J'étais venue tôt.
Je ne me suis pas laissée avoir comme la dernière fois où j'avais galéré pour monter mon fauteuil dans les gradins, cette fois j'avais prévu le coup, je suis venue en avance, j'ai bien tout prévu pour n'avoir aucune complication.
J'ai ris tout bas lorsque j'ai vu le prétendant au titre de master arriver. Une armure en carton ? Il y en a qui n'ont peur de rien. Je sens que ça va faire un master intéressant, après tout il faut de tout dans le corps enseignant non ?
Je soupire. Honnêtement, je ne le connais pas. Je sais qu'il sort avec celle que je considère comme une excellente amie (qui d'ailleurs tremble à vue d'oeil sur son banc) et oui, quelque part je souhaite vraiment qu'il passe ce test mais... Contrairement aux nombreuses personnes qui crient depuis les gradins, je ne suis pas venue en supporter mais en simple observatrice.
A vrai dire, c'est la... Quatrième masterisation à laquelle j'assiste. Mitsuki, puis Aoi, puis Huo, puis Karin (qui n'avait pas donné suite, certes) et j'avais manqué celle d'Akihiko malheureusement. Et malgré ça, je trouve toute cette cérémonie sacrément intéressante. Intéressante et impressionnante. Je suis une fois de plus sur le banc des spectateurs à observer des êtres pas plus âgés que moi à se battre contre des demi-dieux, à donner tout leur possible pour vaincre, pour réussir... Pour quoi, au final ?
Je soupire.
Cette masterisation a une consonnance toute particulière pour moi. Il faut que je sâche. Que j'arrive à déceler, sûrement dans la motivation de ce jeune homme, que j'arrive à comprendre cette force qui le lie à Terrae. Pourquoi lui est resté, pourquoi lui est si attaché à cet endroit, pourquoi il ne doute pas, comme je doute, de n'être qu'un poids. Est ce qu'il pense à l'avenir ? Sûrement pas en cet instant. Il a déjà pris sa décision.
Et de ce point de vue, la stratégie d'Aaron est payante : il lui enlève toute combattivité, il lui enlève cette motivation, ce qui l'a amené ici et qui me manque pour continuer. Sûrement que je me projette trop sur lui, mais je n'y peux rien. Chacun des éclairs, chacune des attaques qu'il subit me fait grimacer. Disons que... C'est comme une profonde empathie, mais égoïste.
Montre moi ta détermination, Ys.
Montre moi que ça vaut la peine de se battre pour Terrae.
Montre nous comment tu te bats pour rester.

Tant de monde était venu. La Miss et Alice les avait rejoint là où ils s'étaient installés. Nicolas avait répondu aux salutations de chacun avec un faible sourire, mais il se sentait bien incapable de faire plus. Il y avait beaucoup trop de monde... Les émotions de chacun se pressaient sur son filet mental protecteur. Il allait être épuisé en sortant d'ici. Il jeta un coup d’œil à Lottie. Le bruit ne semblait pas la déranger... elle essayait même de couvrir le bruit ambiant de sa voix aigu, comme si elle pensait que le but du jeu c'était de crier le plus fort possible. Elle n'avait pas l'air de se rendre compte que papou était en bas en train de se battre. Il l'enviait un peu...

Mais la foule encourageait bien plus Ys qu'Aaron, ça lui faisait un peu mal au cœur. Et il était bien incapable d'élever la voix, comme Huo, pour l'encourager. Il avait l'impression que ses membres étaient devenus du flan, que les larmes lui venaient dangereusement aux yeux... Maintenant que ça avait débuté, on ne pouvait plus rien faire... Il se força à ne pas se sentir impuissant, il se força à bien respirer. Il se força à rouvrir les yeux pour suivre le combat. Ys se téléportait pour ne pas recevoir les éclairs de Aaron de plein fouet. Il eut la bonne idée de se téléporter tout prêt de lui, pour lui rendre son coup mais rien ne vint. Il resta immobile. Son poing ne partit pas. Il ne vit même pas s'il avait réussi à créer de l'électricité avant qu'il ne se téléporte plus loin.

Il entendit la voix de la Miss poser la question terrible... Nicolas mordit sa lèvre et il ne put retenir la panique qu'il y eut dans ses yeux lorsqu'il les posa sur elle, pour répondre à la place d'Aria. :

-Oui.

C'était un souffle. Un souffle de terreur animale. Priver à quelqu'un la volonté de se battre. Nicolas n'osait même pas imaginer ce qu'il adviendrait de lui. A la place de Ys, il fuirait. A la place de Aaron, il serait terrifié... Que se passera-t-il quand il aura dépassé ce manque ? Il ne voulait pas savoir mais il ne pouvait plus quitter des yeux ce qu'il se passait en bas. Un poids immense se fit sentir sur ses épaules... mais il refusa d'y songer. Sa main chercha instinctivement celle d'Aria. Il la serra. Je ne suis pas tout seul. Je ne laisserais pas Aaron tout seul. Il fallait être fort pour Terrae. Pour sa famille. Pour ses amis.

Ariana m’a envoyé plusieurs messages. Hmmm… Pour une fois que j’avais décidé de dormir. Un bras en dehors du lit, je lis ses messages. Mastérisation… Hm, intéressant, j’en ai jamais vu. De qui ? Ys. Oh ! Ys oui, le Tonnerre que j’avais affronté au gymnase, il y a maintenant un long moment. Je ris un peu pour moi. Il va vraiment passer Master ? Il m’avait dit je crois que c’était son objectif… J’aurais pas cru qu’on finisse par le recommander. Mais il se bat bien, et il a été plutôt sympa. Même s’il m’a pas trop considéré parce que j’suis une meuf, situation pas hyper agréable.

Ma porte vibre très très fort. C’est Ariana qui frappe et qui hurle pour nous dire de tous venir… Pourquoi on est dans le même dortoir déjà ? Ah oui. Non mais faut pas que je réfléchisse comme ça, c’est ma pote quand même. Bon allez, on dit qu’on y va. Je me lève, sors de mon lit. Je m’habille tranquillement. Et contrairement à tous ceux qui y vont, je me précipite pas. Tant pis si ça commence sans moi, j’avais prévu une matinée tranquille, je passerai au moins le début de ma journée à mon rythme. Non mais.

