Premier jour dans ma maison.
Il y a tellement de chose étrange avec cette phrase si vous saviez… D’abord, ça fait déjà deux semaines que je suis affairée à la réalisation de cette maison et en même temps à la prise de mes fonctions en tant que gestionnaire matériel de Terrae. Autant vous dire tout de suite que la charge de boulot est conséquente, mais ça serait parler comme un adulte de 40 ans, et jusqu’ici ma masterisation a peut-être aggravé ma voix mais elle ne m’oblige pas à parler comme un vieux.

C’est juste que… J’ai un boulot. Je travaille depuis que je suis toute jeune au Cirque, mais c’était normal, mon statut ne changeait pas vraiment, puisque le fait même d’être un enfant n’était pas vraiment différent du statut d’un adulte. Hors ici, être master c’est complètement différent. Toi au fond tu ne changes pas tant que ça, mais les autres pensent d’un seul coup qu’ils peuvent t’attribuer tous les clichés qu’ils attribuent aux masters, qu’ils soient positifs ou négatifs. D’un seul coup, tu passes d’une handicapée qui a du courage à une personne hyper forte et badass. D’une pote à une figure d’autorité. D’une élève parmi tant d’autres à une prof potentielle. Le changement m’est en fait plus apporté par le regard des autres que par la perception que j’ai de moi.

Et il y a la maison.
Preuve incontestable que j’ai progressé dans l’échelle sociale dirons nous. J’en suis très satisfaite, j’espère que je prendrai plaisir à vivre dedans, vraiment. J’ai fait en sorte que le rez de chaussée soit accessible si on s’inscrit sur la liste, parce que je compte commander du matériel un peu plus pointu, au cas où des décrocheurs scolaires s'intéressent à la pratique. Je sais, m’occuper de ceux qui décrochent n’est pas dans mon domaine d’attribution, mais bon on ne sait jamais, c’est comme ça que Dunkan exploitait son talent après tout !

Enfin. Elle est assez pittoresque et improbable, mais surtout et j’y tiens, malléable. Il faut que je puisse y circuler et la changer rapidement, que la maison entière soit mon alliée. Et de ce côté là j’ai choisi les bons matériaux. Une chance pour moi que les tempéraments des terres soient plus calmes que ceux des autres affinités, au moins je sais qu’un élève ne viendra pas la détruire par pur plaisir.

J’entre dans la bâtisse sur mon fauteuil et observe les alentours. Bien. C’est chez moi maintenant ici. La journée se passe très bien (je la passe principalement à ranger les derniers cartons que j’ai commandé) puis vient la nuit, où je profite de mon ascenseur privé, et de mon lit. C’est… Calme. Étrangement apaisant, et je m’endors avec un sourire excité aux lèvres.

Il ne faut pas attendre longtemps avant que quelqu’un me rende visite pour la première fois (exception faite de ceux qui m’ont aidé à tout installer et/ou qui ont squatté pendant tous les travaux n’est ce pas Mitsu). Je suis déjà à la tâche (Keitaro vient de partir après m’avoir donné les tâches de la journée que je devrai rendre ce soir en salle des masters) quand je sens quelqu’un approcher. Ça aussi semble faire parti de mes nouvelles capacités, capter les auras beaucoup plus clairement. Avant je pensais que c’était uniquement lié à la terre, mais maintenant je sais que c’est plus que ça.

Amusée, j’essaye d’identifier qui ça pourrait bien être.
Hmm, quelqu’un qui semble proche de moi, d’une certaine manière ? Et j’ai déjà l’impression d’avoir senti ça, mais ce serait trop dur de me souvenir exactement quand et où. Sans bouger de ma table d’atelier, j’ouvre la porte d’entrée. Ah, ça a l’air tellement facile dit comme ça… Ça m’aurait tellement coûté avant, maintenant j’ai l’impression que c’est une formalité. Comme c’est étrange.

Je lève la tête vers le.a nouveau.lle venu.e.

_ Bonjour ? Entre je t’en prie.

Voyons voir qui sera mon premier invité.



HRP : Heu j'ai fait le plan de la maison mais je le posterai quand je l'aurai mis au propre ! >w<

Depuis qu'elle l'avait vue dans l'Arène, Alice s'était décidée. Elle y réfléchissait déjà depuis un moment, et elle hésitait encore, mais le combat l'avait définitivement amener à son choix. Elle irait demander à deux Masters de l'entraîner. Alice voulait aller plus loin dans sa maitrise de la Terre, et dans celle de la Télépathie. Elle parvenait déjà par elle-même à un très bon niveau, mais elle se trouvait souvent bloquée, à cours de nouvelles idées pour progresser. Elle avait donc fait sa proposition à Keitaro qui avait gracieusement acepté. Alice était toute heureuse de pouvoir creuser l'étendue de sa Télépathie avec lui, maintenant qu'elle l'acceptait de mieux en mieux, et qu'elle l'utilisait quasiment tout le temps. Elle en entendait, des pensées, tout au long de la journée, et c'était aussi un entraînement que de ne rien dire ou de ne pas réagir lorsqu'on est pas concerné.

Aujourd'hui, la petite Terre va aller voir Isis. Elle voulait lui laisser un peu de temps pour prendre ses fonctions, s'habituer à son statut de Master. Alice voulait demander à Isis puisqu'elle était une des seules Master Terre qu'elle connaissait et avec qui elle se sentait à l'aise. De plus, elle ressentait une réelle admiration pour elle. La jeune femme était douée, forte, et déterminée, elle n'avait pas hésité durant son combat, elle avait de superbes capacités et un esprit stratège évident.

C'est donc avec un entrain assumé qu'Alice se dirige vers la maison toute neuve d'Isis. Lorsqu'elle frappe, elle se demande tout à coup comment va-t-elle présenter la chose à la Master, avant de se rappeler qu'il suffisait de lui demander. Un peu de stress peut-être ?

« Bonjour Isis, merci. »

Alice la suit à l'intérieur avec un sourire. Elle prend le temps de lui demander des nouvelles, et comment se passe ses débuts comme Master, avec beaucoup de bienveillance.

« Ta maison est vramient chouette, tu vas travailler ici maintenant ? »

Je suis un peu surprise de voir Alice passer ma porte, et la voir m'apporte assez rapidement un sourire aux lèvres.

