[Aoi n'a pas de pouvoir pour cette phase, ses pouvoirs sont bloqués
n'oublie pas de tirer aux dés les pouvoirs de Pricie hihi ]


Le terme de ma grossesse approche bientôt, résultat, les collègues ne veulent plus que je vienne à l'hôpital, ils sont dingues ! Je m'ennuie ferme à la maison, moi ! (Et je ne supporte plus les vannes de daron d'Huo. Il faut qu'il se calme, sérieusement !!! C'est de pire en pire !!) Heureusement, j'ai eu le droit (pff faut que je demande maintenant, le monde à l'envers sérieux) de faire la permanence à l'infirmerie... Et voilà que j'ai une mission qui va me changer des petits bobos habituels : une petite est malade et n'a pas l'air de vouloir sortir de sa chambre, apparemment...

Habillée d'une robe de grossesse et de ma blouse, j'enfile donc un masque et me dirige vers le dortoir des Eaux tranquillement, transportant une trousse de premiers soins avec le matériel nécessaire pour le diagnostic et quelques cachets pour la fièvre.

Malgré tout, j'ai une petite appréhension ; il s'agit de la fille du terroriste, Pricie... Immédiatement, je me souviens des images en salle d'opération, lorsque je tentais de sauver Mitsuki. Et le foetus..... J'inspire. M'efforce de sourire derrière mon masque pour paraître engageante ; les sourires se voient dans les yeux !

—Bonjour Pricie, je suis Aoi, de l'infirmerie. On m'a dit que tu étais malade, je suis venue m'assurer que tout va bien. Est-ce que tu veux bien m'ouvrir s'il te plaît ? demandé-je en toquant doucement à la porte.

La fille du terroriste. A présent beaucoup de gens savaient. Pricie avait donc fait un énorme effort ce matin : Elle avait mis son uniforme. Elle était allée à la cafétéria, ça avait dégénéré… Trois gosses de son âge lui avaient fait un croche-patte. Le chocolat avait maculé le sol, son uniforme.
Les mômes riaient jusqu’à ce que les lampes vacillent au dessus d’eux, les plus âgés présents qui avaient d’abord voulu défendre Pricie blêmirent arrêtant leurs gestes comme terrifiés. Et là elle comprit que Ys avait raison. * Ils ne t’accepteront jamais.* Personne ne l’accueillerait, elle n’avait plus de monde.

La tête de Pricie tourna, elle se leva en hurlant : « MONSTRES ! Je vous déteste tous ! Tous ! » Elle claqua sa porte de chambre et ferma à clefs. Elle tremblait. Hier elle était patraque, elle se sentait malade aujourd’hui, la fièvre et les émotions fortes n’y aidant pas. Elle s’affaissa au sol, tête sur le lit.

« Sois forte ne pleure pas, tu es une soldat ! » se répéta t-elle une bonne dizaine de fois.

On frappa à la porte. Une voix demanda à entrer. Pricie sursauta. La lumière de sa lampe vacilla. La petite adolescente se tint la tête. Ça faisait mal, ça faisait si mal tout ça.  

« Taisez vous  ! » murmura Pricie, sa lampe de chevet clignota,  Pricie la brisa au sol en criant : « JE VOUS AI DIT DE VOUS TAIRE ! » La main droite de Pricie saignait mais qu’importe, elle pleurait à présent la petit fille, meurtrie et seule dans un monde qui ne lui a jamais laissée une chance…  

« Qui veille sur les petits d’anges...c’est comme construire un château de sable et sauter dessus à pieds joints... »

Il y a un peu de bruit derrière la porte... et d'un coup, comme du verre qui se brise, et la voix d'une adolescente qui me crie de me taire. Puis je n'entends pas de bruit, rien qu'un murmure chantonné. Je recule brusquement lorsque j'entends le bruit sourd et son cri, mettant ma main sur mon ventre en protection, le visage clairement inquiet. D'accord... l'étudiant qui m'a prévenu m'a dit que ça n'allait pas fort, mais je n'imaginais pas à ce point. Une inspiration. Est-ce que je ne devrais pas appeler Norah pour qu'elle gère la situation à ma place...?

Bien... donc. Je toque à nouveau, gardant ma voix neutre derrière mon masque :

—Je ne partirai pas, Pricie, ouvre-moi s'il te plaît. On m'a dit que tu te sentais mal, j'aimerais pouvoir te parler. Je suis médecin, je ne te veux pas de mal.

