HRP : Désolée pour le titre, c'est Ashton, pas moi.

Ashton observa la porte du dortoir de longues secondes avant de se décider enfin à l'ouvrir. Franchement, il était blasé. D'une, c'était le dortoir des filles, alors il ne voyait pas pourquoi c'était à lui de s'en occuper. De deux... Il avait bien d'autres choses à faire. Sauf que malheureusement pour lui, personne n'avait accepté de s'y coller. Ah, c'était bien facile, ça, de dire à celui qui rapporte l'information de s'occuper de gérer l'incident.

Il n'avait pas fallu moins qu'un entraînement avec sa chère et tendre élève adorée pour apprendre l'existence de cette jungle dans les dortoirs. Il avait bien fallu lui faire cracher le morceau, et supporter derrière ses plaintes concernant le fait qu'il ne l'avait pas emmené avec lui lors de sa dernière mission, mais au moins, il avait eu une information à peu près correcte à partager en réunion des Masters le soir-même.

Sauf que oui, voilà. L'information était passée, il avait partagé la jungle des dortoirs, qu'il avait pris en photographie en arrivant le soir-même, s'autorisant un détour, et tout le monde s'était désisté. Ah bah oui, tiens, puisque c'est toi qui a eu l'info, c'est à toi de t'en occuper. La prochaine fois, il laisserait couler.

Il poussa donc enfin la porte des dortoirs. C'était vraiment affligeant. Heureusement qu'il n'était pas Terre, sinon ça aurait été à lui aussi de ranger tout ce bordel.

-Luna, initié Terre. T'es là ?

Et si en plus elle n'était pas là...

     C’est louche.
     J’ai été réveillée par un SMS de Lloyd me disant que le bar n’ouvrirait pas avant ce soir, ce qui veut dire que j’ai pu faire une grasse matinée. Une plutôt bonne manière de commencer une journée.
     J’ai aussi pu vendre pour près de 5 000 yens de cannabis en une seule journée, une des meilleures depuis longtemps. Je vous le dis, c’est louche.
     Mais c’est pas fini : voilà que deux novices avaient pas cours avant la pause de midi et en ont profité pour acheter des chips et de la limonade. On a cuisiné et mangé ensemble avec ce qu’elles avaient ramené et des produits frais de mes potagers. C’était très sympa.
     Et là, je suis en train de rien foutre sur mon hamac, je regarde Reddit, mon dernier commentaire a reçu trois récompenses et 5 000 votes. Vraiment très louche. Je suis en forme physiquement et mentalement, pour la première fois depuis des mois. Et ça se ressent jusque dans l’endroit où je vis : on est passé d’une jungle impénétrable à une sorte de jardin à l’anglaise un peu sauvage. On peut même circuler relativement librement et le nombre de pièces rouvertes pour les novices se monte à trois. Dans lesquelles on trouve quantité de plantes en pot et de plantes grimpantes tombant de la grille qui supportait les dalles du faux plafond.
     Tout tourne trop bien, il va y avoir une tuile, je la sens venir.

     Ah, on a dit mon nom, là ? Je me retourne, pousse quelques lianes pendouillant dans le couloir. Un type blond avec des lunettes. Il a pas trop l’air d’être là pour déconner. Hm. Ce serait lui la tuile ? Je me lève et vais le voir, pieds nus et avec des plantes qui poussent un peu partout sur moi, comme d’habitude.
     « Euh, ouais, qui la demande ? »

Une voix lui répondit, se frayant un chemin à travers toute la végétation qui peuplait désormais les dortoirs. Ashton la fixa quelques secondes sans rien dire. C'était quoi cette tenue ? Il ne voulait pas juger, mais quand même, ça devait être sacrément insupportable, non ? En tout cas, il ne voyait absolument aucun confort à avoir autant de plantes sur son corps.

-Ashton, répondit-il simplement.

Il passa toutefois sur ça, puisque ce n'était pas la raison de sa venue. Il pouvait bien juger dans son coin, de toute façon cela dépendait de sa façon d'envisager les choses. Tout le monde n'était pas obligé de partager son avis.

