Il hoche la tête.
Je sais qu'il a compris, du moins il l'a entendu, mais je pense que ce n'est pas quelque chose qu'on peut assimiler. D'ailleurs il ne cherche pas à le cacher, il ne cherche pas à répondre. Il me dit qu'il va prendre une douche. Que je peux- que- quoi ?!

Il retire son T-shirt et le lance dans la petite pièce comme si je n'étais pas là. Il pénètre dans la salle de bain avant que je n'ai eu le temps de répondre. Qu'est ce que- Qu'est ce qu'il vient de se passer ? Je- Loin de me faire rougir, une douleur vient empoigner mes poumons et je porte ma main à ma gorge, comme si ça allait m'aider à respirer. Qu'est ce que- est ce que ?! Pourquoi ?! Merde pourquoi ça fait si mal ?

Je suis pas son geôlier. Je vais pas surveiller le moindre de ses faits et gestes, j'imaginais juste qu'on pourrait... Parler ? Que je pourrais alléger sa peine, au moins un peu ? J'essaye de respirer correctement. En silence. Est ce qu'il s’imaginait que je venais ici avec ce genre d'intention ? Je- Il n'a jamais été question de ça, si ? Si ?! Est ce qu'il voulait juste me blesser, parce que si c'est le cas, c'est réussi ?! Respire. RESPIRE. Je serre le poing. Merde, est ce que j'ai encore rien compris ?! Mais bordel, c'est lui qui avait l'air si heureux quand je disais qu'on était amis non ?!? J'y comprends plus rien. Putain, j'y . comprends . plus . rien.

Je me suis levé si vite que ma tête tourne. Je me suis dirigé vers la fenêtre, comme en mode automatique, furieux. Je l'ai ouverte en grand, la lumière du jour m'a piqué les yeux. J'ai commencé à ranger des affaires. Je le fais déjà pas dans ma chambre, pourquoi il faudrait que ça soit dans la sienne. Et quand j'estime que ça a assez duré, je me mets à parler assez fort pour qu'il m'entende.

_ Pourquoi est ce que tu crois que je suis venu, je lance, juste pour te faire chier ?! Je suis venu parce que je m'inquiète, et tu peux pas m'enlever ça. J'arrive et non, ça va pas bien, et- t'es toujours là quand je vais pas bien Zola, pourquoi est ce que ça peut pas marcher dans l'autre sens ?!

Ma voix s'est brisée sur la fin, elle m'a trahi cette pute.
Mon pong s'est serré si fort que je ressens une vive douleur et le dessert aussi vite. Ma main tremble. Putain j'ai dû me faire mal avec ce pouvoir de merde, manquait plus que ça. Je me mords la lèvre, massant ma main avec soin, continuant à faire les 100 pas, luttant pour qu'un souvenir ne prenne pas la place de la réalité, pas maintenant.

_ Merde ! je lâche, autant pour lui que pour cette main à la con.

Zola finit donc de se déshabiller et part sous la douche. C'est trop chaud. Il baisse la chaleur. Toujours un peu plus et encore plus et encore plus. L'eau fini par être seulement froide. Très froide. Pourtant ça ne luis éclaircit pas plus les idées. Il se sent juste encore plus minable. Il a mal. Si mal.

Il laisse sa tête tomber contre le mur. Qu'est ce qu'il fait vraiment là ? Il rejette Houston, oui. Oui clairement mais pourquoi ? Parce qu'il ne veut pas parler ? Parce qu'il se sent mal ? Mais ça tout ça là.. Houston le sait. Il te l'a dit Zola et te le redit. Pourquoi tu ne l'entends pas ? Entend le putain ! C'est bon là ! T'as grandit merde !

Il écoute Houston sans l'écouter. Enfin si il entend bien ce qu'il dit. Et au fond de lui il sait que c'est juste et il aimerait pouvoir aller dans cette direction aussi mais tout ça c'est enfoui beaucoup trop profondément en lui. Il se répète donc qu'il doit agir comme un grand. Qu'il doit savoir se gérer et là, il les revoit. Papa et maman quand il leur dit qu'il compte partir loin. Ne plus être relié à eux. Et qu'eux ne bronche pas et demandent juste le montant dont il a besoin.