La dame voulait vraiment entrer et Pricie était lasse. Alors elle décida d'obéir.

Pricie se leva difficilement, vacilla jusqu’à la porte, tout tournait autour d’elle. Elle ouvrit la porte, la clef fit un petit bruit. La dame en face d’elle avait très peur, Pricie le ressentait, ça faisait froid dedans le corps, glacial en ses veines mais comment lui en vouloir ? Elle jeta un regard vaseux sur son uniforme maculé d’une tache brune de chocolat.

«  L’uniforme est tout sale. » constata t’elle. Elle posa son regard sur sa main d’où perlait du sang. « Ma main aussi... » dit-elle d’une voix plate.

Ses yeux se posèrent sur le ventre de la dame médecin.

« C’est un bébé dedans c’est ça ? » demanda Pricie de toute son encore enfance.

Elle fit une pause puis continua intriguée : « Ma Maman avant d'être malade elle m'avait aussi dans son ventre ? » Silence . «  Les filles de ma classe disent qu'il faut avoir ses ... » Elle rougit. « « Règles » pour avoir un bébé dans son ventre...C'est vrai ? » Après une courte pause, elle dit la voix tremblante : «   Moi je ne les ai pas encore, ça veut dire que je ne serai jamais maman ? »

Après un moment de réflexion aussi paisible que lui permettait son corps affaibli et secoué de légers tremblements de fièvre Pricie conclut :  « C’est peut-être mieux ainsi. »

HRP : Comme tu es revenue je rouvre ce RP, comme discuté en privé


Quand Pricie ouvre la porte, je panique un peu en voyant sa main ensanglantée. Mon premier réflexe est de vouloir lui prendre délicatement la main pour la guérir… mais c’est vrai : je n’ai plus ma magie. Une boule dans ma gorge m’empêche de lui répondre tout de suite, mais je finis par réussir à dire :

—Tu es blessée, il faut qu’on bande ta main…

Mais Pricie lève les yeux vers mon ventre et semble absente, un peu surprise. Ses mots me tirent un regard triste. Sa maman est morte, du coup, c’est ça ? Je suis un peu déstabilisée par sa réaction, ses questions ; on dirait qu’elle n’a jamais eu d’éducation sexuelle, ou de quelqu’un pour lui parler de toutes ces choses.

—Oui, c’est mon enfant, je réponds doucement, passant une main sur mon ventre. Tous les enfants grandissent dans le ventre de leur maman. (Ce n’était pas strictement vrai, mais je ne vais pas partir dans les questions de genre maintenant.) Et il faut avoir ses règles pour pouvoir faire un enfant, mais ça vient durant l’adolescence. Parfois, ça met du temps à venir… surtout quand on a vécu des choses un peu difficiles.

Je me mordille la lèvre, jouant des doigts sur la poignée de la trousse de secours.

—Tu veux bien me laisser entrer pour que je m’occupe de ta main et de ta maladie ? Tu as l’air fiévreuse…

Qui veille sur les petits d'anges
que les grands dérangent

« Je n'ai pas vécu de chose difficile ! » cingla l'atmosphère. « Et je n'ai pas besoin qu'un monstre me soigne ! » Pricie essuya sa main en sang sur son uniforme taché, elle était soigneuse avec ses affaires mais cette uniforme elle le détestait. Elle ne claqua cependant pas la porte.

« Vous êtes un monstre bête... La secte des Karasus disaient qu'une extrême gentillesse était de la bêtise, que Dieu nous voulait fort et intransigeant ! »

Pricie montra sa main, sur son pouce droit  on y voyait un minuscule corbeau tatoué au fer rouge. « J'ai pas pleuré ça a fait mal mais je n'ai pas pleuré ! » La gamine sourit heureuse : «  C'est parce que je suis forte !  Dieu m'aimait ! Avant que je ne vous rejoigne ! Il m'aimait ! »