Il désigna donc les lianes du menton.

-Ca. Tout ça là. Il faut que ça disparaisse. On ne peut pas laisser les dortoirs dans cet état-là.

Est-ce qu'il avait envie de dire que c'était de la dégradation du matériel ? Oui. Est-ce qu'il ne ferait ? Non. L'ordre était simple et concis.

-D'autant que tu es initiée maintenant, alors tu as une chambre.

Ca, par contre, il s'était senti obligé de le préciser, parce que ça l'agaçait un peu que quelqu'un a qui on a pris la peine de préparer une chambre ne l'utilise pas.

     Han comment il me juge. Enfin blondin, tu penses bien que j’en ai rien à carrer, sinon ça aurait fait longtemps que j’aurais amélioré ma présentation. J’ai surtout arrêté d’en avoir quoi que ce soit à foutre, en fait. Surtout que j’arrive encore à pécho même avec cette dégaine, voire grâce à cette dégaine selon Pandora. Alors.
     Ah, ce moment est venu. Ce doit être un master. C’est fou, j’arrive pas à revoir sa tête. Je passe ma main sur mon visage, pour faire mine de me le frotter comme quelqu’un d’un peu crevée qui réfléchit, mais j’en profite surtout pour souffler et sentir mon haleine. Je sens un peu la beuh, mais avec les plantes odorantes qui poussent dans mes poches voire mes cheveux, tant que je ne lui parle pas à quelques centimètres de son tarin, ça devrait aller.
     « Hmm. Quelqu’un s’est plaint ? »
     Il est désagréable, je suis désagréable. En soi, je me suis toujours dit que ce moment allait arriver. La seule chose qui m’étonne, à ce niveau, c’est que ce ne soit pas arrivé plus tôt. Mais je sais pas, j’ai fait des efforts plus le rendre plus présentable, plus accueillant. J’offre aux nouvelles des oranges ou d’autres fruits, tout ça.
     Puis je n’ai plus tellement envie d’une chambre, mais d’un jardin. Après, je pourrais me passer de tout ce qu’il y a à l’intérieur : je peux même réduire ma production d’herbe, vu que j’ai un boulot et que ce n’est plus ma seule source de revenus. En fait, depuis que j’ai un boulot, je n’ai plus le temps de m’en occuper comme il faudrait, de ma jungle. Mais enfin, ce n’est pas parce que ça ne me dérange pas foncièrement que je ne peux pas négocier. Ou à défaut, le faire chier.

Ashton arqua un sourcil face à la réponse de la jeune fille qui lui faisait face. Pardon ? Est-ce que quelqu'un s'est plaint ?

Non, franchement, est-ce que tout le monde a vraiment décidé de le faire chier aujourd'hui ? Est-ce que tout le monde trouve ça aussi normal que, de plus en plus, les Terraens se croient tout permis et remettent en question les ordres en permanence ?

Il remonta ses lunettes sur son nez.

-Oui. Moi.

Ne surtout pas laisser transparaître son agacement.

-Je repasse demain, je veux que tout soit comme avant.

Et il fit demi-tour pour s'éloigner. Il prit son téléphone et ouvrit son horloge pour fixer une alarme. Le lendemain, même heure. Il allait pas falloir le prendre pour un con trop longtemps non plus.