Une fois que j’arrive aux Arènes, je m’arrête mate le bâtiment. Hm, sympa, j’étais déjà passée devant mais j’ai jamais cherché à rentrer. J’devrai peut être, je sais pas. Je monte dans les gradins. Quand j’arrive, le premier truc que je vois c’est des éclairs de partout. OOOOOOK. Je m’approche du bord pour voir. Ys est là, pas en bonne position. Allez mec là, tu vas pas te laisser faire. Le Master présent, j’crois qu’il traine avec Nicolas. C’est pas le père de Charlotte ? Mais si c’est euh, Aaron j’crois bien. Ok mais Ys en fait il a calculé deux secondes ou pas ? Bon sûrement mais à sa façon. C’est impressionnant. Les éclairs partout, le bruit, la poussière partout. Et Ys qui n’arrive pas à se battre. Aaron doit être Sensitif. Ys a vraiment rien calculé putain.

Je cherche du regard des gens que je connais… Bon ok je tourne la tête et j’vois directement Ariana, avec toute la Cool Patrol. Je me dirige vers eux. Tout le monde crie, a l’air passionné par ce qu’il se passe. Je dis pas que c’est pas stylé, mais c’est juste un combat avec des pouvoirs, en vrai ça v-… Ok ça fait du bruit mais BON. Je m’assois juste devant eux en les saluant rapidement. Sauf Jérémy-du-con. Je me tourne vers l’Arène, et je regarde, mon regard complètement neutre. Aaron est impressionnant. Ys est décevant. J’espère qu’il va me surprendre. Je suis certaine qu’il va le faire, beaucoup trop imprévisible ce type.

S'il y a bien une chose que je ne supporte pas dans ces moments-là, c'est certainement l'arrogance et la suffisance. Disons que quand je suis de bonne humeur, je supporte à peu près tout ; j'supporte qu'on me crache sur la gueule et j'supporte qu'on me traite encore comme un moins que rien. Certes, ça ne me fait pas plaisir, mais à force, on fait un sourire crispé, on lâche une réplique bien sentie et basta, ça passe. Là... Je vois Ys qui me regarde de cette manière, qui se redresse poings sur les hanches, avec ce sourire suffisant qui m'irrite au plus au point. Oh, c'est ça, fais le bellâtre ; tu crois quoi, que ce sera une partie de plaisir ? Une Masterisation, ça fait toujours mal. Une Masterisation, ça finit toujours à l'hôpital. Maintenant, y a Nico et ma fille qui sont là, qui vont voir ça. Ca m'fout les nerfs. (Et j'étais censé aller à un rencard à la fin de la semaine putain, tu fais chier shjfdb)

Je prends une inspiration avant de lui lancer son défi, et lui balancer mes premières attaques. Oh, pardon, tu ne voulais pas que je te serve le thé, non ? T'es "là pour" ? Pour quoi ? Pour te battre ?

J'aurais pu lui lancer un demi sourire, mais je me contente de lui renvoyer un visage lisse. Tu m'as dit que tu voulais voir ce dont j'étais capable, alors j'vais pas te faire de cadeau. Tricher ? Oui, un peu. Ta combativité s'amenuise déjà. Tes émotions vont tomber à plat. Toi qui fonctionne sur l'impulsivité, va falloir trouver autre chose mon chéri, sinon tu vas bouffer la poussière un peu plus vite que prévu.

Ys se téléporte rapidement pendant que mes arcs électriques tentent de l'atteindre. Je ne bouge toujours pas, très calme, très méthodique ; je me concentre sur son énergie, à laquelle je m'accroche d'autant mieux grâce à mon petit tour de tout à l'heure (ok, là je triche) et dirige mes jets électriques droit sur lui. Quelques petits disques qui volent dans sa direction, tentent de happer ses membres au passage. Mais je reste attentif et concentré, en sachant pertinemment que mon oeil gauche, à moitié aveugle, est faible dans cette foutue arène. Le soleil m'éblouit tellement que je suis obligé de le plisser ; de toute manière, quand les choses deviendront sérieuses, j'vais prendre cher et je le sais. Les téléporteurs sont trop rapides, même pour mes réflexes de Master.

Là ; à l'instant, il se téléporte ; je fais un brusque écart sur le côté, lui lance quelques éclairs de plus. Cette fois, mon sourire s'étire légèrement, puis plus sincèrement. Je ressens son angoisse, son angoisse qui se transforme en peur. Il se fait toucher, roule sur le sol. Et moi, je l'observe d'où je suis, les yeux baissés vers lui. Dans mes mains, je concentre une bonne part d'énergie.

—Tu ne m'as pas écouté ? je répète, un peu plus fort pour couvrir le brouhaha du public que j'ignore royalement. Tu dois trouver la motivation de te battre. C'est ça, ton défi.

Deux serpents électriques, plus chargés que les éclairs que je lui ai envoyés tout à l'heure, s'échappent soudain de mes mains pour se précipiter dans sa direction et chercher à s'enrouler autour de son corps, en espérant qu'il ne se téléporte pas encore. Ils se subdivisent en plusieurs serpentins pour le clouer au sol à la manière d'un filet, pendant que je les contrôle du bout des doigts, comme on le ferait avec des marionnettes. D'autres projectiles suivent. Mes yeux, eux, brillent déjà d'une lueur d'or.

—Tous les coups sont permis dans l'arène, non ? Alors… Que vas-tu faire ? je lui susurre.

Nouveau sourire, mais je reste sur mes gardes. À l'intérieur, le serpent siffle de plaisir tandis que j'use de mon pouvoir de sensitif sur Ys. Accentuer la peur. Accentuer le trouble. Accentuer l'impuissance. Creuser ce vide dans son coeur. Ces questions qui ne cessent de le tourmenter.

C'est pas contre moi qu'il faut que tu luttes. C'est contre toi-même.

Planté au sol, se maintenant le bras, le Tonnerre aura beau serrer des dents tant cette douleur persiste aussi agaçante que douloureuse, il y a bien autre chose qui le frustre. Tant bien que mal, Ys relève le regard sur la personne responsable de son malheur. Il lui semblait, il en était convaincus, que cette Mastérisation allait devenir le plus beau de tous ses combats. Du moins, il l'avait tant attendu, impatient tel un enfant devant un soir de Noel, mais clairement rien ne se passe comme il ne l'aurait imaginé.

