Je crois que je me suis écorchée le genou. Je ne suis pas sûre, je sens une légère douleur lancinante mais je ne suis pas vraiment concentrée sur ça sur le moment. J’ai un peu de mal à supporter l’été, je dois faire attention à ma peau, je bronze très peu… Par contre qu’est-ce que je crame. Sans crème solaire, je me transforme en écrevisse. Alors je me tartine deux fois par jours, je guette les coins d’ombre, je bois du thé glacé… et si je sors longtemps, je mets mon large chapeau et pars chasser les insectes du Japon. Eh mais sans déconner, le Japon et les insectes c’est incroyable ! On est à Terrae, donc à Tokyo… donc en ville techniquement. Pourtant je suis à genou dans des buissons au bord des bois et je viens de choper un scarabée de folie. :

-Roda ! Viens voir celui que je viens de trouver ! On dirait un scarabée rhinocéros je crois…

Je l’attrape délicatement entre mes doigts. Je n’ai qu’une peur à chaque fois que je manipule un animal, c’est de lui faire mal. Mais grâce à mes pouvoirs Guérisseurs, je sais comment bien les tenir pour éviter de les blesser au moins ; certains insectes ont des membres si délicats… Aujourd’hui, en plus de voir la beauté iridescente de sa carapace, je peux voir ce qui l’anime. Je me sens tellement chanceuse parfois, d’avoir ce pouvoir… Toujours à quatre pattes, je sors à reculons du buisson en parlant à Roda qui doit m’attendre sur le chemin. :

-En tout cas il est bien plus gros que toutes les cigales qu’on attrapait en France…

Je touche la corne qui a donné son nom au scarabée. Je l’observe encore un peu avant de le relâcher… Je ne voulais pas lui faire peur trop longtemps, si c’était le cas, et je préfère ramasser les ailes de papillons que je trouve sur mon chemin. Je pense que je ne fais de mal à personne en les conservant. Je regarde le scarabée s’éloigner et j’en profite pour m’accroupir. Je réalise que je me suis bien écorchée le genou quand je me suis baissée, j’ai des feuilles qui se sont accrochées dans mes cheveux détachés, mon chapeau est de travers, j’ai mis de la terre sur mes mains donc j’en ai forcément sur les joues, EN BREF : je ne ressemble à rien. M’enfin ça ne change pas grand-chose par rapport à d’habitude.

En parlant d’habitude, où est passée Roda ?... Elle est sage mais toujours un peu excitée quand je trouve des insectes, comme si elle pensait que je lui trouvais un nouveau camarade de jeu. Mais là… :

-Roda ?

Je me retourne et elle est bien là, mais elle me tourne le dos, préférant quémander une caresse à Chiri. AH ! La présence de mon ami me fait tressaillir. Je ne sais pas d’où il peut venir ou s’il est là depuis longtemps… Mince alors, je sais que j’ai tendance à être ailleurs quand je commence à chasser les insectes mais à chaque fois ça me surprend… Et passée la surprise, je suis contente de le voir là. Bon il a l’air de zoner lui aussi, les bras ballants, à me fixer… Je sais que je suis dans un sale état Chiri hein, pas besoin de me le faire comprendre avec un regard aussi insistant ! Je me lève d’un coup en époussetant la misère comme je peux. :

-Chiri ! Je-… Erm… Salut ! Tu te promène toi aussi ?

Senri était parti courir. Car courir, c'était déjà quelque chose qu'il faisait tous les jours donc c'était normal de le reproduire. Et c'était un des seul moment où il arrivait à penser sans s'embrouiller lui-même l'esprit. Il faut dire qu'en ce moment, il se passait quelques petites choses dans sa vie.

Entre autre, le fait qu'il ait arrêté l'école pour faire des missions qui représentaient un danger plus que certain, sa sœur à Terrae et le fait que son pouvoir se soit éveillé au contact de Chou.

Bon, évidemment. La troisième raison était celle qui occupait le plus l'esprit de l'adolescent. C'était quelque chose d'assez nouveau pour lui, qu'il n'arrivait pas vraiment à réaliser. Et si son pouvoir c'était déclenché, ce n'était pour autant que le garçon avait mieux compris ses sentiments.

Une fois en forêt, il s'arrêta un moment, essoufflé. Pris un peu d'eau dans la gourde à sa taille, et décida de continuer à marcher parmi les arbres. Il essayait de comprendre la nature de ses sentiments. Il pouvait presque entendre la voix de Chou résonner tant il y pensait.

