Je dois aujourd’hui rejoindre Angie. Ces derniers temps, j’ai la sensation de passer mon temps avec lui. Ce sera néanmoins la première fois que je le retrouve dans sa chambre. La première fois que je rentre dans la chambre d’un garçon en fait. Je dois d’ailleurs reconnaître que cela me donne un certain trac. Pourtant, nous devons simplement choisir nos déguisements pour le carnaval. Mon ordinateur ayant lâché, Angie m’a proposé qu’on regarde ensemble. Et puis, cela sera plus drôle je pense. Je ne sais pas encore trop ce qui me tente, peut être un personnage de conte. Et lui ? En quoi va-t-il se déguiser ? Enfin, nous verrons bien. Quelle heure est-il ? 13h30. Oups. Je vais être en retard si je ne me dépêche pas.

Déjà, m’habiller pourrait être bien. La chaleur d’août est étouffante, malgré le fait que les murs épais de Terrae conservent un minimum de fraîcheur. Je ne suis pratiquement pas sortie depuis le début de l’été, craignant d’exposer ma peau de porcelaine autant qu’appréciant de rester dans mon lit à lire lorsque je ne travaillais pas à librairie. Pour ne pas trop subir la chaleur, je farfouille dans mon armoire à la recherche d’une robe légère. J’en sors une cintrée au niveau de la taille et patineuse sur le bas, ce qui permet d’avoir les jambes au frais. Je l’attrape et la pose sur mon lit avant d’aller me laver. Sortie de la douche, je sèche rapidement mes cheveux et enfile la robe. Pour une fois, pas de bleu, mais du rose pâle. Ce n’est pas trop mal de varier de temps en temps. Je regarde l’heure. Mince, je suis en retard. Nous devions nous retrouver vers 14h, il est 14h15. J’attrape mon portable et sors en abandonnant le désordre de ma chambre.

Dans les couloirs, il fait frais, c’est agréable. Je cherche la partie Terre, nerveusement. J’ai la sensation que les gens me dévisagent. Peut-être est-ce le cas. Je dois avoir l’air d’une novice avec mon air perdu.  Enfin je trouve le bon endroit. Reste à trouver la chambre d’Angie. Comment s’appelle-t-il déjà ? Petit je crois. Je cherche un moment, avant d’enfin trouver.

« Charlie-Ange Petit ? » je murmure.

Il ne s’appelle en fait pas Angie. Je me disais aussi que cela ne ressemblait pas à un vrai prénom mais plutôt à un diminutif. Charlie-Ange donc. Original. Je hausse les épaules et lève la main pour toquer.

Arg. Ce n’est pas facile. Je crains de le déranger. Enfin, nous étions censés nous voir, et je suis en retard en plus. Il doit même m’attendre. Je passe nerveusement une main dans mes cheveux encore mouillés et, prenant mon courage à deux mains, ose enfin toquer.

T’sais que tu devrais GRAVE ranger tous ces cartons un jour ? Non, j’dis ça comme ça mais avant t’avais un soixante-dix mètres carrés et là t’en a vingt-cinq. T’as fait genre un gros effort hein ? il ne te reste plus qu’une vingtaine de cartons empilés dans l’coin qui te bouffent bien le tiers de ta chambre. Heureusement que t’as pas de coloc… Sachant qu’la jeune femme allait venir dans ta chambre t’as fait grave le ménage, t’as poussé toutes tes fringues pas tout à fait sales sous le lit et t’as même changé le drap. T’as pas ouvert la fenêtre par contre, il fait trop chaud dehors. T’as même laissé les volets entrebâillés pour pas qu’il fasse trop chaud. Bon après clairement ça donne une ambiance louche mais t’es plus à ça près… Puis c’est Oksa quoi, elle peut bien voir ton habitat naturel. Elle commence à assez bien te connaitre pour savoir que t’es plus caleçons que slips (elle voulait savoir tu lui as dit !)
Vous passez trop de temps ensemble en fait c’est fou. Maintenant tu réalises que dès que vous vous emmerdez c’est une très bonne excuse pour appeler l’autre et l’entrainer dans… A peu près tout et n’importe quoi. Puis elle te soutient vachement depuis ton chagrin d’amour, peut-être qu’elle essaie de se rattraper pour la fois où elle a essayé de te balancer un pot de fleurs à la figure ? (heureusement qu’elle ne sait pas viser…) ou alors pour s’être évanouie sur toi ? Tu devrais lui proposer de te dédommager en nature une fois pour voir la tronche qu’elle tirerait. Ça serait drôle !
Par contre j’veux pas te stresser mais elle est en retard, tu crois qu’elle a eu une panne d’oreiller ? T’espères que non quand même, parce que bon t’aurais rangé tes magazines d’art pour rien… Oui, chacun ses secrets, toi c’était l’art, certain les pornos. On ne jugeait pas, t’avais arrêté de te présenter comme un artiste pour devenir un humble chauffeur de taxi, sous le lit avant d’être dérangées par tes habits se trouvaient ton nécessaire à peinture et tes crayons à dessin. Tes carnets à croquis avaient aussi trouvé leur place à cet endroit, tu en avais marre qu’ils te narguent alors que l’inspiration t’avait quittée.
Tu finis par sérieusement t’faire du souci pour ton amie, s’était-elle perdue ? La connaissant l’idée n’était pas si insensée, elle avait souvent la tête dans la lune. Tu te décidas donc à partir à sa recherche faisant fi de toute logique. Si l’un des deux se perdaient, si les deux étaient en mouvement ça devenait bien plus dur de se retrouver. Heureusement la bleusaille se trouvait derrière ta porte. Tu ne pus retenir un sourire amusé :

« Alors ma p’tite t’as l’air impressionnée, ne m’dit pas que c’est la première fois que tu toques à la porte d’un garçon… »

Si seulement tu savais Angie.

