Aujourd'hui, j'ai ma soirée, et ça c'est cool. Mais ma collègue n'avait pas réussi à décaler son rendez-vous chez le psy (Ou alors elle avait pas vraiment essayé mais tant pis, elle m'en doit une) et elle n'arriverait que pour le début du service du soir, me laissant gérer la fin d'après midi seul. Ça ne me dérange absolument pas, donc ça arrange tout le monde. Le bar est en plus peu rempli à ces heures là, généralement, laissant place à quelques habitués, et parfois quelques groupes de potes ou d'amis souhaitant boire un café ou une bière en terrasse. Enfin, la routine quoi. Je m'étire avant de reprendre la préparation d'un cocktail sur mesure demandé par un client régulier. C'est une recette que je ne connaissais pas avant qu'il me la demande, mais maintenant je pourrais lui servir ça les yeux fermés. Du coin de l’œil, je vois une chevelure noire avec des mèches bleues passer la porte et se diriger vers le comptoir. Mh. Elisha. J'aurais bien dit que ça faisait longtemps mais non. Je lui adresse un sourire le temps de terminer ce que j'ai commencé, puis je me dirige vers elle. Sacrée gueule qu'elle me tire, aujourd'hui.

"Salut 'Sha. Je te sers ça tout de suite ouais. Ça se voit, pour ta salle journée. C'-"

Ouais nan, la fine algérienne irlandaise brune aux cheveux bleus et aux yeux gris fait un peu la gueule. Je me demande un instant si c'est lié entre autre aux gamins qui on visiblement réveillé un paquet de monde ce matin à hurler et gueuler partout, d'après certains clients et mes échanges matinaux avec quelques amis vivants encore à l'institut. Et encore une panne d'eau chaude, pour laquelle cette fois ci je ne suis pas responsable. Hehe. N'empêche que je me suis jamais fait choper.

En attendant, tout le monde dans le bar est servi, alors je commence à me préparer un café. Je suis accro, c'est moche hein. Mais voilà, c'est toujours agréable un bon café. Elisha me jette un regard que je comprends immédiatement, et je réponds d'un simple hochement de tête.

"Pas de soucis, je garde tes affaires. Siii. Si toi tu gardes l'équilibre1, ce qui a l'air mal par- Merde."

Je prends appuie sur le comptoir d'une main, balançant mes jambes au dessus du zinc pour passer de l'autre côté et rejoindre la jeune femme qui vient de perdre connaissance. Je remercie chaleureusement un jeune Air sirotait tranquillement sa bière et qui a eu l'excellent réflexe de freiner la chute de la tonnerre.

"T'assures grave, mec. Ta prochaine conso est pour moi !"

Je claque du doigt, l'index pointé vers lui, mais tout le reste de mon attention tend vers Elisha, allongée au sol. Formé brièvement aux premiers secours, j'approche ma joue de la bouche de la sensitive. Elle respire, tout va bien. D'un signe, je fais signe aux curieux de s'éloigner pour qu'elle ai de l'air, et je viens faire couler un mince filet d'eau sur son visage pour la réveiller. Ce qui a l'air de fonctionner parce qu'elle rouvre rapidement les yeux, m'autorisant un léger soupir de soulagement, couvert par celui de l'irlandaise qui semble excédée par ce qui vient de se produire. J'espère que je n'ai pas trop chargé son verre. Elle l'a bu si vite, je m'en voudrais si c'était de ma faute...

"Elisha. Comment tu te sens. Et qu'est ce qu'il s'est passé?"

De l’hypoglycémie? Ooooh. Ça m'est arrivé une ou deux fois moi aussi, après un entraînement trop intense en étant à jeun. Bon, jamais au point de tomber dans les pommes, mais tout de même. La tête qui tourne, tout ça, je vois ce que ça peut faire.

"Est ce que tu te sens capable de te lever? Je t'apporte un truc à manger, assieds toi ici, je reviens."