Oui, elle était clairement spéciale. Il l'entendait alors qu'il ne rêvait même pas.

Il fut sortit de ses pensées par Roda. Dès qu'il l'a vit, il posa une genou à terre pour la caresser.

Mais, si Roda était là, ça voulait dire que Chou aussi ?

Il releva subitement la tête quand il entendit la voix de Chou et se rendit compte, que depuis tout à l'heure, il entendait parce qu'elle était là ! Elle portait un joli chapeau, de jolie vêtements et avait le visage plein de terre.

Quant à lui, il était en short et en débardeur, les yeux écarquillé de surprise (et aussi par la beauté de Chou, ne nous le cachons pas). Il se redressa, doucement.

— Euh, oui, je... Je courrais.

Il posa son regard sur le genoux de Chou.

— Oh, tu es blessé ? Tu veux mettre un peu d'eau ?

Il tendit sa gourde, en essayant d'avoir l'air un peu cool, mais il avait surtout une face d'ecrivisse.

Niveau émotion, je sais pas si vous avez remarqué, mais je suis la spécialiste pour remettre à plus tard l’analyse de ce que je ressens. Fun fact, je n’analyse pas ce que je ressens plus tard. J’oublis ou je me dis que ça va mieux donc ce n’est pas important. De là à dire que ce que je ressens n’est pas important, il n’y a qu’un pas… que je vous demanderai de ne pas franchir, ne vous inquiétez pas je m’en charge. Alors forcément tout ce que j’avais mis de côté est revenu avec la puissance d’une tornade quand j’ai vu Chiri… Tout ce que j’avais laissé dans la chambre après avoir embrassé sa joue, faisant enfler mon cœur. Je ne comprends pas pourquoi… pourquoi… pourquoi je fais une fixation sur son débardeur ?! Encore ?! Crotte à la fin !... Il courrait, qu’il me dit… Mais je le vois bien ! Dans la lumière qui perce parfois entres les feuilles des arbres, la sueur faisait scintiller sa peau. Il est beau. …KSSKJFT ?! :

-Hein ? Blessée ? je lâche d’un coup en revenant sur terre, le voyant s’approcher de mon genou. Oh ça, ce n’est rien ne t’inquiètes pas ! J’ai tout ce qu’il faut dans mon sac.

Il devrait garder l’eau pour lui, vu comment il est rouge, il doit avoir chaud. C’est d’ailleurs pour cette même raison très scientifique que je rougis, j’ai chaud. Bon, ok, j’ai pas couru moi mais on est en été. Voilà. C’est pas du tout parce qu’il est adorable à vouloir me soigner alors que c’est moi la Guérisseuse ici. Gentiment, je repousse sa main qui me tend la gourde en lui offrant un sourire. Je n’ai pas du tout laissé ma main trop longtemps sur la sienne. Pas du tout. …MMH oui bref, mon sac. Je le cherche des yeux, tout en essayant de retirer les feuilles coincées dans mes cheveux. :

-Moi je baladais Roda et puis j’ai vu une araignée toute jaune… ou vert clair je ne saurais pas dire. J’ai voulu la voir de plus près mais elle a filé trop vite. Et puis il y a ce coin avec pleins de scarabées-… Ah ! Merci Roda !

Ma chienne vient de me sauver, c’est que je commençais à m’embourber dans des justifications… pour rien en plus. Roda rapporte mon sac que j’ai dû abandonner sur le bord du chemin, le trainant un peu. Je fouille un instant à l’intérieur, je décale mon désinfectant en spray, ma boîte de pansements,… et je prends mon mouchoir pour essuyer la sueur du visage de Chiri. Chrys Suede, arrête deux minutes de vouloir toucher Senri t’occuper des autres ! :

-Ça fait longtemps que tu cours ? Il faut que tu fasses attention quand il fait aussi chaud dehors.

Senri acquiesça quand Chou refusa sa gourde, en disant qu'elle avait déjà ce qu'il fallait. Elle était toujours prévoyante sur ce genre de chose. C'était normal, après tout, elle travaillait à l'infirmerie et elle était guérisseuse. Un tas de pensées du genre inondait l'esprit de Senri tandis qu'un nouveau contact entre Chou et lui se produisait. Il s'agissait là, d'une réaction à un tumulte de sentiment de panique et de joie.

La peau de Chou était vraiment douce.

