Si l'annonce du départ de Renji m'a fait l'effet d'un coup de poingard au coeur, celle du départ d'Akito a carrément achevé de le piétiner. Ca fait plusieurs semaines maintenant que je suis passée en mode ermite. Je reste roulée en boule dans mon lit et je ne réponds plus à aucun message. Je vais encore au travail ceci dit - y'a que les riches qui ont le loisir de déprimer convenablement, lol.

Du coup, la seule personne avec qui j'ai encore des contacts réguliers, c'est Allen. J'essaie de faire bonne figure, je ne sais pas si c'est convaincant. Dans tous les cas, même s'il a remarqué un changement dans mon humeur, il n'a fait aucune remarque - et je lui en suis reconnaissante. Il m'a proposé un entraînement aujourd'hui, j'ai accepté. Je pensais que ça me changerait un peu les idées, mais ça a juste été un fiasco complet. Impossible de me concentrer sur quoi que ce soit, résultat des courses mes pouvoirs partent en freestyle, ce qui est incroyablement frustrant et énervant. Je décide de mettre fin au supplice après une petite heure, une petite moue d'excuse sur le visage à l'attention de mon collègue.

"Désolée... Je fais n'importe quoi aujourd'hui. J'arrive pas à me concentrer, je crois que c'est pas la peine que je te fasse perdre ton temps plus longtemps."

Je lui tourne le dos et me dirige vers les bancs pour récupérer mon sweater et ma bouteille d'eau. En vrai je me sens tellement frustrée que j'en ai les larmes aux yeux, c'est ridicule. Il faut vraiment que je me reprenne en main ! Je me passe une main sur le visage en soupirant, avant de rejoindre Allen.

"Encore désolée, et merci quand même pour ton temps. On se voit demain ?"

J'essaie de lui sourire, mais on va dire qu'on a vu plus convaincant.

Cela fait quelques temps que Pandora est beaucoup moins souriante que d'habitude au magasin. Nos entraînements se sont un peu plus espacés aussi. Oh, bien sûr, elle reste toujours aussi gentille, elle garde son sourire poli, mais rien de la bonne humeur qu'elle affiche devant les clients n'est vraie.

Je ne savais pas trop quoi faire pour elle. D'un côté, je me disais qu'elle avait peut-être besoin de parler et qu'il faudrait que j'aille vers elle pour lui ouvrir la porte. Mais d'un autre côté, je me disais que si elle avait envie de parler, elle serait déjà venue, et puis elle ne ferait pas semblant d'aller bien, elle montrerait carrément qu'elle va mal pour qu'on lui pose la question... Ou pas. Les humains sont tellement difficiles à cerner, c'est dingue ! J'vous rappelle que j'suis un boulet des émotions ok. Alors bon.

J'ai fini par en parler à ma psy l'autre jour, en lui expliquant que j'avais envie de faire quelque chose, montrer que peu importe ce qu'elle traversait, j'étais là. Mais qu'en même temps, je savais pas quoi faire. Et que par conséquent, j'étais juste bloqué à l'étape "Elle va pas bien, je le sais, mais je bloque, JE DOIS FAIRE QUOI ?!". Ma psy avait souri et m'avait rappelé que notre objectif du moment était d'arrêter de se bloquer et de se renfermer. Je devais sortir de ma zone de confort. Donc peut-être aller vers elle si effectivement elle ne va pas bien. Quitte à me prendre un vent, ou alors à supporter des choses que j'étais peut-être pas encore prêt à supporter. Mais après tout, on a bien dit sortir de la zone de confort, hein...

Je lui ai proposé un entraînement -nous ne finissions pas trop tard aujourd'hui, et surtout à la même heure tous les deux. Elle avait vraiment l'air d'avoir du mal, surtout comparé à ce que j'avais eu l'habitude de voir venant d'elle. On aurait dit une handicapée des pouvoirs comme moi, le délire.

Alors qu'elle lâchait l'affaire et qu'elle commençait à me dire au revoir, je lui attrapai le poignet pour la retenir, le relâchant assez rapidement quand même pour ne pas être trop imposant.

-On va boire un coup plutôt ? Ca fait un moment qu'on se dépense là, et j'ai super chaud. Et il fait beau, alors autant profiter un peu du soleil... Ca te dit ? On a quitté suffisamment tôt pour profiter du soleil, alors ce serait dommage de ne pas pouvoir en profiter, hein.