Ok. Bravo Angie. Une seule phrase et je passe de blanche comme du plâtre à rose comme une pivoine. Génial.

« Bien sûr que non. J’ai même carrément l’habitude. »

Bref. Je ne suis pas du tout convaincante. Je hausse les épaules. Sans déconner, pourquoi je l’aime bien ce type ? (après toutes ces rumeurs qui courent je me sens obligée de le dire : « Aime bien », pas « putain pourquoi je suis hyper in love de lui ». Voilà). Il me vanne tout le temps. Je soupire intérieurement.

« Bon. Je suis venue pour que tu m’embêtes ou pour choisir ces déguisements ? »

Mon sourire ne tarde pas à revenir. Il se fout de moi et ça me fait rire en plus. Ah. C’est peut-être pour ça que je l’aime bien. Parce que je dis mes conneries et que je ris sans qu’il me dévisage, sans qu’il me trouve à côté de la plaque. Enfin si, probablement, mais il semble s’en ficher complètement. Faut dire qu’il est sacrément à l’ouest lui aussi de temps en temps.

Enfin je rentre dans sa chambre à sa suite et découvre une pièce sombre et étrangement bien rangée. Je soulève un sourcil. C'est à ça qu'une chambre de mec ressemble? Hum. Soit il est maniaque, soit il a flippé que je trouve sa chambre crade. Cela me tire un sourire. En tout cas, même si l’ambiance vire à la Twillight (vous savez, ne pas exposer les vampires au soleil, toussa toussa), j’apprécie la fraîcheur de la pièce. J’ai dû être vampire dans une autre vie, vu la guerre que je livre au soleil, rayon de l’enfer d’après moi.

Je cherche à m’assoir et m’installe finalement sur la chaise de bureau se trouvant… à côté du bureau. Logique. J’observe Angie d’un œil critique. Je m’inquiète un peu à vrai dire. Mon nouvel, et unique, ami a failli mourir deux fois et en plus s’est apparemment pris un râteau. Oublions le fait qu’une des deux fois où il a failli mourir, c’était par ma faute (les pots de fleurs peuvent être super dangereux, faut pas croire). La première fois, il s’était fait mal tout seul. Deux pas doués potes, génial. Lequel des deux mourra en premier ? On devrait peut-être en faire une émission de télé réalité tient. Brefouille. Après il y a eu cette histoire avec une dénommée Mitsu qui était là à la fête. Ah oui ! Cette fameuse fête. Où Angie a fini saoul, lui qui ne boit jamais. Et où Ipiu lui a roulé dessus. Et où il a appris que Mitsu avait un mec. Qui est Ys en plus. Mon patineur. C’est fou comme le monde est petit. Enfin, surtout Terrae. Quoi qu’il en soit, notre chauffeur de taxi a toutes les raisons du monde d’être complètement au fond du gouffre, il est donc logique que je m’inquiète.

Néanmoins, nous ne sommes pas là pour ça. Et puis, je sais déjà que c’est une sale période pour lui. Pas besoin d’en rajouter avec des « Tu tiens le coup ? », « Ca va aller ? ». S’il veut pleurer, gueuler, s’énerver, il peut et il le sait. En tout cas j’espère bien qu’il le sait.  Mais là tout de suite, il faut lui changer les idées. C’est donc avec mon sourire de gamine que je lui demande :

« Alors ? Prêt à te déguiser ? T’as des idées ? »

[Hrp: Désolée ce post c'est n'importe quoi x)]

« Je savais que tu étais une femme d’expérience ! »

Tu ne peux pas d’abstenir de la taquiner, ses réactions quand tu y fais attention sont tellement mignonnes. Elle rougit et ça lui fait une tête tellement mignonne que t’as envie de continuer à l’embêter, mais elle te fait fermer ta grande bouche, avec elle tu te sens assez à l’aise pour dire des bêtises, pour ne pas te surveiller. Pour être naturel ? Non, ta nature n’est pas extravertie, t’es même timide… Mais quand tu te sens en confiance, tu t’ouvres… Et ce n’est pas une métaphore érotique. Pourtant avec elle ça passe, t’es peut-être pas naturel mais tu es toi-même.

« Pour les deux mon commandant ! » réponds-tu avec un grand sourire idiot quand elle te demande pourquoi elle est venue.

Tu la laisses entrer dans ta chambre de vieil ours mal léché. Elle doit se douter que la chambre d’un mec ne ressemble pas à cette vision rangée. Sauf que tu passes plus assez de temps ici pour réellement déranger. Tu ne dessines plus, ne peint plus… Tu te forces à sorttir, à travailler et à voir du monde pour ne pas retrouver ton état de décomposition d’il y a quelques mois. T’as dit un truc du genre ‘’plus jamais’’ quand tu as foutu les pieds à Terrae. Alors même si ça n’allait pas, tu te forçais à faire comme si tout allait bien, quand atteindrais-tu le point de rupture ? Quand retrouverais-tu l’inspiration ?