Plus que celles des autres gens. En même temps, Senri n'avait pas beaucoup d'éléments de comparaison, la majeure partie de ses contacts avec autrui se faisaient à travers des gants de boxe. C'était donc, tout à fait normal qu'il soit aussi surpris, de la douceur et de la beauté qui se dégageait de la main de Chou.

Oui, absolument normal.

La jeune fille finit par expliquer à son ami ce qu'elle faisait avant qu'ils ne se rencontrent. Jusqu'à ce que Roda intervienne pour ramener de sa maîtresse à celle-ci. Elle sortit toute sorte d'équipement, ainsi qu'un mouchoir pour éponger le visage de Senri. Ce dernier, fut tout à fait surpris par la réaction de son corps. Son dos s'était très légèrement courbé pour éviter à la jeune fille de s'élever trop haut.

Quand il se rendit compte de cette réaction, il s'empourpra encore plus. Et se redressa, quittant, à contrecœur, la vue du visage de la jeune fille sous son chapeau.

- Euh, ça fait un moment, je crois. Mais je suis habitué !

Il regarda un peu ailleurs, encore un peu gêné de tout ce qui venait de se passer et de la façon dont son cœur tambourinait dans sa poitrine.

- Donc, tu... euh, chasses des insectes ? Je le faisais aussi quand j'étais petit.

Senri, en tant que Japonais vivant en campagne, était un cliché de personnage de shonen. Ainsi, dans sa jeunesse, il avait fatalement chasser des insectes avec une épuisette et un chapeau de paille qui passait le tiers du temps par terre plutôt que sur la tête du garçon.

- Mais, j'ai jamais été très doué, en fait.

Senri, en tant qu'adolescent japonais fan de shojo, ne pouvait rester de marbre devant Chou, chassant des insectes. Ce qui le poussa à prendre son courage à deux mains et à reprendre la parole.

- Je peux t'accompagner un peu ? Pour voir comment tu fais.

Et pas du tout parce que, maintenant, qu'il l'avait vu, il ne pouvait plus songeait à se séparer d'elle.

J’ai un immense sourire qui se dessine quand Chiri se baisse. Il est mignon à se soucier de moi. J’éponge un peu son front pour que la sueur ne l’aveugle pas mais je ne frotte pas… J’ai pas l’impression que ça l’aide beaucoup, il est un peu plus rouge encore… Je me demande s’il ne fait pas une légère insolation, mais quand il se redresse, il n’a pas l’air d’avoir de vertige… Bon. Je vais surveiller ça quand même. C’est mon ami, il faut que je veille sur lui n’est-ce pas ?... Bon.

Chiri enchaîne en me disant qu’il chassait lui aussi les insectes quand il était petit et je crois que mon visage s’illumine encore un peu plus, si c’est possible. Faut me comprendre, j’ai l’impression qu’en France, y’a pas beaucoup d’enfants de ma génération qui font ça… et les gens sont facilement apeurés ou dégoûtés par les insectes. Alors bien sûr, je suis toute contente de pouvoir en parler avec Chiri ! Il n’était pas doué, il avoue. Ça me fait doucement rire de l’imaginer avec une épuisette, courir dans tous les sens avant de regarder à l’intérieur pour ne rien y trouver. Puis il me demande s’il peut rester avec moi, pour apprendre. Ah ! C’est une excuse parfaite pour que je vois s’il a vraiment une insolation en plus !

Je sautille sur place en attrapant son bras, toute ravie. :

-Oui bien sûr ! Je vais te montrer. Viens !

Je me remets à quatre pattes, ayant complétement oublié mon genou écorché, pour retourner dans le buisson que je venais de quitter. :

-Les plus faciles à avoir, ce sont les coléoptères ! On en trouve partout, par terre, dans les arbres ou les fleurs,… Quand ils ont peur, ils font les morts alors pour attraper ceux dans les arbres, il suffit d’étaler un linge blanc par terre, de taper les branches et ils tombent dessus… C’est comme ça que j’attrapais des hannetons avec mon grand frère !...

Je m’arrête dans un endroit où je peux me redresser et où Chiri peut me rejoindre sans se cogner dans les branches, près d’un tronc d’arbre. Ça grouille un peu à notre passage mais ils ne s’enfuient pas tous. :

-Je connais d’autres astuces, des pièges pour les capturer sans les blesser… mais on va plutôt s’intéresser aux cigales, elles sont plus faciles à trouver ! D’ailleurs t’entends ?...