Il a beau cherché, il ne comprend pas. Le publique hurle, siffle. Son regard glisse sur les estrades mais rien. Il n'y a aucune solution et vraiment, ces cris ne l'aident pas.
La voix de Tahia est plus persistante. Il l'entend, tente de la décrypter. A croire que son combat contre elle était une partie de plaisir.
Incapable de pouvoir hurler aussi fort, il tente néanmoins de se redresser sur ses jambes. On croirait voir un faon sur la glace. Il est pitoyable. Les paroles d'Aaron lui parviennent, l'obligeant à reporter son attention sur lui. Il aura beau retourner la chose dans tous les sens, il ne comprend pas.
Aaron est si... terrifiant. En temps normal, le Tonnerre aime pouvoir se moquer du Master et il n'y a aucun respect entre eux. Mais à cet instant, ce n'est plus l'Aaron qu'il connait qui se tient en face de lui. Il est si différent, impressionnant. Il est fort. Très fort. Nullement besoin de lui promettre qu'il ne se montrerait aussi insolent. Pour l'heure, il est en mauvaise situation.

C'est terrible de pas reconnaitre les gens. A vrai dire, il ne saurait dire qui se tient devant lui. Non, ce n'est plus si drôle. Certes, il n'est pas idiot, il se doutait bien que les combats pour devenir Master sont impressionnants et dangereux. Mais il pensait pouvoir y passer un bon moment.
Quel idiot! Et alors qu'il tente de se redresser, d'avoir une meilleure allure, sans lui laisser le temps de respirer, Aaron lance deux serpents. C'était la première fois qu'il vit une telle technique. Et alors que, paniqué, il réalise la situation, il est trop tard pour se téléporter.
Ces maudits serpents l'enveloppent: son cou, ses bras, ses jambes. Il est prisonnier et obligé de se plier face contre sol.

"Tssss... Je n'ai pas envie... Je ne veux pas...."

Pendant un instant, il se surprend lui même. Réalisant ce qu'il se passait, il marqua une pause. Non. Non, ce n'est pas ce qu'il voulait dire. Ce n'est pas ça. Il voulait, il en est sûr, il voulait devenir Master. Alors pourquoi ne fait-il aucun effort? Il est face contre sol, prisonnier de serpents qui l'électrocutent à chaque mouvement. Il ne devrait pas plier le genoux.
Ne pouvant plus se téléporter, paniquant, Ys cherche du regard quelque chose. Il voit les personnes assistants à ce désastre. Même pour un Tonnerre, l’électrocution devint insupportable. Elle vous laisse des traces de brûlures. Il peut encore sentir la douleur, mais il se sent dépossédé de ses pouvoirs. La voix d'Aaron l'interpelle, et son regard le glace. Ce dernier s'apprête à lancer une nouvelle attaque, il est sans pitié.
Instinctivement, dans un dernier recours, le Tonnerre lance des micro billes un peu partout autour d'eux. Ces dernières explosent telles de minimums bombes créant ainsi un nuage de poussière. Même là, il n'a pas chercher à blesser son adversaire.
Malheureusement pour lui, les attaques d'Aaron finiront par le toucher. Le coup est violent et fatal. Sonné, brûlé, Ys s'effondre.

L'hurlement du public se disperse. Sa vision devint floue. Les serpents le retiennent toujours, et sous la douleur, il est incapable même d'hurler. Il subit. C'est drôle. Ce n'était pas l'idée qu'il s'était fait de sa victoire. Il n'avait pas non plus envisagé sa défaite. Il faut croire qu'il n'était pas aussi prêt qu'il ne l'aurait crus. Il avait tord. Mitsu avait tord.
Et maintenant il allait devenir la risée. Le nuage de poussière lui donne un temps de répit, camouflé, lui offrant la chance d'un second souffle.
Et tandis qu'il se noyait dans l'abandon, la crainte de mourir dans ce combat, il en oublie que son corps était capable de supporter énormément de coups.

Je serrai mes poings sur mes cuisses, sentant mon coeur lourd et mon estomac noué. Je ne saurai dire si c'est parce que j'étais sensible après la récupération de mes pouvoirs, ou si c'est parce que c'était d'Ys qu'il s'agissait, mais là-bas, dans l'arène, la tension était beaucoup trop palpable. Ca me traversait toute entière, et j'en perdais mes moyens. Je n'avais que rarement vu Aaron autant en colère, et pourtant, c'était pas les occasions qui avaient manqué.

Les articulations de mes doigts craquèrent alors que je serrai encore davantage mon poing, sentant la paume de mes mains moite. Les flots d'énergie qui émanaient d'Aaron me faisaient trembler. C'était comme s'il se nourrissait de la peur d'Ys, comme s'il s'abreuvait de son angoisse pour augmenter sa puissance. Ce qui n'était pas possible, techniquement. Pourtant, l'affaissement d'Ys donnait tellement cette impression que c'en était déstabilisant. Je t'en prie, Ys, relève-toi... Relève-toi...

Mes yeux se posèrent sur la fille aux cheveux gris qui avait hurlé un peu plus loin dans l'arène. Je me mordis la lèvre inférieure, retenant la jalousie qui montait en moi, et reportai mon attention sur Ys. Je me redressai dans les gradins, m'appuyai contre la rambarde en la serrant fort entre mes doigts. Clairement, si j'avais été titan, ce morceau de métal aurait passé un sale quart d'heure.

Allez Ys. Redresse-toi. Ressaisis-toi. Tu peux le faire ! J'ai confiance en toi...

Un deux trois.
Respire.
Un deux trois.
R e s p i r e.

Mon souffle est contrôlé, maîtrisé ; chaque mouvement, chaque regard, chaque décharge d'énergie. Mon attention est focalisée sur la sienne, pour ne perdre aucune miette de ce qu'il se passe, dans son coeur et de ce qui s'échappe de lui. J'ai conscience d'être dur avec lui, d'autant que ce n'est pas une épreuve facile ; ce n'est pas juste quelques attaques lancées en l'air. Il faut qu'il se dépasse lui-même s'il veut réussir à se remettre dans le combat, mais je pense aussi qu'il en a besoin pour se recentrer. Il ne connaît visiblement pas ses propres capacités, comme il ne connaît pas les capacités de ceux qui l'entourent. Prendre les choses à la rigolade ? Quand tu veux, mais pas là. Ton armure en carton me fait plus pitié qu'autre chose, Ys, et toi aussi au final. Tu fais quoi, là, par terre, à te rouler de douleur sans réussir à te relever ? T'as besoin d'aide, peut-être ?

