Nous y voilà, c'est le jour J pour le camping en forêt.
Aujourd'hui, il faut faire découvrir les joies de la nature aux jeunes recrues de Terrae. Et pour cela, plusieurs volontaires se sont désignés pour encadrer cette petite aventure en plein air.

Au programme, découverte de la faune et de la flore Terrae, préparation d'un camp, dégustation de marshmallows, histoire palpitantes autour du feu, nuit à la belle étoile pour les moins frileux...

Sac de randonnée sur les épaules, vêtu d'une tenue de sport confortable, un bandeau rouge et des traits de crème solaire sur les joues pour se donner des allures de warrior... Bito se lève. L'heure des présentations a sonné.

— Moi, Bito, je viens combattre mes peurs ! Fait-il à haute voix. J'ai lu que le stress et l'angoisse faisaient perdre les cheveux ! Être une flipette j'veux bien, mais une flipette chauve c'est mort !

Il aurait dû s'arrêter à sa première phrase mais bon... quand Bito est à fond dedans, il balance toujours la sauce (à ne pas sortir de son contexte).

Oui, notre héros a peur du noir, des insectes, des bruits suspects, des potentiels mauvais esprits qui pourraient habiter la forêt... et bien d'autres choses. C'est l'environnement idéal pour mettre son courage à rude épreuve.

     Qu’est-ce que je fous là, me demanderez-vous ? Bonne question. C’est une histoire de quotas. Voyez-vous, avec Bito, on a le moniteur un peu timbré qui va te parler de surmonter tes peurs, crier partout (probablement dans un mégaphone), probablement raconter des histoires sur la force intérieure et faire son mec viril, ou ce genre de trucs. Avec Cornélia, on a la nana un peu précieuse qui doit connaître tout ce qu’il faut d’histoires de fantômes pour égayer les nuits. Et vous savez, à Manaus, j’étais très pote avec la projectionniste du ciné du quartier, ce qui fait que je pouvais voir tous les films qu’il passait gratuitement depuis sa loge. J’ai consommé assez de conneries pour adolescents pour savoir qu’il faut un troisième larron : celui qui fume des gros joints et est super coulant.
     C’est moi, ça. Je suis un peu moins dans ma dégaine de clocharde habituelle, mais je suis quand-même couverte de plantes un peu partout : dans mes poches, sur mon bras, dans mes cheveux, voire s’entrelaçant dans les mailles de mon gilet.
     « Yo les gens. Moi c’est Luna. Restez cool. »
     La forêt, ça me connaît. J’ai genre vécu entourée par la jungle amazonienne. Une bosquet entretenu de climat tempéré, c’est rien en comparaison. Puis en vrai, si c’est pour foutre la frousse, une Terre planquée dans un arbre qui peut faire surgir des lianes comme ça, ça peut être utile. On verra. Perso j’ai surtout postulé à ce boulot de week-end pour casser un peu ma routine.

Lorsque la sorcière fait son apparition, Bito laisse échapper un petit cri aigue accompagné d'un geste de recul naturel... qui ressemble étrangement à un dab.

— Gniiih !!

Puis il arrive à se faire surprendre par la dame buisson malgré toute la nonchalance qu'elle dégage.

— Gyaah !!

"D'abord la sorcière bien aimée avec son balais, puis Groot en mode clodo... c'est quoi ces collègues chelou, sérieux ?!" S'écrie la petite voix dans sa tête.

Ça y est, notre héros regrette déjà d'avoir participer à ce camping. Des ondes négatives imaginaires commencent à grouiller autour de lui. 

— On est là pour apprendre des trucs et passer du bon temps, ok ?!

Il se tourne vers sa première collègue, Cornelia.

— Pas pour faire flipper les autres... !

Puis vers la seconde, Luna.

— Ni pour faire du camouflage militaire !

Crier sur ses collègues ne rendra pas cette journée meilleur, bien au contraire.
La chose la plus importante qu'il a apprise à Terrae, c'est qu'il ne faut pas juger les gens sur leur apparence.

Alors, il respire un bon coup et chasse ses ondes négatives inexistantes avec de grands gestes. Il faut voir les choses du bon coté !

— Bon, ok pour le camouflage... ça pourra s'avérer utile pour approcher les petits animaux tout mignons de la forêt.