Fièrement la gamine dit : «  Une fois aux cours des Karasus après l'école on a eu un test pour voir qui était le plus courageux ! Il fallait dormir dehors par moins  10 mais Papa a hurlé que j'allais mourir, il  était très fâché et a voulu me sortir du jardin intérieur sans plafond à part le ciel mais je n'ai pas voulu, Dieu devait être fier de moi, car j’étais bleu et en hypothermie, je ne suis pas allée à l'hôpital car on n'emmène pas les enfants des Karasus à l'hôpital. Mais j'ai été la première à m'en remettre je suis sûre qu'à cet instant Dieu me faisait confiance. »

Dans un soupir la gamine soupira : «  La confiance ça se mérite. Et je l'ai perdu j'ai trahi Dieu en laissant à Papa la bombe et je me retrouve ici... avec des gens hais de Dieu qui me haïssent et ont peur de moi ! »

La main ensanglanté de la mioche se ferma brusquement et elle grimaça autant de souffrance physique que morale.

Elle reporta son attention au ventre rebondi de l'infirmière il l'inquiétait. Elle leva son visage encore enfantin et demanda : «  Ce bébé est ce que vous allez l'aimez ? Maman m'aime mais elle m'a perdue dans sa tête …. Comment vous pouvez être sûre que ce bébé vous n'allez pas l'oublier car vous aurez du fouillis dans la tête ? Comment vous pouvez être sûre de toujours vous souvenir de qui il est votre bébé ? »

La maman de Pricie est en hôpital psychiatrique depuis la naissance de bébé Pricie et quand elle la voyait sa maman ne savait pas qui elle était et pleurait perdue dans sa tête réclamant quelqu'un mais pas Pricie. Alors pour Pricie c'était évident qu'il était si facile de perdre son enfant dans un coin de vie comme elle avait perdu son papa même si elle elle s'en souvenait bien, trop bien.

Alors que Pricie se met à crier, je me recule vivement, le coeur tambourinant dans ma poitrine, une main sur mon ventre. Ses réactions impulsives m’effraient. Ses paroles, aussi. Elle a l’air complètement endoctrinée par son père, par cette secte dont nous avons parlé. Je repense à l’explosion, qui a blessé si fort Mitsuki… et mes yeux se remplissent de larmes alors que je recule encore, la main toujours crispée sur mon ventre. Mon enfant pourra voir le jour, mais celui de Mitsuki, celui que j’ai échoué à sauver, parce que son père à elle a fait exploser nos murs… Lui ne verra jamais la lumière. La gorge bloquée, je regarde cette enfant en serrant la mâchoire, tâchant de retenir les larmes qui perlent à mes yeux. Ce n’est pas nous, les monstres. Ce sont ceux qui mettent ces histoires dans la tête d’enfants.

Je crois qu’une partie de moi arrête d’écouter ce qu’elle me dit à propos des Karasu. Trop de colère bouillonne en moi à l’entente de ce qu’ils lui ont fait subir et de ce qu’elle me balance en pleine tête. Et après, elle me repose des questions, comme si elle ne m’avait pas traitée de monstre quelques secondes auparavant… j’inspire et ne peut retenir mon émotion. Au moins, je ne pleure pas devant elle.

—Pourquoi est-ce que tu t’intéresses à ce que je pense, si pour toi je suis un monstre ? demandé-je un peu impulsivement. Bien sûr que j’aime mon enfant, que je l’aimerai.

Du fouillis dans la tête…

—Je répondrai à tes questions, mais seulement si tu me laisses soigner ta main et te donner un médicament pour la fièvre.

un jour on gagne
un jour on perd
mais je n'ai pas perdu la guerre

Pricie avait peur, elle avait peur car un tout nouveau monde s'ouvrait à elle. Un monde dont on lui avait toujours parlé avec haine et terreur jusque là. Elle hésitait, elle ne savait pas ce qui allait lui arriver si elle cédait. Qui dit que cette Terraenne ne voulait pas l'empoisonner pour se venger ?  Tout était possible avec eux, c'était ce qu'on lui avait enseigné et elle y croyait encore dure comme fer. Elle laissa donc passer quelques minutes d'hésitation puis demanda : «  Et vous pourquoi vous voulez me soigner au lieu que vous me détestez autant que je déteste Terrae ? »

C'est vrai ce n'était pas logique on ne soigne pas notre ennemi non ?

« Je vous ai fait du mal et vous voulez m'aidez pourquoi ? Cela n'a pas de sens... » Mais la fièvre de la petite fille était forte et sa tête lui tourna, elle se rattrapa à la porte alerte mais faible comme un animal blessé et terrorisé. Sa respiration était saccadée, elle avait du mal à tenir debout.

