Alors que la conversation commençait à s'orienter vers des sujets qu'elle maîtrisait, Svea se sentait beaucoup plus à l'aise. L'intérêt manifeste d'Agate la touchait, mais sa question la mettait également dans une certaine gêne. Que comptait-elle faire plus tard ? Elle n'avait pas de réponse claire à cela. Ses études en sciences de la Terre et sa passion pour la préservation de l'environnement étaient les seules choses dont elle était certaine pour l'instant.

"Bien, pour le moment, je suis encore loin d'avoir terminé mes études, alors je n'ai pas vraiment eu le temps d'y réfléchir", avoua-t-elle, haussant légèrement les épaules.

Elle s'arrêta quelques secondes, le regard perdu dans le vague. Une idée lui vint alors à l'esprit, un idéal peut-être un peu naïf, mais sincère.

"Je crois... je crois que j'aimerais sauver la planète," déclara-t-elle, un sourire timide et déterminé sur le visage. Ses mots flottèrent un moment dans l'air, porteurs d'un espoir puissant et pourtant fragile. Sa déclaration avait ce mélange d'idéalisme et de naïveté que l'on trouve souvent chez les jeunes adultes engagés.

La déclaration d'Agate laissa Svea sans voix. Des conseils en géopolitique, des postes de professeure... Tout cela semblait si sérieux, si complexe et infiniment plus concret que tout ce que Svea avait connu jusqu'à présent. Cette femme était vraiment impressionnante.

Heureusement, la petite brisa le court silence gênant lorsqu'elle tira sur les vêtements de svea en lui demandant ce qu’etait la biodiversité. Ses yeux brillaient. Svea comprit que c'était une chance d'enseigner, d'éveiller l'intérêt d'une jeune fille pour un sujet aussi essentiel. Elle prit une grande inspiration, cherchant les mots les plus simples pour expliquer un concept aussi complexe que la biodiversité à une enfant.

"Bien, la biodiversité, c'est comme un grand puzzle," commença-t-elle, souriant à la fillette. "Imagine que chaque pièce du puzzle représente une forme de vie différente sur Terre - que ce soit un animal, une plante, un insecte ou même un minuscule microbe. Chaque pièce a une place et une fonction spécifique dans le tableau global, et toutes sont liées d'une manière ou d'une autre."

Elle marqua une pause, s'assurant que Aéna suivait toujours.

"Maintenant, imagine que certaines pièces du puzzle disparaissent, à cause de la pollution ou de la destruction de leur habitat naturel, par exemple. Le puzzle commence à avoir des trous et l'image globale est endommagée. C'est ce qui se passe sur notre planète aujourd'hui. La biodiversité diminue à cause de l'activité humaine, et cela crée de nombreux problèmes. Mon travail consiste à étudier ces problèmes et à trouver des solutions pour les résoudre."

Svea espérait que sa métaphore aiderait Aéna à comprendre l'importance de la biodiversité et pourquoi sa préservation était si vitale. Mais surtout, elle espérait que cette petite discussion pourrait allumer une étincelle d'intérêt pour la nature dans le cœur de la jeune fille.


Écoutant attentivement Agate expliquer son domaine d'expertise. Cela la faisait rêver d'un avenir où elle aurait la même confiance en elle et en son domaine.

Lorsque Agate eut fini, Svea se tourna vers la petite Aéna. Une question lui brûlait les lèvres, une curiosité sincère quant aux rêves et aspirations de la fillette.

"Et toi, Aéna, tu as une idée de ce que tu aimerais faire plus tard ?" Demanda-t-elle doucement, s'efforçant de rendre sa voix aussi accueillante et ouverte que possible. Elle se rappelait à quel point elle se sentait dépassée par ces questions quand elle était plus jeune, et elle ne voulait pas mettre Aéna mal à l'aise. Mais elle était aussi sincèrement curieuse de savoir quel genre de rêves une si jeune enfant pouvait nourrir.