J'aime beaucoup Alice, d'abord parce qu'il y a peu de terres avec qui j'ai du mal on ne va pas se mentir, mais aussi parce que du peu de temps que je l'ai contoyé, elle s'est révélé être une personne très douce et attentive. Enfin, est ce que j'ai vraiment besoin d'expliquer pourquoi certaines personnes sont des anges ?! Alice semble en faire parti. Sans compter qu'ils sont nombreux à ne pas tarir de compliments à son sujet, même en salle de masters.

Lorsqu'elle m'appelle Isis, je me rends compte que j'ai désormais plus de mal avec mon propre prénom qu'avec Athéna. Enfin, c'est Athéna maintenant mon nom... C'est étrange, comme si c'était logique, comme si c'était le nom que j'avais attendu toute ma vie, et qu'Isis c'est... Quelqu'un d'autre ? Moi, mais avant, il y a longtemps, alors que techniquement ça ne fait que quelques semaines. J'hésite à lui faire remarquer, mais... Je ne me sens pas encore de corriger les autres. Sûrement parce que les masters le font déjà naturellement et que je sais que Mitsuki ne changera jamais. Je ne lui fais pas la remarque.

Je l'accueille alors qu'elle me demande un peu des nouvelles de mon nouveau statut. Une conversation classique certes, mais que j'ai du plaisir à avoir avec elle. Probablement que c'est de là que vient son charme, tout semble terriblement simple avec elle.

_ Je commence à m'y faire doucement. J'ai encore deux semaines sous la supervision de Keitaro ensuite je prendrai pleinement mes fonctions, et sans mentir j'ai hâte. J'ai déjà tellement d'idées, j'appréhende juste le fait de ne pas avoir assez de temps pour tout faire, je ris doucement.

Peut-être que j'appréhende aussi mon premier Appel. Il n'est pas encore arrivé, et même si je suis au courant de la procédure (et que je ne souhaite le Vide à personne évidemment) je reste un peu anxieuse à ce sujet.

_ Et merci pour la maison, c'est... Enfin tu vois, avoir sa maison à 23 ans, c'est quelque chose. Je pense travailler une partie du temps ici, mais j'ai prévu de travailler au minimum trois jours à l'Institut au moins pour les commandes de matériel, sinon j'ai bien peur de ne plus jamais sortir d'ici !

Je désigne le matériel derrière moi, l'immense table d'atelier est déjà recouverte de toutes parts. Pas ma faute, en faisant l'inventaire, j'ai trouvé des longues toiles pour trampolines qui n'ont jamais été utilisées, il faut bien que j'en fasse quelque chose, histoire de rentabiliser l'argent qui a été dépensé dedans ! Je suis gestionnaire vin diou.

Je m'appuie doucement contre le plan de travail pour être en face d'elle.

_ Oh mais je manque à tous mes devoirs d'hôte ! Tu veux quelque chose à boire ou à manger ?

Prenant (ou non) sa commande, je me dirige vers la cuisine pour me servir à moi une limonade faite maison (pratique quand tous les ingrédients sont à portée de main) avant de lui demander enfin.

_ En quoi puis-je t'aider ?

Vous croyez que je peux vraiment l'aider ? C'est vraiment étrange, le rôle de master...

Alice a encore un peu de mal à nommer correctement Athéna. Elle voit à la brève expression de visage que la jeune femme tique lorsqu'elle se trompe, mais elle ne la reprend pas. Alice ne relève pas non plus, mais elle voudrait essayer de faire de son mieux. Les deux prénoms se mélangent, c'est embêtant, elle aimerait pouvoir s'y habituer le plus vite possible pour ne pas la blesser, même si ce n'est pas évident pour la jeune Terre. La Master répond néanmoins à sa question avec sympathie. Alice lui renvoie un doux sourire, et montre clairement qu'elle est intéressée par ce qu'elle lui raconte, et l'accompagne dans son rire.

« Je te comprends. Ca doit être à la fois un peu impressionnant, mais très intéressant. Je suis persuadée qu'avec un peu d'expérence, tu arriveras à tout faire comme tu l'entends ! »

Elle regarde autour d'elle, et suit du regard son geste pour observer tout le matériel disposé dans un ordre qu'Alice ne comprend pas à son petit niveau, mais qui doit sûrement faire sens pour la Master, ou au moins être un bazar organisé.

« C'est sûr que ce n'est pas anondin. Ahaha, en même temps tu as l'air d'être bien installée. Je suis contente que tout se passe bien pour toi en tout cas ! »

Alice adresse un sourire chaleureux à Athéna, réellement heureuse pour elle de voir que tout se passe pour le mieux après ce combat à la sortie un peu chaotique, bien que maîtrisé. Elle accepte volontier la proposition de la Master et lui demande une limonade, ne pouvait résister à l'argument du fait maison.

Enfin, Athéna lui demande si elle peut l'aider. Alice boit une gorgée de limonade, sourit un peu plus timidement tout en levant les yeux vers la Master.

« Hm, ce n'est pas de l'aide à proprement parler. Enfin si, on peut aussi le voir comme ça. En fait, je veux te demander si tu es d'accord pour être ma professeur. Jusqu'à maintenant, j'ai toujours appris plus ou moins seule la maîtrise de la terre et des plantes, je me suis amusée avec d'autres élèves, mais je n'ai jamais demandé à un Master. Keitaro a accepté de m'aider pour ce qui est de la Télépathie, mais je voulais te demander à toi si tu étais d'accord pour m'aider avec le côté Terre. »

Le ton d'Alice est assurée, simple et tout dans son attitude laisse deviner l'admiration qu'elle porte à la Master. Son regard est doux et plein d'affection. Elle ne prendra pas mal un refus, loin de là, elle comprendrait parfaitement même. Elle demande juste si elle accepte, si ça lui dirait bien.

Elle est vraiment gentille. Je veux dire, profondément gentille, pas comme quelqu'un qui le penserait à moitié, et ça se sent. C'est à la fois rafraichissant et perturbant, vous savez, cette sensation que tout se passe avec une fluidité perturbante. Elle me dit que j'arriverai à faire tout comme je l'entends, et j'espère que c'est vrai, après tout c'est une première pour moi d'être inscrite dans une ogranisation tout de même différente de ce que j'ai connu au Cirque. Bien que similaire sur certains aspects, et notamment mon travail. Au final, j'aurai vraiment suivi les pas de mon père, c'est une jolie histoire.

Elle demande également une limonade, et je suis contente de lui en servir, pas peu fière du petit espace que j'ai réservé à un potager. Bon ok, Chris se foutrait de ma gueule, il est vraiment petit. Mais c'est parce que j'ai des plans pour le reste du jardin.