Mais elle restait debout, droite empêchant obstinément l'infirmière de rentrer dans son espace. Chaque seconde était épuisante, si bien qu'au bout d'un moment elle ne put s'empêcher de se laisser glisser contre le mur et de murmurer tremblante de fièvre : «  De l'eau je voudrais un peu d'eau... »

Elle attrapa son doudou un chien en peluche de sa main qui ne saignait pas et le pressa contre elle. Elle hésitait encore, elle n'avait rien d'une terroriste elle était juste une petite fille seule et complètement perdue.

Elle mit sa tête dans ses genoux elle ne voulait pas voir ce qu'elle allait faire, pas constater qu'elle cédait. Elle poussa un peu la porte de son dos et celle ci s'ouvrit un peu plus.

« Vous pouvez approcher. » dit elle simplement d'une petite voix. Tête dans les genoux elle tendit sa main blessée en silence, son doudou contre son cœur.

Au sol la lampe était en dizaines de morceaux comme cette enfant sauvage en cet instant qui aurait tout donné pour un rire de son papa qui ne rira plus jamais. Il l'avait sauvée.

Il l'avait laissée.

« Papa m'a laissée ici ! Il m'a laissée ici toute seule. » souffla une petite voix cachée dans les genoux. Elle laissait sa main de visu pour qu'elle soit soignée mais elle ne levait pas le regard.

Il le faudrait bien pour prendre le médicament contre la fièvre mais pour le moment c'était au dessus de ses forces. Elle avait besoin d'encore quelques minutes pour apprivoiser l'inconnu.

Mon coeur loupe un battement. L’adolescente face à moi semble complètement perdue, et au fond, je ne peux pas lui en vouloir. Sa question est légitime ; pourquoi je l’aiderais ? Parce que c’est mon travail, que j’ai juré. Parce que c’est qui je suis. Mais c’est vrai ; pourquoi on aiderait quelqu’un qui nous a fait du mal ? Mes lèvres se pincent un peu et je détourne le regard un instant.

—Je suis médecin, Pricie ; c’est mon travail de t’aider. Tu n’es qu’une enfant. Tu ne m’a pas fait de mal, et tu ne m’en feras pas.

Puis je la fixe à nouveau ; j’ai un mouvement vers elle lorsqu’elle vacille, inquiète. Mais je ne la touche pas, ne m’approche pas trop près. Elle se laisse tomber sur le sol, lentement, mais lourdement. Elle semble hésiter, mais finalement, accepte que je m’approche après s’être recroquevillée sur elle même. Je retiens un soupir de soulagement. Peut-être qu’on est tous un peu dans le jugement, quand on ne connait pas… Même moi.

—Merci… Je m’occupe de ta main, et ensuite je te rapporte un peu d’eau, d’accord ? Il faudra retourner au lit pour bien te reposer.

Doucement, je me retiens contre le mur et me baisse en fléchissant les genoux, pour me mettre à sa hauteur, et me laisse m’asseoir par terre en soufflant douloureusement. Pour me relever, ça va être plus compliquée avec mon gros ventre, mais elle est par terre, il faut bien que je me mette à sa hauteur… Doucement, j’attrape la main qu’elle me tend. Mon premier réflexe n’est pas de désinfecter sa blessure, mais de la garder dans la mienne un instant, mon pouce frottant gentiment le dos de sa main.

—Je suis désolée qu’il t’ait laissée. Tu n’es pas toute seule ici. Il faut simplement... t’autoriser à nous regarder.

On est des humains, nous aussi, ai-je envie de rajouter.

Lentement, je sors de quoi désinfecter de ma trousse de soin, posée par terre à côté de moi, et de quoi nettoyer le sang, puis bander sa blessure.

—Ca va piquer un peu. Ca te fait très mal ?

J’applique le spray sur la blessure et passe un mouchoir propre dessus ; je regarde s’il n’y a pas de morceaux de verre qui restent et prend une pince à épiler pour enlever les petits bouts qu’il reste. Ca saigne encore bien, mais on arrive à endiguer le plus gros. Ce n’est pas non plus trop profond, ça ne nécessitera pas de points de suture…

—Il faudra faire attention à ne pas trop utiliser ta main blessée. Ca risquerait de rouvrir la plaie.