Et un petit sourire pour accompagner le tout. Ca passe ou ça casse, mais moi dans tous les cas j'ai tendu la perche, donc maintenant la balle est dans son camp !

Notre entraînement ne passe pas très bien et tourne assez court ; bon je dois dire que je m'en doutais un peu au vu de cette mauvaise passe que je traverse actuellement... Mais tout de même, ce n'est pas très correct envers Allen, qui prend sur son temps pour tenter de m'aider à m'améliorer. Je m'excuse donc auprès de lui avant de tenter de m'esquiver. Une soudaine pression sur mon poignet m'en empêche.

Je me retourne avec surprise. Le brun m'a déjà relâché le poignet, mais le geste en lui-même est étonnant venant de lui. Je crois même que c'est la première fois que nous échangeons un quelconque contact physique ! Ca doit bien faire un an maintenant que nous travaillons tous les deux, mais ce n'est jamais arrivé. Même pas un petit effleurement accidentel en se passant des cartons dans la réserve ; ça a de quoi surprendre du coup !

Il me propose de prendre un verre pour se rafraîchir et profiter un peu du soleil. J'hésite un moment, je ne suis pas sûre d'être de très bonne compagnie... Mais d'un autre côté, celà me ferait peut-être du bien de parler un peu ? Même pas spécialement du fait que je ne vais pas bien, mais simplement de la pluie et du beau temps, pour me changer les idées... Renji et Akito partis, Allen doit probablement être une des personnes les plus proches de moi maintenant. Et je jurerais que sa proposition est une tentative de sa part de faire un pas vers moi... Ce serait con de laisser passer l'occasion, je finis donc par hocher positivement la tête.

"D'accord, on peut aller prendre quelque chose à boire. Tu pensais plutôt à la cafétéria, ou aller au village ? Mais c'est une bonne idée de se poser dehors oui !"

Sur la terrasse d'un café ou alors posé dans la cour, ça m'est égal je dois dire. Tant qu'on prend l'air, ça me fera du bien je pense... Je fais signe à mon collègue d'ouvrir la marche avec un léger sourire, le laissant décider ce qu'il préfère.

Pandora parut surprise par mon contact et j'eus instantanément un mouvement de recul. Ok, t'as merdé Allen, t'es allé trop loin- non. Non non non. On sort de la zone de confort. On sort de la zone de confort. Ca veut dire qu'on se rétracte pas. Ca veut dire qu'on prend pas la fuite. Ca veut dire que pour une fois, Allen, t'as eu une idée, une vraie. Tu t'es dit : Pandora elle va pas bien, elle a besoin d'un peu de soutien. Alors tu vas au bout. Même si peut-être tu te prends des trucs dans la gueule. Même si ça te fait peur et que tu sais absolument pas quoi dire. Tu fermes juste ta gueule, et t'y va. Voilà.

Je souris alors à sa réponse. Un peu moins sûr de moi. Mais ça restait Pandora. Et même si c'était pas facile pour moi d'aller vers les autres, c'était quand même un peu plus facile avec elle ; parce qu'à force on se connaissait, et que malgré tout, on passait un sacré bout de temps en ensemble, à travailler et à s'entraîner tous les deux à la fin de nos journées.

-Allons prendre un truc à emporter à la cafétéria et on se posera dans la cour, ça te va ? Et puis la cafétéria est bien plus près que le village...

Je lui souris, et entrepris alors d'ouvrir la marche. Je jetai un petit coup d'oeil par dessus mon épaule alors que je rassemblais mes affaires, et lançai, tout en ouvrant la porte pour sortir :

-T'as vu comme le patron est stressé en ce moment au magasin ? C'est insupportable, j'ai l'impression de me faire fusiller du regard à chaque fois que je m'occupe d'un client...

Ok. Bon, c'était pas la meilleure technique d'ouverture de conversation. Mais dans le doute, je pense que c'est quand même mieux d'ouvrir la conversation sur autre chose que le vif du sujet, non ? Même si le sujet choisi c'est pas le meilleur de la Terre.

Je hoche la tête lorsqu'Allen me propose de prendre quelque chose à la cafétéria avant de se poser dans la cour. Ca ne sert à rien de marcher inutilement jusqu'au village alors qu'il y a ce qu'il faut à deux pas ! Et puis surtout, on a déjà du se taper le trajet pour revenir du travail, ça ferait pas mal d'allers-retours inutiles ahah. On va passer sous silence le fait que le brun est fainéant et moi aussi, hein...

