Je m'étais réveillée tôt ce matin là, vers les 4:30. Je n'avais que très peu dormis, des cauchemars me hantant. Je me leva à pas de loup, évitant de réveiller les autres novices présentes dans le dortoir. Lorsqu'elles se réveillent, certaines peuvent être facilement comparées aux dragons féroces des mythes, vous savez les moches.
Je m'étais habillée sobrement, une jupe blanche légèrement évasée et mettant ma taille en valeur, un haut marron trouvé récemment dans une de mes sortie shopping et enfin mes éternelles bottes cavalières brunes. Je m'étais coiffée d'une tresse latérale et le tour était joué! Je sortis, arpentant les couloirs sans réel but. Je n'avais pas mangé, comme d'habitude, n'en n'ayant aucunement l'envie. J'étais dans l'une de mes phases déprimée, ne sachant pas ce que j'allais faire de ma vie, me rappelant douloureusement ma vie d'avant et sa fin bien entendu. Je foulais le sol de mes bottes, quand je vis la sortie, ainsi que le chemin dissimulé dans les sous-bois pour rejoindre l'entrée de Terrae. J'ai cru que je trouverais là-bas les réponses à mes questions et, étant donné la dissimulation de Terrae au milieu de toute cette végétation, je doutais qu'il y aurait beaucoup de monde.
Je regarda le ciel et souris tristement: Il avait cette teinte grisâtre annonçant les orages que j'aimais tellement. Je me rappelle qu'il avait cette même couleur le jour où je suis arrivée... Chargé de mélancolie, de doutes et de tristesse, le ciel s'assombrissait de plus en plus, et, sous l'humidité, je voyais mes cheveux friser sur la pointe de ma tresse. Néanmoins, je continua mon chemin, mais en marchant, fatiguée de sentir mes muscles, endolories par mon footing d'hier sur six kilomètres, se ployer sous mon poids.
J'arriva assez vite devant le portail de l'établissement, vers six heures, mais je resta dissimulée derrière les fourrés en voyant une ombre devant l'entrée. Je discerna peu à peu une petite fille, ne devant pas avoir plus de dix-douze ans maximum. Elle tenait un doudou noir contre elle et elle semblait perdue. Une nouvelle élève? Elle était si jeune! Elle était jolie comme une poupée, et semblait aussi adorable mentalement que physiquement. Je sortie du sous-bois et arrivant prés d'elle, je lui souris, avant de me baisser à sa hauteur.

- Salut toi! Comment tu t'appelles? Moi, c'est Ludmila Parker.

Je regarda de plus prés la petite et la trouvas à croquer. Elle était vraiment adorable.

- Tu es nouvelle ici? Si tu veux, je peux t'accompagner à l’accueil, histoire que tu puisses t'installer tranquillement avant que les cours ne commence, même si je pense que tu auras au minimum ta demie-journée de libre.

Je lui souris et lui fis un clin d’œil avant de me relever. Je regarda le chemin de terre puis la fillette et lui tendis la main, souriant toujours.

- Tu viens?

La petite fille finie par me fixer ses jolis yeux et je lui souris. Lui tendant toujours la main, j'attendais patiemment de savoir si oui ou non, elle voulait bien me suivre. Elle semblait perdue dans ses pensées, serrant toujours son doudou contre elle, sa valise à côté d'elle.

- J'aimerais bien voir maman. Furent ces premiers mots. Elle avait une voix douce et aigu, une voix innocente et ignorante, comme l'enfant qu'elle était.

Timide, la petite me répondit d'une faible voix:

- Moi c’est Lumia, Lumia Hearts comme cœur ! Oui, un monsieur m’a dit d’attendre là, alors je ne bouge pas. Mais je commence à avoir froid, et puis je ne sais même pas ou on est...

Elle me plaisait cette petite, je pris dans mon sac ma veste en cuir blanche la lui tendis. Quand je lui proposa de venir, elle attrapa ma manche, collant son doudou contre elle.