Je suis fatiguée
Je ne suis plus rien
rien qu'un cœur blessé
rien qu'un soldat qui a mené son ultime combat
emmène moi
ou laisse moi mourir

« Merci… Je m’occupe de ta main, et ensuite je te rapporte un peu d’eau, d’accord ? Il faudra retourner au lit pour bien te reposer. » Pricie ne réagit pas dévastée. Elle sentit soudain que sa main était frottée par une autre avec bienveillance et douceur... Elle se dit qu'elle aurait aimé que les gens de Terrae ne soient pas hais de Dieu peut-être auraient ils pu être amis. Mais Maman avait refusé de les suivre et en avait payé les frais.

« Je suis désolée qu’il t’ait laissée. Tu n’es pas toute seule ici. Il faut simplement... t’autoriser à nous regarder. »

A ces mots de l'infirmière l'adolescente Pricie avait la  gorge serrée elle ne savait plus quoi en penser.

« Ça va piquer un peu. Ça te fait très mal ? » demanda l'infirmière.

« Je suis un soldat ! » se vexa Pricie maugréant ces mots prouvant ses émotions et réactions encore bien enfantine.

« Il faudra faire attention à ne pas trop utiliser ta main blessée. Ça risquerait de rouvrir la plaie. » dit la médecin.

Pricie haussa les épaules en guise de réponse.

«  Je... » Sa voix tremblait elle hésitait : «  Je ne peux pas rester là, je dois retourner avec les Karasus ! Je suis...Je n'ai pas le droit de vous le dire...» finit elle par soupirer.

Elle leva les yeux vers l'infirmière et regarda les soins de sa main : «  Merci pour ma main et vos conseils. »

Après un silence elle se lança : «  IL va savoir que je suis là et IL va LE prévenir et VOUS serez tous en danger. » L'adolescente détourna le regard : « Monstre peut-être détestés de Dieu peut-être aussi... mais... Je ne comprends pas pourquoi mais Papa est mort en tentant de vous éviter le pire, il a raté son coup mais sans son geste il y aurait eu beaucoup plus de blessés et de pertes... »

L'adolescente encore si jeune presque enfant baissa la voix : «  C'est moi qui aurait dû porter la bombe, c'est moi et non père, mais Papa en fait toujours à sa tête. » La presque encore enfant eut un rire douloureux : «  Il en est mort. » « Et moi je suis... » Elle se stoppa, elle n'avait pas le droit d'en dévoiler plus, elle en avait déjà trop dit.

Et elle était fatiguée.

« Philos maîtrisait l'air. Mais un jour, il perdit le contrôle de ses pouvoirs et tua la dame du Feu. Le Monsieur de l'eau Zane était son nom, était amoureux de la princesse du feu Alia. Il eut tant de tristesse en son cœur que cela se transforma en colère. Philos reprit le contrôle de ses pouvoirs et créa une école merveilleuse où chacun surmontait la souffrance et retrouvait le sourire, Terrae » dit la presque encore enfant la voix frêle.

« Quand j'étais petite ma tante m'avait racontée ce conte mais ...J'ai découvert qu'à cause de Terrae, Maman a perdu la raison, Terrae n'est pas un monde pour nou...moi. » Nous car elle avait tellement l'habitude d'inclure Papa dans ses phrases, l'adolescente retenait ses larmes mais la fièvre était forte, la peine aussi. Elle  laissa sa tête choir sur les genoux de l'infirmière.

« J'aurais voulu que maman me prenne sur ses genoux au moins une fois. » dit-elle et ses larmes se mirent à couler.

—On peut être très fort et avoir mal, je réponds calmement à son exclamation.

Sa voix me déchire le coeur, mais me concentrer sur sa blessure me permet de penser à autre chose. De mettre mon attention dedans, et moins dans la tristesse et la confusion que m’animent. Pourtant, je la laisse parler. Même si tout ça me dépasse, que je ne comprends pas tout. Je lui lance un regard perdu, car je ne comprends pas qui est ce grand “IL” qu’elle me décrit, ni “LE”. Mon estomac se tord, et j’ai un peu envie de vomir — de peur. Sans mes pouvoirs, j’ai l’impression de n’être qu’une créature fragile.