Toi, tu ne sais pas ce que c’est que la recherche, mais ça a l’air bien aussi. C’est comme rechercher un trésor, c’est ça ? Enfin, tu crois, tu n’es pas sûre et comme tu ne veux pas être vue comme une enfant idiote, tu ne dis rien. Tu préfères être sage et attendre de voir ce que Svea va répondre à Agate. Surtout que tu ne sais pas ce qu’est une application concrète de la biodiversité. Tu es encore bien petite pour comprendre tous ces mots d’adultes et pour savoir que l’environnement est une chose si importante que ça.

Sauver la planète ? Tu regardes autour de vous et tu te dis que la nature va bien. Est-ce qu’il te manque des informations pour comprendre ? Oui, totalement. Timidement, tu regardes Svea et tu hésites un moment avant de poser tes questions. Elles ne vont pas se moquer de toi quand même ? Tu crois que si ?

- L-l-l-l-la pl-pl-planèt-t-te est m-m-m-malad-d-de ?

Et encore une fois, tu n’arrives pas à ne pas bégayer comme quelqu’un ayant un problème de langage. Pourtant, toi, tu n’en as pas et ça t’agace, surtout que tu ne veux pas qu’elles s’éloignent de toi. Tu veux être leur ami, toi !

Oh, Svea prend le temps de t’expliquer ce qu’est la biodiversité. C’est intéressant ! Tu fais comme elle dit en plus, tu imagines en grand, très grand puzzle avec énormément de pièces. Des centaines, des milliers, des milliards ! Oulà, ça fait beaucoup de pièces pour un seul et même puzzle. Tu crois qu’il est faisable ? Vu ce que tu as en tête, tu en doutes vraiment beaucoup, mais ça n’a pas l’air d’être le plus gros problème de l’histoire. Bah oui, un puzzle avec des pièces en moins, ce n’est plus vraiment un puzzle. C’est tout moche en plus. Tu crois que ça se répare ?

- ç-ç-ça v-veut d-d-d-dire que l-les an-n-nimaux v-v-vont part-t-tir ?

Tu ne veux pas ! Tu veux voir des loups comme ta peluche et plein d’autres animaux ! Tu ne veux pas ne plus en avoir, c’est triste ! À l’école, on t’a appris que sans les animaux, on ne peut pas vivre. Bon, tu n’as pas tout compris du tout parce que tu n’étais pas très concentrée non plus, faut l’assumer, mais si on enlève les animaux, il n’y aura plus de vous et donc plus de papa. Sauf que toi, tu veux encore de vous et surtout de ton papa. Et puis, t’aimes bien dessiner des animaux, c’est beau alors si ça disparaît, tu fais comment toi ?

Autant Svea sait expliquer à une enfant autant Agate n’a pas cette faculté en sa possession parce que tu n’as rien compris du tout. Enfin, si, que c’est super compliqué et que tu ne veux pas du tout faire ça ! Ça n’a pas l’air amusant comme travail et toi, tu veux quand même t’amuser un peu plus tard. Tu regardes un peu la rousse en essayant de comprendre, mais peine perdue…

- C-c-c’est q-quoi d-d-d-des r-r-rapport d-d-de p-p-pouv-v-voirs ?

Peut-être qu’en sachant ça, tu comprendras mieux ? Enfin, tu espères, mais ce n’est vraiment pas sûr. Et puis c’est à toi qu’on demande ce que tu veux faire plus tard. En vrai, tu n’y as jamais réfléchis, mais tu dis la première chose qui te vient en tête avec un sourire se reflétant dans tes magnifiques yeux toujours cachés par ta frange.

- Veux dessiner !

Et c’est sortie avec tellement de cœur, sans aucune réflexion que tu n’as pas bégayé une seule fois. Comme quoi, ça peut arriver, parfois, que tu parles correctement.

Sauver la planète, rien que ça.

Elle ne s’attendait pas à une réponse des plus construites de Svea, surtout pas après avoir annoncé qu’elle n’avait pas vraiment réfléchi, mais c’était quand même le beau summum de la niaiserie. Non seulement la planète n’avait pas besoin d’être sauvée, mais ce n’était clairement pas en s’enfermant dans un laboratoire que cette pauvre gamine allait atteindre qui que ce soit.