Nos yeux sont plantés l'un dans l'autre. J'y lis tout son désespoir, toute sa peine, sa peur ; Ys tente de se relever, mais il n'y arrive pas. Peut-être que c'est à un trop haut niveau dès le début pour lui ; mais s'il veut être Master, ce n'est certainement pas comme ça qu'il va y arriver. Et puis... ça n'aurait pas été aussi amusant de le faire flancher à la fin, non ?

Amusant. Mon nez se plisse et je serre à demi le poing. Aaron, faut que tu t'ressaisisses. T'es complètement en train de craquer mec. Le laisse pas décider. Le laisse pas te contrôler. Contrôle-le. Contrôle-toi.

Les serpents s'échappent de mes mains comme s'ils étaient dotés d'une vie propre ; Ys ligoté sur le sol, que je continue à fixer de haut, sans émotion ou presque, sans la moindre bienveillance. Trop de choses tournent dans ma tête, et mon instinct me dicte de ne pas me laisser faire, sinon c'est moi qui vais échouer. Et même si je n'ai plus d'épreuve à passer, passer sous le scan de tous ces regards une fois de plus me rend fébrile.

La douleur d'Ys me parvient par vague ; je continue à l'invectiver, cherchant à le provoquer pour lui donner quelques clés. Soit il ne comprend pas, soit il n'y arrive pas ; dans tous les cas, sa volonté n'est pas assez forte pour lutter contre ce qui le cloue au sol pour le moment.

Il lance soudainement des billes, qui explosent tout autour de nous ; je me protège le visage des bras, quelques langues électriques venant intercepter le plus gros des explosions, mais je sens à peine les brûlures sur mes bras. Quand le nuage se dissipe, je le vois à nouveau effondré au sol. Ma voix s'élève, sombre, violente, impatiente.

—Qu'est-ce que tu crois que tu fous ? Regarde-toi ! T'es pitoyable. T'es là pour quoi au juste ? Si tu ne veux pas t'battre, pourquoi tu es là ? Pour te couvrir de ridicule ? T'as que de la gueule, en fait. Toujours à l'ouvrir pour rabâcher des conneries, mais quand il s'agit de montrer ce que t'es, ce que tu peux faire, t'es pas là.

Plus de force. Les serpents resserrent leur prise sur lui en grésillant.

—C'est ta dernière chance. Prouve-moi ce que tu vaux, ou c'est maintenant que ça se termine !

J'envoie un éclair dans sa direction, qui touche le sol près de lui dans une explosion.

—UTILISE UN PEU TA TÊTE ET BATS-TOI PUTAIN.

C'est étrange. 
Pour avoir reçu autant de coups dans la vie, autant de cicatrices, il y avait bien autre chose de plus frustrant que cette douleur. Généralement le Tonnerre se moque bien des plaies et prend un malin plaisir à foncer tête basse. Mais aujourd'hui, il est face contre sol, gêné par la poussière et surtout aucune volonté.
Le nuage de poussière qu'il avait provoqué sans aucune violence lui laisse le temps d'un souffle. 
Pendant un instant, tapis et à l'abris des regards, il disparaît de cette arène. Il est loin de ce combat.
Rentrer. 
Ca sonne tellement bien. 
Et cet horrible ensorcellement l'envoute. Il est cloué au sol, ne cherche plus à résister. A quel moment avait-il abandonner le combat? L'avait-il vraiment désirer? Son esprit lui joue des tours, les questions se bousculent. Le malin se joue de lui et le torture psycologiquement.

Il est bien désespéré quand peu à peu le nuage se dissipe. Cet instant de répit aura été de courte durée. La folie dans les estrades lui parvint de nouveau, sa vue se stabilise. Il ne veut pas. Il ne veut plus être là. Et petit à petit, il sombre. 
Soudainement la voix claire et grave du Master lui parvint. Le mal est toujours là. Il ne le lâche pas. Il veut le détruire. Ys ne souhaite plus l'affronter. Il s'était trompé sur Aaron. Il est bien trop fort pour lui. Il a le monopole du combat. Perdu, le Tonnerre ne comprend pas et ne réalise pas la malédiction qui s'abat sur lui. 

Aaron se moque de lui, il l'humilie. Pourquoi il ne se révèle pas pour l'injurier? C'est ce qu'il sait faire pourtant! Alors pourquoi? Il accepte la défaite et le feu intérieurement s'éteint doucement. Les serpents ressérent encore plus leur emprise. La douleur est vive mais il n'est plus que l'ombre de lui même. 
Le Master lui lance une attaque, histoire de le provoquer. L'éclat des particules viennent s'écraser sur le côté de son visage. Même là encore, Ys ne cherche plus à se protéger. Et pourtant....

Tandis qu'il détourne le visage pour éviter le projectile, son regard retombe sur un visage familier. Elle est là, elle l'observe du haut des gradins. Et que la déception est grande dans son regard. Une douleur bien plus vive que celles qu'il subit depuis le début du combat martèle sa poitrine. 
Elle lui avait donné sa confiance. Elle lui avait toujours donné sa confiance. Elle avait été la seule depuis des années. Personne n'avait crus en lui. Pas ces Masters autour d'elle. Seulement elle, et elle était celle qui lui avait donné le goût d'aimer Terrae....

C'est ça. Terrae. Le visage du Tonnerre se transforme peu à peu. Il réalise, il se réveille d'un terrible cauchemar. Jamais. Jamais il n'aurait réagis ainsi. Ce n'est pas lui. Il n'est pas ainsi. 
UTILISE UN PEU TA TÊTE
Ni une, ni deux, aussi soudain soit il, le jeune homme frappe brutalement son front contre le sol. Provoquant ainsi un choc, un réveil, le visage ensanglanté, il se redresse, une lueur dans son regard. Même si cela sera de courte durée, il devait au moins tenter de gagner du temps, garder un peu de sa personnalité.
Il doit impérativement reprendre le contrôle. D'une main, il saisit l'un des serpents et l'électrocute au point que ce dernier en s'évanouisse. Le second s'échappe et enfin libéré, il se relève, maladroitement, mais il se tient enfin debout face à son ennemi. Ancrant son regard dans le sien, il s'aperçoit d'un Aaron calme et sûr de lui. Finalement, son adversaire est plus redoutable qu'il ne l'aurait imaginé, et plus intéressant aussi. Et étrangement, un sourire mesquin se dessine en coin.

