Ariana venait de mettre sa toute dernière acquisition en matière de lingerie fine : une jolie nuisette pourpre et blanche et son shorty assorti. Bref, de quoi faire baver ses yeux, c'est moi qui vous l'dis. Elle s'admira un instant dans son miroir, tout en réarrangeant vaguement la forme de ses cheveux attachés en un chignon désordonné. Parfait, tout serait par-fait ! Elle gloussa, s'hydrata encore un peu le visage, le rinça, s'épongea, guetta le moindre cil ou bout de sourcil qui ne serait pas à sa place. Puis, elle ressortit de la salle-de-bain, s'approcha de sa fenêtre qu'elle avait préalablement ouverte, puis se transforma en grenouille.

Elle passa par l'embrasure de la fenêtre, tout en gloussant intérieurement. Son mec du moment allait être absolument ravi de la voir. Il était prévu qu'ils se voient, mais elle était certaine qu'il n'avait pas prévu, eh bien... ça. De quoi lui faire une jolie surprise !

Enfin, c'est ce qu'elle pensait. Elle avait compté le nombre de fenêtres jusqu'à la sienne, et était persuadée de ne pas se tromper. Après tout, elle pouvait compter sur sa mémoire exceptionnelle, non ?! Bon... Ok, personne n'y croit.

Forcément, arrivée devant la fenêtre entrouverte qu'elle croyait appartenir à son cher et tendre, elle atterrit au milieu d'une chambre étrangement décorée... Et atterrit même sur les genoux de quelqu'un. N'y tenant plus, ayant tout de même tenu sa concentration pendant un moment pour pouvoir traverser l'institut elle fut forcée de se retransformer en humaine, légèrement haletante à cause de l'énergie déployée. Elle glapit et s'étala à moitié sur sa victime, avant de se redresser, ses boobs à la hauteur des yeux de l'adolescente qu'elle surplombait.

— Oh !! La rouquine ! Hamilton !! Coucou !! T'es la copine de Nirolas, toi, non ? Ça te va bien, les cheveux courts !

O-k. Tout est normal, hein, tout à fait. Elle remonta son gilet en laine qui glissait le long de bras d'un air nonchalant, avant de lui pincer une joue et de faire.

— Tu n'as rien vu, je ne suis paaas là, ok ? Tu veux bien attendre trois minutes le temps que je retrouve l'énergie de me retransformer pour repasser par la fenêtre ? Merci ! T'es trop mignonne !

Et elle s'éloigna de la rouquine, descendit du lit et s'étira en baillant.

— Bon, il est quelle heure ? fit-elle en lorgnant sur son portable, dans la poche de son gilet. Je vais être en retard, moi...

Et elle tapota du pied, boudeuse.

L’eau chaude humidifie mes cheveux, les mouille jusqu’à ce qu’ils deviennent une masse rousse contre mon dos. Je les lave avec soin, comme toujours. Cela fait du bien, cela apaise. Mes rencontres ces derniers temps sont éprouvantes. La remise à ma place par le master, la mise au point avec Kurei, cette étrange affection que j’ai pour Alice et la découverte de ce que je pourrais appeler… un ami ? Probablement. Ys, qui m’a surprise par la manière dont il m’a acceptée. Tout cela remet en question mes idées, mes suppositions, mes choix. Il faut que je l’avoue, mes préjugés.

J’ai besoin de me reposer. Certes, mes cernes sont moins profonds, moins marqués. Je suis parvenue à reprendre un peu de poil de la bête. Néanmoins, il faut que je dorme plus, j’en ai conscience. L’heure du repas vient à peine de passer, mais mes paupières se font lourdes. M’allonger avec un peu de musique serait assez agréable je crois.

Je rejoins donc mon lit, un vieil mp4 acheté d’occasion dans la main, et m’y assois, glissant les écouteurs dans mes oreilles quand soudain, je sens une chose m’atterrir sur les genoux. Une chose étant en fait une grenouille. ET CETTE CHOSE SE TRANSFORME EN HUMAIN.

« AAAAAAAAAH »

Et la chose parle. Parle. Parle. Parle. MAIS QUAND EST-CE QUE CELA VA S’ARRETER QUE JE COMPRENNE ? J’ai la tête dans des seins qui plus est. Non pas que cela soit fondamentalement désagréable, mais tout de même… TROP DE PROXIMITE. ALERTE.

Alors qu’elle descend enfin de mes genoux et s’éloigne, je la reconnais enfin. Ariana, dont j’avais assisté à l’anniversaire. Elle se tait finalement et me laisse de ce fait le temps d’intégrer la dose d’informations que je viens de recevoir. Pour la première fois depuis longtemps, je me retrouve sans voix un moment avant de retrouver mon ton habituel et mon regard assez indifférent, qui avait pourtant cédé place à de la surprise quelques secondes auparavant.

« Nirolas ? Parles-tu de Nicolas ? Je suppose que nous pouvons dire que nous sommes amis. »

Je passe ensuite un doigt dans mes boucles courtes formant désormais des anglaises que j’apprécie particulièrement.

« Merci pour le compliment. »

Mon regard balaye ses propres cheveux et un sourire amusé nait sur mon visage.

« Tu as laissé tes cheveux roux. C’est joli aussi. Mais tu devrais te refaire une couleur. Je ne te connais pas tout à fait mais je sens que plus cela est excentrique, plus cela te convient. »

Oui, ceci consiste en une remarque sur autrui, nouveauté faisant partie du processus d’insertion que je m’impose depuis quelques temps. Mes yeux détaillent ensuite sa tenue. J’arque un sourcil.

« Ais-je vraiment le choix ? Tu sembles bien décidée à rester. »

J’ajoute, un ton taquin mêlé d’ironie dans la voix.

« Tu as une bien jolie tenue pour te balader dans l’institut… Tu te caches… Lequel des Feux voulais-tu voir, grenouillette ? »

Après tout, si elle est assez gonflée pour s’imposer ainsi, je peux l’être assez pour supposer qu’elle allait voir un quelconque amant en incognito.

Cette fille venait littéralement de lui broyer les tympans. C'était certes une réflexion vaguement hypocrite venant d'elle, mais elle venait de comprendre ce que subissaient constamment ses proches quand elle se mettait soudainement à hurler pour une raison x ou y. Hmm... Ca méritait quand même un peu réflexion, hein. Mais bon, tant pis. Elle défroissa sa tunique d'un geste vague, tandis qu'Hamilton reprenait tant bien que mal ses esprits.