Enfin, le but d’Agate était de s’intégrer à Terrae, pas d’y être instantanément détestée. C’est pourquoi elle s’était contentée d’un « Je vois », certes accusateur, mais trop vague pour qu’on puisse le lui reprocher. Et ce faisant, elle avait écouté les petites explications sur la biodiversité — dignes d’un conte pour enfant — en continuant de marcher. Là aussi, elle aurait bien ajouté que le problème n’était pas tant la recherche de solutions scientifiques (au demeurant, et même si Agate connaissait plus de climatosceptiques que de hippies, elle savait que c’était toujours les mêmes choses qui revenaient) que leur applicabilité dans le monde réel et le fait que personne n’en avait grand chose à foutre, mais il ne fallait pas qu’elle joue le rôle de la méchante.  

Elle reprit donc la parole pour expliquer les rapports de pouvoir à l’enfant. Ce n’était toujours pas un exercice simple : dans sa tête, tout le monde savait ce qu’était un rapport de pouvoir, et elle utilisait depuis des années le terme sans jamais avoir eu à le définir. Elle y réfléchit donc un peu, et se lança :
« C’est la différence de pouvoir entre deux personnes ou deux pays. Par exemple la différence entre le Japon et un pays d’Afrique, ou… à ton échelle, la différence entre ce que peut faire un élève et un professeur, ou un élève et un adulte. Ça permet d’expliquer pourquoi il peut te dire de ranger quelque chose mais tu ne peux pas faire pareil avec lui. »

Enfin, Svea avait posé une question intéressante, et Aéna y avait apportée une réponse… Eh bien, digne du genre d’enfant qu’elle semblait être, livrée à elle-même et peu dotée du sens des réalités.
« Le dessin, c’est un bon loisir, mais il va falloir trouver quelque chose qui paie. »
C’était sa façon d’être sympathique. Craignant que cela ne le soit pas assez pour une enfant perdue et une écolo naïve, elle essaya toutefois de mitiger :
« Tu pourras y réfléchir sérieusement plus tard. »

Il apparaîtra peut-être au lecteur que cela ne faisait qu’empirer les choses, mais on ne défait pas une éducation facilement. Pour Agate, ce n’était que des évidences, et il était cruel de dire à des enfants de croire en des rêves qu’ils avaient des probabilités relativement faibles de réaliser. Si les vérités allaient s’imposer à elle, autant que ce soit tôt, avant de finir... eh bien, par exemple, comme Svea. Encore qu'elle au moins gagnerait sa vie, dans la recherche si elle était assez bonne ou en prof dans le secondaire si elle ne l'était pas.

L'ardeur avec laquelle Svea s'investissait dans ses passions était palpable. Pour certains, elle semblait même obsédée, consacrant la majeure partie de sa vie à ce qu'elle aimait. C'était sa raison de vivre, son carburant quotidien. Mais aujourd'hui, devant elle, se tenait une jeune âme pleine d'inquiétudes, posant des questions qui déchiraient le cœur.

Face à l'enfant, ses yeux emplis d'incertitude et de peur quant à l'avenir de la planète et de ses habitants, Svea répondit avec toute la douceur et l'assurance qu'elle pouvait rassembler : "Les animaux ne disparaîtront pas, car il y a des personnes déterminées qui œuvrent chaque jour pour garantir leur sécurité."

Ses paroles n'étaient pas simplement pour apaiser. Elles reflétaient une vérité profondément ancrée en elle, une conviction que malgré les défis, la compassion et l'action humaine pouvaient renverser le cours des choses. Elle voulait transmettre cet espoir à l'enfant, lui montrant que chaque génération a le pouvoir de façonner l'avenir de notre Terre.

Lorsque vint le moment pour Agate de partager son enthousiasme sur ce qu’elle faisait et ce qui la passionnait - si tant est que quelque chose pouvait vraiment la passionner -, elle sembla trouver les mots plus aisément qu’avant.