Je tire la première chaise avec un dossier pour l'asseoir délicatement dessus, lui apporte un grand verre d'eau légèrement citronnée dans lequel j'ai ajouté un peu du sucre et j'entreprends de préparer un sandwich pour la jeune femme. Moment que choisit ma collègue pour rentrer dans le bar.

"Salut, tu tombes bien. Enfin. Moi bien qu'Elisha, qui elle tombe littéralement. Elle vient de faire un malaise je vais la raccompagner chez elle, jte laisse les clés de la boutique!"

Désolé Elisha, mais non, je ne te demande pas ton avis. Là c'est dans ton lit direct, et je veille à ce que tu avales un truc. T'es déjà maigre à faire peur, alors si en plus tu OUBLIES de bouffer, ça va devenir dangereux.

"Je récupère tes affaires, et dès que tu te sens capable de tenir un minimum debout, je te ramène chez toi. Tu te sens un peu mieux déjà?"

Ça aurait en effet été plus crédible si tu avais pas fait tomber le verre, Elisha, c'est certain. Je lui souris, amusé, et je vais chercher de quoi nettoyer sa bourde, non m'être d'abord assuré qu'elle allait bien.

"Tiens, je t'ai préparé un sandwich, que j'oublie pas de te le donner. Et c'est pas de la pitié, n'importe quoi ! Juste, je prends soin de mes clients, encore plus quand ce sont des habitués et des gens que j'apprécie, tu sais. Laisse moi le temps d'aller me changer rapidement, je reviens."

Le sol nettoyé et ma tenue de travail enlevée, j'enfile ma chemise dans l'arrière boutique, et je ne peux pas m'empêcher de sourire. C'est la chemise que m'avait choisi Elisha pour le bal de Noël. Je me demande si elle va le remarquer. Je salue ma collègue et les quelques clients qui me font un signe de main et me souhaitent une bonne soirée, puis je récupère les affaires de la jeune femme, et je m'approche de la sensitive en lui offrant mon bras pour qu'elle s'appuie dessus si elle en ressent le besoin, tout en lui fourrant le sandwich entre les mains.

"Tu vas rentrer oui, ne t'en fais pas."

On sort, tranquillement, et arrivé à quelques mètres j'ouvre enfin la bouche.

"C'est vraiment juste de l'hypoglycémie, t'en es sûre? Sinon on passe par l’hôpital avant que je te ramène à ta chambre."

Je préfère demander, et de cette façon ci la brune n'a pas à rentrer dans les détails.

"Et puis, franchement. Quelle idée de boire à jeun... Ne pas manger avec en plus l'alcool qui déshydrate ton cortex. Tu devrais vraiment faire attention à ta santé, 'Sha. S'il te plaît. Elle était si terrible que ça, ta journée? Tu veux en parler un peu?"

Je ne sais pas vraiment parler autant est une bonne idée, j'ai pas envie de l'assommer avec mon débit de paroles après qu'elle soit tombée dans mon débit de boisson, tu vois? Mais je suis réellement inquiet. Déjà qu'elle n'est pas bien épaisse, si en plus elle mange pas et qu'elle boit, ça pourrait avoir de vilaines conséquences.

"Oh et. si jamais tu veux faire une pause pour reprendre ton souffle ou quoi, ou même t'asseoir dans l'herbe pour fumer une clope, tu hésites pas, j'ai tendance à ne pas m'arrêter quand je marche. Sinon, je peux aussi te porter si tu veux."

Je ne plaisante qu'à moitié en proposant de la porter, parce que je sais que j'en suis largement capable, en soit, mais j'affiche un air provocateur en disant ça. J'aimerais que ma bonne humeur soit plus communicative que mon inquiétude, alors parfois j'en fais des tonnes, j'en suis désolé.

"Mais. Je te prends pas pour une petite chose frag- ..."