Tu la voies qui observe avec soupçons la chambre rangée et t’es vraiment fier de ta ruse, tout le bazar est planqué sous le lit… Bon certes il y a un mur recouvert de cartons, mais t’as tout si bien aligné qu’on dirait que c’est fait exprès. T’as géré mec.
D’habitude t’étais plus tu genre à faire tes costumes toi-même. T’étais pas le plus doué en couture mais t’avais une assez bonne vision en trois dimensions et t’arrivais à trouver des systèmes D pour que ça rende bien. Après clairement fallait pas regarder dans le détail… t’étais pas un pro et quiconque s’y connaissait aurait trouvé à critiquer… Mais le résultat était là, moins solide que cela aurait pu l’être mais qu’importait.
T’as réfléchi pas mal avant de te décider, ton esprit à pas mal vagabondé. T’avais pensé te déguiser sérieusement au début, genre un truc anthropomorphe comme un loup-garou ou un centaure… Pourquoi pas un lama ? Ce serait assez inédit… Mais tu avais décidé que tu ne coudrais pas cette fois-là, tu avais délaissé tout ce qui avait un attrait à l’art, et on ne trouvait rien de terrible sur internet. Allez savoir d’où te venait l’idée, mais tu n’en démordrais pas :

« EN CLOCHETTE ! »

Okay, tu mets peut-être un peu trop d’enthousiasme, puis en clochette si faut elle est en train de voir une clochette du temple, ou celles qu’on voit autour du cou des chats. T’es fou mais pas à ce point faut que tu dissipes ce malentendu.

« En fée clochette je veux dire, j’ai déjà mis de côtés deux trois pages net, j’avais besoin d’un avis extérieur pour me décider, et toi une idée ? »

« Oui, c’est tout à fait moi ça, une femme d’expérience. »

Moi qui du haut de mes 21 ans n’ai pas même embrassé un garçon… Le plus fort contact que j’ai pu avoir était ce câlin, si l’on peut appeler ça ainsi, d’Akira. Et depuis, volatilisé le garçon.

Je soupire et lève les yeux au ciel.

« Je t’ai déjà dit de m’appeler « Maître », pas « Mon commandant ». Tu pourrais faire un effort ! »

Un léger rire m’échappe. Après tout, c’est rare que j’ose taquiner quelqu’un. Angie fait partie de ces quelques chanceux (oui, oui, chanceux).

Assise sur la chaise, j’attends la réponse du garçon. Qui ne tarde pas. Il crie d’ailleurs son idée. Ce qui me surprend et me fait presque sursauter.

… En quoi ? Clochette ? Je reste perplexe quelques secondes, jusqu’à ce que l’explication vienne. Aaaaah… La fée Clochette ! Je comprends mieux. Beaucoup mieux. Beaucoup…

AHAHAHAHAHAHAHAHA. IL VA ETRE TROP BELLE TIENT !

Je me mords les lèvres pour ne pas éclater de rire. Après tout, c’est une idée comme une autre. Mais je l’imagine ensuite dans une petite robe verte trop mignonne et là j’explose.

« Désolée hein, mais c’est que là dans ma tête t’es carrément bonne ! »

Heureusement je me calme facilement et je le regarde avec un grand sourire.

« Je me fous pas de toi hein. Juste je suis contente je vais pouvoir te voir en fille ! »

Eh oui je n’ai pas oublié ce qu’il m’a raconté l’autre soir, et c’est un peu un de mes buts depuis de le voir déguisé en nana. Après tout, ça doit être pas mal du tout.

Il m’a demandé si j’avais une idée. Certes, j’avais pensé au Chaperon Rouge. Mais il fait un personnage de Disney, ça m’amuserait de faire la même chose. Je réfléchis donc.

« Hum, je ferais bien un personnage de Disney aussi tiens… Mais j’hésite entre Jasmine et Arielle. En même temps, avoir une queue de sirène c’est soit pas joli du tout soit pas facile à porter parce qu’on ne peut pas marcher correctement… Donc en avant pour Jasmine ! »

Et là… ILLUMINATION. Je me plaignais à la fête que tout le monde ne me remarquait qu’à cause de la couleur particulière de mes cheveux. Ce serait l’occasion de tenter une coloration ! Un grand sourire aux lèvres, c’est mon tour de m’exclamer :

« J’AI UNE IDEE ! ON VA ME TEINDRE EN BRUNE ! »

Avant qu’il n’ait le temps de me poser une question, je continue dans un débit surexcité assez inhabituel chez moi.

« Il y a des colorations temporaires qui partent après quelques shampooings ! On n’a qu’à tester ! Tu sais faire les colorations ? Parce que le coiffeur c’est cher ! Tu vas m’aider hein ? Je t’aiderai pour ton costume de Clochette s’il y a un problème ! »

Hihi je suis trop contente ! J’ai hâte qu’on commence tout ! Et puis, si Angie accepte de me faire ma couleur, cela promet d’être drôle ! Mes yeux tout brillants, je regarde le garçon avec mon regard de Chat Botté – façon celui de Shrek bien sûr - pour être sûre qu’il dise oui !

Si tu savais Angie, tu ne la chambrerais peut-être pas autant. Ou pas. Qui sait, si elle arrivait à rire de son malheur t’en ferais autant. On va pas se mentir, toi à vingt et un ans t’étais déjà passé à la casserole plus d’une fois. Hey, on ne juge pas de ta dépravation d’alors, ta première année de fac avait été le moment d’apprendre à te connaitre… Toi et tes préférences. Enfin, revenons à nos moutons. Ça fait un moment que t’avais invité personne ici. Non, en fait tu n’y avais jamais invité personne. Tu t’étais rendu compte après ta mésaventure avec Aaron cet hivers qu’il fallait que tu fasses de la place. Ce que tu avais lentement fait.