Amis, amis, c'est ça, hein, songea Ariana en lui lançant un regard suspicieux. M'ouais, elle y croyait pas trop, hein. Elle cuisinerait probablement Nicolas plus tard, mais elle se doutait qu'il n'y répondrait pas. Hm. Dommage... Une autre fois peut-être. Elle gardait le sujet dans un coin de sa petite tête pour un moment où elle se ferait chier. Oui oui, c'était une idée eeexcellente !

— Oh, merci ! J'y comptais, mais j'hésite encore, j'ai pas spécialement envie de les décolorer mais j'aimerais bien être blonde, sinon y avait une jolie couleur turquoise que j'avais trouvée, et... Enfin, je les laisse respirer un peu en attendant !

Finalement, elle se décida à se rassoir sur le lit de la jeune feu, sans lui demander son avis évidemment, et s'étira.

— Pas vraiment le choix, en effet ! Et... Tu es sûre que tu veux savoir ? fit-elle en glissant un chuchotement vers elle en gloussant. Je te dirai pas, de toute manière ![/color]

Elle n'avait pas spécialement honte, elle était même plutôt contente d'être tombée sur quelqu'un qu'elle connaissait plutôt qu'un mec random. Bon, ça aurait pu lui faire des connaissances, hein !…

— Puis, d'où t'as vu que je me baladais ? J'essayais d'atteindre sa fenêtre, mais j'arrivais plus à tenir, bouda-t-elle. C'est loin, les dortoirs des eaux, hein !

Elle se rendit compte qu'elle avait quand même traversé la moitié de l'institut en sautant de fenêtre en fenêtre.

— OH MAIS C'EST DINGUE EN FAIT. J'arrive à tenir vaaachement plus longtemps !!

Elle lui lança un grand sourire.

— Et toi, tu faisais rien ? T'as peur des grenouilles, en fait ? Je voulais pas te faire peur tout à l'heure, hein !

Je ne crois pas avoir déjà vu un regard aussi clairement dubitatif posé sur moi. Ok, elle ne me croit absolument pas, la rouquine. Tant pis, me défendre ne ferait que plus donner l’impression d’une quelconque culpabilité.

Je hausse les épaules lorsqu’elle me répond à propos de ses cheveux.

« Le blond n’est pas très original. »

La voyant, je m’attendais en effet plus à des choses comme violet clair, turquoise comme elle le veut éventuellement… et pourquoi pas arc-en-ciel ? Enfin, je décide de passer à autre chose, ayant l’étrange impression de me sentir un peu trop impliquée dans les colorations capillaires d’Ariana.

Cette dernière s’assoit à côté de moi et je me décale de quelques centimètres pour que nous ne soyons pas collées. Assez brusquement, je la rembarre légèrement.

« T’arrive-t-il de demander avant de t’imposer ? Tu es vraiment envahissante. »

Elle m’agace un peu quand même, à squatter de cette façon. Je soupire et lève les yeux au ciel. Néanmoins, j’ai l’habitude d’être plus polie. Avec la rouquine, j’ai du mal à me contenir. Son comportement me pousse à tout dire sans réfléchir lorsque cela me vient. Son gloussement me fait grincer des dents. Je crois comprendre pourquoi elle fait hérisser mes poils cette fille… Elle semble complètement idiote !

Mes yeux viennent la regarder en coin. « Sa fenêtre ». Elle ne voulait rien raconter mais laisse tout lui échapper. Quelle naïveté en elle. Elle n’a dit aucun prénom encore, mais cela se sent qu’il suffit de la laisser parler pour glaner des informations. Je secoue lentement la tête, comme désespérée. Elle enchaîne ensuite sur son périple de son dortoir à ma chambre.

« Si tu le dis… Je ne sais pas où il est. »

Je ne connais que celui des Tonnerres, des Airs et bien évidemment, celui des Feux. J’ai mis tellement de temps à commencer à retomber sur mes pattes que je ne découvre réellement l’institut que maintenant. Et soudain l’Eau, puisque c’est apparemment ce qu’elle est, crie sa joie, fière d’elle-même. Sa réaction, si enfantine soit-elle, me tire un sourire contraint. C’est d’une voix peu convaincue, bien trop plate, que je consens à la féliciter.

« Bravo Ariana. »

Et pourtant je le pense. Il a en effet dû lui falloir beaucoup d’énergie pour parcourir la distance, si elle si grande qu’elle le dit. Mon sourire en coin lui, est plus sincère, montre que mon « Bravo » n’est pas ironique.

La rouquine m’adresse un grand sourire. Quelle vie en elle ! Je hausse les sourcils, lui lançant mon air le plus blasé lorsqu’elle me demande si j’ai peur des grenouilles.

« Tu aurais pu être une libellule, un éléphant ou un chat, j’aurais tout de même eu un minimum peur en voyant soudain un animal se changer en être humain sur moi alors que je suis seule. Et non, je ne faisais rien. »

Je me tourne enfin complètement vers elle, m’apprêtant à lui demander si elle compte bientôt partir – je sais je suis trop aimable – quand soudain un cri se fait entendre. Un ? Plusieurs. Beaucoup.

« ALLEEEEEEZ LES GARS ET ON DEFONCE TOUT !! A L’ATTAAAAAQUE !!! »

Et là ma porte s’ouvre. Deux mecs torses-nus entrent. J’ouvre le bouche, prête à gueuler, quand une bombe à eau vient s’éclater sur mon mur, juste au-dessus de ma tête. A eau ? NON. PLEINE DE PEINTURE BLEUE. Une seconde, verte, atterrit sur Ariana, la colorant à peu près… partout. Et une dernière, rose, sur moi. Je me lève d’un bond, bien décidée à les faire cramer, mais trop tard. Le temps de réaliser ils sont partis vers d’autres chambres à grands « BON LES NANAS ON SE REVEILLE C'EST PAS LE MOMENT DE DORMIR. C’EST LA GUERRE DONNEZ TOUT CE QUE VOUS AVEZ. ».