     J’ai très, très envie de ne rien faire, juste pour ne pas lui donner la satisfaction d’avoir gagné en se montrant autoritaire. Ah, en fait, je crois même que je ne peux pas faire autrement. C’est comme ça, on me donne un ordre, je me sens obligée de ne pas le respecter. Puis envoyer chier des connards qui pètent plus haut que leur cul, c’est banco là.
     Enfin quand-même, je prends mes précautions et préviens la novice à qui je louais ma chambre qu’il va falloir m’aider à ce qu’on échange nos affaires de place. Il me fait perdre près de 2 500 yens par jour, ce con. Puis je dois rembourser avec de l’argent que je n’ai pas, donc c’est super gênant. Ouais non en fait, je crois que je vais les lui briser autant qu’il me les brise, ce Ashton.
     Puis je vais devoir faire disparaître tout le cannabis que je ne vais pas pouvoir planquer dans ma chambre. Soit zéro, en fait, vu que c’est bardé de télépathes.
     Qu’est-ce que je vais pouvoir l’emmerder, ce con.
     Du coup j’ai prévenu les novices : accrochez-vous à vos slips, ça va être le Vietnam. Je leur ai promis une grosse fête payée de ma poche quand ce sera finie quand-même, je suis pas un monstre non plus. Je sais bien que ça va être nettoyé, mais d’abord, il y un point d’honneur à mettre. Elles peuvent toute aller dormir chez moi pour cette nuit, il y a assez de sacs de couchage pour juste une fois.
     Un quart des dortoirs étaient propres. Hé bien pendant toute la nuit, je me suis déchaînée. Et finie les allées entretenues. Là, on passe en mode sauvage. Comme je suis qu’initié, ça a été un travail… ben de titan, en fait, ce qui est plutôt adapté dans mon cas.
     Et du coup, Ashton peut revenir pour me trouver affalée sur mon hamac, en train de récupérer de mes litres de caféine prise dans la nuit d’hier. Enfin, s’il arrive à progresser jusqu’à moi, ce qui va être compliqué sans machette.
     Ah non mais, c’est comme avant. Avant que je rende ça plus propre, c’était vraiment impénétrable.
     Il va probablement péter une durite, mais quand on a déjà été menacé de mort un flingue sur ta tempe, tout paraît plus… enfin moins… enfin voilà, quoi.

Ashton roula des yeux en arrivant devant la porte ouverte des dortoirs des filles. Il s'arrêta quelques secondes, et observa l'état des lieux. Bien. Alors visiblement, ici, à Terrae, tout le monde avait commencé à n'en faire plus qu'à sa tête. C'est marrant, parce qu'il ne pensait pas que ça viendrait des Terres en premier. Déjà l'autre en mission la dernière fois, et maintenant celle-là avec ses plantes partout sur le corps.

Il n'avait pas prévu de s'énerver. Il avait donné une consigne ; les lieux devaient être évacués, puisque de toute façon aucune autorisation n'avait été demandée pour en prendre possession ainsi, forçant d'ailleurs tous les novices à devoir aller voir ailleurs. Ouais, en fait, non, il n'avait vraiment pas besoin de se justifier en fait : la règle est la règle, et un rappel à la règle exige une réponse simple et efficace. Et non une provocation.

Un soupir lui échappa. Remplir entièrement la pièce d'eau et l'inonder avec ses pouvoirs ? Il avait clairement envie de le faire. Mais il savait aussi que répondre à la provocation par la provocation n'apportait malheureusement pas grand chose. Peu importe jusqu'où elle irait avec cette jungle sauvage, il aurait le dessus dans tous les cas à la fin de l'histoire. Inutile d'aller donc chercher à avoir le dernier mot.

Il repartit donc après avoir laissé un mot sur la porte. Il avait longuement hésité sur le contenu du message qu'il avait laissé. La prévenir que pour chaque jour de retard, elle devait un jour d'intérêt général ? Lui indiquer qu'en cas de poursuite sur cette voie, elle risquait de perdre sa place à Terrae ?

Ouais, non. Il en avait assez de prévenir et de prévenir en suivant les directives de l'Institut. C'était bien parce qu'on donnait la possibilité aux jeunes de trop s'exprimer que ça finissait avec des gamins incapables d'écouter et de respecter une règle simple : quand un supérieur te fait une remarque, tu ne la remets pas en question.

Ainsi, avait-il laissé comme note un simple "Demain, même heure.". Si elle poussait le bouchon trop loin, alors elle prendrait ses affaires. Chris viendrait arranger tout ce bordel, et elle serait mise à la porte. Une seconde chance, c'était bien assez. On avait voulu qu'il s'occupe de cette affaire ? Bien, il s'en occuperait. Terrae était devenue beaucoup trop laxiste, il était temps que les choses changent.