Nan bon bah. J'ai proposé aussi hein, j'imagine qu'on peut dire que je l'ai cherché... J'attrape les jambes de la tonnerre pour qu'elle ne tombe pas, et je continue le trajet avec la brune sur le dos. Elle est toute légère, et je suis à peine essoufflé en arrivant à notre destination. Et évidement, l'ascenseur est en panne. Quelques volées de marches plus tard sans croiser grand monde, et je la laisse descendre en me baissant pour qu'elle ne tombe pas. Elle semble tenir debout seule pour les derniers mètres nous séparant de la porte de sa chambre, et elle me propose de rentrer. Je n'hésite même pas et je m'engouffre à sa suite. Je ne repartirais que quand je serais certain qu'elle se sent mieux, de toute façon.

"Je serais pas reparti avant de te savoir en un peu meilleur forme, de toute façon, mais je suis ravis que tu le proposes. Et mh. Si tu as une bière en trop, je prends !"

Je viens m'avachir sur le canapé, dans le coin de la pièce, juste en dessous de la fenêtre qu'Eli vient d'ouvrir, et j'entreprends de me rouler ma propre cigarette du bonheur, comme disent les. Gens chelous. Puis je l'allume, et je porte enfin mon regard sur la pièce qui m'entoure.

"Ça me rappelle mon ancienne chambre; un truc de ouf. Même si j'y ai passé que quelques semaines."

J'attrape la bière qu'elle me tend, et je me décale pour qu'elle puisse s'asseoir à côté de moi, après avoir retiré la pile de vêtements et de sous vêtements posés là, et je ne peux pas m'empêcher de rire.

"Tu caches sacrément bien ton jeu, n'empêche. Vu comment tu t'habilles d'habitude je pensais pas qu'en dessous c'était des choses aussi sexy, que tu portais."

Enfin, le pire c'est que malgré sa maigreur, je suis persuadé que ça lui irait super bien et. Je chasse ces pensées de mon esprit. et ces images. Bordel. Après une gorgée de bière et une taffe sur mon joint, je me tourne vers la tonnerre.

"Bon. Qu'est ce qu'il s'est passé aujourd'hui pour qu'on en soit là? Pour que tu ais oublié de manger, 'Sha."

L'air frais dans mes cheveux me fait du bien, et je cherche le regard de l'irlandaise, n'osant pas vraiment la prendre dans mes bras. J'espère obtenir une réponse, cette fois.

"Tu m'inquiètes un peu..."

Ça, je l'ai soupiré à demie voix, parce que j'assume pas beaucoup. Mais c'est tout de même très vrai...

"Ah, parce que du coup te rendre super sexy en te choisissant une robe de bal qui te rend ultra bonne ça fait de moi quelqu'un de déméritant? Je note, okay. Et puis, je regardais pas, j'ai juste vu, d'accord?"

Je l'écoute me raconter un peu sa journée, et c'est un sourire quelque peu amusé qui se dessine lentement sur mon visage, au fur et à mesure des péripéties de la journée d'Elisha. Mais le ton de ma voix est sérieux quand j'ouvre la bouche, et c'est pas plus mal sinon elle aurait été capable de faire la gueule et de me mettre à la porte.

"J'ai appris, pour les gamins, ouais. T'as pas été leur seule victime, si ça peut te rassurer un peu. Et je connais des gens compétents qui peuvent recoudre ton jean, si tu veux! Mais effectivement, c'est moche, ce genre de journée. Mais c'est bien, que tu n'ai pas craqué, 'Sha. Montre à la vie, cette salope, de quel bois t'es faite ! À ta super journée à partir de maintenant !"

Je viens percuter sa bière avec la mienne, la vidant de moité en une seule gorgée, avant de reprendre une taffe. Je l'écoute continuer de parler, et je refrène un sursaut de surprise. Comment ça, OUBLIER DE MANGER RÉGULIÈREMENT? Elle plante son regard dans le mien et ça a pour effet de me calmer immédiatement. Bon, clairement elle ment, sur le fait qu'elle ne sache pas pourquoi, j'imagine qu'elle a au moins une idée de pourquoi, mais je n'en montre rien.