Rose de la tête aux pieds, je me tourne vers Ariana, les bras le long du corps, les poings serrés.

« Prête pour une vengeance ? »

D'oùùù, le blond c'était super cool ! Et elle voyait pas en quoi le manque d'originalité était un problème, elle voulait juste tester plein de choses différentes ! Puis au fond, ça la regardait pas, hein, soyons clairs sur le sujet, hein ! Elle haussa donc les épaules et réitéra lorsqu'Hamilton lui demanda s'il lui arrivait d'être polie, des fois. Lol. Polie. Evidemment qu'elle était envahissante, m'enfin.

— Hein ? Le dortoir des Eaux ? Il est dans l'autre aile du batiment en fait, fit-elle en pointant la direction, à cet étage !

Elle s'applaudit un peu elle-même, avant de sourire laaaargement. Elle était heureuse au final, c'était beaucoup plus compliqué qu'il n'y paraissait, surtout quand il fallait en plus sauter à cette hauteur... Elle regarda par la fenêtre pour vérifier. Wait. C'était haut, quand même… Wah...

Aria reporta son attention vers Adélaïde en haussant deux sourcils.

— OH UNE LIBELLULE. Je devrais essayer une fois. Et j'ai promis à Mitsuki qu'elle pourrait faire un tour sur mon dos quand je pourrai me transformer en éléphant, fit-elle avec un sourire.

Elle voulut lui proposer de faire un tour elle aussi quand elle entendit beugler derrière la porte. Par réflexe, elle resserra son gilet autour d'elle et cria en sentant la peinture poisseuse atterrir sur son visage et couler ensuite sur son corps.

Elle gardait la bouche grande ouverte yeux fermés, avant de les rouvrir pour apercevoir les deux types torse-poils. Elle trembla. Serra les dents.

— MAIS GRAVE. VIENS LA BONNASSE, ON VA LEUR DEFONCER LEUR TRONCHE DE CAKE LYOPHILISE.

La rouquine se planta sur ses jambes pour tirer Hamilton à sa suite, complètement hystérique. Elle aperçut les gars agresser d'autres meufs dans les chambres. Mais les tarés quoi !!

— OMG MAIS JE VAIS VOUS TUER. CES FRINGUES M'ONT COUTE UNE FORTUNE BANDE DE PAUVRES PETITS CROAAAAAAAAAAAAAAAAAA !

Evidemment, elle ne termina pas sa phrase, se contentant de se jeter sur eux en se transformant en grenouille rendue encore plus verte à cause de la peinture. Le premier se prit une vilaine tâche de peinture en pleine tête alors qu'il reculait en braillant, et Ariana l'utilisa comme appui pour sauter sur l'autre gars. Elle en profita pour lui coller sa langue dans l'oeil, avant de se retransformer (elle loupa sa transformation, atterrit par terre sur les fesses, juste devant eux) et de l'asperger d'eau comme elle le pouvait. L'eau sur le sol eut le mérite de les faire glisser un peu...

— ALLEZ LES MEUFS, CRAMEZ LEUR LA GUEULE !!

La violence, vous connaissez ? Bah v'la. C'est tout.

J’apprends finalement où se trouve le dortoir des Eaux. Ok, déjà un truc de plus sur l’institut. Pas mal.

L’idée de la libellule semble lui plaire intensément. Mon Dieu, cette fille est une boule d’émotions instantanées. Son cerveau semble réagir à 1000 choses à la fois. Mitsuki ? Qui est-ce ? Je crois l’avoir vu à l’anniversaire de la rouquine, mais rien de sûr. En tout cas, elle n’a pas tort sur l’idée de vouloir monter sur Ariana-éléphant.

Néanmoins l’attaque coupe le sujet métaphores. Et là, je découvre l’Eau en colère. Tremblante. Gueularde bien comme il faut.

AH QUAND MEME QUELQU’UN QUI REAGIT ENFIN AUSSI EXCESSIVEMENT QUE MOI DANS CES CAS LA. Je me laisse tirer, trop emportée pour capter le « la bonnasse » qu’elle emploie pour me désigner. C’EST PARTI ON VA LES ECLATER.

… L’attaque d’Ariana me laisse perplexe sur le coup. Mais… mais… mais… MAIS EN FAIT C’EST HYPER PRATIQUE. Personnellement si j’utilise mes pouvoirs je fais tout cramer… Pas terrible n’est-ce pas ? Quoi que… A entendre la rouquine, ce serait parfait.

Heureusement, les nanas se contentent de lancer divers objets aux garçons, et je décide que les imiter ne serait pas trop mal. M’engouffrant dans ma chambre, j’attrape la vieille paire de chaussure gagnée à la tombola et me fais un bonheur en sortant de les lancer sur les attaquants. Pof, une sur la tête, une autre sur le dos.

AH MAIS ON TOMBE TROP VITE EN RADE. Ok retour dans la chambre, farfouillage intensif. C’est shampooing et savon liquide en main que je sors et ALLEZ ON ASPERGE TOUT. Aaaaaaah ça fait mal dans les yeux hein ? MOUHAHA.

Oups. Problème. Avec l’eau d’Ariana, ça mousse carrément. Et je glisse. Et eux aussi. Et tout le monde en fait.

Deux minutes plus tard, nous voici tous les fesses par terre au côté de l’eau. Plein de mousse. Je me tourne vers l’Eau.

« Au moins… Cela aura peut-être nettoyé tes vêtements… »

Je lui souris, amusée, avant de me retourner, surprise, en entendant un « BOUM » sonore. J’éclate d’un rire franc en voyant l’un des garçons qui étaient entrés dans la chambre se frotter le dos en grimaçant, comprenant bien vite qu’en tentant de se lever il avait glissé.

« Eh bien dis-moi… Ne ferais-tu pas moins le malin soudain ? »

Ah oui, car j’ai l’air fine là, par terre au milieu de la mousse, c’est vrai…

ARIA MODE TROP VENERE LÀ RESPECT PLIZ. Fallait pas trop la chauffer la cocotte, elle avait beau être eau, elle pouvait carrément être ON FIRE quand il le fallait. Surtout quand des abrutis congénitaux au cerveau de mollusque atrophié par leur connerie lui balançaient de la peinture sur les fringues, notamment une tenue sexy toute neuve et sur un gilet en laine MAGNIFIQUE qu'elle ne pourrait décemment plus porter après tout ce bordel. Et si son téléphone a été abîmé dans la procédure, elle se jurait de leur écarter les cuisses pour leur arracher leur si adoré attribut de la virilité.