« Je t’ai déjà dit que maitre c’était pour les hommes et que tu ne serais jamais ma maitresse chérie, soit je suis l’seul dans ta life soit c’est pas possible tu vois ? »

Tu te fois clairement de sa gueule, t’as jamais dit ça, comme elle ne t’a jamais demandé de l’appeler maitre. Vous inventez des bêtises à peine on vous colle l’un dans les pattes de l’autre. C’était un peu le même principe que le « et paf, ça fait des chocapics ! » on se doutait de ce qu’il allait en résulter, et on savait que ce ne serait pas très glorieux.

Elle commence clairement à se foutre de ta gueule… J’crois qu’elle apprécie l’idée de te voir en fée clochette. Bon mon chou, c’est clair elle commence à fantasmer sur toi… Et j’ai une mauvaise nouvelle pour Akira, c’est qu’au vu de sa réaction elle préfère les boobs aux pics. Enfin c’est pas tout ça mais elle t’a fait un compliment à toi d’en rajouter une couche :

« Mais je suis toujours trop bonne t’insinue quoi là ? »

Fais ton offusqué, ce petit plus entre tes sourcils est charmant. Tu la regarde de bas en haut, de haut en bas. Arielle ? Jasmine ? Elle a un petit gabarit qui rentre dans tout, peu importe… Mais c’est étonnant de sa part de choisir des personnages si dévêtus… La petite Oksa deviendrait-elle une femme ? La question est assez sérieuse, et t’as pas envie de la décourager.

« Tu crois qu’on trouvera un tapis volant sur le net ? »

C’est la chose la plus importante du monde, tu n’imagines pas Jasmine se déplace autrement… Attends c'es pas ça le problème... Elle est sérieuse quand elle veut teindre ses cheveux là ? ça te brise le cœur, mais après tout comme ça on arrêtera de la faire chier à cause de sa couleur si particulière ? C’est dommage, et en même temps… C’est ironique, elle les aura teints et on arrêtera de la faire chier en lui demandant s’ils sont teints :

« Je veux bien te colorer les cheveux mais on le fait pas ici… Le noir partirait jamais de sur la moquette si j’me chie et je vais me chier comme d’hab… C’est à tes risques et périls. »

Ouai t’as d’jà fait plusieurs couleurs à tes potes, qui avaient plus confiance en toi que toi-même soit dit en passant. Toi t’avais toujours pensé que tu galèrerais grave, et eux savaient que même si tu galérais tu le ferais. Ils dépassaient ta vision du monde. Te surestimait sans doute un peu… T’ouvris ton ordinateur montrant les deux modèles sur lesquels tu hésitais… L’un avait des bretelles mais des couleurs plus fades, l’autres sans bretelles avait des couleurs plus pimpantes. Confort ou beauté ? Entre les deux ton cœur hésitait…

« Laquelle je prends d’après-toi ? »

Tu lui as passé l’ordi et tu regardes maintenant par-dessus son épaule, la laissant faire ses recherches…

Je ne réponds même pas à la vanne d’Angie. Bon ok, je l’avoue. Si je ne réponds pas c’est tout simplement parce qu’il a touché juste. Il est malheureusement le seul homme dans ma vie en ce moment.

Et le seul homme dans ma vie va se déguiser en Fée Clochette. Pourquoi je me sens minable tout à coup là ? Pfff. Ma vie est super ok ? Même moi, je n’arrive pas à m’en convaincre tiens.

Enfin, ce n’est pas le moment de m’apitoyer sur mon sort ! J’affiche un grand sourire et réponds au garçon.

« Grave ! T’as de ces booooobs ! »

Et ça, ce n’est jamais un compliment quand c’est dit à un mec. C’est même clairement une insinuation comme quoi il serait grassouillet le p’tit Angie, ce qui n’est même pas le cas en vrai. J’affiche tout de même un air tout fier, contente de ma petite vanne sympathique.

Un tapis volant ? Mon air fier ne reste pas longtemps. Attendez. Jasmine c’est laquelle déjà ? OH NON JE ME SUIS PLANTEE. GENRE COMPLET. Je croyais que c’était la jolie Amérindienne là… POCAHONTAS ! Non mais Jasmine elle est à moitié à poil je peux pas ! Ouais enfin si j’avoue que j’ai confondu les deux il va clairement se foutre de moi là quand même. Je l’ai dit, je le fais en gros… Du coup, comme toute réponse un petit rire gêné et un sourire crispé me vienne.

Bon, Oksa, on se détend. Sinon il va se poser des questions. En plus il est d’accord pour la coloration, c’est chouette. Aaaah avec une semi-permanente j’aurai un peu plus d’un mois de tranquillité. Les gens arrêteront de buger sur ma couleur et croire que je mens en disant que c’est naturel. Dire qu’il aura fallu que je les teigne pour ça… Je cherche du coup un endroit où nous pourrons le faire sans gêner personne, il faut dire que l’odeur de ces produits n’est vraiment pas agréable

« Je te fais confiance ! Tu voudras la faire dehors ? Je nous vois bien au bord du lac avec toi en train de me colorer les cheveux tiens ! »

Je plaisante bien entendu. Enfin, qu’à moitié. Dans la cour, je doute que la directrice apprécie que nous décorions le goudron de jolies tâches noires. Il faudra donc bien trouver un endroit et le bord du lac n’est pas si mal après tout.

Angie me passe l’ordinateur pour me montrer les deux modèles. Sans hésitation, je pointe du doigt celle sans bretelles.