Il rassemble rapidement ses affaires avant d'ouvrir la marche, et reprend la parole à peine avons-nous passé la porte. Ah ouais, il attaque directement le sujet comme ça lui, tout en finesse et en délicatesse ! Bon, il parle du patron mais... Je ne sais pas pourquoi, j'ai l'impression que c'est un peu dirigé vers moi aussi. Je me contente donc de hausser les épaules en avançant dans le couloir.

"Oui, c'est vrai qu'il est à cran en ce moment... Je pense que la boutique ne marche pas super bien ? J'espère qu'on ne va pas se faire licencier d'ailleurs..."

Ce serait la cerise sur le gâteau ahah, sans emploi je n'aurais carrément plus aucune raison de sortir de mon lit... Je me demande vaguement à quel point l'institut injecte de l'argent dans les commerces du village, s'ils sont sensés être auto-suffisants ou quoi ? Parce qu'en vrai, tout est assez bon marché, beaucoup plus bon marché que dans la ville de Tokyo... Ce ne serait pas étonnant que les boutiques soient subenventionnées. Mais bon, subventions ou pas, ils ne vont pas garder plusieurs employés si la clientèle n'en demande qu'un ou deux... J'espère que la situation va s'améliorer du coup.

Nous arrivons rapidement à la cafétéria, et nous mettons à l'arrière de la file d'attente. J'ai l'impression qu'il y a la queue à toute heure du jour et de la nuit ici, c'est dingue quand même ! Ou alors, je choisis toujours mal mon moment, ahah. Je soupire légèrement avant de reprendre la parole.

"Je sais que je n'ai pas non plus participé activement à la bonne humeur générale ces derniers temps au boulot... Je suis désolée pour ça... J'ai essayé de garder mes soucis personnels à la maison mais bon, c'est pas toujours facile !"

Apparemment, ma tentative pour masquer mon humeur générale a échoué... Bon, j'ai pas spécialement envie d'en parler, mais je dois quand même bien des excuses à mon collègue. Entre le patron et moi, ça n'a pas du être très agréable ces dernières semaines.

Je relève mes yeux sur lui et lui lance un mini-sourire d'excuse. Je peux bien lui offrir son café pour me faire pardonner !

"Qu'est ce que tu veux boire, sinon ? Il y a du monde aujourd'hui... Enfin, j'ai l'impression qu'il y a toujours du monde ici !"

Le changement de sujet le plus subtil de l'univers...

Se faire licencier ? Alors j'avoue que sur le coup, rien qu'y penser me met dans un mood plutôt bof. Parce que se faire licencier dans ma tête c'est un sacré échec. Mais en même temps, j'peux pas m'empêcher de me rappeler que j'suis sensé reprendre des études, bientôt, genre très bientôt, et que du coup, ça me permettrait peut-être de me mettre un sacré coup de pied aux fesses si je ne travaillais plus à la boutique ?

... Mouais, qui y croit ? Pas moi. Vu les horaires que je fais, si je le voulais vraiment, j'aurais déjà repris les études. C'est pas le temps qui me manque, concrètement. Probablement juste la motivation.

On arriva à la cafétéria. J'avançais vers la file d'attente. Les groupes d'amis bavardaient de tout et de rien. Mais surtout, ils parlaient super fort. Genre c'est bon ça va on sait que vous êtes là, pas la peine de gueuler omg.

J'allais me plaindre du bruit ambiant à Pandora (oui j'ai des super sujets de conversation où je ne fais que me plaindre, c'est cool hein ?) mais elle prit la parole avant que je n'ai le temps de faire. J'arquai un sourcil, un peu surpris par ses propos.

Je n'eus pas le temps de répondre qu'elle enchaîna et me demanda ce que je voulais boire. Je haussai une épaule avant de répondre :

-Un simple café ça ira, merci. Et ouais, y'a toujours du monde, et c'est toujours terriblement bruyant ! Mais attends attends, rassure-moi, tout à l'heure, tu t'es quand même pas excusée d'aller mal ? Parce qu'à preuve du contraire, aller mal n'est pas une chose dont on doit s'excuser.

J'ancrai un instant mon regard dans le sien, cherchant une réponse dans ses yeux, avant de lui balancer une pichenette en plein milieu du front.