Les autres filles se chargeaient avec grand plaisir - et hargne - de balancer tout ce qui leur tombait sous la main, alors que d'autres mecs se mêlaient à la bagarre. Franchement, c'était un peu l'apocalypse dans le couloir, avec les jets de feu qui fusaient et…la mousse ? Ouais, Adé a eu la bonne idée de leur balancer du shampooing et du gel douche dessus. OH MAIS C'ETAIT PARFAIT.

— Ahah... t'as de l'espoir ! C'est complètement mort... t'inquiète, ils vont payer !

Ariana leur rebalança de l'eau dessus en se relevant et manqua de s'étaler avec ses petites chaussures à talons. Elle se remit debout et se rejeta sur le dos du gars tombé au sol pour le faire rouler dans la mousse. ALLEZ BOUFFE LA MOUSSE, BOUFFE LA ! Elle se retransforma en grenouille pour s'échapper plus facilement, arriva près d'Adélaïde et lui attrapa la main pour l'aider à se lever après s'être retransformée.

— Viens, j'ai une idée ! gloussa-t-elle en la traînant à sa suite en courant - et glissant - , jusqu'à sortie du couloir des feux, et juqu'à entrer dans la partie Eau des dortoirs...

Héhéhéhéhéh !

— HE LES GARS !! beugla-t-elle en donnant des coups contre les portes et en ouvrant celles qui n'étaient pas fermées à clé. LES FEUX SONT EN TRAIN DE SE METTRE SUR LA GUEULE, C'EST LE MOMENT D'ATTAQUER !! ALLEZ ! ALLEZ !! VIIITE !! TOUS SUR EUX ! FAITES DE LA MOUSSE !!!

Certains Eaux sortirent pour aller voir, très motivés, tandis que d'autres, plus timides, restaient planqués dans leur chambre. Mais à la vue d'Ariana et Adélaïde, leur curiosité ne tarda pas à prendre le dessus. Fière d'elle, Ariana observa les personnes de son dortoir courir jusqu'au dortoir des Feux avec du gel douche et du shampooing, puis tira Adélaïde à sa suite une nouvelle fois en gloussant. Elle resta en retrait en observant le capharnaüm dans le couloir d'à côté, à demi cachée derrière un pan de mur, morte de rire.

— Et maintenant on observe !!

Elle sortit son téléphone et prit des photos en jetant un oeil amusé à Adélaïde. Merde, euh, mais le couloir était vraiment en train de mousser ?!

Est-ce que cette fille est réellement Eau ? Non parce… Il me semblait qu’ils étaient censés être posés, les Eaux. Pas des dingues prêts à traumatiser les autres. Enfin bon… En tout cas, elle nous venge sacrément bien. Je la regarde en souriant, toujours assise dans la mousse. Elle se débrouille plutôt bien toute seule je trouve.

La revoici grenouille pour s’enfuir, puis humaine devant moi. Cette fois-ci, je me sens me tendre lorsqu’elle m’attrape la main et qu’elle m’entraine à sa suite. J’ai ce mélange d’amusement face à son comportement et de gêne de ce contact non désiré. Mais je suis sans rien dire, pour une fois, intriguée par la suite des évènements.

Nous marchons, enfin, glissons, jusqu’à ce que je suppose être la partie Eau et là… Ariana pète littéralement un câble. C’est un véritable appel à la guerre qu’elle lance aux élèves. Certains hésitent – et cela me confirme le fait que le comportement de la jeune fille n’est pas celui attendu d’une Eau, je persiste – quand d’autres osent venir jeter un coup d’œil. Finalement, la curiosité prend le dessus et les voici pratiquement tous dans les couloirs, shampooings et savons en main, lançant des tirs d’eau un peu partout. J’observe, étonnée de ce que nous venons de lancer, alors que la rouquine prend des photos, toute amusée. Je lui souris à son regard avant de reposer mes yeux sur le couloir de plus en plus rempli de mousse. Et là, à mon tour, une idée me vient.

« Reste-là je reviens. »

Et hop je me carapate dans le coin des Eaux, entrant dans une chambre inconnue. J’attrape une serviette accrochée à la porte de la salle de bain – désolée pour celle ou celui à qui cela appartenait – avant de rejoindre Ariana. Je pose le tissu au sol et me tourne vers l’Eau avec un grand sourire.

« Assis toi devant, tu pourras filmer! Je me mets derrière. »

Je la laisse s’installer et là, je pousse sur mes bras pour nous lancer dans une glissade au milieu de la mousse. Vu comment le sol est glissant, je n’ai néanmoins pas à produire de grands efforts. Et nous voici parti à toute vitesse dans le long couloir.

« POUSSEZ VOUS ON ARRIVE ! »

Oui parce que quand même, nous fonçons actuellement sur le regroupement d’élèves et que je n’ai AUCUNE idée de la manière dont nous pourrions freiner. J’éclate de rire alors que nous nous prenons de la mousse sur la tête. Je m’en fiche actuellement, la glissade est bien trop marrante.

OUAIIIIIIS ALLEZ, QUE CA MOUSSE, QUE CA MOUSSE ! Ariana devenait littéralement folle. Elle profita des secondes d'accalmie pendant qu'elles couraient à nouveau vers le couloir des Feux pour attacher son large gilet en laine avec un noeud, histoire de ne pas le perdre. Elle échangea un regard amusé avec l'autre rouquine et l'observa avec un interrogation repartir en sens inverse pendant qu'Ariana continuait à prendre les photos. Bah alors, qu'est-ce qu'elle préparait au juste ?

Lorsqu'Hamilton revint, Aria l'interrogea du regard une seconde fois, avant de comprendre. Elle alluma le mode caméra de son téléphone :

—Oh mon dieu, oh mon dieu, ça va être trop bien, gloussa-t-elle en sautillant, avant de s'installer sur la serviette. Je pensais pas que t'avais de si bonnes idééééééééEEeesss !

Elle cria lorsqu'Hamilton se jeta sur elle pour les pousser dans le couloir, qu'elles traversèrent en glissant sur le sol.