Puis Alice me répond, et je sens qu'elle a changé un peu de registre. Je la regarde, attendant d'en entendre plus. Et... Wow. Wow ?! Attendez, moi, prof ? Oui, ça semble logique, dans un sens. Enfin, je veux dire, j'y avais pensé, mais je ne m'étais pas rendue compte que ça pouvait aller aussi vite, et surtout avec quelqu'un qui je connaissais. Je me rends compte d'un coup pourquoi Mitsuki a autant d'élèves, elle ne les voit probablement pas comme ça. Donc déjà, recevoir une telle demande d'une connaissance ça a un côté gratifiant, mais de Alice ça a un côté flippant. Qu'est ce que je pourrais bien lui apprendre au juste ? Je veux dire, elle en sait déjà beaucoup non ? Est ce que j'ai vraiment des choses à lui apprendre ? Il y a des grands risques pour que j'ai l'air stupide en prof.

Passé le petit instant de silence où je me rends compte de ce que ça représente, j'inspire avec ironie contre moi même. Athéna, tu es stupide. C'est probablement ce qui me ferait le plus plaisir.

_ Eh bien, je m'y attendais pas à celle là ! Si tu penses que je peux t'apporter quelque chose, alors je n'y vois absolument aucun inconvénient, je souris franchement. Je ne vais pas te le cacher, c'est à la fois flatteur et flippant, clairement, et je ne suis pas sûre d'être meilleure prof que Keitaro -tu as bien vu Chris, leurs enseignements ont carrément rien à voir. Mais ça me tente !

Je bois encore une gorgée du brevage avant de demander.

_ Et si tu commençais déjà par me dire ce que tu arrives à faire et ce sur quoi tu voudrais progresser ?

Bon, ça m'a l'air d'être une bonne façon de commencer. Après tout, chacun a ses spécialités, encore faut-il que je puisse l'aider.

Alice regarde Athéna tout en lui proposant de devenir sa professeure. Elle voit très vite le visage de la jeune femme être surpris. Alice sourit un peu. Elle était peut être la première à le lui demander. Naïvement pour une fois, Alice ne voyait aucune autre raison à la réaction d'Athéna. Alice se met à rire un peu à la réponse de la Master qui lui sourit. C'est le style d'Alice ça : aller droit au but, même si les gens n'y sont pas préparés. Bien sûr elle fait suffisamment attention, mais on peut se retrouver avec ce genre de demande sans y être préparé.

Alice a l'air sincèrement heureuse qu'Athéna accepte. C'est formidable pour elle, c'est comme gagner la confiance de quelqu'un qu'elle admire beaucoup. Elle lui sourit de toutes ses dents.

« Ahaha, pardon... J'imagine que ça doit secouer un peu, dans le bon sens comme dans le mauvais, désolée si c'est stressant pour toi, je ne veux vraiment pas que tu te prennes la tête pour moi ! »

Elle secoue ensuite la tête, et son sourire redevient doux et bienveillant. Elle parle avec sa voix grave, celle qui veut rassurer.

« Je ne penses pas que tu sois meilleure ou moins bonne que Keitaro,mais comme tu dis, que tu es très différente de lui, et c'est aussi pour ça que je te demande. J'ai beaucoup d'admiration pour ta façon de maitriser la terre et j'aimerai beaucoup pouvoir m'en inspirer. »

Alice n'a absolument pas l'intention de copier les techniques de ses professeurs. Elle veut les comprendre pour pouvoir ensuite se les approprier et en faire ses propres techniques. C'est ainsi qu'Alice a toujours appris, elle tire seulement le meilleur de ce qui l'intéresse pour en faire quelque chose de personnel.

A la demande de la Master, Alice lui répond en bougeant sensiblement les doigts de sa main libre.

« Oh, bien sûr ! Hm, en ce moment je m'entraîne à maitriser des blocs de terre important, à les soulever hors du sol sans les toucher et à m'éjecter en l'air avec. Ensuite, j'ai beaucoup travaillé depuis que je suis Initiée à modeler des formes, et maintenant que j'arrive à créer ma propre matière, ça devient de plus en plus simple, y compris pour la précision. J'essaie d'être plus précise sur la texture, la dureté, la densité. Et j'aimerai y arriver aussi pour les gros blocs. »

Dans la main d'Alice s'est formé en assez peu de temps une sculpture de verre à pied complexe, orné de feuilles de lierres très fines. Le bout du verre est bien plus fin que le bas, et sa structure est solide et équilibrée.

« Pour ce qui est plantes, je peux en faire pousser de plus en plus en même temps, et faire pousser des arbres de plus en plus grand aussi. Ca me demande encore pas mal d'énergie mais j'en suis capable. Sinon, j'essaie d'améliorer encore mon lien avec la terre et les arbres. Je sens leur présence, les vibrations des autres, les caillous à l'intérieur, où chaque brin d'herbe se situe si je me concentre. J'y arrive même en chaussure maintenant. »

Alice termine son exposé en faisant pousser un bleuet dans le verre, en pleine forme. C'était là l'étendue des capacités d'Alice, et ses recherches pour aller encore plus loin.

Elle m'impressionne à toujours vouloir être agréable et gentille avec tout le monde. Elle devrait pas autant s'inquiéter pour des petites choses enfin ! Quand elle parle ensuite, elle a sa voix des masters à elle. Vous savez, cette voix douce et rassurante, presque maternelle et je me reconnais beaucoup là dedans. C'est presque... Non, elle est trop différente encore de celle que j'étais avant. J'étais plus excentrique je crois !

C'est déjà une bonne chose qu'elle ne veuille pas imiter mes techniques, c'est la base. Je crois d'ailleurs que ce qui me plaît le plus à Terrae, c'est la différence de maniement entre deux personne de la même affinité et de la même affiliation. Tant de possibilités... Comme quand elle me parle de s'éjecter en l'air. Une chose qui n'aurait aucun intérêt dans ma situation mais qui prend tout son sens quand on prend en compte Alice. De même, la précision des formes je l'ai pour ma part développé dans les petits ouvrages qui servent dans mes machines, jamais vraiment en plus grand.

Elle forme entre ses mains un verre à pied de belle facture, agrémenté de tout un tas de détails rafraichissants (bien que les fioritures ne me plaisent guère habituellement). Elle me décrit les sensations qu'elle a de cette connexion avec la terre en faisant fleurir un bleuet dans le verre. Oui, nous sommes vraiment différentes dans la manipulation, j'ai beaucoup plus vite développé le lien avec la terre puisque j'étais plus proche du sol.