« Celle-ci ! L’autre est beaucoup trop fade, ça ne sera pas terrible. Si tu veux faire la Fée Clochette, fais-le bien au moins ! T’auras une perruque ? »

J’en profite pour regarder un peu les costumes de Jasmine. Ah ouais, elle est quand même vraiment à moitié à poil. Au niveau de la poitrine en tout cas, pas le bas c’est déjà ça. Mais bon… Je vois un déguisement de la tenue de fête de la princesse orientale. Il est vraiment joli quand même. Finalement, peut-être que ça va me plaire de m’habiller comme ça. Même si je vais me sentir un peu trop exposée. Ce sera un pas en avant on va dire…

« T’en penses quoi de celui-ci ? Il est joli non ? »

J’ajoute en riant.

« J’aurais bien dit que je serai très bleue entre le costume et mes cheveux mais non en fait ! »

T’as une mine inquiète tout à coup et tu regardes ton poitrail avec empressement ? De quoi elle parle ? T’as pris du poids ? Elle déconne ? Elle aurait pu l’dire autrement non. Te voilà en train de te tripoter les nibards pour vérifier qu’ils n’ont pas pris une taille et que la graisse les épargne encore. T’es peut-être un peu complexé par ton poids. Faut dire que n’ayant jamais excellé dans aucun sport t’en a jamais pratiqué un en particulier. Le lycée terminé t’avais dit fuck, et t’étais contenté de considérer tes divers pèlerinages photo, tes déambulations artistiques comme un sport. Ça t’avait à peu près réussi… Mais vu que tu ne faisais même plus ça… Tu lui lances un regard faussement furieux. Teigne.

« MAIS T’ES MALADE ON VA PAS TUER DES GENTILS PETITS POISSONS ! On fera ça genre… Dans les douches des dortoirs novices, ouai ça serait nickel, tout est carrelé là bas on aura qu’à rincer ! »

Enfin nickel Angie… Tu oublies juste un petit détail qui sera intéressant à régler. Irez-vous dans les douches filles ou mecs ? Oui, c’est une réelle question, mais t’y a pas du tout pensé. Tu t’en fous sans doute de base en fait.

Donc elle est du même avis que toi pour la robe. Pchit, t’espérais peut-être un peu qu’elle soit la voix de la sagesse. Bon, tu l’ajoutes au panier en sachant d’avance que tu vas grave galérer le jour J et qu’il te faudra sans doute y mettre de la colle spéciale pour empêcher tout ça déraper… Sans doute la même que pour tes faux cils… Que tu n’as pas encore commandés, mais tu ne le feras pas devant Oksa, tu veux lui faire la surprise.

« Hm… Je sais pas le tissus à l’air assez lourd, il en faudrait un plus vaporeux… Plus fin… »

Mais merde quoi si elle choisissait un truc sexy c’était pas pour le faire à moitié. Tu n’allais pas lui permettre ce genre de couardise alors qu’elle avait choisi la robe sans manche pour toi. Elle avait été sans pitié, tu lui devais bien de lui rendre la pareille. Sérieusement. Un sourire mesquin se dessina sur tes lèvres :

« Si tu as peur de manquer de bleu on peut opter pour la schtroumpfettre, par contre se déteindre les cheveux c’est un peu plus définitif… Mais le blond t’irait pas si mal ! »

C’est l’histoire d’une blonde qui croit que son ami est un zombi et essaie de lui fracasser la tête à coup de pot de fleurs… ça vous rappelle rien ? Dommage, ça veut dire que vous avez sauté les pages cent-vingt à cent trente-six de la vie de Charlie-Ange Petit à Terrae.

Je retiens un fou rire en voyant la panique dans les yeux d’Angie. Il se palpe même les seins quoi ! N’importe quoi ce gamin… Oui, oui, ce gamin. Tout à fait.
Wouah c’est quoi ce regard qu’il me fait là ? Il ferait presque peur ! Je hausse les sourcils, à la fois surprise et amusée par son emportement soudain. Mais il n’a pas tort, les produits toxiques dans le lac ce n’est pas génial. Enfin, il y a un léger souci avec les douches des novices tout de même…

« Oui bien sûr ! En plus on ne nous regardera pas du tout bizarrement, un homme et une fille dans les mêmes douches ce sera très discret ! »

Enfin bon, au fond je m’en fiche pas mal. C’est juste mon petit plaisir d’embêter le grand un peu trop taquin. Mais, mais, mais… Il me raconte quoi là sur mon choix de déguisement ?

Plus vaporeux ? Plus fin ? OH MAIS IL M’EMBETE LUI. Je ne réponds pas, affichant une mine boudeuse. Je l’aime bien mon déguisement de Jasmine en fête teh. A son sourire, un air assez noir répond. Qu’est-ce qu’il veut faire à mes pauvres cheveux ? Une coloration semi-permanente, c’est une chose. Mais une décoloration ? Il ne va pas bien ! Ca resterait super longtemps et ça défoncerait mes si doux cheveux.

« Blonde ? Non, non, non. Même pas en rêve. Et puis rien qui soit définitif, t’es fou toi ! Je tiens à les retrouver indemne mes cheveux bleus ! Et la Schtroumpfette… Hum… »

Je ne finis pas ma phrase. Comment dire d’une manière pas trop vulgaire « tout le monde la considère comme la salope du village vu qu’elle est la seule nana et, quand même, t’as vu combien ils sont ? ». Je ne l’achève donc pas et reprends en haussant les épaules.

« Je l’aime bien celui-ci. Il est tout à fait vaporeux d’abord ! »

Je ne peux retenir un sourire, on dirait que j’ai cinq ans. Et puis en plus, je ne saisis pas tout à fait ce qu’il veut dire par « plus vaporeux ». Un habit est un habit, j’ai du mal à voir plus loin pour être honnête.