"Mais... 'Sha... T'es déjà pas grosse, vraiment, s'il te plaît, fait attention... J'ai pas envie de te retrouver par terre dans la rue, ou quoi, moi. Vraiment, il va falloir que tu prennes de bonnes habitudes alimentaires. C'est très important! Je t'aiderais, si je peux. Ça me dérange même pas de te faire à manger si tu as besoin et ..."

Je m'emballe peut être un peu, quand même... On est pas vraiment intimes, à peine amis, même si je l'apprécie beaucoup, et que je la trouve jolie. ... Depuis quand on a besoin de trouver quelqu'un beau pour être son ami et l'apprécier, Erik? Bordel. Je tire à nouveau sur le joint, m'enfonçant dans le fond du canapé pour camoufler mes joues rosissantes.

La réaction de la jeune femme était prévisible, tellement prévisible que c'est à peine si je réagis. Je veux dire... Qu'est ce que tu veux répondre à ça. Je me doute bien que je ne suis pas le premier à te tenir un tel discours, et que je ne serais sans doute pas le dernier. Je sais aussi que ce n'est pas agréable à entendre, alors je me contente de la regarder en hochant la tête, malgré son son sarcastique. Quand elle se lève pour écraser son mégot dans le cendrier, j'entreprends simplement de rouler un nouveau joint, bien chargé, bien assez pour deux personnes, tout en continuant de tirer sur le mien.

"Reviens t'asseoir, Eli. Je me doute bien, qu'entendre ça une fois de plus ça ne va pas changer ta vie. Et ça n'est pas pour te faire la morale que je dis ça. Je suis juste réellement inquiet. Tu gères ta vie comme tu peux, je sais bien, ça aussi. J'essaie juste de te dire que. T'as pas à gérer ta vie comme tu peux seule. On est tous ici plus ou moins dans le même bateau, et s’entraider c'est important."

Elle revient et me tend le cendrier, dans lequel j'écrase moi aussi mon mégot, avant de lui tendre le nouveau joint.

"Je te laisse l'allumer, tiens. Et puis, rapport à ce que tu disais tout à l'heure. sur le fait que tu pourrais commencer à penser que j'aimerais que tu sois sexy pour moi. Si tu pouvais être plus sexy pour toi, déjà, ça serait génial. Un peu plus en chair. Je sais pas vraiment trop comment dire ça mais. Vraiment, quelques kilos en plus et toute l'aile des Feux fantasme sur toi."

Le ton dans ma voix est mi amusé, mi sérieux. Qu'est ce que je suis en train de raconter moi? C'est grave. J'ai pas vraiment oublié de manger, moi, pourtant. Et j'ai pas bu ou fumé plus que d'habitude. J'enchaîne rapidement pour ne pas lui laisser le temps de répondre, parce qu'elle risque elle aussi de se répéter à me dire que je lui fais la morale et qu'elle est assez grande.

"Si jamais je peux faire quoi que ce soit pour t'aider, tu hésites surtout pas, hein? Que ça soit t'écouter raconter tes journées pourries, accoudée sur le comptoir, ou alors ici, à parler de choses un peu plus personnelles, te faire à bouffer ou même voir du monde... Tu m'appelles. T'as mon numéro, nan? Vraiment, ça me ferait plaisir..."

Je termine ma bière et je cherche le regard de la sensitive, qu'elle puisse lire la sincérité et la bienveillance dans le mien. C'est quand même dingue à quel point tout le monde arrivant à Terrae peut être dans des états pareils, de temps en temps. À quel point la vie, le Vide nous a volé une partie de notre bonheur... C'est injuste, et je m'estime presque heureux, malgré mes traumatismes, comparé à beaucoup d'autres. Je me demande par quoi est passée Elisha...