     « Il déconne plus, là.
     – C’est lui qui a commencé. Moi j’m’en fous hein. Au pire quoi, il va remettre un post-it ?
     – Nan mais, si tu te fais tej comme une malpropre tu vas pas pouvoir nous faire la teuf promise. Oh.
     – Ouais…
     – Pis on tolère on tolère, mais tu prends pas mal d’espace pour toi toute seule et—
     – Ça va ça va, j’ai compris. On a le droit de déconner un peu, quand-même. T’façons j’ai jamais dit que je ne le ferai pas. Bon ça suffit, allez en cours les jeunes. »
     On était en train de discuter devant la note d’Asthon, moi et trois novices, et ça c’est conclu comme ça. Demain même heure par contre ça va pas être possible, même pour une étoile. Je veux dire, foutre le bordel et faire pousser à fond, c’est un gros effort mais c’est ce que je fais tout le temps, donc ça va encore. Mais détruire, ça n’a jamais trop fait partie de mes compétences de prédilection. J’ai eu droit à un week-end allongé de Lloyd pour avoir le temps de m’occuper de ça, mais ça représente quand-même facile quatre, cinq jours de taf. Peut-être pas en bossant à temps plein, mais quand-même.
     Enfin, au moins pas mal de mes plantes vont trouver des pensionnaires en la personne des novices. J’ai fait venir ceux du dortoir des mecs au passage. Ils ont tous pu repartir avec un plant. Ça me fait ça de moins à dégager.
     Résultat, demain même heure, je suis en train de prendre ma pause dans mon hamac. C’est nettement plus propre et plus vide, ça y’a pas à dire, et il suffit qu’il se renseigne un tout petit peu pour savoir que des mouvements de terre et de végétaux, il y en a pas eu qu’un peu.

Pour une surprise... C'en était une.

Remontant ses lunettes sur l'arête de son nez alors qu'il s'arrêtait devant la porte du dortoir des novices, il prit connaissance de l'évolution des travaux. Oui. Alors il était peut-être parti de la salle des Masters tout à l'heure avec mauvaise foi, quand il avait demandé à Chris de l'accompagner pour virer tout ça avant qu'il ne perde réellement patience.

-C'est moins grave que ce que tu m'as dit, se contenta de dire l'homme à ses côtés.

Oui, et bien...

Et bien tant mieux, en réalité. Si cela avait duré un jour de plus, sans amélioration, il se serait rendu auprès d'Hideko et de Ryu, et aurait probablement hésité entre "exclure tous les indisciplinés" ou "partir de ce lieu rempli d'incapable et de rebelles abrutis". Force était de constater qu'il s'était emporté un peu vite.

Le Master Titan qui l'accompagnait haussa une épaule, avant d'indiquer au blond qu'il était bien capable de s'occuper de ça tout seul pendant qu'il retournait à l'entrée de Terrae. Le Master Morphe avança donc dans ce qu'il restait de la jungle, passant ici et là sa tête entre les lierres qui tombaient du plafond pour tomber sur la jeune femme couverte de plantes allongée dans son hamac... Il prit la parole.

-Tu peux déplacer tes plantes directement dans ta chambre, si tu le souhaites. Ou t'occuper d'une partie du potager. Ou prendre une partie pour tes expérimentations dans la forêt, ou dans le champ de fleur. Ou l'espace vert.

Bref, c'qu'il essaie de dire, c'est que oui, il comprend le besoin d'entraînement, juste : il n'accepte pas que cela se passe dans les dortoirs alors qu'il y a tant d'autres endroits mis à disposition des élèves dans l'Institut.