Un sourire passe mes lèvres. Je crois bien que j'ai une idée.

_ Parfait, ça te va de faire un petit exercice maintenant ? dis je sais faire de remarques sur sa création. Non, avant ça, qu'est ce que tu veux faire avec la terre dans l'idéal ? Dans quel but tu veux t'approprier ce pouvoir ?

Moi c'était pour me battre. On va pas y aller par 4 chemins hein. Ecoutant sa réponse, je me dirige ensuite vers le petit jardin et l'incite à m'y suivre. Dans un coin il y a un potager, mais là où je l'emmène, c'est juste un grand carré d'herbe que je modèle en fonction des occasions. Et croyez moi il y en a déjà eu pas mal.

_ L'exercice est tout simple ; d'abord je veux voir un cube de terre, ensuite une plante, ensuite une roche.

Oui, juste ça. Si c'est très imprécis ? Oui, c'est justement ça, l'exercice. Parler c'est bien, voir les gens en action pour les comprendre, c'est mieux.

Alors qu'Alice expose ses idées, elle regarde les réactions d'Athéna. Les deux jeunes femmes sont fondamentalement différentes dans leur approche avec la Terre et les plantes. Alice a d'abord créé une connexion très forte avec les arbres et les plantes, probablement en lien avec sa Télépathie qui a entraîné une nouvelle ouverture au monde. Est venue ensuite la Terre en elle-même, sa maléabilité, sa stabilité, sa présence partout autour.

Le sourire d'Athéna en tire un à Alice. Un sourire malicieux, bien qu'éperduement doux. Dualité des émotions, Alice connait bien. Elle hoche la tête vivement lorsque la Master lui propose de s'entraîner et puis elle réfléchit. Pas à ce qu'elle veut en faire, mais à quels mots employer pour le traduire avec justesse.

« J'aimerai pouvoir utiliser mon pouvoir à la fois comme un outil, mais aussi comme une prolongation de moi-même. Je veux dire, c'est déjà un peu le cas, mais j'aimerai m'améliorer. J'aimerai mieux me servir de l'outil, atteindre ses limites, les repousser. Et j'aimerai m'en servir comme une extension de moi, ce qu'elle est déjà. J'aimerai connaître mes propres limites, toutes les façons dont je peux les utiliser. »

Ce n'était pour Alice pas une question de défense, d'attaque, de puissance, de pouvoir, de devenir meilleure que les autres. Alice voulait se connaître en entier, elle et son pouvoir, elle voulait devenir meilleure qu'elle-même. Tout le reste n'était qu'une utilité d'elle-même, et elle ne venait pas voir Athéna pour apprendre à attaquer, ou à défendre Terrae. Elle saurait se servir de tout pour se battre, pour défendre, pour guérir, pour faire rire ou pour créer artistiquement, elle avait déjà commencé tout ça, elle continuait d'apprendre. Aujourd'hui, Alice venait pour se dépasser.

Alice se dirige vers le jardin avec Athéna, et fait face au carré de terre. Dans l'exercice, qui lui parait déjà un poil compliqué de par la grande liberté donnée, Alice tique légèrement sur la roche. Elle n'en a encore jamais créée. Ce serait une première. Elle sourit. Si la petite Terre n'a que très peu l'esprit de compétition, les challenge à elle-même sont toujours un plaisir.

Elle s'avance dans le jardin, dos à la Master. Elle ne retire pas ses chaussures, elle n'en a plus besoin pour être en connexion complètement. Sans même faire un mouvement, elle s'élève du sol, un bloc de terre l'accompagnant, parfaitement cubique. L'exercice ne lui demande pratiquement aucun effort. Le bloc est pourtant assez conséquent. Elle se tourne vers Athéna, les yeux rivés sur le sol. Son sourire est soudainement très doux, plein d'affection. Elle ouvre doucement sa main au dessus du sol, saisi l'emplacement mentalement, puis se détend de nouveau et fait pousser du buis, un bel arbuste, les branches sagement rangées en une grande boule feuillue. Le regard d'Alice est tendre envers sa nouvelle création.

Puis elle concentre, perd son sourire, et cette fois, garde ses mains ouvertes face au sol. Elle respire lentement comme en pleine méditation, et avec lenteur, un bloc de talc se forme, relativement petit, atteignant Alice juste sous le genou, sans réellement de forme. Une roche brute. La dernière partie semble avoir demandé beaucoup plus de concentration à Alice, qui s'en sort pourtant sans grande fatigue. C'était la première fois qu'elle créait sa propre roche. Elle commençait un peu à en manipuler, mais ce n'était pas la même demande d'énergie et de concentration.

La petite Terre lève la tête vers Athéna, et lui sourit, ses yeux attendent la suite, attendent une réaction, une nouvelle demande. Tout dans son attitude montre de la motivation, une immense motivation.

Quand elle me répond sur son objectif avec son pouvoir, je me rends compte à quel point nos approches sont différentes.
Son objectif en soit c'est assez abstrait. Enfin, on a bien une idée d'utiliser le pouvoir comme une extension de son corps -ce que je peux comprendre, surtout dans ma situation- mais on en est pas encore au transhumanisme, et le "pourquoi faire ?" est encore bien vague. Mais ça viendra avec le temps je suppose qu'elle pourra y voir beaucoup d'applications différentes.

Enfin, on est au jardin pour lui donner les consignes.
Après cela, je l'observe très attentivement. J'analyse la façon dont elle déplace son énergie, dont elle répond à la consigne volontairement vague.

J'ai demandé un cube de terre.
Elle se soulève du sol en même temps que le cube parfait de terre qu'elle soulève du sol. Premièrement, je trouve ça amusant qu'elle prenne la peine de lever son corps de la même manière, je ne savais même pas cela possible à vrai dire. Est ce qu'elle se repousse elle même de la terre ? Ça a l'air d'être quelque chose comme ça. Revenons sur le bloc- le cube. Il a une forme parfaite, de ce côté là, il n'y a aucun problème. Pour le reste, elle a soulevé le bloc de terre présent sur place, sans créer de la nouvelle matière, sans non plus en modifier la composition. Elle n'a pas cherché à changer la terre présente sur place, je note.