Il a beau être trempé, ses yeux le piquent et il sait qu'il est en train de pleurer. Son coeur se serre à tomber en miette. Il serre les dents. Il fait un grand geste comme pour essayer de virer avec violence ces images. Au final c'est une lame d'eau qui prolonge de nouveau son mouvement et casse, détruit, fait tomber des choses par ci par là dans la salle de bain. Il hurle.

-MERDE !

C'était presque synchronisé avec Houston. Comme c'est cocasse. Zola se laisse glisser contre le mur de la douche et tombe au sol. Il reprend la même position que quelques instants plus tôt devant la porte et se met à sangloter en jurant. Ses paroles masquées par le son de la douche.

-Putain mais .. putain de merde .. C'est pas possible .. Dégagez ! Allez crever !

Zola a juré, je l'ai entendu.
Je me rapproche de la porte. Je ne sais pas s'il s'adresse à moi, je ne pense pas, j'ai pas envie de le penser. Je n'entends plus rien, mais personne ne jure comme ça pour rien. Je me torture l'esprit encore quelques secondes, essayant d'ignorer la douleur à ma main, avant de craquer. Oh et puis merde, c'est lui qui m'a invité à entrer non ?!

J'ouvre la porte en poussant doucement la poignée avec le coude (au moins ce pouvoir m'empêche d'agir avant de réfléchir, bon point) et je tremble en sentant l'humidité et- le froid ?! J'accélère et fais à peine attention à l'eau qui a encore giclé partout pour me concentrer sur Zola. Il va vraiment me haïr. Merde, je m'en fous, je préfère ça qu'il se chope un rhume en plus de toute cette merde.

Je passe un bras sous l'eau glaciale pour couper le jet -et je crois que je dis autant d'insultes que lui, à savoir "merde merde merde merde merde"²-, je me retourne pour prendre une grande serviette et la dépose sur ses épaules et son crâne, avant de m'agenouiller à nouveau devant lui, poser délicatement mes mains sur ladite serviette qui est elle même sur ses bras.

_ Doucement, respire, ils sont pas là, ça va aller...

J'ai aucune idée de ceux dont il parle, mais on ne vouvoie pas une personne qu'on a envie de tuer, ils sont forcément plusieurs. Et ils ne sont pas là.

Zola actuellement n'est pas très bien. Il est en boule au sol. Il sent la présence de Houston se rapprocher. Il sent la serviette se poser sur ses épaules. Son coeur est en miettes. Il entend Houston. Il se fige un peu plus. "Ils ne sont pas là". C'est vrai ça. Il ne sont pas là mais quelqu'un d'autre en revanche est là. Hein Zola ? Tu aimerais l'épargner et qu'il ne soit pas là mais il est là. C'est un fait.

Il prend plusieurs longues et laisse lentement sa tête tomber au contact de la main de Houston. Il ne sait ni trop quoi dire. Ni trop quoi faire. Il murmure la voix chancelante.

-J.. Désolé.

Sa gorge se serre a lui en faire mal. Il s'étrangle avec un sanglot. Il essaye de ravaler ses larmes mais échoue lamentablement. Quel nul.

-Pardon j- Je .. S'il te plait ne reste pas.. Je veux pas je ..

Il fond en larmes et referme encore un peu plus ses bras autour de lui.

Il ne va pas bien.
Mon cœur et ma gorge se serre alors qu'il se met vraiment à sangloter, à s'excuser, à me supplier de partir. Mais merde, hors de question que je te laisse dans cet état putain, tu me prends à ce point pour un monstre ! A cet instant, je cesse d'avoir peur de ce pouvoir de merde. Il a beau me demander de partir, il n'a pas à être seul maintenant.

Ma main droite remonte jusqu'à la racine de ses cheveux pour commencer de légers massages avec mon pouce, je m'approche pour passer mon bras gauche dans son dos et déposer sa tête sur mon épaule. Quoi, la nudité ?! Mais on s'en fout merde, c'est tellement le dernier de mes problèmes là tout de suite ?!? Je ferme les yeux et commence aussi à exercer de légères pressions dans son dos.

_ Non, je pars pas, je te laisse pas tout seul, ça va aller, respire, doucement, ça va aller, je suis là...