     Ah, il est revenu. Et a l’air sensiblement mois à cran, le Ashton. C’est pas encore tout à fait ça, il a toujours un balai dans le cul, mais plus l’intégralité du placard du concierge. Il y a une amélioration significative de mon côté aussi, ça doit jouer.
     Ses propositions sont intéressantes, mais elles partent du principe que je vais avoir le temps de m’en occuper. Or ma jungle, c’était mon délire de chômeuse.
     « C’est gentil mon gars, mais l’intérêt d’avoir ça ici, c’était de pouvoir vivre dedans. »
     Et de pouvoir en vivre. Ça va probablement l’énerver, ça. Boah, pas mon problème. Je me suis enfilée un gros joint il y a quelques minutes – heureusement que mes plantes sont là pour diffuser une odeur capiteuse qui masque celle du cannabis au passage –, donc ce n’est pas comme si je faisais vraiment gaffe à ce que je raconte.
     « Non mais, t’sais quoi, attend. Toi t’es… T’es pas Eau morphe ? Je crois bien. Ça n’ira pas, mais ça t’embêterait d’aller me chercher le premier Feu que tu croises et de lui dire de venir ? J’aurais un travail à lui refiler. Payé. »
     Et Tiago ne répond pas, sinon je lui aurai déjà proposé. Enfin, en fait non, je ne lui aurais pas proposé, vu que l’idée c’est qu’on avance dans le nettoyage, pas qu’on fasse des galipettes.
     « Si tu m’fais ça, euh… Ben écoute t’auras droit à une conso gratuite la prochaine fois que tu passeras au bar. »
     Depuis que Lloyd m’a légué sa gestion, je fais c’que j’veux. D’ailleurs c’est comme ça qe celui qui vient m’aider sera remboursé.

Ashton arqua un sourcil dès l'instant où la Terre prit la parole. Ouais, nan. Il regrettait déjà d'avoir essayé d'être sympa. Elle se foutait ouvertement de sa gueule. Visiblement, elle n'avait pas vraiment l'air de comprendre à qui elle s'adressait, et la notion de "respect" semblait ici complètement dérisoire. Bien, aucun souci, il n'essayerait plus d'aller vers elle, et se contenterait de s'assurer qu'avant la fin de la semaine, les dortoirs seraient à nouveau habitables pour les nouveaux arrivants. Il fallait pas trop se foutre de sa gueule non plus.

Il la dévisagea un long moment quand elle lui demanda d'aller faire ses courses pour elle, ne répondit rien quand elle lui proposa une jolie récompense comme à un bon toutou si il faisait ce qu'elle lui demandait. Elle n'avait réellement rien compris en fait. Non, vraiment. Elle avait fait une connerie, avait abusé de l'hospitalité qui lui était offerte, s'était en plus ouvertement foutu de sa gueule la veille, et là, c'était à lui de faire les petites commissions. Mais bien sûr.

Il fit volte face, et sortit de la pièce. Est-ce que ça valait le coup de parler ? Non. Mais s'il ne lui indiquait pas qu'elle pouvait bien se débrouiller seule comme une grande fille, il doutait qu'elle comprenne par elle-même. Aussi, alors qu'il franchissait la porte, il lui indiqua :

-Tu as jusqu'à la fin de la semaine pour que tout soit comme avant. Je repasserai à ce moment-là.

__-Wep, c’est définitif, il ne m’apprécie pas. Bah, un pète-sec autoritaire et moi passablement défoncée, ça ne pouvait pas le faire. Même moi passablement sobre et claire, en fait. Pourtant, j’ai essayé d’être sympa et d’engager la conversation et tout. Si ça se trouve, c’est juste qu’il ne boit pas, et forcément faire une course pour un diabolo gratuit c’est pas super intéressant. Enfin, il aurait pu offrir à une amie à lui, voire à la personne avec qui il est en couple… Quoique, les peigne-culs se mettant généralement ensemble quand ils se casent tout court, ça ne risque pas.
__-Du coup, il va falloir que je me lève pour aller chercher un Feu. Eeuah. Ou alors je pourrais envoyer une novice, après tout elles rentrent de cours dans une heure. Puis elles au moins ne refuseront pas la contrepartie. Enfin, pas toutes.