J'ai demandé une plante.
Là elle montre plus d'habilité, plus de diversité, je la sens hésiter un instant pour réfléchir à ce qu'elle pourrait faire pousser. Elle se fait plus sereine, moins concentrée. Plus en adéquation avec elle même. Une fleur ? Une plante ? Un arbuste ? Un arbre ? Son choix se porta sur un buis. Un très bel arbuste à la feuille ravissante, massif comme s'il avait plus d'une dizaine d'années. Elle a choisi cet arbuste qui a des difficultés à pousser, à être entretenu, qui faiblit facilement, mais qui est très dense et d'une grande complexité à faire pousser avec précision. Je note.

J'ai demandé une roche.
Elle se concentre à nouveau, semblant bien moins encline à l'exercice. Il est vrai que la pierre n'est accessible qu'au niveau étoile, et justement ça me donnera une indication des essaies qu'elle a déjà mené depuis qu'elle a obtenu son statut. Lentement, un bloc se forme. Je suis surprise un instant qu'elle décide d'en créer, là où elle ne l'a pas fait pour la terre. Par contre, le choix de la pierre en soit m'intrigue moins. De par ses propriété de dureté et de densité, le talc est la plus maléable et friable des roches. En cela, je ne sais pas si son choix a été conscient ou inconscient, mais faire pousser un bloc de cette taille pour une première fois sans connaître la composition exacte de la roche, c'est un très bon début.

Je relève mes yeux vers elle. Elle n'a pas l'air plus épuisée que ça, je crois que je l'envie. J'étais crevée pour pas grand chose à son stade (mais bon je crois que ça venait en partie de ma condition physique). Je réfléchis encore quelques instants à ce que je vais dire. Bon, ne soyons pas avare de paroles comme Chris l'était, je peux bien lui fournir quelques explications.

_ Bien, je vois un peu mieux. La végétation c'est ton rayon je me trompe ? Ça tombe bien. Pour le reste... C'est amusant en fait, tu ne procèdes pas de la même manière entre la terre et la pierre. Tu appelles la terre qui t'entoure, ce qui est cohérent avec ce que tu me racontais, mais pour la pierre, tu l'as créée de toutes pièces alors qu'il y avait aussi des échantillons disponibles dans la terre.

Je souris. Il n'y a pas forcément à répondre, je n'attends d'ailleurs pas de réponses. Je ne fais que constater. Je commence à me diriger à nouveau vers la maison avant de m'arrêter.

_ Oh. Je vais chercher un truc. En attendant, tu pourrais me faire ce que tu veux, sans forcément te préoccuper de la forme ? Hésite pas à faire gros, dis toi que tu auras peut-être plus l'occasion de faire ça pendant un moment après.

Je m'en vais sans donner plus d'explications, prenant tout mon temps pour monter à l'étage, regarder dans ma bibliothèque et sélectionner avec attention les livres que j'ai l'intention de lui faire étudier. Oh oui je sais, je suis du genre rabart-joie. Mais je l'ai prévenu, nos méthodes sont complètement opposées. Et j'ai hâte de voir ce qu'elle pourrait bien faire des miennes.

Isis l'observe, elle peut le sentir, et malgré le fait que ce soit un peu une forme de test, Alice ne se sent pas du tout stressée. Car elle n'a rien à prouver. Elle a seulement à montrer ce qu'elle sait faire, Alice est venue pour apprendre, pour s'enrichir. Elle renvoie un doux sourire à Isis lorsqu'elle note à voix haute que la végétation est plus son rayon, et hoche la tête. Son lien avec la terre en elle-même était fort, mais il l'était d'autant plus avec les arbres, les plantes, le vivant.

Alice l'écoute continuer, et elle sourit en répondant, essayant elle-même de comprendre son propre comportement. Alice ne se justifie pas, elle parle presque plus à elle-même qu'à la Master.

« C'est vrai, j'avoue ne pas y avoir pensé. Pour être honnête, c'est la première fois que je touche à la roche, en dehors de trier une partie de terre et de retirer les morceaux infertiles. Alors j'ai voulu essayer quelque chose de nouveau, qui venait de moi. J'ai essayé de faire quelque d'assez simple... Enfin simple, j'ai tout créé moi-même, je ne sais pas si on peut dire simple, hm... j'ai choisis une roche que je connais bien, premièrement, et aussi une roche effritable, avec une densité moindre, je pense, enfin je crois, que c'est plus simple pour moi, pour une première fois. Je le ressens comme cela. »

Alice avait pour projet de s'entraîner seule à voir ce qu'elle pouvait créer en roche, mais cette capacité lui demandait beaucoup d'efforts, en comparaison avec les autres qu'elle manipule et perfectionne depuis plus de 2 ans.

La Master s'en va, et demande à Alice de faire quelque chose. N'importe quoi. Même quelque chose de gros. Des arbres, Alice en avait fait pousser une bonne somme dans la forêt, et pas seulement des petits. Elle avait envie de jouer avec la Terre, avec la matière. Elle fait redescendre ton cube, et s'allonge au sol. Que pouvait-elle bien faire ?

La petite Terre s'allongea sur le sol, bras écartés. Elle ferme les yeux. Doucement elle fait s'élever une arche, grande comme la maison. Elle penche la tête sur le côté, crée des ailes par dessus cette arche, sans forme très précise. Elle soulève et crée de la terre en même temps, sous elle, pour concevoir une sorte d'escalier sous cette arche, où elle reste assise. Sans nécessairement se concentrer sur la forme, Alice crée des figures très nettes, et très fines. Elle lève la tête vers l'arche, crée deux chaines qui descendent pour venir devant elle. Elle les attrape, crée un réceptacle, et vient s'asseoir sur la balançoire qu'elle vient de créer. Ce n'était pas le cas tous les jours, mais souvent, Alice aimait se trouver au milieu de ses créations, notamment les plus imposantes. Que ce soit dans la peinture ou la maitrise de la Terre, les deux étaient très reliés pour elle.

Enfin, elle fait monter une énorme sculpture derrière elle, deux sorte de vague, qui surplombe les deux ailes sur son arche. Lorsqu'Athéna revient, Alice est toute petite au milieu de sa création. L'air un peu plus fatiguée que lorsqu'elle l'a quittée, elle ne semble pas non plus exténuée. Alice pousse ses limites jusqu'au bout depuis qu'elle son Initiation, elle sait bien gérer ses capacités depuis le temps. Mais il reste tant à apprendre. Les yeux bleus de la jeune femme se mettent à briller en se posant sur les livres.

« Je crois que tu ne pouvais pas m'annoncer meilleur exercice. »

Elle m'a confirmé que c'était sa première fois avec la pierre, et je suis assez fière d'y avoir assisté.
Son cheminement de pensée suit à peu près ce que je pensais, donc je n'argumente pas plus là dessus. Mes paroles étaient plus de l'ordre du constat, mais savoir qu'elle analyse bien les choses en arrière plan me permet déjà d'avoir un éventail de ses capacités.