Je sais même pas ce que je raconte, mais c'est exactement ce que je pense.

Zola reste immobile à sangloter pensant un moment. Il ne sait pas bien quoi faire de plus. Il se déteste et essaye de ne pas trop penser. Ca occupe tout son esprit. Il renifle plusieurs fois avant de faire le grand moove qui soit, soit liberer une main pour qu'elle aille s'accrocher au t-shirt de Houston. Il gémit deux trois fois à la suite et souffle pour essayer de se calmer. Tout est si compliqué. Il soupire un "Merci"

Les gestes que Houston fait l'apaisent. Il a encore du mal. Il gémit un dernier "Pars" presque inaudible. Il referme un peu plus son poing sur le t-shirt de Houston. Ses sanglots s'apaisent doucement. Il laisse un long silence passer avant de finalement réussir à formuler une phrase.

-J.. J'ai .. J'ai un peu froid..

Bah oui tiens. Etonnant. Boloss. T'es vraiment trop con.

Il tremble entre mes doigts, mais je sens qu'il se détend.
Donc c'est bon ? C'est bien ce que je fais ? Ça a l'air d'être bien. Je me détends encore un peu, continuant mes massages doucement. Au bout d'un moment, il s'accroche à mon T-shirt, et j'affermis ma prise, je ne le laisse pas me dire que je dois partir.  Hors de question.

Quelques minutes passent, et puis. Il a froid.
Je ricane doucement.

_ Ah bah ça tu m'étonnes.

Je recule avec précaution de lui, enlève la serviette humide de ses épaules et saisis le pommeau de la douche pour tirer une eau tiède, pour ne pas le brûler. Je passe le pommeau sur lui, lui demandant en même temps si ça n'est pas trop chaud. Je me relève en lui laissant la prise sur l'objet et me dirige vers le petit placard pour prendre une nouvelle serviette. Je reste à la sortie de la douche pour lui tendre.

_ Tiens, je dis doucement. On va te trouver des trucs chauds à mettre et un chocolat.

Aucune idée où, mais on va trouver.

Zola se sent con. Il se sent vraiment super super super méga con. Il se sent débile aussi. Et con. On l'a déjà dit con ? Bah c'est que c'est vrai. Il reste assis sur le sol de la douche après que Houston se soit relever. Il a un faible sursaut quand il réactive l'eau et se laisse faire. Quand son ami lui tend le pommeau il le saisit avec un main lourde. Il Le regarde sans trop savoir quoi faire pendant un moment puis finit par se relever. Il se rince une dernière fois, frissonne et sort de la douche en prenant la serviette que Houston lui tend . Il s'essuit vaguement puis regarde Houston hésitant avant de le reprendre subitement dans ses bras et de les serrer fort. Cette fois il pleurera pas, il pleurera pas, tout va bien, il pleurera pas. Il a juste du mal à respirer et à parler mais il ne pleurera pas. Tout va bien. Il reste un moment comme ça avant d'enfin se décider à parler.

-Le peignoir doudou sur la porte il est bien..

Il est chaud et doux c'est bien. Et puis c'est pas compliqué un peignoir. Par contre pour le chocolat il voit pas trop ..

-Je sais pas pour le reste désolé ..... Je .. Mais .. Je .. Mara va bien ?

Il avait commencé a paniquer mais il s'est rattrapé comme un pro. Ca c'est un bon garçon !

Je sens qu'il est perdu au début.
Je lui laisse le temps. Je ne m'attends pas à ce qu'il se comporte comme si tout allait bien, ça serait flippant. Il s'essuie un peu lorsque je lui tends la serviette puis hésite avant de me prendre dans ses bras. J'hésite vraiment à lui rendre son geste jusqu'à ce qu'il s'accroche à moi comme à une bouée. Je ferme les yeux et passe mes mains dans son dos pour lui rendre son câlin. Ce n'est pas juste un câlin, je sens qu'il se retient, je ne sais pas si c'est bon, je ne pense pas, mais je ne dis rien.

Il me dit que le peignoir sur la porte fera l'affaire et je m'exécute pour aller le chercher. C'est vrai que ça va être compliqué de faire quoique ce soit pour le chocolat maintenant qu'il le dit... Il me demande si Mara va bien. C'est une diversion, mais ça fera l'affaire.