Aéna, de son côté, écoutait avec une attention qui pouvait trahir soit une véritable curiosité, soit une politesse bienveillante envers ses aînées. Il était difficile de dire ce qui l'animait réellement, mais son écoute attentive faisait plaisir à voir.

Ni Svea ni Agate ne se sont arrêtées pour réfléchir si ce qu'elles partageaient était approprié pour une personne du jeune âge d'Aéna. Pour elles, le partage de la connaissance et de l'expérience n'avait pas d'âge. Et peut-être, dans leur esprit, c'était une opportunité pour Aéna de s'éveiller à des sujets plus vastes et de stimuler sa curiosité naturelle. Après tout, chaque moment d'apprentissage est précieux, peu importe l'âge.

La réponse pétillante de la petite à une question si vaste concernant son avenir éclaira le visage de Svea d'un sourire bienveillant. Elle était sur le point de louer la passion ardente que manifestait la jeune fille, de lui dire combien c'était inspirant de voir un tel feu dans les yeux d'un enfant et de l'encourager à toujours suivre ce qui faisait battre son cœur. Cependant, avant qu'elle n'ait pu formuler ses pensées, Agate intervint avec des paroles lourdes, du genre que de jeunes oreilles ne devraient jamais avoir à entendre.

Svea, consciente de l'impact que de telles déclarations pourraient avoir sur un jeune esprit, s'empressa d'adoucir la situation.

"Écoute, pour le moment, l'important est que tu profites de ton enfance et que tu suives ce qui te rend heureuse," commença-t-elle, sa voix douce cherchant à apporter réconfort et assurance. "Chaque chose en son temps. Pour l'instant, fais juste ce que tu aimes et laisse l'avenir se dérouler à son rythme."

- T-t-tr-trop b-b-bien !

Bah oui, tu ne veux pas que les animaux disparaissent alors ça te rassure que Svea te dise que les animaux ne disparaîtront pas. Du coup, ça veut dire qu’elle, elle garantit ta sécurité ou pas du tout ? Dans tout les cas, c’est vraiment trop bien et tu as un grand sourire en imaginant des gens mettre des bouclier autour des animaux. C’est un peu bizarre comme vision, mais elle est marrante alors tu la gardes pour le moment, histoire de garder quelque chose de positif de tout ça même si c’est plutôt tiré par les cheveux.

Là, tu as compris ! Comme quoi, même Agate peut savoir expliquer à une enfant. Donc, les rapports de pouvoir, si c’est bien ce que tu viens de comprendre, c’est la différence entre deux trucs. C’est vrai que tu ne peux pas faire la même chose que Tomoe par exemple alors ça te semble logique maintenant. En fait, ça semble assez simple, mais t’as quand même pas envie de travailler dedans car ça n’a pas non plus l’air passionnant du tout ce qui est tout de même un peu triste, non ? C’est mieux de faire un métier que est trop bien !

Et puis voilà qu’Agate fait une phrase que tu trouves étrange quant à ton envie de faire du dessin. Quelque chose qui paie ? C’est vrai qu’il faut avoir de l’argent pour faire quelque chose dans ce monde, c’est ton papa qui te l’avait expliqué quand tu lui avais demandé pourquoi il était obligé d’aller travailler. Du coup, ça veut dire que le dessin n’est pas quelque chose qui donnait de quoi vivre ? Oh, mais tu n’y as jamais pensé et tu t’es toujours dis que tu t’amuserais ainsi, à toujours faire ce que tu aimes, c’est à dire dessiner ce qui t’entoure. Et puis, on t’a toujours dis que tu as du talent pour une enfant, mais ça ne veut rien dire après tout. Voilà que tu es partie dans ta tête, à réfléchir à tout ce que ça veut dire. Tu crois que tu peux trouver un vrai métier ?