Une fois encore, je ne peux pas m'empêcher de sourire aux propos de la sensitive. J'espère bien que ça te fait du bien, que je sois là. C'est pour ça que je suis venu. Pour te f- Euh. Ouais si, pour te faire du bien. Au sens pas sexuel. Ça semblait ambiguë, dans ma tête, c'est étrange.

"Je suis toujours là quand on a besoin de moi et qu'on prend la peine de m'appeler. Et ouais nan, je sais bien que j'ai de jolis yeux, mais j'ai pas envie que tu tombes littéralement pour eux, t'vois? Puis genre c'est toi qui dit que j'ai de beaux yeux. Les tiens sont juste dingues."

Ça c'est dit. Ma tête est légèrement brumeuse, et pas forcément plus que d'habitude, mais être dans cet état avec une nouvelle personne, c'est toujours quelque chose d'un peu spécial. Il peut se passer des choses de ouf, ça peut révéler des alchimies amusantes entre les gens, c'est sympa. Apparemment, Elisha et moi, quand on est défoncé ensemble, on se complimente sur nos yeux. Comme quoi, chacun son truc, hehe !

Je récupère le joint pour tirer dessus tranquillement, me tournant vers l'irlandaise qui me pose une, ou plusieurs questions, c'est pas facile de compter, mais l'idée globale est plutôt simple. La réponse un peu moins, mais je fais de mon mieux pour que ça soit compréhensible.

"Moi ça fait un peu plus d'un an, que je suis là. Je crois que c'est ça ouais. Parce que ça allait bientôt faire deux ans que maman est morte. Et que ça fait 3 ans et un mois, maintenant. Oui, je sais, j'ai une façon étrange de mesurer le temps qui passe. Mais t'en fais pas. Et en ce qui concerne le reste. Je suis tombé sur les bonnes personnes, ici. Et j'ai réussi à vaincre ma peur. Tu sais, avant d'arriver ici j'avais jamais adressé là parole à une fille..."

J'hausse les sourcils en haussant la tête, reprenant une taffe avant de repasser le joint à Eli.

"Et ouaaaaais. On dirait pas hein? Mais nan, je suis tombé sur les filles les plus gentilles et les plus adorables, vraiment, j'ai eu beaucoup de chance. Enfin. Il reste encore des fois où j'ai du mal, et des nuits où je me réveille en pleurant, tu sais. Mais j'essaie de sourire tout le temps, ça rassure les gens, et tout le monde ici en a besoin."

Je réfléchis un moment pour essayer de me rappeler la fin de la question, et pour y trouver une réponse, avant de reprendre.

"Je pense que mon secret, il est plutôt simple. Je passe pas une minute à rien faire, sauf quand je dors. Mais j'ai un sacré emploi du temps, entre le boulot, qu'en plus je kiffe, le sport, les promenades avec ma chienne, sortir avec des gens qui redonnent le sourire par leur simple présence, les jeux vidéos, une colocataire géniale. J'ai pas un moment pour penser à des trucs aussi stupides que mon passé, et je ne m'en porte pas plus mal. Se changer les idées, c'est vraiment bien. Mais de manière générale, j'ai tendance à toujours voir le positif. J'en ai eu besoin, de ça, pour pas envisager de me foutre en l'air plusieurs fois. Mais je vais te passer les détails sur mon passé, ça intéresse pas grand monde et c'est glauque, okay? D'ailleurs, tu t'en sors avec tes pouvoirs, toi? Clairement, j'ai l'impression que c'est celui qui provoque le plus de soucis, sensitif. Pour en connaître quelques uns, c'est pas le plus simple à vivre, c'est certain !"

Ça me semble important de demander, quand même, surtout qu'elle me dit qu'elle apprécie de se retrouver avec quelqu'un de pas déprimé. C'est pas plus mal, je trouve. Ça me donne une idée, d'ailleurs.