Je remonte donc et lorsque je redescends avec de quoi travailler, mon jardin est complètement transformé. Heureusement que je l'ai prévu à cet effet, mais tout de même. J'observe avec attention la structure qu'elle a créé, la façon dont les éléments s'enchevêtrent entre eux. Un ouvrage magnifique sans aucun doute, d'une précision exceptionnelle, et surtout plutôt imposant. Je remarque la poésie avec laquelle elle créé cet espace, avec cette même audace du poète qui se met au milieu de son oeuvre (peut-être est-elle moins tourmentée cependant que ces jeunes éconduits drogués à l'opium). Elle semble tout de même plus épuisée qu'avant, et ça ce n'est pas pour me déplaire. Je la trouve déjà très puissante pour son niveau, ou alors est-ce moi qui ne savait pas gérer mes forces ? Probablement. Ou alors j'ai tout autant impressionné Chris, mais c'est clair que lui ne l'aurait pas dit.

Je m'apprête à être une bonne Maître en félicitant mon élève mais elle me coupe la motivation lorsqu'elle sourit en voyant les livres. Elle sourit de toutes ses dents visiblement très heureuse de l'exercice que je veux lui confier. C'est à mon tour de sourire, taquine.

_ Ne te réjouis pas trop vite, tu ne sais pas encore ce que je vais te demander.

D'une main, j'élève une table de granit rustique et y dépose lourdement les livres. Deux livres sur les pierres -un sur les précieuses, le second sur tous les types de roches classiques-, trois livres sur les terres tout autour du monde, trois sur les plantes -des encyclopédies sur les plantes, puis les arbustes, puis les arbres. Ce sont mes bibles, à vrai dire. Elle sont si énormes que je suis obligé d'utiliser mes pouvoirs pour les porter, et malgré leur concentration énorme, elles restent lourdes et encombrantes. Mais ce sont les meilleures, et surtout, les plus détaillées -et c'est exactement là que je veux en venir.

Je pousse les livres devant mon élèves et l'invite à venir en face de moi, faisant apparaître un siège du même granit. Je m'assois également, désireuse d'épargner un peu mes jambes artificielles -et par là, mon bassin.

_ Comme tu t'en doutes, je vais te demander de choisir. Dans l'un ou plusieurs de ces livres, tu vas devoir trouver une ou plusieurs formes qui te plaisent -et que tu ne connais pas déjà de préférence-, en observer les détails et les propriétés. Ensuite, tu fermeras tous les livres et tu feras apparaître sur cette table un échantillon de chaque élément que tu auras choisis dans l'ordre que tu désires. Ne sois pas trop radine avec l'échantillon par contre.

Je réfléchis une ou deux secondes avant de terminer ma consigne.

_ Oh et tu as maximum 3 heures pour le faire. Tu as accès à mes connaissances, au reste de la bibliothèque et à tout ce que tu estimes qui pourrait t'aider.

Je souris gentiment.
Certains cerveaux pressés se diraient sûrement que 3 heures sont beaucoup trop pour ce genre d'exercice. Mais je n'ai évidemment pas précisé quel niveau d'exigence j'aurais sur le résultat...

Hrp : J'ai passé une fin de matinée entière à faire des recherches, yes ! xD



La réplique d'Athéna arrache un rire sincère à Alice. Elle hoche la tête, c'est vrai qu'elle ne sait pas encore. Néanmoins, la petite Terre n'a jamais vraiment envisagé de lire des livres pour s'entraîner. Ne serait-ce que cette différence, cette chose nouvelle, ça la touche et lui donne envie de faire mieux encore.

Athéna l'incite à venir s'asseoir sur un bloc de sa création, ce qui impressionne toujours Alice. Elle n'a vraiment pas l'habitude de travailler la roche, elle devrait, pourtant. Elle est capable maintenant, c'est encore une autre ouverture sur ses pouvoirs. Elle est donc bien contente d'avoir demander à la Master, qui, de toute évidence, n'a pas l'intention de la ménager - et c'est tant mieux.

L'exercice est simple à comprendre, beaucoup plus complexe à réaliser. Notamment parce qu'Alice n'a jamais fait ce genre de choses auparavan. S'imprégner des informations précises d'un livre, pour se permettre de créer plus facilement, ou en tout cas avec plus de précision, n'importe quel élément qu'elle pouvait maitriser, c'était une première. Elle avait du travail, beaucoup, et ça la réjouissait. Alice adorait apprendre. Elle adorait commencer de tout en bas et progresser, découvrir différentes branches sur lesquelles s'asseoir pour repartir ensuite.

Sagement, elle hoche la tête. Elle remonte ses jambes en tailleur sur la chaise, et attaque le premier livre qui vient à elle, un livre sur les différents types de terre. Elle en connaissait une bonne partie, mais loin de tous les détails. Alice savait des choses pragmatiques sur les sols, elle connaissait peu leur composition en revanche. Et cela l'intéresser, à plusieurs niveau : pure curiosité et meilleure maitrise de son pouvoir.

Alors Alice s'abreuve de connaissance sur les fractions solides, liquide, gazeuse et organique des sols, elle comprend lesquels sont constitués de quoi. Elle en retient un, qu'elle n'a jamais vu, ou travailler auparavan. Elle note les informations dans un coin de sa tête, ferme le livre, presque une heure vient de passer. Elle attrape le premier livre sur les plantes, l'attire à elle et commence à le feuilleter. Alice a un air très sérieux, et pourtant, cet espèce de sourire fantôme reste accrochés à ses lèvres.

Elle s'intéresse aux plantes, leur compositions, au arbustes, aux arbres, à leur fruits, leur feuilles, leur type de sèves, les propriétés de leur racine. Un peu plus d'une heure cette fois. Mais Alice sait lequel elle fera. Elle a beaucoup hésité, relu des passages, réfléchi. Elle ne sait pas quel est le but de l'exercice, elle essaie donc d'en faire bon usage, au maximum. Elle ferme le livre, se frotte les yeux, étire son dos et ses bras. Passons aux roches maintenant. Aussi étrange que cela puisse paraître, Alice avait une connaissance plus générale en ce qui concernait les roches que les sols.

