec qui par contre.
Elle réfléchit et soudain la lumière se fait sur ses traits.

« Tu lis en quelle langue ? Dis loi que c’est en japonais ! »

Quand elle a ce regard passionné on peut se douter qu’elle a une idée derrière la tête. Quand il lui répond un grand sourire se dessine sur ses lèvres :

« GENIAL ! Tu m’attends deux minutes ? »

Voilà comment elle revient avec un livre d’image illustrant le conte de la Princesse Kaguya et lui tend :

« Tu veux bien me le lire ? »

Elle ne lui laisse pas vraiment la liberté de répondre trop excitée à l’idée qu’elle pourrait enfin découvrir ce qui se cachait derrière les illustrations de ce livre. Elle le trouvait magnifique, il lui avait de suite tapé à l’œil. Alors qu’elle avait dans un premier temps pensé à dépenser son premier salaire dans des habits qui lui faisaient cruellement défaut elle n’avait pu s’empêcher d’acheter ce livre aux si jolies estampes quand elle l’avait vu dans une vitrine. Elle ne comprenait absolument rien à l’histoire mais l’avait cependant feuilleté nombre de fois se créant sa propre histoire.

Elle revient rapidement avec le livre et sans trop poser de questions elle le lui foure entre les mains. Lis homme ! Avoue aussi que tu ne peux résister à ces yeux pétillants. Un conte est fait pour être conté, alors elle prend du plaisir à maintenant fermer les yeux pour imaginer les scènes qu’il raconte. Les dessins se mettent à bouger dans le théâtre de ses pensées. Il assure plutôt bien la narration bien qu’elle ne fut aussi fluide que s’il avait déjà lu le livre des dizaines de fois.

Alors quand il se tait et que tu rouvres les yeux croyant l’intrigue fini, mais il lui apprend que ce n’est pas le cas autant que le livre encore ouvert sur ses genoux. Alors il n’a pas oublié, c’est un sourire doux qu’elle lui offre maintenant.

« Dis tu veux bien finir l’histoire ? Je t’en raconterais une bientôt ! Pas maintenant, il y a trop de bruits ici pour que je puisse raconter… Mais on peut se retrouver dans la semaine si tu veux ? »

Elle ne savait laquelle, elle n’oserait sans doute pas raconter l’une des dernières qu’elle avait écrites… L’hiver avait été productif, mais elle ne trouvait pas encore abouti la majorité de ses contes. Elle voulait les retravailler… Mais comprendrait-il les histoires qu’elle avait l’impression de narer depuis toujours ? Celle du masque de la danse ou de l’enfant univers ?
Non, bien sûr que non. Elle lui narrerait donc l’histoire de la danse du temps. Quand l’enfant univers rêvait tout se passait en simultané. C’était une histoire douce, celle d’un nouveau concept humanisé. Celle d’une histoire qu’elle n’avait jamais encore raconté à personne. Elle ne voulait pas lui raconter une histoire d’un autre monde, elle voulait qu’il puisse entrer dans son univers par la grande porte. Elle ne pouvait se résoudre à simplement lâcher cette histoire ici. Elle voulait que ses mots puisses résonner dans l’esprit de son nouveau ppublic.

« Mais si on se donne rendez-vous on se rencontrera, on ne fera pas que se croiser. »

C’est assez simple en fait, si leurs horaires de sortie habituels ne concordent pas ils n’ont qu’à se donner des rendez-vous. Elle serait mesquine la jeune femme lui rappellerait que lui connaissait l’emplacement de sa chambre et qu’il lui aurait été facile de venir la voir s’il en avait ressenti l’envie. Elle ouvrait toujours sa porte lorsqu’on y toquait, du moins quand elle était derrière. Cela aurait été avec plaisir qu’elle se serait à nouveau entrainée avec lui.

Enfin qu’importe, elle n’est pas assez rancunière pour soulever cela et ce d’autant plus qu’elle comprenne très bien que le jeune homme n’ait pas ressenti l’envie de la revoir. S’il était passé étoile pendant l’année elle l’aurait maintenant plus gêné qu’autre-chose. Elle ne progressait plus. Certaines mauvaises langues diraient qu’elle a atteint le niveau de maitrise maximal pour un initié, elle pense qu’elle peut toujours s’améliorer à force d’entrainement mais ne se montre pas pressée. Elle est bien comme elle est, elle fait déjà partie des magiciens depuis bien longtemps… Et contrairement à beaucoup de gens ici, elle l’était avant d’arriver. Elle savait depuis longtemps utiliser les mots pour faire naitre des sourires sur les visages des gens.

Elle écoute l’histoire. Elle est belle. Pourtant elle lui laisse une tonalité mélancolique. Oh, ce n’est pas le retour de la belle parmi les siens qui la choque le plus mais bel et bien le choix de l’empereur de gaspiller son élixir d’immortalité. Il aurait d’après elle du le prendre, car tant qu’il vivait il aurait pu essayer de la retrouver. Mourir était un renoncement, il disait l’aimer mais il préférait accepter l’échec que de se battre contre lui. C’était dommage.

« C'est parce que les livres de contes sont fait pour être lus à voix haute bien entendu. »

Ce n’est pas parce qu'elle ne peux pas lire l’histoire que je ne peux pas en profiter… Et puis pourquoi ce livre aurait-il besoin d’être utile pour lui plaire ? S’il est beau n’est-ce pas suffisant ? Le sens qu’a mis le dessinateur dans ces images vaut-il plus que celui qu'elle y met ?

Afya doit savoir que ce n’est pas sympa de répondre à une question par une autre. C'est pour cela qu'elle ne le fait pas, pourtant la douce refuse ce monde où les choses doivent être utiles pour avoir le droit d’exister. C’est ainsi depuis toujours… C’est pour cela qu’elle veut créer un univers de mots, un univers de futilité où l’esprit libre pourrait voyager.


« Il y a un jour qui te conviendrait plus qu’un autre ? »

Durant cette semaine il faudrait qu’elle réussisse décidément à mettre un prénom sur ce visage. Cela devenait une nécessité.