Les quelques rayons du soleil qui filtrent à travers les volets fermés finissent de me réveiller. Lentement, je m'étire dans le lit, constatant qu'Ys n'est plus à mes côtés. Je serre mon oreiller contre moi, bâille, puis referme les yeux quelques instants avant de laisser un léger sourire se dessiner sur mes lèvres en entendant quelques murmures provenir du couloir. Je me décale pour ne plus être au milieu du lit, entendant sa si jolie voix au moment où la porte s'entrouvre légèrement.

Une petite boule se forme dans le creux de mon ventre alors que j'aperçois son visage pétillant caché entre ses mains. Mon coeur s'agite toujours autant dans ma poitrine à chaque fois que je la vois. Je n'arrive toujours pas à comprendre l'angoisse qui m'a saisie lorsque j'ai appris que j'étais enceinte. Personne n'est vraiment prêt pour son premier enfant, mais tant qu'on l'aime, c'est bon non ?

-Oui je dors encore...

J'adresse un joli sourire à la petite fille, qui se dépêche d'entrer dans la chambre pour se glisser dans le lit à côté de moi. Je la prends dans mes bras, déposant un baiser sur son front. Mon regard croise celui d'Ys qui entre à son tour dans la pièce, un plateau dans les mains qu'il vient déposer sur le lit à côté de nous. Je me penche en avant pour venir lui voler mon baiser du matin, avant de passer une main dans les cheveux de l'enfant qui se dandine dans le lit.

-Allez viens papa ! On mange tous ensemble dans le lit !!!

Je ris légèrement à l'entente de la proposition, et me décale encore un peu pour laisser suffisamment d'espace à Ys. Mes mains glissent des cheveux de la petite pour aller chatouiller son ventre.

-Dis donc, tu es déjà bien en forme toi ! ris-je en l'embrassant une nouvelle fois, sur la tempe cette fois, cessant de l'embêter (nan mais parce qu'elle serait capable de renverser le plateau).
-Regarde Maman ! C'est moi qui ait fait le bouquet, hein, c'est pas du tout Papa.
-Hé bien ! Heureusement que tu es là alors, un petit déjeuner sans fleur c'est pas un vrai déjeuner !

Je prends le bouquet entre mes mains, le portant à mon nez pour sentir l'odeur des pâquerettes, qui n'existe pas, évidemment.

-Je crois que c'est ton plus beau bouquet.

Un énorme sourire éclaire le visage de la petite, et je dépose les fleurs sur la table de chevet à côté de moi. Elle se jette ensuite sur le plateau pour prendre un croissant dans lequel elle croque avec détermination.

-Attention aux miettes dans le lit, hein ! Mange bien au dessus du plateau. Dis donc, il est encore tôt quand même, tu es sûre que tu as suffisamment dormi toi ? Et alors, c'est quoi le programme de la journée ?

Un rire m'échappe et je relève le regard vers Ys qui était resté à côté de la fenêtre.

-Il aurait été moins attrayant, ça c'est sûr !

Je lui adresse un sourire mutin, avant d'aller prendre une viennoiserie à mon tour, croquant dedans de bon coeur en replaçant derrière les oreilles quelques mèches rebelles de la petite fripouille. C'est qu'elle serait presque en train de manger ses cheveux...

Quand je demande le programme de la journée, l'enfant se redresse d'un coup, toute ravie et évidemment ravissante dans son innocence.

J'arquai un sourcil à l'intention d'Ys en entendant ses paroles, un sourire se dessinant avec amusement sur le coin de mes lèvres. Un tour à dos de dragon dans le parc, mais oui, évidemment. Un éclat de rire m'échappa alors que la petite se tournait instantanément vers moi, sous le regard un peu pris au dépourvu d'Ys.

Ses petits doigts sur lesquels se trouvaient encore quelques miettes de croissant vinrent se coller des deux côtés de mon visage pour me forcer à regarder cette bouille absolument adorable, réclamant mon accord. Je passais une main dans ses cheveux rebelles et fis glisser mon doigt jusqu'à la pointe de son nez pour venir l'embrasser sur le front avec amusement.

-Chérie, si papa a dit que tu devais l'aider, il fallait l'aider alors... Tu sais très bien qu'il faut respecter l'accord en entier si on veut obtenir ce qu'on veut !

Elle afficha un regard choqué et visiblement terriblement déçu avant de gonfler ses joues, lâcher mon visage pour croiser ses bras sur son petit poitrail, affichant désormais une moue boudeuse.

-C'est pas juste ! Vous vous mettez toujours tous les deux contre moi !

J'adoptai un air faussement contrarié, rentrant dans son jeu.

-Comment ! Mais je crois que c'est parce que c'est toi qui ne respecte pas ta part du marché, non ?