—WOUHOUUUUU, PRENEZ VOUS CA DANS LES DENTS LES FEUX !! fit-elle en balançant un jet d'eau vers un mec qui leur barrait le passage et en tentant de protéger son pauvre téléphone des nombreux projectiles qui s'échangeaient dans le couloir. Mais c'est une zone de comb-dfv berk, de la mousse !

Elle toussota en grimaçant, avant de perdre l'équilibre et s'étaler dans l'eau et la mousse au sol. HOP, STRIKE !

—Hamilton, où t'es, je t'ai perdue, où tu es ?!

Des cheveux roux, des cheveux roux, où elle était ?! (Heureusement que son téléphone était waterproof, en fait. Ca lui faisait penser qu'un jour, elle l'avait fait tomber dans la cuvette des toilettes...)  

Elle se retourna sur le ventre, affalée tel un phoque polaire sur sa banquise, et rampa vers la rouquine.

—Viens, faut qu'on fuie ! fit-elle avec le plus grand des sérieux, alors qu'un sphère de glace passait à trois centimètres de son oreilles. GASP ! Mais c'est des psychopathes les Eaux, pourquoi ils sont jamais marrants quand j'veux faire une fiesta dans les couloirs, hein, pourquoi ?!

Elle tenta de se relever en glissant, s'appuyant contre le mur, trempée de la tête aux pieds et regarda d'un côté et de l'autre. Et un morphe-chauve-souris, un !

—J'ai p'tetre du colorant alimentaire dans ma chambre, en fait, fit Aria un peu trop fort - un feu lui sauta dessus pour essayer de l'empêcher de partir. HE MAIS NAN JE SUIS PAS D'ACCORD !

Glissaaaaade…. Euh… Mur ?

« BAM »

Oui. Mur. OUTCH.

Je me relève difficilement en grimaçant, posant mon regard noir sur le mur que je viens de me prendre, me promettant intérieurement une revanche. Comment cela il est impossible de se venger d’un mur ? Donnez-moi un marteau ou une hache et nous en reparlerons.

En attendant, j’ai perdu la rouquine. J’observe autour de moi, cherchant soit sa chevelure, soit une grenouille en fait, mais ne vois qu’oiseaux divers, une chauve-souris, un matou, un chien et… un cheval. Oui, oui, un cheval. C’est assez drôle à voir d’ailleurs. Je doute que la personne ait été très inspirée en se transformant, car les sabots semblent glisser plus qu’autre chose avec la mousse. Mais il faut reconnaitre une chose, pour charger, c’est bien pratique.

Enfin, cela ne m’apprend pas où est Ariana ! Ce n’est pas possible cela ! Elle a perdu l’équilibre pendant la glissade, et disparu dans la mousse.

Mais soudain, un cri attire mon oreille et mes yeux. Ça y est, je l’ai repérée. Néanmoins, une véritable basse-cour nous sépare, ainsi que quelques lancées de boules de glace, voire de stalactites volantes – ils sont sacrément fêlés quand même – et l’atteindre risque d’être difficile. OH. Qui est ce gars qui lui a sauté dessus, là ? JE VAIS LE TUER.

Allez Hamilton, il faut se bouger ! Une idée… Une idée… UNE IDEE. MAIS OUI.

Je fonce vers le tas, rentrant dedans en grimaçant, manquant de tomber à plusieurs reprises et – je prie pour ne pas me ramasser – je saute sur le cheval, m’agrippant à la crinière pour me hisser plus facilement. L’animal – qui est en fait un humain, mais n’allons pas me perturber – s’agite, tentant de me faire basculer, et finalement en dernier recours se met à courir devant lui, les sabots partant tantôt à gauche, tantôt à droite selon les bons vouloirs de la mousse. Il aurait tout aussi bien pu se retransformer, mais apparemment, l’idée de me faire me ramasser grâce à sa forme animale l’amuse plus. Enfin, il réagit comme je l’avais voulu, fonçant droit sur Ariana. Et alors que nous passons à côté d’elle, je me penche et envoie un coup de pied sur le garçon qui l’avait attaquée, tendant au passage ma main pour attraper la jeune fille par le col. Je la traine un moment au sol et je me laisse ensuite glisser à mon tour, atterrissant peu délicatement sur les fesses à ses côtés. Qu’est-ce que je vais avoir comme bleus… !

Je me tourne vers le cheval qui s’est retransformé, et comprends soudain pourquoi il – enfin il se trouve « elle » - était restée animale. La fille est minuscule, 1m45 tout au plus et pas bien épaisse. Elle me fusille du regard, marmonne un « Tarée », avant de s’éloigner dans le couloir des Eaux.

« Oups. Je viens de t’enlever une amie je pense. »

Je me tourne vers Ariana avec un léger sourire. Qu’allons-nous faire maintenant ? Retourner dans la bataille ? Ou enfin nous poser ? N’avait-elle pas rencard ? Ah mais, elle avait crié quelque chose me semble-t-il…

« Je t’ai entendu crier un truc après la glissade, mais je n’ai pas entendu. Tu parlais de ? »

MAIS QUE CE MALOTRU LA LÂCHE, WESH. Aria tentait de se débattre avec le feu, roulant boulant dans la mousse, avec toute la ménagerie des Eaux à côté qui se défendaient comme des forcenés. Elle entendit un hennissement furieux, et, d'un même geste avec le feu, dont elle tenait la tête éloignée d'elle presque par le nez - glam, isn't it -, ils levèrent les yeux vers le bordel qui commençait à être créé dans le couloir. Encore plus. Enfin, vous avez compris, quoi.

Hamilton est sur le cheval, en train de faire du rodéo ; et elle se dirige droit sur eux. Le gars fait un brusque écart sur le côté tandis que la rouquine attrape Aria au passage, qui s'accroche comme elle le peut au bras qui la traine par le col.

—Héé, tu vas m'arracher ma nuisette !!!!!

Evidemment, faut que tous les mecs regardent dans leur direction. Sans doute aperçurent-ils les dessous de la jeune Eau qui se faisait traîner sur le sol sans délicatesse, la moitié de sa nuisette retournée. Heureusement qu'elle avait son gilet.