Je prends délicatement sa main pour la tirer tout aussi prudemment vers la chambre. On va pas parler dans la salle de bain non ? Sur le trajet, je me mets à parler d'une voix calme.

_ Mara s'inquiète pour moi, c'est intelligent ces bestioles. Mais elle va bien, elle a été très nerveuse hier parce que j'ai changé sa nourriture, et je pense qu'elle t'a cherché un peu aussi, pour le reste, elle se prélasse et son dernier méfait c'est mon nouvel oreiller. Je crois qu'elle aime beaucoup l'odeur de ma nouvelle lessive, je finis avec un petit rire.

J'ai beau prétendre que ma compréhension des bestioles se réduit au stricte minimum, je ne suis pas une bille pour comprendre Mara quand même...

Une fois le peignoir enfilé Zola se laisse trainer jusqu'à la chambre. Il s'assoit sur le lit et attend un peu que Houston en fasse de même. Il est content d'entendre parler de Mara. Savoir qu'elle prend soin de son ami et qu'elle le cherche un peu. Il souffle amusé puis se penche un peu vers Houston, la tête dans son cou.

-C'est vrai qu'elle est chouette ta nouvelle lessive. Elle est douce et sucrée.

Il ferme les yeux et au final pose sa tête sur l'épaule de son ami. C'est vrai que l'odeur est apaisante. Il comprend Mara, elle a décidément de bons gouts cette miadmoizelle.

Zola se laisse emporté jusqu'à la chambre, et on va s'asseoir sur son lit.
Il ne proteste pas, et ça déjà c'est une victoire. J'ai envie de lui proposer d'aller chercher des trucs, mais j'ai peur qu'en revenant je reviennes directement au point de départ.
Il finit par poser sa tête sur mon épaule, et je le laisse faire, parce que je sais que ça le rassure. Je souris quand il me dit que ma lessive est chouette. C'est vraiment le pire pour les conversations normales.

_ C'est Aria qui me l'a conseillé, et j'avoue que c'est pas mal.

Je ne sais pas trop quoi faire, je ne sais pas si je dois le laisser s'endormir ou pas... J'hésite avant de reprendre la parole.

_ Ça va un peu mieux ? je souffle.

Pire question j'crois.

Zola hoche doucement la tête.

-Aria c'est quelqu'un de bien.

Après tout c'est elle qui lui avait empêché de déborder un peu trop face à Ys et qui l'avait forcé a faire gaffe à lui. Bon il ne l'avait pas vraiment fait avec beaucoup de volonté mais de loin il savait qu'elle avait raisons. Et même hors de tout ça c'était une personne dévouée et attentionnée. Et puis visiblement en plus de ça elle conseillait de la bonne lessive.

Il lache un petit "Hmm." peut convaincu mais bien plus léger que tout ce qu'il avait pu dire auparavant . Il saisit une de ses mains et joues un peu avec ses doigts. Ca aussi c'est apaisant. Il laisse passer un léger soupire encore.

-Désolé ..

Il n'aura de cesse de le dire.

Il hoche doucement la tête en me disant que Aria est une bonne personne.
C'est vrai. C'est une très bonne personne. Je ne réponds pas, me laissant porter par mes pensées, alors qu'il prend ma main pour jouer avec mes doigts. Je le laisse faire, je regarde son geste avec tendresse, même si ses doigts sont encore froids. Et puis il s'excuse. Ça me tire un sourire fatigué. J'ai envie de lui filer une petite tape, mais... J'ai fait la même chose non ? C'est à mon tour de jouer avec sa main, suffisamment détendu pour que le pouvoir des titans soit pas trop chiant.

Je ne dis juste rien, je sens que son poids s'alourdit, il s'apprête à s'endormir.
Et si il continue comme ça il va vraiment prendre froid. Je me dégage doucement pour le pousser à s'allonger, ramenant la couverture pour lui. Je m'assois au sol et garde un contact avec sa main avant de lui parler.

_ Tu peux te reposer. Je reste là.

Je ne bouge pas. Je ne te laisse pas seul.