Elle attrape le livre, et l'ouvre. Composition, formation, localisation, propriété, la roche regorge de trésor. C'est d'ailleurs sur un trésor qu'Alice s'arrête. Elle lit tout ce qu'elle peut sur cette roche, après en avoir écumé un bon nombre. Elle termine de lire les dernières informations. Il reste 10 minutes. Alice ferme les livres, et se met debout. Elle remue ses pieds, puis se concentre.

Elle ferme les yeux, et visualise. Comme elle l'image, mais aussi ce qu'elle doit créer. L'effort est bien plus important quand elle veut que tout soit complet. Petit à petit, un tapis de terre s'étale sous ses pieds, grandi, déborde jusque dans le jardin. Pas trop de carbone, juste la bonne dose. Un type de podzosol humide, un sol très peu fertile, présentant un pH élevé, un sol qu'Alice n'a jamais croisé. Un sol presque noir, qui n'est pas spécialement joli, mais résulte de beaucoup de battage par la pluie. Après avoir réalisé cet échantillon, Alice respire un coup, puis elle joint ses mains. Ferme les yeux.

Imaginer toutes les liaisons entre les atomes. La façon dont il est créé normalement, sous haute pression de carbone. Le diamant est supposé nécessiter des années de création. Alice contracte ses muscles. L'effort est pratiquement aussi grand que lorsqu'elle a voulu créer un Cristal. Lorsqu'elle ouvre les mains, un diamant brut, avec la circonférence d'une pièce d'un centime se tient dans sa main. C'est un effort énorme pour elle. Elle a clairement fatiguée, son visage est transpirant. Elle respire, pose le diamant sur la table, et s'approche du jardin, pour de pas abîmer la maison de la Master.

Elle décide de s'asseoir, pour éviter de gaspiller toute son énergie. Elle commence à avoir faim. Pourtant, elle se concentre, et commence. Elle ira moins loin que prévu, tant pis si elle doit décevoir la Master. Elle fera mieux, les prochaines fois. Devant elle, les yeux ouverts, un arbuste grandi. Sa forme adulte n'est pas immense, mais elle demande beaucoup d'efforts, notament parce qu'Alice créer ses fruits en même temps. Qu'il soit reconnaissable : un if. La complexité des fruits est le plus difficile, mais la composition du bois n'est pas évidente non plus. Elle a pourtant bien plus de facilité que pour la roche, et cela se sent. Malgré tout, lorsqu'elle se tourne vers l'horloge pour vérifier si elle est dans les temps, elle semble réellement épuisée. Elle sent bien qu'elle pourrait utiliser ses pouvoirs encore, tirer sur la corde, elle l'a déjà fait un nombre incalculable de fois. Mais elle préfère attendre de voir ce que lui réserve sa professeure.

Un bon point pour Alice : elle prend tout le temps imparti pour se préparer, pour recherché dans les livres que j'ai amené. Elle ne me pose pas de questions, soit, de toutes façons chaque question a ses propres pièges. Après je n'ai pas dit que toutes les réponses étaient dans les livres... Ok, j'ai été un peu pute sur l'exercice, mais vous verrez ! Je ne peux pas vraiment m'empêcher de sourire à la regarder opérer. J'observe la façon dont elle procède.

Déjà, elle semble avoir intégré la première consigne à la seconde, elle veut faire un élément de chaque, visiblement. Ce n'était pas forcément une demande en soit. Plus curieux, elle attend vraiment d'avoir terminé toutes ses lectures pour fabriquer les éléments. Pour ma part, je me serai inspirée directement du livre, des informations en direct, mais elle semble vouloir prendre le temps de se les approprier, soit.

Je la regarde faire, ne m'éclipsant que pour préparer une tisane maison afin de palier à la fin de l'exercice. Je reviens à temps pour la voir travailler sur son rendu final. Elle n'a pas beaucoup de temps, mais elle a pris la peine de s'économiser, de se recharger un peu pour être plus exacte, j'apprécie. Je regarde ses œuvres.

Un podzosol, original ! Pas du tout facile à mettre en place, il nécessite d'extraire toutes les particules importantes qui nourrissent les sols. Sauf que naturellement, ce sont les eaux qui se chargent de ce drainage, ce n'est pas du tout le cas dans cette configuration. Je m'approche du sol et de la quantité qu'elle a faite. J'approche avec un verre d'eau, et le verse sans aucune hésitation sur le sol créé. L'eau s'infiltre sans trop de problème et je hoche la tête. Je fais ensuite pousser une espèce de chiendent, cette horrible plante beaucoup trop résistante, et avec un peu d'insistance, la plante finit par pousser. Je lance un petit conifère à côté, qui pousse quasiment sans problème.

Je me tourne vers elle prête à donner ma conclusion. Je sais qu'elle est au sol, épuisée, mais une fois cet exercice fait, elle pourra se reposer tranquillement autour d'un thé ou d'un chocolat chaud.

_ Bien. Je suis assez impressionné, pour un premier sol c'est plutôt entreprenant ! Par contre, la difficulté de l'exercice -comme tu l'auras peut-être compris- consiste à reproduire ce qui t'intéresse dans chaque élément. Tu as essayé de reproduire au plus proche en terme de composition biologique et c'est totalement louable, mais en faisant ça, tu ne t'es pas concentrée sur les conséquences qu'a cette composition. Par exemple, ton sol est encore un peu trop chargé en nutriments, tout simplement parce que tu ne peux pas effectuer en création ce qui est du domaine du drainage de l'eau. Le plus efficace aurait été que tu créés un sol le plus proche possible, et ensuite que tu drennes vers le bas les nutriments dont tu n'as pas besoin, reproduisant ainsi le cycle naturel. Mais dans l'ensemble, c'est un sol très bien fait, suffisamment pour empêcher un eau de créer de la boue avec ou un autre terre pour y faire pousser quelque chose qui puisse être dangereux.

Contrairement à ce que certains pourraient croire, je ne cherche pas à la décourager, à faire étalage de ma supériorité. Je ne fais pas ça par plaisir de contredire ses créations, je lui donne les outils pour les rendre plus efficaces, et plus faciles à produire aussi, qu'elle s'épuise moins.

Je me dirige vers la pierre, prête à rendre mon jugement. Je la saisis entre mes doigts, un sourire franc aux lèvres. Je joue un instant avec avant de sortir un outil de ma poche : un petit marteau et un bec benzen portable. Je frappe avec le petit marteau avant d'allumer la flamme et de passer le diamant dessus.