"Tous les coups sont permis hein?!"

Peu à peu, des jets électriques grésillent tout autour de son corps. Il doit réunir ses forces. S'il n'a plus la volonté de le battre, il doit au moins trouver une solution. La colère. Jamais il ne ferait honte auprès de Mitsuki et il est hors de question de perdre pour Terrae. Il est hors de question qu'Aaron continu cette emprise sur lui. Son esprit lui appartient. 
Ses bras se lèvent et comme s'il tenait un arc, il lui lance en direction de son adversaire une flèche électrique. Contrôler le tonnerre, c'est bien. Mais il est difficile de pouvoir viser une cible correctement, hors ses entrainements avec Kurei lui auront permis de s'améliorer dans ce domaine. 
Manquant de force dans ses attaques, il est bien conscient qu'Aaron n'aura aucune difficulté à l'arrêter. C'est vrai.
Seulement cette dernière en cache une autre, et une fois séparée de sa sœur, c'est celle-ci qui le prendra par surprise. Et pendant que le Master réalise cette supercherie, Ys se téléporte suffisamment près de lui, par derrière, pour lui porter une frappe. Son poing grésillant, prêt à frapper. Il ne s'agit plus de le battre, il s'agit de protéger Terrae. Et tel un animal sauvage, ayant perdu la raison, tout se passera très vite, il le sait...

Le voir continuer à se traîner au sol ne fait que gonfler mon agacement. Est-ce que le défi que je lui ai imposé est trop dur ? Pourtant, il est prêt ; il devrait y arriver, non ? Je jette un oeil du côté des Masters dans les gradins, et plisse les yeux pour tenter d'apercevoir l'expression sur le visage d'Hideko. Est-ce que j'ai foiré ? Ou est-ce que c'est simplement Mitsuki qui avait tort de penser qu'il était prêt ? Pourtant, je sais qu'il peut le faire. Mais s'il nous a fait perdre notre temps de cette manière, s'il ne passe pas... S'il n'y arrive pas… De quoi on aura l'air ? De quoi il aura l'air, lui ?

Ys n'est pas quelqu'un que je méprise. Et je sais que si je veux qu'il dévoile ses vraies capacités, je dois le pousser à bout. L'obiger à réfléchir, à ne plus seulement se fonder sur son instinct. Parce qu'au final, c'est ça que j'amenuise ; cette impulsivité qui le définit, qui est tellement profondément ancré dans son caractère qu'elle dicte ses actions les plus primaires. Lors de nos précédentes rencontre, c'est en tout cas ce qui m'avait le plus frappé. Ca, et sa capacité hors du commun à ne pas réfléchir, à se jeter dans les événements sans prendre le temps d'observer autour de lui, et surtout à utiliser ses pouvoirs si grossièrement qu'il lui arrivait encore de se louper sur des choses que des initiés sont capables de faire.

Il m'avait semblé que lui couper cette énergie vitale-ci lui permettrait de faire ressortir le meilleur de lui-même. Mais peut-être que je me trompais ? Au final, je ne le connais pas. J'aurais dû en parler plus longuement avec Mitsuki…

À la place, je continue à le pousser à bout. Tenter d'atteindre cette brèche, de l'élargir, de le pousser dedans ; qu'est-ce que tu veux, Ys ? Comment tu veux que tout ça se finisse ? Toi au sol, et Terrae toute entière qui te fixe ?...

Au bout de ma patience, je crie... Ma voix résonne sur les murs de l'arène. Et finalement, Ys réagit.

Il utilise sa tête.
.... Littéralement.

Un rire manque de me secouer. C'est nerveux. Putain mais il est con ???? SERIEUSEMENT ?? T'as pas trouvé mieux, mec ?

Visiblement, ça marche plutôt pas mal, vu qu'il a l'air un peu plus vif... Un sourire en coin s'étire sur mes lèvres. Ok. Maintenant, le combat commence. Faut que je me tienne prêt. T'as bien fait de le recommander, Mitsu. Tu sais qu'il en est capable. Alors j'ai foi en toi, ok ?

Ys se débarrasse de mes serpents ; pendant ce temps, je ne le laisse pas sans répit et lui lance quelques disques électriques pour le destabiliser. Ne pas oublier que ce type est imprévisible. L'imprévisibilité, c'est dangereux, même quand on contrôle les émotions de quelqu'un. Concentre-toi.

Yeux dans les yeux. Tous les coups sont permis ? Tsk. Qu'est-ce qu'il va encore faire ?
Mon pouvoir continue à tenter de brider ses émotions, mais il réussit à s'en détacher petit à petit.

Des flèches électrifiées foncent droit sur moi ; je prépare un mur électrique d'un geste ample du bras en sautant vers l'arrière. Le mur, trop fin, s'effondre après avoir arrêté la flèche. Mais pas sa jumelle. Ahhh, enfoiré d'sa mère… Le truc, c'est que Ys est téléporteur, et c'est un truc que j'ai tendance à oublier facilement. Son énergie apparaît derrière moi, sur mon mauvais côté ; je suis forcé de me concentrer sur la circulation de l'énergie dans son corps pour réussir à capter son coup de poing, que je manque de prendre sur la tempe gauche. Seuls mes réflexes de Master me permettent de ne pas prendre le coup.

J'envoie une décharge-réflexe et roule sur le côté en sifflant de rage. La flèche m'a entaillé et brûlé en partie le biceps pendant que je tentais de l'éviter lui. Rien de grave, mais ça m'énerve. Ouais, en fait, j'aurais mieux fait de fermer ma gueule, c'est ça ? Pourquoi il m'a choisi ?!

Bon, récapitulons. Ys a l'avantage du déplacement et du terrain, mais j'suis rapide et j'vise bien. Bon, heureusement, sinon on s'demande c'que je foutrais dans cette arène, hein. Ca fait pas beaucoup de points pour moi, mais ça va le faire.