-Donc ben non, j'accepte pas tes excuses. J'suis sensé être ton ami, alors j'suis sensé t'aider quand ça va pas. Pas te faire te sentir encore plus mal au point de ressentir le besoin de t'excuser...

Je poussai un léger soupir, avant de glisser mes mains dans mes poches, relevant la tête pour regarder devant moi où en était la file d'attente.

-Tu veux en parler ?

Ma remarque sur la boutique semble plonger Allen dans la perplexité. C'est marrant, je ne m'en étais jamais vraiment rendu compte, mais à force de se fréquenter, j'ai appris à reconnaître sa tête quand il est concentré ou contrarié. Cette prise de conscience m'arrache un léger sourire, alors que le brun reste silencieux pendant un moment.

Nous arrivons rapidement à la cafétéria, qui est bondée et bruyante, comme d'habitude. La plupart des autres personnes dans la file d'attente ont l'air plus jeunes, probablement des collégiens et lycéens. Je me demande vaguement si notre génération était aussi bruyante et mouvementée à l'époque du lycée... Mmh, je pense que oui en fait - les autres du moins, moi j'ai toujours été calme. Mon collègue et moi nous insérons dans la file calmement, j'en profite pour m'excuser auprès de lui de mon humeur maussade ces derniers temps, avant de changer rapidement de sujet.

La réponse d'Allen me prend complètement par surprise, et je relève les yeux vers lui avec les sourcils légèrement haussés. Enfin, je ne parle pas de sa réponse à ce qu'il veut boire hein, mais du reste ! Il ancre son regard dans le mien avant de finalement m'envoyer une petite pichenette sur le front, me laissant bouche bée. Je ne sais pas du tout comment réagir, voilà une facette du brun que je n'avais encore jamais rencontrée... Mais d'un autre côté, ça me fait chaud au coeur. Parce qu'il se fait du souci pour moi, et parce qu'il me considère comme son amie. Je baisse les yeux sur mes chaussures, un peu émue, et hausse les épaules.

"Je m'excusais plutôt d'avoir mis la mauvaise ambiance au boulot mais... D'accord, pas désolée alors !"

Je relève les yeux vers lui avec un micro-sourire, avant de hausser les épaules une nouvelle fois, le regard fuyant. Je fais mine de m'intéresser au comptoir qui se rapproche lentement de nous, alors que mon collègue se concentre sur la file d'attente qui s'amenuise. Je vois bien qu'il n'est pas plus à l'aise que moi sur ce terrain de confidences.

"Je vais pas vraiment... Mal, hein. C'est juste qu'il y a eu pas mal de chamboulements dans ma vie ces derniers temps et j'ai du mal à retomber sur mes pattes... Maiiis ça ne te dit pas d'attendre d'être dehors pour poursuivre cette conversation ?"

Je termine en baissant la voix, alors que je remarque le groupe de jeunes devant nous qui semble s'intéresser d'un peu trop près à notre conversation. J'ai déjà du mal à me confier - un peu - à une personne que je côtoie presque tous les jours depuis plus d'un an, alors ce n'est pas pour étaler ma vie privée et mon ressenti en plein milieu d'une cafétéria remplie d'oreilles indiscrètes... Mais heureusement, c'est bientôt notre tour.

Un sourire s'étira sur mes lèvres alors que je croisai celui de Pandora, encore timide, certes. Mais ça faisait du bien de la voir comme ça. C'était déjà une petite avancée.

La file d'attente avança un peu et je fis quelques pas avant de reporter mon attention sur ma collègue et amie. Elle m'expliqua brièvement les raisons de sa mauvaise mine de ces derniers jours. Je hochai la tête, avant de rire légèrement quand elle me demanda si ce n'était pas possible d'attendre d'être dehors pour faire ça.

-Bien sûr, pas de souci, on en discute après.

Et je posai mon regard devant moi, apercevant le groupe de filles à l'oreille qui traîne gesticuler pour faire croire à tout le monde ici qu'elles étaient en plein milieu d'une conversation super intéressante. Bah oui tiens, bien sûr. Un sourire en coin étira mes lèvres, et je me passai de tout commentaire. C'était amusant, d'étudier les gens, finalement. Et si ça devenait mon métier...? Ouhlà, j'crois que tu tiens un truc Allen. Faut que t'en parle un peu autour de toi pour demander les avis des autres !