"Eh mais, j'y pense ! Tu ne m'as jamais vu utiliser mes pouvoirs, toi ! Enfin, pas mes pouvoirs d'eau, ça tout le monde ayant commandé un café au bar a pu l'entrevoir. Nan, mon pouvoir de Morphe, regarde !"

Je pouffe et je me redresse du canapé, me transformant comme d'habitude en un beau chien semblable à ma petite sœur, avec la fourrure noire et la truffe un peu humide. Puis je viens me planter devant la jeune tonnerre, la regardant dans les yeux (qui sont d'ailleurs l'une des seules choses ressemblant à mon moi humain, même couleur, tout ça). D'habitude j'ai le droit à des grattouilles. J'espère qu'Elisha elle fait bien les grattouilles. Je grimpe sur le canapé, et j'approche doucement ma tête, quand la tonnerre a un mouvement de recul.

"Woof?"

Eh bah ça a l'air loupé, pour les grattouilles... J'ai tendance à oublier que certaines personnes ont peur des chiens...

J'éclate de rire.

"J'ai commencé à bosser dans un club gay. Eheh. Jme suis fait payer quelques verres, du coup, ça avait que des bons côtés. Rhalalah, ce sont de bons souvenirs."

Puis je l'écoute me parler de ses pouvoirs, et je ne peux pas m'empêcher de sourire, compatissant.

"C'est ce qui fera ta force. Crois moi, je vis avec une master sensitive. Même si pour l'instant tu perçois ça comme un truc chiant. Vraiment. L'empathie c'est l'une des plus belles qualités du monde. Tu vas finir par t'y habituer, ça sera moins pénible. Mais ne change pas."

Je suis le genre de personnes à tenir ce genre de discours, ouais. Mais j'y crois très fort en le disant. Evidemment que l'empathie c'est une qualité. C'est ce qui te rend vrai, ce qui te rend bon, et gentil. Il n'y a rien de pire que les gens incapable de comprendre les autres. Rien.

Puis je lui fais ma petite démonstration, et vraiment, c'est le drame. Je ne pensais pas qu'on pouvait réagir à ce point. Qu'on pouvait avoir à ce point peur d'une petite boule de poils. Même si la boule de poils c'est moi. J'arrête de bouger, la regardant sans vraiment comprendre, au moins aussi choquée que la jeune tonnerre. Merde. J'agite la queue bêtement quand elle crie, au moins aussi effrayé par sa réaction qu'elle par ma transformation. Puis, dans ses yeux, je vois une larme se former, puis une seconde. Aussitôt, je me retransforme, et je m'assieds en tailleur sur le sol. Mmh.

"Excuse moi, 'Sha. Je voulais pas te faire peur. Je savais pas que c'était à ce point, que tu avais peur des chiens. Tu veux bien descendre de là?"

Je me relève, la main tendue vers elle pour qu'elle daigne se décoller du mur.

"Viens là. Pardon..."

Je m'assieds sur le bord du lit, sa main dans la mienne, et elle fait de même. Ses yeux sont humides, je le vois bien, et je lui fais un petit sourire triste, avant de l'attirer vers moi et de la prendre dans mes bras, la berçant doucement.

"Je recommencerais pas. Ça va? Je suis terriblement désolé."

D'une main, je frotte doucement son dos, pour la consoler. Je m'en veux pas mal, de lui avoir fait peur, alors j'évite les mouvements brusque et je la serre le moins fort possible, même si c'est assez peu confortable.

"Du coup, si quand tu touches quelqu'un tu ressens la même chose que lui... Tu sens que je suis désolé? Ça m'intrigue."

J'espère qu'elle va pas sentir que sa réaction je la trouvais quand même un peu mignonne. Un peu comme elle, d’ailleurs. Je resserre un peu mes bras autour d'elle, espérant chasser un peu ces pensées gênantes de mon esprit en la réconfortant.