Un sourire en coin. Oh bah, allez, tant qu'à faire…

En me relevant, je lui envoie plusieurs sphères électriques, qui s'amusent à poursuivre son énergie où qu'elle aille. Pendant ce temps, des disques d'énergie pure se matérialisent dans mes mains, et je les envoie rapidement un peu partout autour de nous, aléatoirement. Pas trop près de moi pour me laisser une zone  safe et suffisamment près pour que s'il ne fait que les effleurer, elles explosent...

Encore des éclairs que je lui jette dessus. Mes yeux parcourent le terrain. Ok. À partir de là, ça va vraiment pas être de la tarte. Mais il est hors de question que je lui laisse une seconde de répit.

Tout se passe rapidement. Evidemment, sans surprise, Aaron arrête aisément la première flèche mais se fait surprendre par la jumelle. Pendant ce temps, le Tonnerre se téléporte pour lui porter un coup au visage. Malheureusement, ses gestes sont trop lents et l'envie de le combattre est quasi inexistante. 
De ce fait, le Master esquive ce coup et le propulse par une décharge électrique. La défense portée au flanc, Ys est projeté en arrière, à plusieurs mètres. C'est frustrant, il est de nouveau à la case départ, à cracher du sang, un genou au sol. Tentant de se redresser, agenouillé dans la poussière, le Tonnerre gémit de douleur tandis qu'il porte une main au flanc. Difficilement, aussi bien gêné par le sang qui coule du front que par la douleur qui le tiraille, il cherche du regard son adversaire.

Peu à peu, il le réalise. Son côté bestiale a disparut. Il n'est plus lui même. Il ne se connaît pas. Il est bien conscient que ce combat allait être différent de tout ceux qu'il a connu. Cette fois, il ne pourrait réagir tête baissée et laisser son instinct animal prendre le dessus. De plus, il ne désire pas blesser Aaron. C'est idiot! Il est bien obligé pourtant de lui porter des coups s'il veut remporter ici, aujourd'hui sous le regard de tous. 

Prenant une profonde respiration, le Tonnerre comprend alors qu'il allait devoir être plus rusé. Un point bien faible pour celui ci. Il n'est pas du genre à réfléchir avant d'agir. Dans un sens, il faut croire qu'Aaron tente réellement de l'aider, d'une manière brutale certes. Se relevant, titubant légèrement, il est contraint d'ôter le peu de t-shirt qui lui resté. Le problème des attaques d'un Tonnerre, c'est que ces dernières peuvent causer des brûlures.
Et tandis qu'Ys cherche un temps de répit, tentant de trouver une solution, voilà que le Master renouvelle ses attaques.
L'apprenti vit des sphères électriques dans sa direction. Aussitôt ce dernier se téléporte sans aucune difficulté. Mais à sa grande surprise, il constate que ces sphères le suivent. Une téléportation, encore une autre, il saisit le problème: ce sont des têtes chercheuses. 

Grinçant des dents, le jeune homme est à la fois agacé et admiratif. Il n'avait jamais vu une telle attaque. Malheureusement, il n'aura pas le temps de prendre des notes. Pendant qu'il se téléporte de gauche à droite évitant de rentrer en contact avec ces sphères, Aaron en profite pour placer des disques un peu partout dans l'arène. Inquiet, le garçon ne comprend pas où le Master veut en venir. Et quand ce dernier baisse sa garde, le Master en profite pour lui lancer des éclairs. Et quand il s'en rend compte, il est déjà trop tard. Evitant un jet d'éclair, le garçon frôle alors l'un des disques qui explose automatiquement. Le coup est fatal. S'étant protégé de son bras droit, le Tonnerre est de nouveau propulsé. Depuis le début du combat, il a l'impression d'être jeté de droite à gauche. Aaron n'ira pas avec le dos de la cuillère.  

Dans un cri de douleur, Ys maintient son bras ensanglanté. Ce dernier ne bouge plus, pas même les doigts. Voilà qu'il part avec un handicapé et de plus en étant droitier, ses chances diminuent. Ys n'a pas le temps de se plaindre d'avantage qu'il ravale sa rage constatant que les sphères le suivaient toujours. De nouveau, il se téléporte, inlassablement. 
Seulement, son terrain pour se téléporter est très limite. Il se téléporte entre des disques, pas trop près pour que ces dernières n'explosent. Le temps lui manque et son énergie s'effondre de plus en plus. Il aura beau se téléporter autant de fois qu'il le voudra, à un moment donné, il sera vidé. 
Quand enfin, une idée lui vint. Se téléportant de droite à gauche sur une distance très courte, tout en fixant son ennemi dans les yeux à chaque réapparition, le Tonnerre intensifia son déplacement. La vitesse de la téléportation s'accroit au point que de nombreuses silhouettes du garçon se dessine. Il n'y a plus un Ys, mais plusieurs. Une chaîne qui se suit. Finalement, les sphères se confondent dans cet échange et finissent par s'entrechoqué entre elles pour s'auto détruire. 

Essoufflé, Ys peut enfin s'arrêter et tombe sur ses genoux. Il le reconnaît, il a devant lui un adversaire redoutable. Toujours en tenant son bras mort, il crée un bouclier à champ électrique afin d'éviter d'éventuelles attaques. Planté au milieu de ces cercles, il redresse son regard sur Aaron. Il doit gagner du temps, impérativement s'il veut gagner ce combat. Se recharger en énergie est sa seule option. Pour l'instant, il a réussit à gagner un peu de raison, mais il le sait, ce ne sera que sur un court terme.

"Je le reconnais, tu es très fort. Je t'ai sous estimé. Mes excuses."

Tente-t'il de reprendre entre chaque essoufflement. Gagner du temps pour obtenir plus d'énergie afin de poursuivre son combat. Evidemment, sans éveiller un soupçon, il reprend la conversation:

"Je sais que je suis lent et je n'ai toujours pas saisis ce que tu m'as fais. Ce n'est pas très glorieux bien qu'étrangement, l'envie de gagner à tout prix ce combat ne m'intéresse plus."

Oui ça, il n'avait plus cette motivation pour devenir Master depuis qu'il avait mis un pied dans cette arène. Il se doute bien qu'Aaron est le fautif mais comment? Quoi parce qu'il est Sensitif? Vraiment? Ys a du mal à y croire, il est un peu l'idiot du village à cette heure. En revanche, il a bien compris. Garder son sang froid, calme. Cette fois, il ne se laissera plus guider par cette vieille colère disparue depuis le début du combat. Il allait devoir agir autrement, posé, réfléchis.