_ Là encore, très bonne forme, grande dureté et très bonne qualité, mais il conduit mal la chaleur. Pour le coup ce n'est pas uniquement organique, ces propriété peuvent être induites plus facilement si tu ajoutes à ta connaissance ta sensibilité. Ce qui, te concernant, ne devrait pas être un problème.

Je passe ensuite d'un pas léger vers l'if, à qui je donne un petit coup de boost pour qu'il grandisse un peu, pleine d'affection. Je hoche la tête, c'est le moment d'être un peu indulgente.

_ Pour finir... Très bel ouvrage. Je ne le testerai pas, je pense que tu étais trop fatiguée pour te donner à fond, peut-être as-tu été trop gourmande sur ce coup ! En tous cas, tu mérites une bonne grosse pause maintenant. Thé ou chocolat chaud ? De l'aide pour te relever ?

Je lui lances un grand sourire, espérant ne pas trop lui avoir miné le moral. Pour dire vrai, je suis plutôt impressionnée par son niveau.

Alice attend sagement les retours d'Athéna. La petite Terre ne doutait pas que sa professeure testerait ses créations, elle le souhaitait même. Comment progresser s'il n'y a rien à améliorer ? Elle l'observe faire pousser deux arbres, qu'elle sent se créer dans la terre à laquelle est restée liée. C'est toujours très étrange, de sentir le pouvoir d'un autre opérer aussi clairement. Elle a pourtant appris à apprécier cette sentation après de nombreux entraînements, dès son Initiation, avec Nathanaël.

Alice hoche la tête en l'écoutant. C'était vrai, ce qui résulte d'un drainage qui n'est pas de son contrôle d'origine est très compliqué à créer, et elle s'était concentrée sur d'autres aspects du sol. Athéna lui suggère de créer mécaniquement le drainage, autrement que naturellement. Elle n'y aurait pas pensé si cela n'avait pas été proposé. Cela se voit dans l'étonnement bref de ses yeux puis de son hochement de tête, intéressé, compréhensif. Elle a un léger sourire lorsqu'elle lui dit que son sol est tout de même bien réalisé. C'est bien, mais il y a encore à apprendre. Et Alice a soif d'apprendre. Elle ne semble pas du tout mal prendre ce qu'Athéna lui dit, mais plutôt l'analyser, le prendre en compte, le réfléchir.

Elle appréhende un peu ses retours sur le petit diamant. C'était le résultat d'un gros effort physique, mais aussi de lectures. Elle avait engloutie beaucoup de connaissances sur les roches durant l'exercice, et notamment sur le diamant. Et à trop se concentrer sur les connaissances et le concret, Alice en a oublié le ressenti, qui lui est pourtant si cher. Elle a un léger sourire amusé, elle rit d'elle-même. La prochaine fois, elle fera mieux. Elle sourit ensuite à Athéna, comme pour la remercier de son conseil.

Elle rit à la dernière remarque d'Athéna, un rire franc.

« J'ai clairement été trop gourmande ! C'est la première fois que je fais pousser un if, c'est assez capricieux je ne m'y attendais pas, pas de cette façon. Ca m'apprendra. »

Elle sourit à Athéna, pleine de gentillesse.

« Merci pour tes conseils. Je suis plutôt thé, s'il te plaît ! Et ça va, je devrai y arriver ahaha. »

Elle se redresse doucement. C'est limite, mais elle y parvient. A force d'user son corps, et de compter sur les capacités de Marrionnettiste d'Adé pour la relever, elle sait ressentir les limites et où, quand, elle doit s'arrêter. Tout un chacun lui dirait que c'était là un bien dangereux exercice. C'était vrai. Elle ne s'arrêterait pas pour autant. Son visage est baigné de joie malgré la fatigue, elle a l'air réellement heureuse d'avoir appris autant, et d'avoir eu des conseils sur ses capacités du moment.

« C'était un chouette exercice ! »

C'est fou, parce que même si nous fonctionnons différemment, il est clair qu'Alice et moi n'avons aucun mal à nous comprendre. Elle écoute avec attention mes conseils et mes remarques sur son travail, ce qui me fait sentir... Grandis ? Gratifiée ? Je me suis déjà entraînée avec d'autres Terres, et beaucoup avec Chris, mais c'est la première fois que je me sens vraiment dans la peau du professeur. C'est une situation assez satisfaisante, quoique plus amusante que satisfaisante, au final.

Elle rigole à ma dernière remarque et se considère elle même comme trop gourmande, disant que ça lui apprendra. Je suis tentée de lui faire remarquer que oui, ça lui apprendra, mais dans le bon sens du terme. Peut-être qu'elle réessayera cette fois avec plus de facilité la prochaine fois ! Elle me remercie des mes conseils, et c'est un honneur d'être écoutée je trouve. Je souris donc simplement, en me retournant pour aller lui chercher un thé (avec les herbes du jardin, évidemment), le temps qu'elle se relève.

Je la vois galérer un peu, mais je ne m'approche pas pour l'aider. Loin de moi l'idée d'être cruelle, mais je sais ce que c'est de vouloir se débrouiller seule pour les choses que l'on sait pouvoir faire. Beaucoup de gens m'ont proposé leur aide lorsque j'ai commencé à me déplacer en fauteuil. Au début, je disais non parce que je ne voulais pas de leur pitié. Ensuite je disais non car je savais le faire seule, être dépendante ne m'intéressait pas. Pour finir, j'ai appris à demander de l'aide quand j'en avais vraiment besoin. Ça a été un processus long et fastidieux pour moi, et même si je doute qu'il soit aussi problématique pour Alice, elle souhaite le faire seule, et je respecte ça. Le mieux à faire est de l'attendre avec un thé et des petits gâteaux.

Elle s'assoit en face de moi, fatiguée, alors que je sers la boisson, me livrant que l'exercice était chouette. J'empile les livres sommairement avec un léger froncement de sourcils.

_ Contente qu'il t'ait plu ! Je crois qu'il va falloir que je me creuse la tête maintenant pour t'en trouver de nouveaux ahah. Je ne sais pas si tu es fan des devoirs, mais si tu t'ennuies cette semaine tu peux t’entraîner à faire un if, on pourrait commencer par ça la prochaine fois si ça te va. Je vais devoir réviser un peu mes plantes aussi pour être à la hauteur !

Il est vrai que Alice a l'air de déjà connaître un rayon à propos des plantes, il va falloir que je pousse un peu le sujet, au delà de leur praticité au combat, afin de mieux l'orienter. Ah ! Chris se foutrait un peu de ma gueule s'il savait ça... Ou peut-être qu'il serait juste fier que j'ai ma propre élève...