Tout ce qu’elle me raconte… Quelle horreur. J’ai un souvenir très vivide, comme un flash, de cette soirée-là… Mitsuki, le mur, les blessés… Lentement, je prends une inspiration pour ne pas paniquer devant elle. Ils voulaient vraiment qu’elle se fasse exploser elle…?

—Ton papa voulait sûrement te protéger, je souffle, les yeux brillants de larmes contenues, mais la voix lasse, terminant de nouer son pansement. Tu penses que si tu es là, ça va nous mettre en danger ? Pourtant, toi, tu n’as pas l’air de nous vouloir de mal.

Peut-être. Sûrement. Sans doute. Qu’en savons-nous, au final ? Pricie reprend bien vite la parole, et me conte cette même histoire que je connais si bien… Mon coeur se serre. Je la laisse s’installer sur mes genoux, sans rien dire, et finalement, caresse doucement ses cheveux. Lentement. Tout doucement. Quelle souffrance dans une si petite fille…

—Je suis désolée qu’elle ne l’ait pas fait. Ta tante venait de l’Ancienne Terrae, pas vrai ? je reprends finalement lentement, après un temps de silence. Je connais bien cette histoire. Ma mère venait de là-bas, elle aussi ; elle me contait la même histoire étant enfant. Elle contrôlait le Feu et pouvait se rendre invisible. C’est là qu’elle a rencontré mon père, mais je ne l’ai rencontré qu’une seule fois avant sa mort. (C’est encore récent, mais elle n’est pas forcée de le savoir.) C’est vrai que Terrae permet de rendre le sourire, c’est le cas ici aussi. Je m’y suis fait plein d’amis… Ca fait bientôt dix ans que je suis ici. Si tu es ici, si tu as des pouvoirs… peut-être que Terrae est un monde pour toi quand même, finalement. (Un nouveau temps de silence.) Pourquoi ta maman a-t-elle perdu la raison ?

Oh the misery
 Everybody wants to be my enemy
Spare the sympathy  
Everybody wants to be  My enemy-y-y-y-y
 (Look out for yourself)  
My enemy(Look)-y(Look)-y(Look)-y(Look)-y  (Look out for yourself)  
But I'm ready

Pricie releva la tête et se rassit à la question de l'infirmière : « Je ne sais pas, peut-être car j'ai été méchante, Papa disait sans arrêt que je n'y pouvait rien mais... »

La voix de l'enfant se brisa : « Mais elle avait peur de moi, elle ne savait pas qui j'étais et quand Papa lui disait que j'étais sa fille elle le traitait de menteur. Elle ne reconnaissait pas Papa non plus, elle ne faisait que hurler que sa sœur devait revenir, que Terrae lui a pris et là dessus... » L'enfant leva des yeux plein de larmes vers ceux de l'infirmière : «  Et là dessus je la crois.  Terrae lui a enlevé sa sœur, sa sœur a laissé sa famille pour combler ce vide en elle à Terrae, la famille de maman allait mal et Maman a fini à  la rue mais Elle Terrae ne l'a pas aidée ! »

La voix de l'enfant Pricie se brisa : « Pourquoi Terrae ne l'a pas aidé ? »  «  Au final de ce que j'en sais Papa a rencontré et recueilli Maman chez lui, ils sont tombés amoureux, Maman a été enceinte et elle m'a vu et...elle a sombré dans la folie. » Après un court silence Pricie ajouta : «  Je crois que mettre un enfant au monde elle ne l'a pas supportée j'étais si fragile elle a eu peur de me perdre comme sa sœur avait disparu de sa vie. » L'enfant ferma les yeux quelques secondes pour accuser ses mots. «  Alors elle m' a simplement effacée de sa tête et de son existence avant que je m'efface. Papa en a été triste et m'a confiée un temps à ma tante le temps pour lui de faire le deuil de sa femme qui lui non plus ne le reconnaissait plus. »

L'enfant haussa les épaules : «  Il ne l'a jamais réussi , il a continué à la visiter seul puis avec moi un peu plus tard et ce même si dans la tête de Maman il n'y avait que l'appel de ma tante qui était partie pour Terrae la laissant seule et perdue. Et pas Papa et moi ni personne d'autre juste cet appel qui demeurerait sans réponse. Oh ma tante a déjà visité Maman mais ma Maman avait encore dans sa tête ma tante adolescente pas cette femme adulte venue la voir alors elle ne l'a pas reconnue. »