Mais plus tard, là c'est pas le moment.

Ce fut enfin notre tour et je commandai mon café avant de tourner la tête vers Pandora, lui laissant prendre commande à son tour. Je payai les consommations, et après avoir remercié le serveur d'un sourire, je fis signe à Pandora de sortir d'ici pour aller se poser dans la cour.

Une fois sur place, je me dirigeai vers un banc. Je poussai un soupir de contentement en m'asseyant : enfin une pause ! Il était temps, après tout ce qu'on avait déjà fait, entre le travail et la séance d'entraînement.

Je pris une bonne gorgée de mon café avant de tourner la tête vers Pandora.

-Alors ? Si tu me disais maintenant ce qui te tracasse ? Je ne sais pas si je pourrais être super utile... Mais apparemment, rien que parler et évacuer, ça fait du bien. Alors on peut essayer, si ça te va ?

Allen acquiesce à ma demande de discuter dehors, jetant lui aussi un coup d'oeil au groupe de jeunes indiscrets devant nous. Ils reprennent d'ailleurs leur conversation de manière bruyante quand ils se rendent compte qu'on les a grillés... Ah ces jeunes, plus de respect !
Notre tour arrive, mon collègue commande un café alors que j'opte pour un latte - je n'ai jamais été fan de café, mais avec beaucoup de lait et de sucre, ça passe ! Allen paie nos consommations, une fois de plus - c'était sensé être mon tour, hey ! - puis nous quittons la cafétéria et son bruit pour nous installer au calme dans la cour.

A peine le temps de nous asseoir sur un banc et boire une gorgée, que le brun ré-attaque direct sur le sujet qui fâche. Son discours me tire un petit sourire ; on dirait presque un psy qui parle. Il a déjà mentionné quelques fois aller voir quelqu'un, je suppose que c'est normal qu'il s'inspire de sa propre expérience pour tenter de m'aider. Mes yeux se perdent dans le vague, sur les arbres autour de nous, puis je soupire doucement avant de m'ouvrir un peu.

"Tu te souviens d'Akito ? Et Renji ?"

Je tourne ma tête vers lui avec un sourire triste. Je ne suis pas sûre qu'il ait vraiment eu l'occasion de les côtoyer de près, mais il doit au moins reconnaître leurs noms, de par nos conversations. Je me souviens les avoir mentionnés quelques fois. Je repose mon égard sur les arbres plantés ça et là dans la cour, et continue sur ma lancée.

"Ils sont partis... Tous les deux. Pas pour les mêmes raisons, mais plus au moins au même moment quand même. Et, je ne sais pas, je me sens un peu perdue je crois ? Ils étaient mes deux premières rencontres à Terrae et nous étions devenus assez proches au fil du temps. Terrae me semble vide d'un coup, et il y a des moments où j'ai envie de tout lâcher aussi..."

Je m'arrête de parler en me rendant compte que ma voix tremblote, et me passe une main sur le visage pour essayer de reprendre contenance. Je n'ai vraiment pas envie de pleurer - encore une fois. Même si ça me ferait sans doute du bien, mais je n'arrive pas à me laisser aller devant quelqu'un, même un ami. Je souffle, force un sourire et repose mon regard sur Allen.

"Désolée... Je crois que c'est encore un peu trop frais pour en parler. Tu voudrais bien qu'on parle d'autre chose ? J'ai surtout besoin... De me changer les idées, en ce moment."

Il n'insiste pas, et on se contente donc de parler de la pluie et du beau temps, du magasin, de son projet de réduire ses heures pour reprendre des études - ce que je trouve génial pour lui, vraiment, même si ça me rend triste de me dire qu'on se verra moins. Décidément, tout change autour de moi en ce moment ! Peut-être qu'il est temps que j'avance, moi aussi ?
Au final, nous restons une bonne heure à discuter sur ce banc, Allen parvient même à me tirer un ou deux rires, et je dois dire que ça fait du bien. Ca fait du bien d'oublier un peu ma peine et ma solitude, même juste pour quelques heures.
Nous rentrons ensemble jusqu'au couloir des Airs, et on se dit au revoir avec un sourire. Sourire qui s'efface malheureusement bien vite dès que j'ai regagné la pénombre de ma chambre ; mais au moins, j'ai eu droit à quelques heures de répit...