« Puis tu sais, tous les déguisements de Jasmine sont comme ça. Je vois pas ce que tu lui reproches hein ! T'as qu'à en trouver un autre qui te plaît mieux alors. »

Têtue ? Moi ? Jamais ! Enfin, je me teins les cheveux, j’accepte d’être à moitié nue, je ne vois pas ce qu’il veut de plus. PIRE. J’accepte d’aller à un carnaval pleiiin de monde. Ce qui est tout de même assez surprenant. Du coup voilà, mon impatience est retombée et je suis soudain très calme et moins souriante. C’est sa faute aussi. ET OUI JE REJETTE TOUT LE TEMPS LA FAUTE SUR LES AUTRES.

« Faut pas être à poil pour faire une couleur, il n’y aura rien de suspect… Puis les gens peuvent bien penser ce qu’ils veulent ! »

T’es du genre à pas faire attention au regard des gens. Tu vis dans ton monde, et c’est peut-être mieux. En fait, ce n’est pas que tu n’en as rien à faire hein ? Il te tombe souvent dessus comme un couperet, en fait ta plus grosse entrave n’était pas ce qu’ils pensaient mais ce que tu pensais. Tu avais tes règles et ta conception de l’honneur qui te paralysaient trop souvent. Sauf que là tu ne voyais pas le mal, ce n’était pas comme si vous aviez prévu d’aller jouer à touche-pissou sous les douches quoi, fallait arrêter avec la mauvaise volonté. T’avais rien à te reprocher, donc tu ne laisserais PERSONNE lui reprocher quoi que ce soit. Un Angie accusé à tort ça pouvait être teigneux.

La tête qu’elle fit quand il parla de plus vaporeux valait son pesant d’or… Avait-elle traduit plus transparent alors qu’il avait pensé plus fluide ? Là elle avait pris que des tissus super épais qui ne suivraient pas les formes de son corps. Certes, elle avait à peine plus de seins que lui, mais elle avait des hanches plus agréablement fournies, ce serait vachement plus agréable un tissu qui les épouserait plutôt qu’un qui les masquerait. Logique quand tu nous tiens…

L’idée de la schtroumpfette ne semble pas la réjouir. Tu n’insistes pas, à ton avis elle ne devrait même pas se teindre ses jolis cheveux bleus. Elle devrait dire fuck à ceux qui trouvent à les critiquer ou à la critiquer. Ils font partie de sa personnalité, et te permettent de la repérer au loin dans une foule… Ce qui est assez agréable, bon parfois tu la mélanges avec Roxanne, ce qui n’en est pas moins agréable. T’aimes bien les filles aux cheveux bleus on dirait.

« Ouai laisse-moi chercher ! »

Tu reprends l’ordinateur et cherche quelque chose de plus approprié, ouvre d’autre sites, tu finis par trouvers deux modèles qui te satisfont particulièrement, l’un pour la beauté du tissus qui est d’un bleu magnifique tout en semblant doux et fluide… l’autre car il se rapproche plus d’un costume de danseuse orientale, peut-être plus proche de Schéhérazade que de Jasmine soit dit en passant, mais il magnifique est subtilement décoré de jolies perles. Bref, il te plait, même si le style est un peu différent. Les deux tuniques sont bien plus élaborées que celles de la princesse Disney, elles faisaient clairement plus femme.

« Un avis ? »

En effet le jeune homme a raison, il n'y a rien de suspect. Néanmoins, j'aimerais pouvoir être comme lui. Ne pas faire attention au regard des autres. Vivre ma vie sans me soucier de tous ces yeux voyeurs et scrutateurs. Ce serait une véritable libération. Je ne réponds pas cependant, jugeant le sujet clos. On fera la coloration dans les douches des novices, ce sera parfait.

Angie décide finalement de me chercher un déguisement. Rapidement, il m'en trouve deux. Mais le second passe complètement à la trappe dans mon esprit. Le bleu du premier est bien trop beau. Je reste quelques secondes à observer la beauté du tissus, avant de réaliser à quel point je ferais plus adulte avec. D'un côté, pour une fois on ne croira pas que j'ai 16 ans, d'un autre… c'est un peu gênant tout de même ! Embêtée, je me tourne vers Angie.

« Le premier est magnifique… Je l'aime beaucoup mais... »

Aaaah ça aussi ça fait rougir. Ce n'est pas une question que je pose tous les jours tiens. Je finis par terminer ma phrase, le regard hésitant.

« Tu penses vraiment que ça va bien m'aller… ? »

Je ne me suis jamais trouvée « jolie », ou « femme ». Du moins pas au niveau de mes formes. J'ai conscience que la puérilité de mon visage peut me donner un air mignon, mais justement, cela devient plus dur pour moi d'accepter mon corps comme adulte. Néanmoins, je dois avoir l'air particulièrement stupide, enfantine, à demander ça. J'ai donc envie de tenter de me rattraper.

« Attends tu vas voir je vais te montrer quelque chose qui m'ira super bien ! »

Attrapant l'ordinateur, je le tourne de manière à ce qu'Angie n'en voit pas l'écran. Au bout de quelques secondes, un sourire malin au visage, je le retourne. Un costume de Jasmine absolument affreux est montré. Le pantalon remonte juste en dessous du nombril, dans une matière semblant proche du plastique. Quant au haut… c'est une simple bande bleue ciel englobant la poitrine en partant de côtes et en remontant juste sous l'aisselle. Je laisse échapper un rire.