A genou, mains sur mes cuisses, je ferme les yeux… Des cigales chantent pas loin et je retombe un peu en enfance. Je retrouve mon sud. Je rouvre les yeux bien vite. :

-Euh… Les larves de cigales sortent du sol au printemps, elles muent et vont dans les arbres pour chanter et se reproduire. Alors… Hm… Ah voilà ! Je trouve une exuvie après avoir soulevé quelques feuilles. Avant de collectionner les ailes de papillons, c’est ça que je récupérais par terre… Et ça, ça veut dire qu’il y a probablement des cigales pas loin. Eeeet…

Je m’approche de l’arbre, fouille l’écorce du regard avant de repérer la cigale. Je me redresse, la tête à nouveau plongée dans les fourrés, des branches s’accrochent à la dentelle de mon chemisier, mes cheveux capturent à nouveau des feuilles,… et j’attrape l’insecte avant qu’il ne s’envole. Je retombe à genoux devant Chiri, sourire triomphant aux lèvres, puis je dépose la cigale dans sa main. Elle s’agite, un peu déboussolée, mais ne s’enfuit pas. Je ne lâche pas la main de mon ami, regardant la cigale voyager sur sa peau. :

-Tadaaa ! On a de la chance, celle-là n’a pas l’air effrayée.

Senri acquiesça et suivit Chou entre les feuillages. C'était assez amusant de noter qu'il ne s'attendait jamais à la voir, mais qu'à chaque fois, cela bouleversait totalement sa journée. Ce qui honnêtement, était loin de le déranger. Qui plus est, elle lui avait attrapé le bras, le faisant rougir un peu plus. De quoi conforter la théorie de l'insolation de la jeune fille.

Il écouta attentivement les instructions de son amie, alors qu'elle progressait entre les feuillages. Il essayait de faire de même, en s'efforçant de ne pas les secouer dans tous les sens. Cela dit, même s'il essayait de toute ses forces, il était bien incapable de s'y faufiler à la manière de Chou. Elle avait l'air de vraiment connaître son sujet. C'était attendrissant de la voir parler de quelque chose qui la passionnait autant.

Lorsqu'elle l'encouragea à écouter les cigales, elle ferma les yeux pour se concentrer. Une fois n'est pas coutume, l'adolescent se concentra davantage sur le visage serein, doux et concentré de son amie plutôt que sur le bruit des insectes autour d'eux. Et à nouveau, il écouta à nouveau son explication sur les cigales. Il fronça légèrement les sourcils quand elle lui montra l'exuvie, pour mieux la voir.

- J'ignorais que ça s'appelait comme ça !

Très vite, Chou reprit son exploration et sembla fouiller l’arbre. Elle ressortit assez rapidement une cigale. Senri la laissa prendre sa main et glisser la bête dessus. Au bout d’un moment, elle entreprit de voyager sur la peau de Senri. La sensation d’avoir quelque chose qui lui grimpait dessus était assez particulière. Mais il se contenta de la regarder, assez fascinée par ce tout petit insecte. Avant de relever la tête vers Chou qui commentait la témérité de cette petite créature.

L’adolescent regarda un moment la jeune fille, avec un sourire attendrie face à sa passion.

- C’est avec ton frère qui tu as appris tout ça ?

Je hoche la tête quand Chiri me dit qu’il ne savait pas pour l’exuvie. :

-C’est normal, enfin, je pense. Parce qu’on utilise plus souvent le terme de mue.

Oh regardez-moi. En train de faire ma nerd. Je n’arrive pas à m’arrêter, même quand je dépose la cigale sur Senri, faut que je fasse un commentaire… Le pire c’est que je pourrais faire tellement pire, genre, décrire les organes dédiés au chant des mâles… ou juste glisser comme ça, que les cigales existaient déjà à l’époque des dinosaures. En passant.