- D’accord… Dite madame, pourquoi vous avez les cheveux oranges ? Ma maman elle aime beaucoup le orange, mais moi je préfère le bleue ! Je pourrais avoir les cheveux bleus ?

Je souris de plus belle, cette fois-ci plus franchement, découvrant mes dents blanches, elle était craquante cette gamine!

- Tu as un très joli prénom tu sais? Je ne sais pas, je suis née comme ça. J'avais les cheveux roux étant petite et je les ai gardé. Après, il est possible d'avoir des cheveux d'une couleur... différente mais je te conseillerais vivement d'attendre d'être plus grande. Beaucoup plus grande.

On commença à marcher tranquillement et je me mis à penser que la personne ayant emmené la petite à l'entrée était inconsciente pour l'avoir laissé seule au milieu de nul part, glacée et si vulnérable.

- Pour répondre à ta première question, cet endroit se nomme Terrae. Il s'agît d'une école mais pour être honnête, je ne suis arrivée qu'il y a quelques temps et je ne pourrai spas vraiment répondre à tes questions. Mais ne t'en fais pas, la directrice s'en chargera.

Je ne parla pas du fait qu'elle soit seule, qu'elle n'est pas de parents. Certains souvenirs douloureux ne doivent pas être abordés, encore moins avec une inconnue! Le temps se couvrait, peut-être aurais-je dû prendre un parapluie...

- Elle est mignonne ta peluche Lumia. Elle a un nom?

Elle était timide mais semblait comprendre que je ne lui voulait aucun mal. Elle m'expliqua qu'elle n'arrivait pas à prononcer son nom de famille mais qu'elle s'y entraînait tous les jours, je la trouvais touchante dans cette ignorance et cette innocence propre aux enfants. Elle avait bien le temps de grandir, elle se devait de profiter de son enfance, sans penser à demain. Même si je savais grâce à Maria que chaque personne habitant à Terrae avait été victime d'un événement la faisant basculer dans le vide... Je trouve que la vie est injuste. Je l'ai toujours su mais je l'ai appris à mes dépends. Enfin bon, revenons à nos moutons:

- Terrae ? C’est joli comme nom, mais c’est aussi difficile à prononcer... Le monsieur il a dit que j’aurais peut-être une raison de retrouver ma maman et mon papa, ça serait vraiment bien de retrouver ma maman et mon papa… Madame la directrice ? Elle est belle Madame la directrice ?


- Elle est très belle oui, et aussi très gentille. Mais attention, il ne faut pas faire de bêtises, sinon, elle peut te punir.

La petite serra son animal puis le regarda lorsque je lui demanda le nom du doudou.

- Oui c’est Monsieur Ink ! Il est un peu ronchon, mais c’est mon meilleur ami !

Je lui souris, monsieur Ink... Drôle de nom, je me demandais bien où elle avait pu le trouver celui-là... En général, les enfants prennent des noms plus communs, moins compliqués... Puis sa voix fluette retentit:

- C’est vrai monsieur Ink ! Je m'arrêtai un instant,  surprise, la regarda puis je compris qu'elle devait sûrement avoir un ami imaginaire comme beaucoup de bambins et que cette peluche en était son image visuel. Je finis par regarder dans mon sac et trouver un paquet de bonbons tagada... J'adore ces bonbons, avec les arlequins, ce sont mes préférés! Je tends le paquet ouvert à la petite.

- Tu en veux? Il nous faudrait surement trente minutes pour arriver, puisque Lumia ne marchait pas très vite et que nous étions passé par les bois. Autant lui parler et en apprendre un peu plus, aprés tout,je me sens un peu seule ici, et elle ressemble à ma... Stop. Ludmila ressaisis-toi!

- Alors tu viens d'où comme ça? Je demanda, cherchant à savoir si elle était américaine ou anglaise et de quelle ville, vu son accent.