Lorsqu'Hamilton tomba sur le sol, elle manqua de l'écrabouiller. Ariana se pressa de remettre ses vêtements en place, le visage écarlate. Et le cheval se retransforme.

—Merci pour la balade !

L'autre partit simplement en les fusillant du regard.

—Bah, je comprends pas pourquoi... C'est pas sa culotte en dentelles que tout le monde a vu, hein !

Puis elle se retourna vers Hamilton, lui prit le poignet - sorry - et lui tapa dans la main de l'autre.

—C'était bien trouvé, bravo !!

Elle était pas trop rancunière, Aria. T'façon, elle avait déjà posé nue, elle n'est pas si pudique... enfin je crois, j'en sais rien, me demandez pas, en fait.

Puis elle se releva en glissant et tendit sa main à Hamilton pour l'aider à se relever. Elle était déjà pleine de courbatures, mais elle n'était pas prête de s'arrêter là.

—Suis moi simplement, j'ai une autre idée de génie !

Le truc, c'est qu'il fallait retraverser le champ de bataille dans l'autre sens… Elle réfléchit une seconde, avant de se baisser pour éviter un jet de flammes.

—OH VIENS, VIENS, CE SERA TROP DRÔLE !!

Ce qu'Aria trouvait drôle était généralement une très mauvaise idée. Elle fit donc signe à Hamilton de la suivre et courut en glissant jusqu'à une chambre ouverte.

—C'est la chambre d'un de mes exs, lâcha-t-elle simplement en arrachant la tringle à rideaux, sans le MOINDRE remord.

Elle prit quelques vêtements dans le tas et lui demanda de l'aider à faire des noeuds bien solides. Elle tira dessus plusieurs fois pour vérifier  que tout tenait bien, puis ouvrit la fenêtre et coinça la tringle en travers de la fenêtre. Bien. Ca ne devrait pas poser de problème.

—J'espère que tu sais descendre sur une corde... dit-elle joyeusement. La salle commune est en dessous, les fenêtres sont tout le temps ouvertes en ce moment. On pourra passer par l'étage du dessous pour remonter vers le couloir des Eaux...

Puis elle entendit crier dans leur dos et aperçut son ex. ZUT.

—Hé toi !!!!
—Zut. ADIEUUUU, ON SE RETROUVE EN BAAAAS !

Et elle s'accrocha à sa corde de fortune pour descendre jusqu'à l'étage du dessous, disparaissant à la fenêtre. Elle crut que la tringle allait céder. MAIS MÊME PAS, HEHEHEHE !

Voilà.

—ALLEZ HAMILTONNOUILLETTE, REJOINS MOI !! C'EST SAF-- AHh merde ! C'EST BON TOUT VA BIEN !

Elle venait juste de manquer de glisser en essayant de poser le pied sur le rebord de la fenêtre de l'étage du dessous. Tranquille.

—Salut tout le monde, salua-t-elle dans la salle, sous les regards estomaqués des gens présents.

Puis elle passa par la fenêtre pour entrer, s'épousseta l'air de rien, avant de remettre la tête dehors :

—BON HAMILTON BOUGE TOI.

Grand sourire aux autres. Allezzzz, faut qu'elle aille chercher ce foutu colorant alimentaire.…! (Et peut-être quelques gâteaux à la cafète, juste comme ça.)[/color]

Alors que je la sauve du Feu, Ariana ne se préoccupe que de sa nuisette… Damned. Je lève les yeux au ciel puis lui accorde un sourire alors qu’elle s’indigne de la réaction de la jeune fille/jument. Et soudain, ses doigts se referment sur mon poignet et sa main rejoint la mienne dans une tape de victoire. Un mélange de joie et de dégoût vient s’insinuer en moi. Le rejet du contact mêlé à la fierté que m’apporte le fait d’avoir accompli quelque chose – aussi stupide que ce quelque chose soit – avec quelqu’un.

Je ne saisis néanmoins pas la main tendue qu’elle m’offre pour m’aider à me relever. Je ne m’en sens pas capable, je préfère me débrouiller seule. Désolée Ariana. Je galère un peu à cause de la mousse mais parviens finalement à tenir sur mes jambes au bout de quelques secondes. Quand tout à coup, une autre idée vient illuminer le regard de l’Eau, d’une lueur inquiétante d’ailleurs. Par contre, ce serait sympa qu’elle prenne moins de temps pour réfléchir. Non, parce que quand même, les boules de feu et les stalactites volantes deviennent dangereuses !

Et soudain elle se met à courir, m’intendant de la suivre. Je m’exécute – pourquoi d’ailleurs ? no idea, peut-être une vieille envie de m’amuser qui me pousse à me lancer à la suite de la rouquine – et nous atterrissons… dans la chambre d’un de ses exs. Sérieusement ? Dans quoi m’entraîne-t-elle encore ?

- Mais-

Je m’apprêtais à protester face à l’arrachage intempestif de tringle de rideau mais la curiosité prend le dessus et je la laisse faire. Après tout, ce n’est pas ma chambre alors je m’en fiche un peu, voyez-vous ? Ariana crée ensuite une sorte de corde avec une bonne dose des vêtements traînant dans la pièce et coince le tout en travers de la fenêtre. Descendre sur une corde ? Un petit sourire malin étire mes lèvres. Si tu savais combien de fois je l’ai fait !

- Pas de souci ! Par contre, pourrais-tu m’expliquer ton-

Une exclamation derrière moi me fait sursauter et me coupe dans mes paroles. L’ex en question s’est pointé – logique, c’est sa chambre – et, ni une, ni deux, voilà Ariana disparue. LA LACHE ! Je me promets mentalement de l’étrangler une fois en bas et dégage d’un coup d’épaule la main du garçon qui s’était refermée dessus en une vaine tentative de m’empêcher de m’enfuir, faute d’avoir pu bloquer l’Eau.

- Tu me touches, je te brûle, le menacé-je très sérieusement.

Il recule d’un pas, surpris, et j’attrape à mon tour la corde pour descendre jusqu’à la salle commune où la jeune fille m’attend – son cri en témoigne. Hamiltonnouillette ? No way. Je vais la fracasser. Je pose mes pieds sur le rebord de la fenêtre de la manière la plus naturelle possible – on ne perd pas les vieilles habitudes, n’est-ce pas ? – et pose un regard noir sur Ariana en me glissant dans la pièce. Faisant fi de l’air perplexe des élèves face au duo étrange que nous composons, je m’emporte pour la première fois depuis un moment.