« Alors ? Tu ne trouves pas que je serais trop canon comme ça ? »

Bon ok je dis de la merde pour éviter de repenser à mon moment assez inconfortable vécu juste avant. En réalité, le costume au tissu bleu si beau me plaît énormément, même si je crains de mal le porter. Néanmoins, cela pourrait être plaisant. Je ne serais plus du tout moi. Les cheveux bruns, un costume oriental me faisant paraître, enfin, adulte, me mettant éventuellement en valeur… Je pourrais prétendre ne plus être cette Oksa timide juste pour une journée, et me montrer plus sûre de moi. Une Oksa forte qui sait se faire entendre. Cela pourrait être intéressant.

Elle ne te laisse même pas le temps de répondre… Mais tu comprends bien qu’elle a un grave complexe tout droit sorti de l’adolescence qui se compose plus ou moins de peur du regard des autres et de vision déformée de son corps. Ralala, les meufs quoi… En même temps les pauvres, on les bombarde de corps « parfaits » sans cellulite et prestement épilés. De quoi complexer si on se mettait à penser que la beauté se résumait à ça… Et encore c’était sans parler de photoshop qui avait dû rendre anorexique une ado ou deux… au bas mot.
Bon, toi tu peux parler si tu n’avais pas rencontré les bonnes personnes au bon moment, ton corps t’en aurait encore honte. Ton adolescence n’avait pas été un hymne à l’acceptation de soi… Heureusement que tu as rencontré des types, et des meufs, qui ont su te trouver beau. Te trouver assez attirant pour te désirer, mine de rien ça aidait pas mal niveau confiance en soi… La jeune Oksa ne semblait pas décider à prendre ce genre de virage pour l’instant…

Le truc qu’elle te montre est carrément immonde. Tu hésites trèèèèès sérieusement à lui dire que ça lui irait superbement bien histoire de l’empêtrer dans ses taquineries toutes plus douteuses les unes que les autres. Après tout, elle se démerderait, ce serait à elle s’assumer… Pas à toi, tout tu porterais une jolie robe verte que tu assumerais très bien. Enfin, ce ne serait pas être un bon ami que de lui laisser faire une telle entorse au bon goût, tu le sais bien.

« J’ai des sacs poubelles bleus si tu veux économiser, t’auras exactement le même rendu plastique dégueulasse. »

Pris d’inspiration tu te lèves et tu prends l’ordi des mains de la jeune femme le posant sur ton lit.

« Viens avec moi deux minutes. »

Tu l’attrapes par la main et tu la conduis devant la porte de ta salle de bain, ce petit truc ridicule ou tu n’as pas la place de bouger… Mais sur cette porte t’as suspendu un grand miroir, qui ne te sert d’ailleurs absolument à rien vu que tu ne fais jamais vraiment gaffe à la manière dont tu t’habilles, le carton qui l’abritait prenait trop de place.

« Alors dis-moi ce qui n’irait pas avec la tenue que je t’ai trouvée… J’attends ! »

Tu l’attends dur comme fer celle-là… Qu’elle essaie de se dévaloriser un peu pour voir… Non mais ! Si elle ne voit pas qu’elle est belle tu vas te faire un plaisir de lui ouvrir les yeux…

« T’es une jolie femme tu voies ? »

Dommage que ça pêche autant niveau caractère, sans ça elle serait parfaite… Mais son mélange de timidité et ce fond d’emmerdeuse, la rendait tout juste supportable. Heureusement pour elle t’étais une bonne poire et elle était adorable quand elle le voulait. Faut croire que t’arrivais à faire ressortir le meilleurs chez les gens d’ailleurs, parce qu’avec toi elle était tout le temps adorable. Presque…

Aha j'aurais aimé prendre en photo la tête d'Angie quand je lui ai montré mon horreur. Néanmoins, la mienne doit aussi être pas trop mal quand il me parle des sacs poubelles. Je rebondis tout de même.

« Je serais carrément mignonne dans un… EH ? »

Il m'enlève l'ordinateur et m'attrape la main sans vraiment me laisser le choix. J'aurais plutôt été d'avis que ma main personne ne la touche mais bon, trop tard je crois. Il m'entraîne ainsi devant un miroir. Je me tourne vers lui, saisie d'une grande perplexité. Oui, c'est ma tête. Oui, c'est mon corps. Et ?

Mais lorsqu'il prend la parole, je comprends. Mon regard vient se détacher de son visage pour se poser sur mon reflet. J'y découvre une fille petite de base qui paraît encore plus minuscule à côté du grand gaillard qu'est Angie. J'y vois ce regard apeuré que je déteste tant, dans lequel j'aimerais un jour pouvoir lire du courage. J'y observe ce visage de poupée si enfantin et ce corps avec qui je lutte depuis des années pour qu'un jour la cohabitation se passe mieux.

Je tilte quelques secondes sur le terme qu'il a employé pour me désigner. « Femme ». J'en suis réellement une ? Je ne suis plus une fillette, une petite fille, une adolescente ? Cela me touche qu'il ait dit ça, et je suis certaine qu'il l'a fait exprès.

Je ne réponds pas tout de suite à Angie. Il y a autre chose que j'ai envie de zieuter plus longtemps. Mon regard se perd dans ce reflet et je souris. Un sourire sincère, heureux. Pas un timide et réservé. Je me tourne vers le garçon.

Je ne sais pas si je vais réussir à dire ce que j'ai sur le cœur. J'aimerais lui dire qu'en réalité, je ne vois pas une jolie femme. Je vois deux amis, et c'est ce qui me rend bien plus heureuse encore. Je n'arrive pas tout à fait à lui avouer que je suis si heureuse de m'être fait un réel ami. Si ma timidité s'efface légèrement avec lui, je ne peux pas non plus la faire disparaître complètement. Je décide de tenter autre chose. Je me tourne complètement vers lui et viens passer, lentement, en hésitant, mes bras autour de sa taille. Je pose ma tête contre lui et souris. J'ai réussi à faire un câlin à quelqu'un, de moi-même.