Par contre, Svea est plutôt du genre optimiste parce qu’elle te motive dans le fait de faire ce que tu aimes, mais si ce que tu aimes ne te permet pas de vivre, c’est dommage… Toi, tu veux pas mourir, tu veux vivre alors tu te dis que tu dois faire comme Agate le dit et trouver quelque chose qui te fera vivre. Mais tu veux pas abandonner le dessin parce que le dessin, tu adores ça et puis, ça fait sourire ton papa quand tu les lui montres alors il faut que tu continues… Tu sais !

- J-je v-v-veux f-f-f-air-re sour-rire l-l-l-les g-g-gens !

Voilà c’est ce que tu veux, c’est rendre les gens heureux parce qu’ils sont tout plein de sourires ! Un objectif digne d’une enfant de 10 ans en somme.

À chaque mot qui sortaient de leur bouche, Svea et Aéna confirmaient qu’elles appartenaient à un monde bien différent de celui qu’Agate avait toujours connu. C’était parce que ces gens-là voyaient l’enfance comme quelque chose dont on ne fait que profiter “à son rythme” que leurs progénitures devenaient médiocres, pendant que les familles qui comprenaient l’importance d’investir très tôt dans le succès des leurs en récoltaient les fruits.

Enfin, se raisonna Agate, ce n’était ni la faute de la petite elle-même, ni celle de Svéa, qui ne donnait certes pas un très bon exemple mais avait au moins entrepris des études dans une discipline qui avait assez de vent en poupe pour qu’elle ne s’en sorte pas trop mal, à condition de se reprendre en main. Aéna, de son côté, avait besoin qu’on la reprenne en main, et la rousse ne comptait pas trop sur Terrae pour faire preuve de la rigueur suffisante.

…Restait à savoir comment répondre diplomatiquement sans laisser transparaître tout ça.

« Pourquoi pas. Mais pour faire sourire les gens, il va falloir t’en donner les moyens. »

C’était ce qu’elle trouvait de plus sympathique à dire, reconnaître que cette ambition n’était pas totalement idiote étant, déjà, pour elle, une sacrée marche à franchir. Une marche qu’elle avait toutefois, il fallait le souligner, bel et bien franchi, en faisant le lien avec ce qu’elle avait pu expérimenter de plus similaire : le désir d’être la fierté de sa famille. Elle avait fait quelques sacrifices pour être félicitée — d’aucuns diraient tous les sacrifices.  Ainsi, si elle était pointée dans la bonne direction, Agate pouvait concevoir l'idée que cette envie était à même de conduire à des résultats convenables.

Quelques instants plus tard, elle ne tarda pas à voir poindre au bout du chemin la suite de leur petite visite, et se saisit dès qu’elle le put de l’occasion de retrouver un rôle plus confortable.

« Tenez, on arrive au village, commença-t-elle, avant de pointer sa droite. Ici, c’est la grande arène où se tiennent parfois des affrontements de pouvoirs, et derrière les quartiers où vivent les Masters. »

Elle ne faisait guère que répéter ce que la carte rendait déjà évident, aussi se focalisa-t-elle sur ce qui était plus intéressant, en l’occurrence les commerces qui s’étalaient à leur gauche. L’animalerie ne risquait pas d’être très intéressante pour des personnes qui n’avaient pas d’animaux, et il n’était pas question qu’Aéna mette les pieds dans le bar de hippies qui se tenait juste en face, aussi valait-il mieux les passer assez rapidement.

« On va faire un peu tout le tour, et si quelque chose vous intéresse on s’arrêtera. » ajouta-t-elle donc en avançant, bien que ce soit évident, avant de s’aventurer dans la rue qui passait entre le parc et l’hôpital, en espérant qu'aucune des deux, et surtout pas la plus petite des deux, ne remarque l'étal alléchant du glacier.

Svea affichait un sourire tendre en écoutant Aéna. L'innocence et l'enthousiasme de la jeune fille évoquaient pour Svea ses propres rêves d'enfance, lorsqu'elle aspirait à devenir une héroïne protégeant toutes les créatures de la nature. Bien qu'elle soit en chemin pour réaliser ces aspirations, la réalité s'était révélée être bien plus complexe que les idéaux qu'elle s'était imaginés étant enfant.