__-Enfin bref, j’avance un peu dans le récit jusqu’à la fin de la semaine, où effectivement il y a moins de végétaux. Pas plus du tout de végétaux, vu que j’en ai quand-même offert des quantités aux novices, donc il y a toujours un côté jungle.
__-Et aussi parce que j’ai ressorti les tréteaux de la fête organisée pour Alyona et mis dessus des tomates cerise, du concombre, des radis, des pistaches, des dés de poivron, des petites salades de fruits, des chips et des alcools (c’est fait à base de plantes, ça compte). Du coup s’il déboule, ce sera au milieu de la fête de départ – ou de réhabilitation des locaux, c’est selon. Pendant qu’on danse, au moment où ma liste de lecture part sur du speed metal. Qui sait, ça va peut-être le dérider un poil.

Quand Ashton franchit la porte des dortoirs, il soupira. Et ça, c'était Terre ? A jouer à la provocation comme ça ?

Il ne dit pas un mot, se contentant d'observer les novices et l'initié danser pendant quelques secondes avant de tourner la dos à la scène pour repartir. Les restes de plantes étaient dans des pots, soit sur le sol, soit sur accrochés contre les murs, et ça lui suffisait. Bien sûr, il aurait bien demandé une semaine d'intérêts généraux pour régler le souci d'insolence, mais il se doutait qu'Hideko sortirait un discours du type "Les dortoirs sont à nouveau accessibles pour les novices, non ? Alors le problème est réglé !", alors il garda son amertume pour lui. Ne pas répondre à la provocation par la provocation. Il savait simplement que si un jour ils devaient se recroiser, elle ne devrait rien attendre de sa part.

En attendant, le sol n'était plus recouvert de mousse, et les nouvelles arrivantes allaient à nouveau pouvoir s'installer ici, alors comme aurait dit la directrice "le problème était réglé".

__-Rooh, il est pas drôle. Enfin, qui ne dit mot consent, je suppose. Donc au moins, je ne l’aurai plus au cul pendant un certain temps.
__-« Pfiou, il est bon pour péter une ambiance celui-là.
__-– Ouais, un peu trop d’ailleurs… Hé ! Passe-moi la plante !
__-– … Laquelle ?
__-– Euh… Celle en pot.
__-– …
__-– … Bon oké j’ai compris. »
__-J’aurais pu lui dire son nom, mais pas dit qu’elle aurait su de laquelle je parlais, donc ça n’aurait rien changé à la discussion. Enfin bref, je la prends et sors des dortoirs. Il est parti où ce con ? Ah, là.
__-« Hé attend, euh… toi, là. »
__-Merde, c’est quoi déjà son nom ? Quelque chose qui sonne chiant et britannique…
__-« Grayson ? Non c’est pas ça, un truc du genre, enfin qu’importe. »
__-Ashton, je crois. Aussi, ash, grey, je reste dans le même ton.
__-« Tiens. »
__-Je lui tends la plante. Un citronnier. Une nana un peu bourrée qui te file un arbuste, là comme ça, ça doit faire bizarre, j’en conviens. Surtout quand t’étais venu pour lui faire prendre la porte et ton pied au cul.
__-« Il m’en restait un que personne pouvait prendre alors… voilà. Cadeau. »
__-On pourrait y imaginer une symbolique derrière, genre pour entamer une réconciliation, le remercier d’avoir été plus coulant qu’il aurait pu l’être ou je-ne-sais quoi, mais on va laisser ça à l’interprétation. La vraie raison, c’est que vraiment, personne ne voulait de lui et que je n’ai déjà plus la place nulle part. Mais ça, je ne vais pas le dire. Il faut ménager un peu de mystère.
__-« Sur ce, j’ai des bouteilles à vider et encore trois-quatre nanas à qui j’ai promis une danse, à la revoyure champion. »
__-Et je retourne aux dortoirs. Peut-être pour la dernière fois, sûrement que non vu que je suis un peu comme les maman poules : je rends visite régulièrement à mes bébés pour vérifier qu’ils ont tout ce dont ils ont besoin.