« Merci Angie. Elle est parfaite la tenue que tu as choisi. »

Je ferme les yeux. J'espère juste qu'il ne va pas se faire de fausses idées. Qu'il ne va pas croire que je craque pour lui. Enfin, il est mignon et sympa Angie, mais c'est un ami. Un vrai ami.

WHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAT ? Mais elle te fait quoi là ? ELLE TE FAIT QUOI ? Tu commences grave à flipper un peu comme au moment où elle t’a parlé de tes seins, mais là c’est un peu plus pernicieux, tu ne sais pas où te mettre. T’es en panique car tu ne t’y attendais pas mais au final ta sincérité prend le dessus. Tu restes un peu droit, un peu crispé alors que deux masses gélatineuses s’écrasent contre ton poitrail.

« Euh… Oksa… Je sens tes seins contre moi… C’est grave bizarre… »

Pourquoi elle a des seins ? Si elle était plate, tu n’aurais pas l’air d’avoir avalé une chaise de travers. Tu saurais comment réagir, tu lui frotterais gentiment le dos pour qu’elle se sente bien. Là t’as juste ton cerveau qui te dit fuck et tu ne sais plus où te mettre. Sérieux, pourquoi elle te fait ça à toi ? Heureusement, l’étreinte bizarre prends fin et tu respires plus librement.
Elle finit par partir après que vous ayez réglé les derniers frais d’envois, elle te rembourserait à la livraison. Ça vous reviendrait globalement moins cher de faire un envoi groupé. Les économies avant tout !

***

Il est là, le coli t’attendait ce matin au point relais le plus proche. Vu l’isolement de Terrae t’as cru qu’une chouette l’avait apporté là à la manière de Edwige. Tu récupères le tout et tu envoies un message à Oksa, séance essayage prévue dans l’après-midi… après bien entendu, vous irez acheter du maquillage. T’en as un peu certes, mais d’habitude tu trouvais toujours le moyen d’en piquer à tes amies… T’es quasi certain que cheveux bleus n’a rien de folichon… Les faux-cils ce n’est pas elle qui te les fournira, tu vas devoir investir.

Cette fois-ci ta chambre est un peu moins bien ranger, il y a ta pile de linge sale jetée dans un coin, tu regardes sous ton lit essayant de l’y pousser et te rend compte que la cachette déborde déjà de bonnes intentions de rangement. Déçu tu te décides finalement à les laisser dans un coin, tu n’as jamais été maniaque et on peut circuler, c’est le principal. Petit bonus et non négligeable : on voit le sol. Ce qui signifie qu’il n’est pas encore le temps de ranger. Du moins pour toi…

Le paquet n’est pas ouvert, tu l’attends trouvant en ce rituel une étrange satisfaction. C’est plus drôle d’ouvrir ce paquet à deux. C’est un peu comme un cadeau, même si vous savez ce qu’il y a dedans. Tu ne veux pas lui enlever la joie d’ouvrir ce paquet avec toi. Tu t’excites un peu comme un enfant sur des choses qui n’ont pas tellement d’importance. Tu souris, doux idiot en attendant ton amie.

Ça y est c’est le jour J ! J’ai reçu le message d’Angie m’annonçant l’arrivée de notre colis – enfin ! – et m’apprête à le rejoindre pour notre petite séance essayage. Je m’habille rapidement en attrapant une robe au hasard et m’élance dans les couloirs, toute joyeuse.

Arrivée devant la porte du jeune homme, J’OSE TOQUER. Genre sans flipper, vous vous rendez compte ? Breffouille. Il m’ouvre et c’est parti pour l’ouverture, la découverte, la joie, la… euh. Il manque du tissu là, nan ?

Ma tête doit devenir toute bizarre lorsque je réalise à quel point cette fichue bande tenant la poitrine est étroite. Je n’ai pas beaucoup de seins, mais tout de même, il faut que je les mette quelque part ! Enfin bon. Je regarde avec le Terre son costume.

« Cette robe va être magnifique sur toi ! Je t’assure ! »

Je ris légèrement. Je le taquine, et ai en même temps hâte de le découvrir en Fée Clochette, maquillage compris. D’ailleurs, il faudra que nous allions faire quelques courses pour ce dernier et ma teinture.

« Bon. Je vais aller essayer le costume ! »

Je lui souris et me dirige vers la salle de bain, déguisement à la main. Là je me change rapidement, enfilant le doux tissu d’un bleu envoûtant, splendide, sur mes jambes. Le pantalon est léger, j’ai presque la sensation de ne rien porter. Il descend beaucoup sur les hanches, laissant apparaître le bas de mon ventre, mais remonte correctement sur mon fessier. Hum. Je mets ensuite le haut, glissant doucement mes bras, l’attachant derrière, et observe…

Oula. Je suis quand même sacrément dénudée. Pour voir, je place autour de mon cou le collier fourni avec, positionne sur ma tête le joli diadème et… ARG. ON VOIT MON VENTRE ET MES SEINS C’EST PAS POSSIBLE.

Je ne dis rien. Décide de rester dans la salle de bain. C’est chouette les salles de bain après tout. Puis je suis sûre qu’Angie pourra me faire passer de la nourriture. Je dormirai dans la douche. Ou sur le tapis de bain. Pas de problème. Sortir comme ça me semble bien plus difficile tiens.