Agate, quant à elle, paraissait plus sceptique. Peut-être que ses rêves à elle, comme ceux de tant d'autres, s'estomperaient avec le temps. Néanmoins, elle conservait encore cette lueur d'espoir, cette envie de croire, ne serait-ce qu'un peu, en ses idéaux.

Au fil de leur conversation, sans vraiment s'en apercevoir, elles s'étaient dirigées vers le village. C'est alors que la conversation prit un tournant inattendu.

“Des affrontements ? Mais n'est-ce pas dangereux ?” s'inquiéta Svea, un brin de préoccupation dans la voix.

Svea ressentait une aversion profonde pour la violence. Elle ne comprenait pas l'intérêt que certains trouvaient dans les combats, que ce soit la boxe, le karaté ou toute autre forme de lutte. L'idée même de se battre lui était étrangère, et elle ne pouvait s'empêcher de penser aux blessures, souvent inévitables dans ces disciplines. Cette incompréhension s'accentuait à l'idée que des personnes puissent combattre en utilisant des pouvoirs.

Elle était convaincue que leurs capacités devaient être utilisées pour accomplir des missions bénéfiques, pour apporter du bien dans le monde. Cette vision idéalisée des pouvoirs contrastait fortement avec l'idée de les utiliser dans des confrontations violentes.

Tout en marchant, perdue dans ses pensées, Svea suivait Agate sans vraiment prêter attention à son environnement. Puis, une pensée plus pratique traversa son esprit.

“J'aimerais bien acheter quelques vêtements. Je n'ai pas pu en apporter beaucoup avec moi, et ma garde-robe est plutôt limitée. Y a-t-il un magasin aux alentours où je pourrais trouver cela ?” demanda-t-elle, espérant trouver un lieu pour étoffer ses tenues.

Oh, Agate a l’air de dire que c’est difficile de faire sourire les gens… ça ne te décourage pas pour autant parce que tu juges que ton but est un très bon but alors tu vas tout faire pour devenir une personne capable de faire sourire les gens ! Tu n’es qu’une enfant alors le monde n’est pas encore trop compliqué à tes yeux même s’il y a déjà des choses sur lesquels tu as des petits problèmes comme les mathématiques… C’est pas ton truc, mais ce n’est pas quelque chose de grave. T’es sûre que tu peux rendre les gens heureux même sans le soutien des chiffres ! Enfin, tu crois.

- J-j-je v-vais y arr-rr-rriv-ver !

Tu es tout sourire alors que tu le dis fièrement. Néanmoins, ton attention est bien vite attiré par tout ce qui se présente au bout du chemin. C’est tout nouveau pour toi et ça a l’air trop bien ! Visiter avec tes deux nouvelles amies, c’est vraiment une bonne idée, surtout qu’elles sont intelligentes toutes les deux et agréables. Par contre, l’idée d’aller voir un endroit où les gens font de la magie, ça te fait un peu peur, mais tu fais tout pour ne pas le montrer. Tu dois être une grande fille et ne pas montrer que tu as peur des gens qui sont des monstres. Bon, tu n’es pas une très bonne menteuse par contre… Au moins, Svea semble de ton avis, mais toi, tu préfères regarder partout plutôt que de parler.

Quelque chose qui t’intéresse ? Tu ne sais pas trop en fait puis que tu as tout… Et puis, tu es trop petite, tu n’as pas d’argent de poche donc c’est normal que tu ne puisses pas acheter des choses. Dommage, tu regarderas juste. Oh, des vêtements ? Toi t’en as déjà trop et ils sont tous bien rangés dans ta valise non défaite. L’espoir de vite partir voir ton papa, tout simplement… Par contre, tu te dis qu’il te faudrait de nouveaux crayons pour dessiner. Tu crois que si tu en vois dans un magasin, tu pourras demander à Tomoe de te les acheter ? Ou du chocolat.

En attendant, tu attends la réponse de Agate quand au magasin de vêtements dont à besoin Svea. Ça ressemble vraiment à une sortie entre amies et ça te fait tellement plaisir que tu es toute joyeuse.