Je lui souris alors, beaucoup trop attendrie par sa bouille désappointée.

-Et si on allait faire une balade à vélo plutôt ? Il faudrait tester ton beau nouveau vélo sans roulette quand même, tu penses pas ?

Le regard de la petite s'illumina soudainement comme si tout était déjà oublié. C'est peut-être un peu trop facile parfois avec un enfant de Tonnerres...

-Ok, mais je mets pas de casque alors ! Il est trop moche !
-Je ne crois pas non.
-Mais !
-Bon bah pas de vélo, pas de dragon... Hmmm qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire aujourd'hui... On va quand même pas passer la journée devant la télé... Alors qu'il fait si beau dehors...
-Papaaaa !!!!

Evidemmeeeent, voilà qu'elle se jetait maintenant dans les bras d'Ys ! C'est trop facile d'être un enfant, vraiment.

Un sourire se peint sur mes lèvres alors que la petite est hissée sur les épaules d'Ys. Ils sortent tous les deux de la chambre en courant, et j'entends les griffes de Balto sur le sol du couloir, devinant qu'il tente désespérément de s'inviter dans le jeu. Un rire m'échappe et je sors enfin du lit après avoir terminé mon café. Je soulève le drap pour le tirer jusqu'en bas du lit afin de l'aérer un peu, puis dépose le plateau sur un tabouret plus loin afin de pouvoir le descendre dans quelques instants, quand j'aurais pris ma douche.

Je pénètre donc dans la salle de bain, laisse glisser mon pyjama sur le sol, et me glisse sous l'eau chaude. Je me lave rapidement et sors de la douche, constatant en croisant mon reflet dans le miroir qu'un sourire y est logé et n'a visiblement pas décidé de s'en échapper. Je retourne dans la chambre pour prendre le plateau et descendre dans la cuisine. Je dépose les verres et tasses dans l'évier et range ce qui n'a pas été mangé. Très rapidement, j'entends la voix de ma fille qui me parvient des escaliers, accompagnée par celle d'Ys, et je leur offre un joli sourire quand ils me rejoignent dans la cuisine.

-On prépare un pique-nique pour ce midi ?

L'enfant sautille sur place et court jusqu'à moi en se débattant avec ses cheveux qu'Ys n'a pas encore eu le temps d'attacher. C'est vraiment une boule d'énergie hein...

-Je t'aide maman !!!!

J'éclate de rire et hoche la tête en disposant sur le plan de travail tout ce dont nous aurons besoin, pour qu'elle puisse tout bien mettre dans les boîtes à bento. Pendant qu'elle s'active, je me place derrière elle et profite de ce moment de concentration pour saisir ses cheveux et les attacher en queue haute avec un élastique qui traîne comme assez souvent sur mon poignet.

Mes yeux se posent rapidement sur Ys et je sens mon coeur qui s'agite comme à chaque fois que je croise son regard si doux. Est-il vraiment possible d'aimer à ce point ?

Je m'éloigne de la jeune enfant pour aller chercher un sac à dos, et l'amène sur la table pour qu'on puisse y fourrer tout ce qui nous intéresse. En quelques minutes à peine, tout est prêt, et nous sommes déjà en train d'enfiler nos baskets, le sac à dos sur les épaules.

Arrive donc enfin le moment tant attendu du casque... Je le sors du placard, et le tends au petit monstre qui me regarde avec un dernier espoir qui brille dans ses yeux. Un rire m'échappe et elle finit par l'accepter avec dépit. J'attrape alors deux autres casques et en tends un à Ys avec un large sourire. Nan mais on est bien obligés de montrer l'exemple hein... C'est fou, en fait, quand on devient parent, on devient presque trop sage, juste pour montrer l'exemple. Peut-être aussi parce que notre fille à nous est vraiment trop casse-cou. Mais étions-nous mieux avant qu'elle n'arrive ?

-Allez, c'est parti ! lançai-je, tout sourire, alors que nous montions chacun sur nos vélos. On te laisse partir devant pour nous montrer que tu as retenu le chemin à prendre jusqu'au parc !

HRP : J'ai rien à dire pour le retard >>

HRP : Je te pardonne va. Et t'inquiète, tout me va, c'est la magie du RP, tu t'adaptes à ton partenaire héhé :D

La promenade débute enfin, et le petit monstre ne tarde pas à passer devant, toute fière de réussir à faire du vélo sans ses petites roues. Evidemment, elle ne l'avouera probablement jamais, mais à la voir tracer comme ça, je me doute bien qu'elle a surtout peur de ralentir ou de s'arrêter et de ne pas réussir à stopper correctement le vélo. Hé, j'ai été enfant moi aussi, même si ça remonte un peu maintenant.