L'enfant Pricie eut un petit rire douloureux : « Maman ne reconnaît personne depuis ma naissance. » Pricie secoua la tête : « Et j'arrive à Terrae avec cette bombe, je chamboule vos vies comme j'ai chamboulé celle de ma Maman et vous m’accueillez bras ouverts ! »

Un sourire moqueur et triste à la fois se dessina sur la visage de l'enfant qui demanda : «  Vous ne seriez pas un peu masos ? »

L'enfant regarda sa main pansée : «  Merci pour le bandage. » Elle sourit à l'infirmière : «  J'espère juste ne pas vous attirer d'ennuis plus que je ne l'ai déjà fait ! » Le regard de l'enfant se voila. «  ILS sont puissants, au nom de LUI ils VOUS voient en monstres ! »

L'enfant Pricie plongea son regard dans celui de son aînée : «  Moi aussi je vous voyais ainsi mais à présent, à présent je ne sais pas quoi penser à part que vous êtes des imbéciles même si je ne sais plus ce que je vous veux, du mal ou du bien, je suis profondément mauvaise et j'appartiens à une secte dangereuse. Et je...je suis une partie importante de cette secte et si ils cherchaient à me récupérer et si ma présence les attirait ici ? Je ne sais plus comment vous voir mais je sais une chose Papa a voulu vous épargner alors je devrais faire de même. »

La peur passa dans le regard de l'enfant perdue qui demanda : «  Mais et si ma seule existence suffisait à vous blesser encore plus comme j'ai blessé Maman en naissant ? » D'une petite voix l'enfant dit alors : «  Papa ne voulait pas que je vous blesse ou il n'aurait pas tenté certes en vain de dévier la bombe de votre direction. »

La voix de l'enfant tremblait de peur à l'idée qu'elle puisse blesser Terrae contre la volonté de son père tout comme selon elle en naissant elle avait blessé la raison de sa maman. Elle frissonnait de fièvre et de fatigue également comme un bébé animal, blessée.

C’est étrange cette façon qu’elle a eue de se poser sur mes genoux, comme si elle me connaissait, alors même qu’elle me criait dessus un instant plus tôt. C’est sans doute pour ça que je ne me suis jamais sentie de travailler avec des enfants ; je n’arrive pas à gérer l’imprévisible. Son propre enfant, on apprend à le connaître ; mais un enfant inconnu, ou des tas dans une même salle de classe, c’est certain que c’est étrange pour moi.

Elle me raconte des tas de choses, me parle de son histoire, et je me tais. En réalité, je ne sais pas quoi lui dire, parce qu’il y a trop d’informations, trop de choses, trop de douleur. Visiblement, sa mère s’est effondrée, elle devait être en hôpital psychiatrique, peut-être. Je ne doute pas qu’elle ait eu des difficultés à gérer le départ de sa soeur, surtout si elle-même avait des difficultés. Mais rejeter la faute sur Terrae, c’est trop simple, comme à chaque fois. Terrae ne peut pas accueillir tout le monde, elle ne peut recueillir les gens qui déploient un Vide…

—Nous ne sommes pas maso, je souris pour toute réponse. Tu n’y pouvais rien, ils t’ont forcée. Tout comme tu n’y pouvais rien si ta maman ne se souvenait pas de toi… Elle a l’air d’être très malade, mais ce n’est de la faute de personne, et encore moins la tienne. Certaines personnes sont fragiles.

Puis elle me parle de cette secte étrange, dont nous ne savons presque rien… là encore, mon regard s’assombrit.

—Tu sais, s’ils viennent ici, nous les empêcherons de te faire du mal et de faire du mal aux autres Terraens. La situation est différente, comparativement au mois de mars. Donc ne t’inquiète pas, nous nous en sortirons. C’est aux adultes de gérer ces histoires, pas aux enfants. C’est important que tu te reposes.

Je n’ai pas vraiment l’impression que son père ait tenté de dévier la bombe, mais plutôt qu’il cherchait simplement à éviter à sa fille de mourir… La vision de Mitsuki blessée est encore si fraîche dans ma mémoire. Mes yeux se ferment douloureusement.