- NON MAIS N’ES-TU PAS MALADE ? ESPECE DE TRAITRE ! TU M’AS ABANDONNEE AVEC TON EX ! IL A MEME ESSAYE DE M’EMPECHER DE VENIR ! ET HAMILTONNOUILLETTE ? TU REVES MA GRANDE !

Je croise les bras sur ma poitrine, toujours en rogne, mais encore une fois titillée par l’idée qu’a eu Ariana. Après tout, je ne sais toujours pas ce qu’elle a dans la tête, cette dingue !

- J’espère pour toi que ton idée est géniale, et tu ferais mieux de me l’expliquer rapidement !

Dans mes yeux brille encore une lueur amusée, et je sais que mon ton n’est pas totalement remonté. Je dois bien reconnaitre qu’au moins, grâce ou à cause d’Arian - je ne sais pas, je ne sais plus - au moins ce soir je ne suis pas une loque solitaire.

Elle mettait du temps à descendre, Hamiltonnouillette, en vrai. C'était vraiment pas cool. Elle allait finir par se faire attraper, si ça continuait ! Et Aria savait pas vraiment comment elle était censée faire pour regrimper jusqu'à l'étage du dessus. Elle croisa donc les bras et tapota du pied, avant de jeter un oeil sur les personnes hébétées qui la mataient dans la salle commune. Elle resserra son gilet trempé autour d'elle.

—Roh, quoi, vous avez jamais vu une meuf en nuisette... trempée…et recouverte de peinture ??

Et de mousse. Ne pas oublier la mousse. Elle jeta encore un coup d'oeil dehors et, enfin, Hamilton débarqua. Elle fut tellement heureuse qu'elle la laissa d'abord déverser sa colère avant de s'élancer vers elle pour lui faire un câlin - C'ETAIT UN REFLEXE, UN REFLEXE, PATAPER MADAME. Elle s'éloigna d'un bond en se souvenant qu'elle n'avait pas trop l'air de l'apprécier.

—Mais si, Hamiltonnouillette, ça te va TRES bien ! Sinon, tu préfères quoi, Mimi ? Tonouille ? Milie. Hamil ?

Elle sentait qu'elle allait perdre patience, alors elle l'invita à la suivre en trottinant.

—Alors : non je suis pas malade, et désolée, mais fallait suivre plus vite, hein, t'as qu'à courir, c'est pas ma faute si tu suis pas le rythme ! ENSUITE. Mon idée GENIALE. On va prendre du colorant alimentaire à la cafétéria et leur balancer dessus !! On peut même prendre des bacs à glaçons et les mettre dans le fond du lit des feux omg. Les garçons, hein !

Ouiiiiii les glaçoooons ! ALLEZZZZ C'est une bonne idée nan ?!!

—ALLEZ VIENS ON VA TOUT DECHIRER. OHOHOH.

Elles croisèrent quelques personnes dans les couloirs, qui les regardèrent, l'air de se dire "mais euh wtf ??" mais Ariana était bien trop concentrée sur son objectif. Elle s'élança dans les escaliers qu'elle descendit quatre à quatre, avant d'atteindre enfin la cafétéria tant aimée. Elle fit signe à Hamilton d'être discrète.

—T'es marionnettiste ou invisible ? lui demanda-t-elle en se planquant derrière une porte, à voix basse. Parce que si t'es invisible, c'est le moment de passer en scred pour atteindre les cuisines !! Et sinon, bah, euh.... Fais diversion !!!

Puis Aria se transforma en grenouille et la planta là, alors qu'elle cherchait à passer derrière le personnel de cuisine qui s'affairait à ranger la cafétéria.

Câlin. Urg. Pas d’alerte avant. Rien. Juste un câlin. Nous sommes loin de l’accord visuel auquel j’ai commencé à m’habituer avant un quelconque contact. Avant même que je ne la repousse plus ou moins violemment, Ariana sautille en arrière pour se détacher de moi. Oh. Aurait-elle retenu que je ne suis pas trop contact ? Elle ne doit pas être si insupportable que cela finalement cette fi-

… Quels sont ces surnoms impossibles qu’elle me propose ?

- Hamilton. Juste Hamilton.

Ma tête blasée se refait vite surprise alors que la boule d’énergie trottine tout en répondant à mes remontrances précédentes. Je soupire et la suis. La descente à l’arrache, le rythme rapide pour ne pas se faire attraper dans l’enchainement de débilités que nous faisons… J’aurais presque l’impression d’être de retour au foyer. En moins glauque, il me faut bien l’avouer.

Wait. Soit je suis devenue aussi tarée qu’elle, soit son idée est réellement géniale. Je n’ai aucune idée de laquelle des deux propositions me plairait le plus, finalement. Tout ce que je sais, c’est que, sans trop savoir pourquoi, je la suis. Avec un petit sourire amusé en plus.

Je m’amuse à entretenir mon air le plus sérieux et froid alors que nous croisons des élèves aux regards plus ou moins étonnés, plus ou moins choqués. Deux nanas couvertes de mousse, dont une encore en nuisette, ce n’est pas super habituel apparemment. Même à Terrae.

Puis nous arrivons à la cafétéria et nous cachons derrière la porte – nous sommes en planque, vous dis-je ! – et je secoue la tête.

- Je suis mario-

J’ouvre de grands yeux en voyant une grenouille s’échapper au loin, vers la cuisine.

- Mais-

Non, Hamilton, elle t’a dit de faire diversion. Pas d’être prise pour une folle à parler toute seule, plaquée contre une porte. Je passe une main sur mon visage, agacée. Quelle est cette soirée que je passe, sérieusement ?! Cette fille est à la fois un tourbillon, une tornade de joie et d’énergie pure… mais aussi d’ennuis plus gros qu’un éléphant ! Je soupire. Le temps presse, elle risque de se faire repérer si j’attends encore. Une diversion. Une diversion vite !

Ah. J’ai trouvé.

Je rentre complètement dans la cafétéria où seuls une dizaine d’élèves se trouvent encore. Il est un peu tard et grand monde est déjà dehors où dans leur chambre – notamment en train de continuer la guerre laissée à l’étage des Feux et Eaux, si vous voulez mon avis. Je me plante devant le premier type que je croise et pose mes poings sur mes hanches.