Je l'observa donc s'éloigner au loin, gardant un oeil sur elle, décidant de me concentrer sur son énergie pour ne pas la perdre de vue.

La voix d'Ys, qui finit par se briser, attire mon attention alors que je réalise que je ne sens pas l'énergie de cette enfant. Comment puis-je ne rien sentir ? Elle est pourtant là. C'est son rire qui s'élève dans les airs. Son sourire qui illumine ma journée. Ses cheveux rebelles, suivant les caprices du vent, qui s'agitent sous mon nez. Comment puis-je ne pas la sentir ? Pourquoi parait-elle soudainement si loin de moi, alors qu'elle ne l'est pas ?

Nos vélos s'arrêtent alors et je lève mon regard vers Ys qui commence à articuler mon nom sans le terminer. Le temps change. Il ne fait plus chaud. Le ciel n'est plus aussi bleu qu'il l'était. La douce odeur des fleurs qui éclosent au printemps n'est plus. Pourquoi semble-t-il si triste ?

Mon estomac se tord et le pose une main dessus alors que sa main glisse sur ma joue. Je sens mon coeur se gonfler. C'était le moment où je devais lui dire, non ? J'ai l'impression de n'être plus qu'une actrice qui répète son rôle. Mon corps demande à parler, "tu vas à nouveau être papa". Mais ma raison l'en empêche. Parce que ce n'est pas vrai. Je sais très bien que c'est faux. Alors pourquoi est-ce que tout mon être ne demande qu'à lui dire ça ? Pourquoi tout a changé d'un coup ?

Mes yeux se reposent devant moi. La petite a disparu. Elle s'est éloignée. Pourquoi n'a-t-on pas pu l'appeler ? Pourquoi n'est-elle pas revenue ? Pourquoi nous sommes-nous arrêtés ? Que s'est-il passé ?

Un sourire douloureux se glisse sur mes lèvres et je penche légèrement la tête pour savourer la caresse d'Ys. Mes doigts viennent se poser sur sa main et je ferme un instant les yeux pour profiter de cette chaleur.

-Je t'aime, tu le sais ?

Mes yeux se rouvrent pour se poser sur lui. Le soleil resurgit et chasse les ténèbres qui commençaient à s'emparer de mon coeur. Ys est là. Pourquoi devrai-je m'inquiéter ? Un léger rire m'échappe, comme si rien ne s'était passé. Je lui donne une pichenette sur le front.

-Dépêche-toi d'avancer ! Il faut qu'on rattrape Aiko avant qu'elle ne fasse une bêtise !

Et d'un coup de pédales, je reprends ma course, comme si tout avait toujours été ainsi.

HRP : Allez j'ai fait dans le cliché niais vénère, Aiko ça signifie "Enfant de l'amour" askip ptdr.

Avançant sur mon vélo pour rattraper Aiko, je ne fis plus attention à Ys, persuadée qu'il me suivait. Lorsque je me retournai enfin pour voir où il en était, mon corps rata un battement alors qu'il disparaissait de ma vie, une main lancée dans ma direction comme pour me retenir.

Le ciel s'assombrit à nouveau et je portai une main à mon ventre, le visage décomposé. Les larmes me montèrent aux yeux alors qu'une douleur vive me tordait l'utérus. L'utérus ?

Mes yeux se baissèrent et je fus prise d'un hoquet. Quand je relevai le regard pour retrouver Ys, mes membres se figèrent et mon vélo tomba à côté de moi. Il n'était plus là. Il avait disparu. Ne laissant derrière lui que ces mots que je ne voulais pas entendre.

"Ce n'est pas réel."

Comme ce bébé que je porte dans le ventre, Ys ? J'allais t'annoncer que tu allais être papa une deuxième fois, non ? Mais ce n'est pas réel ? Rien de tout cela n'est réel ?

Et Aiko ? Aiko n'est pas réelle.

Mon yeux se mirent soudainement à sa recherche mais je ne la trouvais plus. Le ciel s'était assombri à nouveau. Le tonnerre gronda. Tout disparut et je me retrouvai seule, perdue au milieu d'un décor que je ne reconnaissais pas, la pluie tombant sur moi avec violence. Mes yeux se fermèrent et je serrai les poings. Ma voix m'échappa pour hurler de rage. Bientôt, les souvenirs d'Ys et Aiko ensemble s'effacèrent et quand je rouvris les yeux, je ne vis que le plafond de ma chambre où je me trouvais, seule, encore. L'instant d'après, j'étais dans les toilettes, vomissant toutes ces pensées négatives qui m'avaient envahies.

De toute la journée, les larmes ne cessèrent de dévaler sur mes joues, et je ne fus pas capable de faire la moindre chose. Je l'avais senti si près de moi. Pourquoi avait-il fallu que rien de tout cela ne soit réel...?