Je ne m’attendais pas à ce qu’il me pose une question sur mon frère par contre. Ça me- pas que ça bloque ma bonne humeur,… ça l’atténue ? Je suis plus calme c’est certain, mais pas triste. C’est pour ça qu’après avoir été surprise, je lui ai offert un petit sourire. :

-Oui. En fait, maman avait peur des araignées, mais je n’ai jamais aimé qu’on fasse du mal aux animaux… Alors, on se renseignait tous les deux avant de déplacer une petite bête. Savoir si elle piquait, où on pouvait la mettre pour qu’elle se sente bien, un buisson ou les hautes herbes,… et puis, j’ai fini par m’intéresser à toutes celles qui étaient dehors. Il avait fait des recherches pour apprendre à chasser les insectes, pour me l’apprendre ensuite… Ça faisait bien rire papa quand on ramenait nos trophées et que maman n’était pas bien…

Je glousse un peu… La cigale a fini par s’envoler, rejoindre l’arbre, probablement lassée par mes histoires sans importance. Je réalise que ça me fait tout bizarre de parler de tout ça. J’ai l’impression que c’était hier, et c’est tellement lointain à la fois. Ce n’est pas étrange de lui parler de ma famille ? Je ne l’ennuie pas ? Dans le doute, je préfère lui renvoyer la question. :

-Et toi ? Qu’est-ce que tu as appris avec ta sœur ?

Senri continua d'écouter Chou parler de son frère et de la façon dont il lui avait appris à chasser les insectes. Senri n'avait jamais songé au fait qu'on pouvait "chasser", sans tuer. La sensibilité de Chou face à ses petites créatures lui faisait prendre conscience de la grande gentillesse de son amie. Pour lui, quand il y avait une bête dans la maison de sa grand-mère et qu'elle ne finissait pas en bouillie, on la sortait juste dehors. Mais Chou, elle, les amenait dans un endroit rassurant, adapté.

- Tu es vraiment un ange.

Là, précisément, c'est ce genre de moment où dans les shojos le personnage pense à voix haute, s'en rend compte, panique. Le pire, c'est qu'en disant cela, l'adolescent avait gardé un visage serein, affublé d'un discret sourire.

Autant dire que quand il réalisa ce qu'il avait dit, il vira au rouge pivoine en écarquillant si fort les yeux qu'ils auraient pu rouler de leurs orbites.

- Enfin, je veux dire. C'est bien de faire ça. Les gens ne le font pas toujours. Je crois.

C'était pas très bien rattrapé, mais au moins, il avait essayé. Lorsque la conversation s'orienta sur Kaiko, sa soeur, Senri prit un moment pour réfléchir.

- Hm. Que Hyoga, il se fout de la gueule du monde.

En réalité, elle lui avait appris bien plus, mais en bon petit frère ingrat, c'était tout ce qu'il retenait.

- Elle est à Terrae, d'ailleurs. Je pense que vous vous entendriez bien.

Alors, ça, c'était bizarre. Autant dans la forme que dans le simple fait de l'avoir dit. Si, ça lui avait paru de prime à bord un commentaire sans conséquence, sans tellement savoir pourquoi, il avait l'impression que c'était différent. Il n'avait jamais vraiment tenu à présenter ses amis à Kaiko. Alors, pourquoi dire ça à Chou ?

...Hein ? Je me suis tournée vers Chiri, d'abord en pensant que j'avais mal compris. Peut-être qu'il voyait des anges -et dans ce cas, le doute sur le fait qu'il fasse une insolation n'était plus permis-, peut-être que l'oreillette traductrice était cassée. Mais je le fixe, et son visage est si doux. Et il sourit. J'ai- le cœur qui s'emballe... Eh ? Il a dû se rendre compte que c'était, enfin, c'est pas bizarre de dire un truc de ce genre à son amie, j'veux dire, je fais aussi des compliments à Alice. Oui, oui. Je pose une main sur mon cœur -c'est pas le moment de doki, doki toi !-, très certainement toute aussi rouge que Chiri, mais je lui souris. :

-M-merci... C'est juste... je me dis toujours... je me mets à leur place c'est- juste pour ça...

Oui j'applique le bon vieux "ne fais pas à autrui ce que tu n'aimerais pas qu'on te fasse" et le "ne ferait pas de mal à une mouche" d'une manière un poil extrême. Peut-être. ...Mais vous avez vu une hérine des lacs près [trigger warning pour ceux qui n'aiment pas les insectes, sont curieux mais pas assez pour taper dans google ; ce sont de petites mouches, leur ailes sont tachetées de bruns, pas seulement translucides] ?!... Enfin... oui voilà pour en revenir à ce que me dit Chiri, si j'étais aussi petite dans ce monde si grand, moi aussi j'aimerais bien qu'on m'aide de temps en temps.