"Saches une chose, même si je ne désire plus devenir Master, Terrae reste ma priorité. Et je compte bien la protéger coûte que coûte. Même si je dois en crever."

Masse de gens sont venus les rejoindre... La fameuse "Cool Patrol" eh. Pfft. Dire que Colette se fout de sa gueule à chaque fois qu'il fait mention des gangs du village, soit disant parce que c'était carrément immature, alors qu'il monte le sien à Terrae c'est vraiment l'hôpital qui se fout de la charité. Il ignore les gens qui le salue. Il est pas la pour faire des politesses mais pour voir Williams se faire ratatiner comme une crêpe. Mais c'est pas du tout ce qu'il se passe... En prêtant l'oreille à ce qui se raconte entre la rouquine embourgeoisée et le Loup Noir, Jérémy comprend qu'avec ses pouvoirs de Sensitif, Willy-Wonka à retirer à son adversaire la volonté de se battre. Le Chasseur grimace et se recale sur son siège. C'était bâtard... intelligent mais bâtard. Soudain nerveux, ses doigts caressent délicatement ceux de Lottie dont les grands yeux font la navette entre ses deux demis-frères et son père adoptif dans l'Arène. Elle ne comprend toujours pas ce qu'il se passe mais elle est d'un coup très silencieuse et sage, comme attentive à la tension qui venait de naître.

D'accord... C'était vachement impressionnant quand même. Les éclairs, les coups, tout ça. Et le simple fait que le potentiel futur Master se relève malgré tout. Il a trouvé sa volonté ailleurs... Les terraens sont quand même incroyables quand ils veulent... Quelque chose a changé dans le regard des combattants, un expression qu'il ne connaît pas encore, une variante de ce qu'il a connu dans son village.

Il revient sur terre quand il entend un gémissement ; Lottie commence doucement à pleurer, les yeux rivés sur son papou. Elle ne le reconnaît pas non plus et ça, c'est plus grave. Bizarrement, Jérémy aurait pu profiter de la situation pour que sa petite sœur soit traumatisée par la simple vision du Master, qu'il ne puisse plus jamais la porter dans ses bras... Mais cela impliquait qu'il fallait qu'elle soit traumatisée... Et c'est simplement hors de question. :

-Euh Loup N-

Mais Colette a le regard vrillé dans l'Arène, une main dans celle de la petite rouquine à côté de lui, l'autre fermée si fort sur sa cuisse qu'il peut voir ses articulations blanches sur sa main encore un peu trop maigre. :

-Oye Nico !

Son meilleur ennemi le capte enfin, pose ses yeux sur ceux de Lottie pleurant doucement. C'est la première fois qu'il la voyait comme ça. Généralement, quand elle fait une crise de larmes, elle est très bruyante, au point de couvrir n'importe quel autre son. Là, le chagrin l'étreint tellement qu'elle peut à peine gémir. Nicolas desserre sa main, elle tremble jusqu'à la joue de Charlotte et essuie une larme. La petite renifle et attrape la main de son demi-frère... Jérémy souffle, jette un œil au combat en suspens en bas. Il n'attend pas ce qu'ils se racontent mais il a l'impression que la bataille va bientôt prendre un nouveau tournant important.

Ch'ais pas ce qu'il se passe Willy-Wonka mais t'as intérêt à faire vite pour faire un gros câlin à Lottie après bordel.

Oh bah voilà, ils ont mis un peu de temps à arriver, mais tout le monde est là ! La petite rouquine salue joyeusement tout le monde, en gratifiant Nicolas, à propos du fameux "autre demi-frère de Charlotte", d'un "OH MAIS C'EST TON FRERE COMME TON FRERE EN FAIT C'EST COOL" — mais vu la tête que Nicolas a fait, non, c'est pas vraiment cool. Bon. Euh. Elle lui posera peut-être la question plus tard, hein ? Nicolas a l'air tendu, elle comprend pas bien pourquoi… Ah, si elle comprend. Ses yeux se lèvent vers ceux tout gris de son ami et elle essaie de les croiser, mais sans succès.

—Tu vas voir, ça va bien se passer ! Ce sera un chouette défi, je suis sûre !

Enfin, quand on voit l'état dans lequel ont fini Huo et Aoi la dernière fois, il y a de quoi se poser des questions malgré tout, hein. Elle se penche vers Lottie pour lui dire bonjour, salue Adélaïde et Alice qui arrivent juste après, mais à peine Elwynn qui s'installe silencieusement quand le combat commence.

C'est. Ys est mal parti, en fait ? Elle acquiesce doucement à la question d'Adélaïde… Et se mordille la lèvre quand Nicolas lui répond à sa place. Il y a un instant de flottement dans le petit groupe, pendant lequel il va chercher la main de la petite morphe — elle la serre doucement, et pose son autre main par-dessus en se voulant rassurante.

—Tout va bien se passer.

Sa voix est un peu plus sérieuse, mais elle tremble un peu ; elle fixe Ys avec intensité de là où elle se trouve, et envoie toutes ses pensées vers lui.
Tu peux le faire. Tu peux y arriver. Lève-toi. Bats-toi. Tout le monde est derrière toi. Mais fais juste attention...

Sa main presse un peu plus celle de son ami quand Ys reprend du poil de la bête et qu'il commence à se battre à son tour... Elle jette de petits coups d'oeil à côté d'elle. Se mordille la lèvre quand Charlotte pleure.

—Nirolas... pour Charlotte, ça ira ? souffle-t-elle, très bas.

Elle serait d'avis que la petite ne devrait pas voir ça. Même si l'intensité et la fréquence des éclairs a baissé, maintenant, elle sait aussi que le combat est loin d'être fini.
Allez Ys. Courage. Tu peux le faire. Sois imprévisible, comme tu sais toujours l'être.

Rester concentré. Je souffle lourdement, fait rouler mon épaule gauche un peu douloureuse. Puis la douleur reflue et disparaît, comme elle est venue... C'est un jeu dangereux auquel je joue, et je sais que si je me casse quelque chose, je vais avoir plus de mal à faire semblant que mon corps ne ressent rien. Puiser dans mon énergie pour les disques explosifs me vide plus que je ne l'aurais escompté ; j'y suis allé trop fort pour un début de combat, j'vais sûrement pas réussir à tenir la cadence.