La petite accepta gentiment les bonbons, les yeux brillant et bavant devant la friandise. Je ris doucement, touchée par une telle innocence. Elle la grignotait gentiment, et je faisais de même, le bonbon sucré me collant au dent.

- D’une petite ville près de la mer qui porte le nom de Château d’eau? Tu connais ? Les gens sont toujours très gentil la bas. Surtout le vendeurs de bonbons M. Anderson. A chaque fois, M. Anderson me donne de fraises tagadas.  Et toi tu viens d’où ?

Je me referma sur moi-même, les souvenirs lointain se réveillant. Mis-à-part mon nom, je ne disais jamais rien sur moi-même. Et je comptais bien continuer, ne voulant et ne pouvant pas dévoiler mes faiblesses. Surtout à cette gamine de dix ans.

- Non je ne connais pas désolée. Mais par contre, je connais des tas de vendeurs de bonbons!

Je lui souris, cachant ma nostalgie. Je ne faisais plus cas lorsque Lumia parlait à son doudou, et je savais exactement quand elle le faisait ou non.

Je remarqua alors l'air apeurée de la fillette.

- Mais au juste, pourquoi somme nous ici ?

Je souris avec sympathie.

- N'est crainte, je ne te ferais aucun mal, je t'emmène juste à l'établissement afin que tu puisses défaire tes bagages. Après, si tu veux, on peut rejoindre le chemin commun. Je n'ai pas pensé que tu puisses avoir un peu peur de la forêt, excuses-moi.

Appuyant ma franchise, je fis l'effort de la prendre par la main, un geste me rappelant douloureusement ma... Bref, je la pris par la main.

La petite semblait avoir compris que j'avais volontairement élucidée la question. Et c'est là qu'elle prononça la phrase:

- Tu n’en sais rien monsieur Ink, peut être qu’elle souffre encore de son passé ?

Mon sang se glaça et je m'arrêta un instant. Elle avait parlé à son doudou, mais je pouvais deviner qu'elle parlait de moi. Mon passé... Personne n'en avait jamais fait allusion devant moi, car une fois le sujet abordé, je peux très vite devenir... Violente et mon côté impulsif ressort avec véhémence. Je m'obligea néanmoins à me calmer, sachant que cette petite s’enfuirait si elle me voyait en colère. Je continua néanmoins le chemin, peureuse à l'idée qu'elle ne discerne mon ma-être. Finalement, elle répondit à ma question:

- Non, ça ira… Il faut que je devienne forte comme maman. Mais on y fait quoi exactement à cette école ? Je ne comprends toujours pas pourquoi je suis ici, et j’ai peur sans ma maman et mon papa…

Elle me ramena sur terre, calme et attendrit.

- N'aie pas peur Lumia. Ici, on ne te veut que du bien tu sais? Quand à savoir ce qu'on y fait, je ne l'ai pas encore vraiment compris, mais étant moi aussi novice, je sais que tu dormiras dans un dortoir, avec les autres. Et sûrement prés de ma couche, comme ça, si tu as une question où un problème, tu pourras me demander.

La petite sembla songeuse, tellement que je me demandai si elle pensait aux dortoirs, à son passé, ou tout simplement à son doudou. Puis, la sentence tomba:

- Quelque chose ne va pas ? J’ai l’impression que tu es triste ?

Je me figea littéralement sur place avant de lâcher la petite pour me baisser à sa hauteur.

- Ça va ne t'en fais donc pas. J'ai quelques petits problèmes mais rien de grave. Tu verras, en grandissant, tu comprendras. Tiens regarde, on arrive!

Je lui repris la main tout en lui expliquant qu'elle devrait d'abord aller à l'administration avant d'aller aux dortoirs pour défaire ses bagages.

- Si besoin est, tu me trouveras dans les dortoirs où dans la forêt. Je passe aussi beaucoup de temps dans la salle commune. Oh! Et bien sûr, si monsieur Ink et toi voulez des bonbons, j'en ai toujours un peu sur moi. Je dis en lui faisant un clin d’œil.