- Eh ! Toi là ! lâché-je assez fort pour attirer l’attention.

Quelques têtes se tournent. Ce n’est pas suffisant. Le personnel de cuisine avait vaguement jeté un coup d’œil, mais était vite retourné à ses occupations. Pendant ce temps, l’inconnu me dévisage en fronçant les sourcils.

Ok. Tentons le tout pour le tout.

Je lui colle une baffe en criant un peu plus fort.

- Mais n’as-tu pas honte ? METTRE UNE FILLE ENCEINTE PUIS TE BARRER COMME UN LACHE.

Arg. Je ne sais vraiment pas crier. Ma voix dérape à la fin de ma phrase. Le gars me regarde avec un air paniqué et des yeux ronds.

- Qu’est-ce que tu-

Et puis une fille arrive et le coupe dans sa phrase en l’attrapant par le bras et le poussant en arrière. La nana s’arrête devant moi et me fixe d’un air noir.

- TU T’ES TAPEE MON MEC ET T’OSES VENIR GUEULER ICI. JE SAVAIS QU’IL ME CACHAIT QUELQUE CHOSE. JE LE SAVAIS.

Ah. Ça y est le personnel rapplique. Au moment où elle va m’en coller une. Parce qu’elle va m’en coller une, je le sens venir.

- Qu’est-ce qu’il se passe ici ?!

Je jette un coup d’œil inquiet vers les cuisines alors que la fille continue de crier, à la fois sur son copain et moi je pense, et que le personnel tente de comprendre ce qu’il nous prend.

- ET POURQUOI TU ME REGARDES MEME PAS LA ? TU T’EN FOUS EN FAIT !

Regard jeté à la nénette, retour sur les cuisines, puis la nénette, puis les cuisines. AH. LA VOILA.

- Ravie d’avoir brisé ton couple ! Tu devrais surveiller ton copain, il a l’air de fricotter avec pas mal de filles. Bisous mon chou ! lâché-je à l’attention du garçon toujours ahuri.

Quitte à semer la zizanie, autant le faire bien. Je pars en courant sous les regards perplexes d’à peu près tout le monde et attrape sans ménagement Ariana par le bras.

- Allez miss Bond, lâché-je – laissez-moi me la jouer espionne, ok ? - Il faut foncer avant que je ne me fasse frapper !

Je la tire sans ralentir le pas jusqu’au hall où je m’arrête pour reprendre mon souffle. La fusillant du regard, j’agite un index réprobateur devant son nez.

- Est-ce que tu souhaites ma mort ? Arrête de t’enfuir en me laissant en plan ! Je vais te laisser finir la soirée seule tu vas voir !

Je lève les yeux au ciel et croise les bras sous ma poitrine, encore agacée. Agacée, mais curieuse. Fichue curiosité.

- As-tu réussi à avoir tout ce qu’il nous faut ?

Hamiltonnouillette n'aimait décidément pas les surnoms. C'était pas grave, elle lui en trouverait un cool !! ELLE TROUVERAIT. Ariana trouvait toujours, peu importait le temps que cela prenait, bwahaha. Elle gloussa en entraînant sa nouvelle copine derrière elle (désolée Adé) jusqu'à se cacher derrière une porte de la cafétéria. Hmmmm, ça semblait assez compliqué pour le coup... Comment comptait-elle parvenir à traverser toute la pièce sans se faire repérer, pour récupérer les outils dont elle avait besoin ? Hmm. Elle regarda Hamilton, et se dit que si elle l'avait suivie jusque-là et avait survécu, c'est qu'elle devait être très intelligente, comme elle (lol). DONC ELLE DEVRAIT S'EN SORTIR.

Elle l'écouta à peine lui répondre qu'elle se trouvait être marionnettiste, puisqu'elle était déjà partie gambader comme la grenouille qu'elle était sur le sol. De toute manière, elle ne pouvait pas faire grand-chose de plus, hein. ELLE SAVAIT QU'ELLE GERERAIT. C'ETAIT UNE ROUSSE COMME ELLE. TKT.

Derrière elle, elle entendait déjà le grabuge causé par Hamilton et croassa de rire. Elle se transforma dans la cuisine alors que tout le monde sortait voir ce qu'il se passait - les ragots, tout ça, vous savez. Aria récupéra ce dont elle avait besoin dans les poches détrempées de son gilet. Elle rit un peu trop fort en voyant que la copine du mec manquait de coller une baffe à Hamilton - pas sa faute, c'était beau - et se fit capter. Donc elle se mit à courir. Et Hamilton la choppa au passage pour COURIR ENCORE PLUS VITE MAIS OMG POURQUOI CA ALLAIT SI VITE.

Essoufflée, elles tournèrent à l'angle d'un couloir et Aria brandit ses trophées : des colorants alimentaires et un bac de glace au caramel au beurre salé. QUOI. UN PROBLEME ? wesh

—Et voilàààà !! ..... La glace, c'est pour après. VIENS ON VA DANS MA CHAMBRE VITE VITE VITE ILS NOUS SUIVENT.

Elle sautilla jusqu'à l'ascenseur - laissez tomber, elle avait mal aux guiboles - et sautilla sur place alors qu'elle voyait la furie les poursuivre. Elle paniqua et poussa Hamilton dedans, apeurant les personnes qui tentaient d'en sortir.

—Paaaaardon c'est une urgence !!

Vite le bouton fermer fermer fermer MAIS MARCHE OMG NOW. La fille faillit pouvoir s'engouffrer, mais Aria lui envoya un jet d'eau à la tête pour qu'elle recule.

—Ouuuuuuf. C'est bon. Libérées. (Déliv-)

Elle s'appuya un instant contre la paroi pour reprendre son souffle et la porte s'ouvrit à l'étage des Eaux/Feux. Elle l'entraîna en courant - toujours - vers sa chambre et disposa son matériel par-terre.

—Récapitulons : colorant, eau, capotes, cuillère.

Regard vers Hamilton.

—La cuillère, c'est pour la glace, assura-t-elle.

ALLEZ AU BOULOT NOW, FAUT FAIRE DES BOMBES A EAU (ohohohohoh).