Enfin, passons ce moment, vraiment, s'il-vous-plaît... Je vais en apprendre un peu plus sur Chiri et sa grande sœur, je sais pas pourquoi cette idée me fait autant plaisir mais je prends ! Par contre... C'est qui Hyoga ? Un ex ? Je sais pas et à cet instant, je n'ose pas vraiment le demander... :

-Euh... parce qu'il a fait... quelque chose de grave ?

Je ne connais pas ce monsieur Hyoga, mais je suppose que si c'était une leçon assez importante pour que ce soit la première à laquelle pense Chiri quand il me parle de sa sœur, je suppose qu'il y a une raison. :

-Oh ! Elle est à Terrae vraiment ?! Tu en as de la chance !

Je lui offre mon plus grand sourire, parce que, je sais pas mais l'idée de rencontrer la famille de mon ami me rend toute joyeuse... et un peu stressée aussi ? Pourquoi ?! Je pense que c'est parce que je suis pas très à l'aise lors des premières rencontres de manière générale, oui, c'est sans doute ça. :

-Ce sera l'occasion pour moi de faire d'autre ram- AH !

Je me jette en avant, m'étalant sur les cuisses de Chiri pour attraper l'araignée [trigger warning again : je vais décrire l'animal dans le dialogue suivant de Chrys] que j'ai aperçu entre mes mains. Elle panique un peu, je la sens chatouiller mes paumes alors qu'elle tente de s'enfuir. Je galère un peu à me redresser mais une fois que c'est fait, je suis toute proche de Chiri... J'm'en rends pas compte, je suis pour le moment trop contente d'avoir réussi à attraper le petit trésor que j'avais repéré plus tôt ! :

-C'est une araignée courge ! Enfin, Lag et moi on l'appelait comme ça... à cause de la forme de leur corps ! Quand elles naissent en automne, elles sont oranges ! On dirait des citrouilles, l'hiver elles sont marrons et au printemps, une fois adulte, elles sont vertes pour se fondre dans les feuilles ! Bon comme je lui ai fait peur, elle va vouloir vite partir... t'es prêt ?!

J'ouvre mes paumes, encore toute excitée à l'idée de voir une araignée que je connais bien, et je la regarde courir dans mes mains, chercher à s'enfuir en se faufilant entre mes doigts, me faisant doucement rire... :

-C'est un monsieur ! Hmm... il faut que je lui trouve des feuilles...

Je tends mon bras vers le buisson le plus proche mais l'araignée a décidé que le remonter serait une meilleure idée. Je ris un peu, la sensation de ses petites pattes me chatouillant bien plus que lorsqu'elle était entre mes mains. J'essaie deux fois de la guider vers les feuillages, mais c'est à la troisième tentative qu'elle arrête enfin de descendre mon bras pour rejoindre le buisson.

Quand Chou questionna Senri sur ce qu’avait fait Hyoga, celui-ci croisa les bras, un air sérieux sur le visage.

– Il n’a battu qu’un seul chevalier d’or !!! Alors que c’était mon chevalier préféré !!! J’ai eu la honte !

Dans la catégorie des grandes déceptions de Senri, Hyoga était certainement dans son top 5. A couteau tiré avec les derniers tomes du manga Orange. Il finit par acquiescer en confirmant que sa sœur était à Terrae. Chou déclara qu’elle en profitait pour refaire, ce que Senri devina comme être des ramens. Mais avant même qu’il puisse ouvrir la bouche, elle se jeta sur lui.

Senri, bien que conscient des effets qu’avait sur lui la présence de Chou avait sur lui, il n’était pas préparé à un tel bond dans sa poitrine. Son cœur accéléra tandis que ses bras s’était instinctivement contractés et tournés vers l’Air pour la réceptionner.

Après cela, Senri dut faire un effort si surhumain, dépassant tout ce qu’il avait jamais éprouvé ; il avait l’impression de porter plusieurs portes de taille et poids toujours plus grand à bras le corps. Sauf, que ce n’était pas un effort physique mais bien un effort de l’esprit, du cœur !!

Il dut donc produire tous ces efforts pour se retenir de prendre Chou dans ses bras et de ne plus jamais la lâcher.

Maintenant, qu’elle s’était redressée – Senri l’avait aidé – et qu’elle lui montrait l’araignée, l’adolescent regarda au creux de la main de Chou et, quand il eut chassé l’envie de prendre cette main, il s’intéressa à l’araignée. Son rythme cardiaque se calma progressivement.