Ys, lui, prend rapidement connaissance des mines que j'ai disposées autour de nous ; il a intérêt à faire attention à leur emplacement, ou au moins à leur énergie qui rayonne autour de lui, s'il n'a pas envie de finir en canard braisé…

Mes projectiles continuent à le poursuivre. Il devient de plus en plus difficile de le suivre des yeux, et surtout, de distinguer son énergie parmi celle qu'il laisse un peu partout dans son sillage. Ma mâchoire se contracte. Ok, c'est mauvais. Dans d'autres circonstances, j'aurais sans doute applaudi, l'air de dire "Hey, gg mec, c'est hyper impressionnant ça, je kiffe, pouce vert !"... Mais en fait, euh, pas aujourd'hui, hein.

Il retombe à genoux - il n'a pas encore dépassé ses limites, mais ses batteries sont déjà bien mises à mal... Est-ce qu'il va réellement y arriver ? Plutôt que d'attaquer, il ne bouge pas et… parle. Je hausse un sourcil circonspect, arrêté dans mon mouvement. Je mets quelques secondes à comprendre le but de sa tactique - en même temps, Ys qui parle pendant une baston, à part pour gueuler, ça peut pas être par pure envie de taper la discut'. Gagner du temps. Hm. Ca ne me fera pas de mal à moi non plus… Un demi sourire naît sur mes lèvres. C'est dangereux... C'est dangereux, mais c'est grisant.

Me déplaçant de manière circulaire autour de lui, je contourne les disques d'énergie sans le quitter des yeux, cherchant à rester dans une zone relativement safe. Laisser un temps mort, très bien. Mon sourire s'étire davantage sur mes lèvres, mais mes yeux ne rient pas. Je laisse mon énergie circuler afin de préparer le terrain... Tout doucement... Pour qu'il ne s'y attende pas.

—Ah oui ? En crever ? Ok.

De nouveaux éclairs apparaissent dans mes mains pour n'y grésiller qu'un instant, avant que je ne les envoie sur Ys. J'enchaîne les projectiles, le visant lui et les mines, cherche encore à l'acculer pour qu'il se défende, bon sang. Suffit le temps mort, maintenant. J'espère qu'il a bien récupéré, c'est un peu décevant niveau attaque, pour le moment.

—Est-ce que tu vas passer tout le combat à t'écraser par-terre, ou bien tu comptes attaquer un jour ?!

Au dessus de nos têtes, le ciel déjà nuageux commence tout doucement à s'assombrir. L'atmosphère devient lourde, plus sombre, plus électrique. Les rayons du soleil à son zénith disparaissent.

Bientôt, le tonnerre grondera. Et Ys aura intérêt à se téléporter très, très vite.

Pour Terrae, oui. Elle est là la véritable raison de sa présence ici. Le reste ne compte pas et ça, quoiqu'Aaron ait pu lui faire, ça restera ancrer en lui.
Ys ne doute plus, du moins pas sur ce sujet. 
Le temps d'un répit, il fit diversion et le Master entre dans son jeu. Ils rechargent tous deux leurs batteries. ce n'est peut être pas une bonne idée mais seul l'avenir nous le dira.

Toujours un genoux au sol, le Tonnerre ne quitte pas du regard son adversaire. Ce dernier tourne autour de lui tel un lion en cage. Il veut quelque chose. Il le désire. Aaron a de la prestance qui ne laisse plus indiffèrent et Ys a intérêt à être méfiant. Il l'a, son cours.
Le Master, sans appel, relance les hostilités. Protégé par un bouclier à champ électrique, Ys évite ces éclairs. Pendant le temps de cette protection, il frappe les paumes de ses mains par terre. Un épais mur électrique se créait à l'arrière du Master et longe les murs de l'arène. 
Entre les mines et ce mur, ils sont entourés et dans une véritable cage prête à exploser. Ys fut prisonnier de ces cercles, désormais ce fut Aaron qui serra gêné de ce mur. S'il recule, ce sera lui qui connaitra les malheurs du tonnerre.
Le regard déterminé, malgré l'insoutenable douleur au bras, Ys se redresse. 

"Je suis prêt."

Maintenant, on peut jouer. 
Un coup de téléportation, il évite une éventuelle attaque du Master. Ce dernier tente de faire exploser ces mines à proximités du rouquin. L'ayant remarqué, Ys les manque de peu, bien qu'il fut projeté à certains moments. Retombant sur ses pieds tel un félin, le jeune homme se concentre afin de former entre ses mains une énorme sphère de la taille d'un ballon. Sans l'ombre d'une hésitation, il lance cette dernière alors qu'il est obligé d'éviter une nouvelle attaque du Master. Cette dernière se dirige au dessus d'Aaron et soudainement elle se détruit en plusieurs petites billes qui viennent s'exploser sur l'ennemi.
Tout se passe rapidement. Et tandis qu'Aaron est occupé par ces billes, Ys tente le tout pour le tout.

A en crever. Bien qu'il ne soit pas toujours l'homme le plus réfléchis, il n'en reste pas moins homme de parole. Et telle une promesse, tandis que le Master est menacé de reculer sous l'attaque de ces bille sur un mur potentiellement dangereux, Ys se jette volontaire près d'une des mines pour la faire exploser. Tout se joue à la seconde, le rouquin est concentré, il le sait, il ne doit pas se louper. 
Sous l'effet de l'explosion, Ys se téléporte de justesse pour éviter d'être propulsé. Sous l'effet de la téléportation, il s'empare des débris brûlants en pleine instance d'explosion. L'instant est crucial et calculé à la seconde prêt. Lorsque le Tonnerre réapparait, c'est pour être, sous le souffle de l'implosion, juste sur le côté gauche de son adversaire. Car oui, il l'avait bine remarqué que ce dernier connaissait un léger handicapé. Non, il n'y avait jamais prêté attention, mais durant ce temps d'échange, lors du répit, il remarqua une gêne étrange du côté de son œil. Et quitte à tout tenter, pourquoi pas là?
Oui, il joue la carte du kamikaze. Parce que oui, il peut réellement en crever pour Terrae.

Et pendant ce temps, le ciel se couvre et remplit d'effet statique.