Et maintenant, un petit compliment pour la sorcière. Aller !

— Et... Heu... joli chapeau...

     Du camouflage militaire, on me l’avait pas encore faite celle-là. Et pour ce qui est de t’approcher des animaux, il faudra pas trop compter sur moi. Déjà parce que ce n’est pas parce que je ressemble à un buisson que je peux être discrète.
     La sorcière dit qu’elle ne connaît pas le nom de Bito. Du coup je lui dis.
     « Lui c’est Bito. C’est marqué. Là dessus. »
     Je lui montre sur mon ordiphone le courriel de confirmation qui a été envoyé à tous ceux inscrits, avec la liste des animateurs. Donc de nous trois.Puis j’ai eu un peu le temps de faire des recherches, au moins sur leurs pouvoirs respectifs.
     Si vous me dites que c’est la stoner qui a fait tout le boulot de préparation, on va pas s’entendre les gens.

     Sur ce, le groupe de sépare en petits groupes autour des animateurs, en fonction des préférences et plus ou moins sur l’inspiration de Cornélia. Évidemment, j’ai attiré autour de moi les quatre-cinq qui veulent surtout se la couler douce et me taxer des taffes quand j’allumerai un joint en cachette quelque part, lors de la veillée.
     « Bien alors écoutez les jeunes, j’ai demandé à un voyant avant de venir pour la météo, on a une bonne soirée en perspective donc ceux qui veulent pas s’emmerder à monter une tente peuvent faire comme moi : trouver deux arbres et y accrocher un hamac. Au pire j’en ferai pousser si besoin. »
     Et c’est là qu’on se rend compte qu’on a tous une idée un peu différente de ce qu’est un bon coin où passer la nuit. Plus il y a d’arbres auxquels accrocher des hamacs, moins il y a de place pour les tentes. Aussi, je vais voir Cornélia et Bito pour leur proposer un truc.
     « Yo vous deux… Ça vous botte on se sépare en trois ? Genre trois maisons ou des trucs comme ça. Puis on peut, j’sais pas, faire des trucs un peu compétitifs, ça marche bien pour occuper les gens et créer des liens. »
     Le problème, c’est que chez moi dans mon milieu, des trucs compétitifs impliquant des jeunes, on appelait ça la guerre des gangs. Donc j’attends de vous que vous trouviez de meilleures idées.

Bito pose sa main sur le phone de Luna pour la couper en pleine action.

— Mais tu peux continuer de m'appeler "Grand brun ténébreux" ! Fait-il d'une voix grave.

Ouais, ça lui donne l'air cool et il kiff avoir l'air cool.

Puis les idées fusent. L'une propose un repérage de la forêt avant d'y poser le camp, l'autre propose la simplicité du hamac de dernière minute... et Bito, lui est plutôt d'avis à faire les choses dans les règles de l'art.

Les yeux rivés sur son petit bouquin intitulé "le guide du parfait campeur" -qu'il a sortit d'on ne sait où- il lève le doigt pour faire objection.

— Non et non ! Alerte relou de service. Faut pas qu'on soit dépendant de nos pouvoirs et faut pas qu'on fasse n'importe quoi, sinon ça va être le bordel.

Et finalement, l'idée de faire 3 "maisons" vient. Ce qui mettra tout le monde d'accord sur ses pratiques.

— Ca m'va !

Et il se tourne vers les gosses.

— Ceux qui veulent survivre, apprendre et s'endurcir dans les règles de l'art me suivent !

Quatre gosses s'approchent de lui.

— Première règle : Pas de danse Fortnite pendant le voyage.

Un gosse du groupe soupire, déçu, et s'en va rejoindre le groupe de Cornélia. Du coup, Bito se retrouve avec 3 gosses à sa solde. Une hyperactive, un peureux et un intello.

— Que fait-on, chef ? Demande la petite speed.
— Allons trouver l'endroit idéal pour poser notre camp !
— Et quel sera le nom de notre groupe, chef ?
— Nous serons... les RAMBO SURVIVORS !

Dès lors qu'il annonce le nom de son groupe, un coup de vent soulève les longues lanières de son bandeau rouge. QUEL STYLE, QUELLE CLASSE !