Il regarda la petite araignée avec attention, en acquiesçant à chaque information. Il acquiesça quand elle lui demanda s’il était prêt. Attentif. Et quand Chou ouvrit la main, il regarda la petite araignée allait dans la mauvaise direction et remonter le bras de Chou. Il releva les yeux vers elle, intrigué.

– Comment tu sais que c’est un monsieur ?

Pour Senri, c’était une grande découverte qu’il existe une différence de sexe entre les araignées. Mais en y pensant, c’était logique. Mais c’était quand même une découverte.

J'ai aucune idée de ce qu'est un Chevalier d'Or et, à ce moment, j'ose pas lui demander non plus. Mais si Hyoga est son Chevalier préféré, il faut que je me renseigne sur cette histoire -il y a des chevaliers au Japon ?!... Pas tout de suite, Chiri m'a rattrapée un peu et aidée pour me relever et observer l'araignée avec moi. Je suis touchée qu'il s'intéresse autant à ma petite passion pour les petits êtres... Je me sens tellement bien que je ressens plus du tout de peine ou d'inquiétude, ces sentiments qui me lâchent jamais vraiment, même en bonne compagnie. Je peux être moi. Sans regret. De plus, j'y pense à peine ; je suis happée par le moment. Je glousse légèrement à la question de Chiri. :

-C'est parce que les messieurs sont plus petiiits~ ! Et puis j'ai l'habitude, ce sont des araignées romantiques, j'en voyais souvent dans les rosiers... OH !

La petite bébête ayant trouvé refuge dans le buisson, je me tourne d'un coup vers Chiri, attrapant son bras. Je suis toute excitée par mon idée, j'ai plus aucun contrôle sur ce que je fais. J'ai juste... les yeux qui pétillent, agrippée à lui... :

-Faut qu'on aille au champ de fleurs ! On va avoir plus d'insectes volants et colorés ! Et des papillons !...

Je me lève, oubliant qu'on est caché dans un buisson, oubliant que mon genou était encore blessé. Des branches m'écorchent la peau. Je tire le bras de Chiri, voulant l'encourager à me suivre. :

-Viens Chiri ! Viens ! Aïe aïe !

J'ai zéro chill maintenant que j'ai envie de voir des papillons.

- Oh, je vois.

Senri avait acquiescé aux précisions que Chou avait apporté. Mais, ensuite, il ne put s'empêcher de se demander, pourquoi, l'on trouvait les roses romantiques. Après, tout elles étaient recouvertes d'épines. Mais alors que l'adolescent songeait à cela, son amie lui attrapa soudain le bras en l'invitant à la suivre. Elle voulait qu'ils aillent voir le champ de fleurs. L'enthousiasme de Chou perturba un instant Senri, qui s'activa malgré tout. Comme galvanisé par l'impatience de son amie.

Alors qu'il se levait, il voyait les branches s'accrocher et écorcher la peau et les vêtement de Chou. Senri s'était levé somme toute assez lentement, et avait repoussé les branches avec ses épaules.

- Chou !! Fais attention !

Il passa ses bras autour de la jeune fille pour écarter les branches et pour permettre à son amie d'avancer. Mais c'est vrai que c'était compliqué de se mouvoir dans ces branches et feuilles. Surtout quand on avait les épaules de Senri. Il fallait trouver une solution pour faciliter leur sortie. Senri jeta un regard à Chou.

Il hésita à la porter, mais elle portait un short, certes, mais dans les branchages, ce n'était pas très pratique et puis... Il se concentra immédiatement sur les branches qui lui arrivaient dans la figure alors qu'il virait au rouge pivoine. Il continua d'écarter les branches en passant devant Chou. Avant de s'immobiliser.

- Euh. Dans quelle direction le champs de fleur ?

Il avait tourné les yeux vers elle. Puis avait vu son short. Il avait de nouveau détourner le regard, encore un plus rouge qu'avant.

Ok j'aurais peut-être dû faire attention c'est vrai. Mais ! :

-Je fais toujours attention ! Toi fais attention !

Il essaie de me protéger avec ses bras, il est très près... J'arrive pas à voir son visage avec mon chapeau large et quand j'arrive enfin à le soulever un peu, Chiri me dépasse pour se planter devant les buissons, bouclier géant... Il ne se passe plus rien pendant quelques secondes, ces secondes où je réalise qu'il n'y a quasiment plus rien qui me pique ou s'accroche à mes vêtements, avant que mon ami me demande la direction du champ de fleurs. Nouveau silence... et je lâche un rire bref. :

-Rejoins déjà le chemin, baka ! On verra ça après, quand on sera sorti des buissons.