—Nos Masters sont très forts. Ils arrivent à protéger cet endroit. Parfois il arrive qu’il y ait des blessés, mais on s’en sort toujours. Ton existence ne nous fera pas de mal, sauf si toi tu décides de nous faire du mal directement. Mais ce n’est pas ce que tu veux, de ce que j’ai compris, pas vrai ?

« Je ne veux pas vous faire de mal, je voudrais être quelqu'un de bien et apporter du bonheur. » expliqua Pricie. « Ils ne m'ont pas forcée je voulais porter la bombe, je croyais que Terrae était le mal, je croyais que les Karasus avaient raison. »

« Je pensais ce que je faisais était bien. » L'adolescente soupira : « L'enfant que j'étais pensait que c'était le mieux. » Des larmes perlaient des yeux de Pricie.

« Mais j'avais tort, les Karasus se trompent, je ne sais pas si Terrae est réellement mauvais, je ne sais pas si Dieu est offensé mais je sais que blesser les gens n'est pas la solution ! »

Elle secoua la tête : « Je sais à présent que faire exploser une bombe n'apaisera pas Dieu, ça personne ne l'a mis dans la tête, je l'ai devinée en voyant tous ces gens de Terrae à terre. » Elle frissonna : « Et Papa fondre sous les flammes. »

Elle passa sa main intacte sur sa main pansée. « Tu crois que je peux réparer ? » Elle secoua la tête se souvenant de tous ces gens à terre. « Il y a des choses qui ne sont pas réparables n'est-ce-pas ? »  Elle avait des larmes aux yeux et bredouilla : « Je suis désolée je sais que cela ne change rien mais je suis désolée ! »

Mais cela ne suffisait pas et désemparée face à tant de poids sur ses épaules l'enfant se mit à pleurer pour de bon, trop de malheur, elle ne voulait pas être la clef de la secte, la clef destinée à détruire Terrae, elle voulait juste être une enfant juste une petite fille.

Elle voulait vivre comme son papa aurait voulu pour elle. Être libre de choisir sa voie, ses pensées, son opinion, enfin.

Mais elle doutait fortement que cela lui soit autorisée et possible.

Ma poitrine se compresse une fois de plus… C’est difficile de gérer cette émotion qui monte et menace de m’engloutir. Alors j’acquiesce simplement, consciente de l’endoctrinement qu’elle a dû subir. Evidemment qu’elle pensait faire le bien ; c’est pour ça qu’elle a souhaité le faire. On pense toujours qu’on fait ce qui est moralement juste, même les pires personnes pensent faire le bien. Mais le bien à leur manière, suivant leur propre idéologie. C’est ça la tragédie de l’être humain ; parfois, on ne se rend même pas compte du mal qu’on fait, ou alors on pense que c’est un mal nécessaire.

—Je comprends, je réponds lorsqu’elle me dit avoir voulu le faire. Je suis contente que tu aies changé d’avis… que tu nous laisses une chance.

Doucement, je caresse les cheveux de la petite Pricie. Maladroitement, j’essaie d’exprimer les questions qui me viennent.

—Tu sais, si on existe et que Dieu a bien créé les hommes, est-ce qu’il ne nous a pas créé ainsi, nous aussi ?

Je ne sais pas si je crois en un Dieu unique, ou même en un dieu tout court. Sans doute à des forces qui nous dépassent, à nos ancêtres ; mais si nous sommes là, ce n’est sans doute pas pour rien, me dis-je.

—Tu es très courageuse, tu sais. Certaines choses ne sont pas réparables, non… ce qui est détruit ne revit pas toujours. Mais on peut toujours essayer de faire de notre mieux, donner un peu d’aide, et surtout avancer… (Je caresse à nouveau son front pour dégager quelques cheveux, et je sens mes yeux se remplir de larmes alors que l’enfant s’excuse.) Même si ça ne répare pas tout, ça change beaucoup de choses, pour moi. Merci.

Et alors qu’elle pleure, qu’elle s’effondre enfin, je la laisse pleurer tout ce qu’elle a, en la gardant contre moi… Frottant son dos doucement, le temps qu’elle se calme. Et moi aussi, je pleure, silencieusement.

—Ce n’est pas ta faute, tout ça. Tu es une enfant. Ce sont les adultes qui t’ont mis de mauvaises idées en tête qui sont les coupables, pas toi. Un enfant, ce n’est jamais responsable.