Je pose mes mains sur ses... épaules ! oui les épaules -j'ai pas du tout failli toucher ses hanches pfft NO- histoire de pas me casser la figure la première dans son dos en avançant... Je ne suis pas particulièrement petite... enfin, ça dépend comment on voit les choses. Je suppose qu'en tant que "garçon" je fais pas bien grande. Grand ? GNEH. Mais comme Chiri est plus grand, mais aussi plus large, j'ai l'impression d'être minuscule à côté de lui... ...ça- ne me dérange pas.

Je baisse la tête pour voir où je mets les pieds avant de la releveeeEER ! NOPE. MAUVAISE IDÉE. Pas dans cette- NOOOOOO. Je préfère regarder la cime des arbres. OUI. C'est plus intéressant que ce qu'il y a en bas. Tant pis si je tombe. VOILA.

– Ah oui ! Le chemin, oui, allons-y. Et, euh, je fais attention... j’te ferais dire !!

Est-ce qu’il avait faillit dire « je fais attention à toi »? Totalement. Il continua d’avancer tout en sentant les mains de Chou sur ses épaules. Ça ne devait pas être confortable pour elle. Mais il n’osait pas lui demander de peur qu’elle le prenne mal. Alors, il se voûta, ploya légèrement les genoux pour se tasser et continuer de chasser les branches.

Ils arrivèrent finalement jusqu’à un sentier. Il se tourna lors pour aider Chou à passer.

– On y est ! Enfin, sur le chemin. Mais aucune idée de où on est sur le chemin. Mais je sais qu’on est sur le chemin. Car ça ressemble à un chemin, donc c’est sûrement lui. Je parle beaucoup, non ?

Totalement en roue libre le Senri. Ces joues écarlates n’arrangeaient pas grand choses à tout ça. Qui plus est, la traversée de la forêt avait un peu écorchée sa peau à quelques endroit et son débardeur déjà en mauvais état semblait l’être encore plus. Il était totalement débrayé. Aussi bien physiquement que mentalement.

– Je... je te suis pour la suite !

On arrive, enfin !, au chemin. Je souffle alors que Chiri m'aide à sortir des buissons, Roda nous suivant de près. Je la caresse brièvement avant de lever les yeux sur mon ami. Il répète qu'on est sur le chemin. Genre pleins de fois. Je souris en le laissant se dépatouiller avec ses mots et je regarde ses bras de plus près... Il y a des griffures et des gnions, les arbustes n'ont eu aucune pitié. J'étais sensée être là pour le réparer, et voilà qu'il m'a protégé des griffures... et d'être à moitié à poil maintenant que je le vois tout dépenaillé. Je souffle un sourire, remet son débardeur droit et je prends un de ses bras.

Je fais glisser une première fois ma main sur sa peau, le regard dans le vague, complétement concentrée sur ce que mes pouvoirs de Guérisseuse captent... La peau est endommagée, mais rien n'est trop profond, rien n'est infecté. J'inspire et ferme les yeux... Quand je passe ma main la seconde fois, mes doigts suivent la forme de ses muscles et, au fur et à mesure, ma paume soigne les petites blessures sur son passage. ...J'ai totalement oublié ce qu'on fait là. ... ... AH OUAIS ! Les papillons !!!

Maintenant que mon Chiri est réparé, on est partis ! J'ai gardé sa main dans la mienne alors quand je suis partie, je l'ai tiré avec moi. Roda s'est mise à courir, toute joyeuse,... je crois que j'ai ris à un moment. J'ai levé ma tête vers la cime des arbres, j'ai failli perdre mon chapeau mais je l'ai rattrapé au bon moment. J'ai suivi le soleil et le chemin, je suis sortie de la forêt, emportant toujours mon ami derrière moi, droit vers le champ de fleurs. Il est magnifique à cette période de l'année, blindé de couleurs et de vies.

Je suis trop contente, je sautille sur place avant de lâcher Chiri et courir vers les fleurs. Je regarde autour de moi, je repère des papillons et des coccinelles... Je tourne sur moi-même pour offrir un sourire à Chiri, faisant souffler le vent légèrement et s'envoler les insectes. Il n'y en a pas beaucoup, j'ai pas osé les déranger avec un vent trop fort -et perdre mon chapeau. :

-Tu viens ?!


HRP : BOUM ! SHOJO TIME