Alice entre dans les couloirs pour la première fois. Elle tire un peu sur son t-shirt. C'est très grand, Terrae. Doucement, elle vient coincer ses cheveux derrière son oreille, et s'avance à pas lent. Les murs sentent la vieille peinture, les traces de chaussures se font voir. Le batiment date un peu, mais il reste propre, c'est une bonne chose. Alice n'a pas l'habitude des grands bâtiments. Elle espère ne pas s'y perdre, même si c'est un projet prévu. Alice aime bien se perdre pour découvrir.
Alice porte son gros sac à deux bras. Elle y a quelques vêtements, mais principalement des livres. C'est tellement dur de choisir, entre toute la saga des Harry Potter, et ses vieux albums jaunis, sans compter sur ses éditions limitées de comics... Elle a décidé de ne pas choisir. Elle espère qu'elle aura une colocataire appréciable. En attendant, elle visite tranquillement. Le poids ne semble pas lui poser problème, elle porte très souvent beaucoup de livres à la fois. Ce poids est rassurant dans cet espace vide. Elle ne voit personne pour le moment, alors Alice avance. Son regard cherche à travers les interstices des portes, les fenêtres un peu plus loin. La lumière du jour se fait faible, mais Alice aime bien la nuit.
Ses pas raisonnent dans le couloir. Elle tend l'oreille... Rien. Pas même un grillon pour lui rappeler sa cabane.

Il faudra que j'écrive à papa...

C'était important, Alice se doit de lui écrire des lettres. Son père... Il est seul maintenant. A cette idée, le petit coeur d'Alice se serre. Elle ne sait pas très bien pourquoi elle l'a quitté, mais elle sait que c'est important. Qu'elle est différente. Elle doit apprendre à se connaitre. Elle secoue ses cheveux aux pointes rouges. Elle doit avoir confiance. Tout se passera bien. Et puis, Alice aime bien rencontrer de nouvelles personnes. Il doit y avoir beaucoup de gens comme elle ici. Sont-ils perdus ? A quoi ressemble-t-il ? Quelles histoires préfère-t-il ? Plutôt cacao le matin, ou café ? Alice voudrait bien les découvrir, mais elle est un peu intimidée. Elle est toujours intimidée, lorsque c'est le commencement.

Au détour d'un couloirs, devant de grandes fenêtres, Alice, déconcentrée, perd l'équilibre de son sac, qui s'écrase au sol, juste à coté de son pied, dans un gros "Pof ! ". Elle rit, en s'apercevant qu'elle aurait pu avoir mal. Puis elle relève la tête, et regarde autour d'elle... Oh, mince. Elle s'est perdue. Comme à chaque fois qu'elle reste trop longtemps dans  ses pensées. Elle reprend son sac, et réfléchit un instant. Elle cherche les dortoirs ? Non pas tout de suite. Elle veut découvrir avant. Oui. Découvrons pour le moment. Elle avance doucement.

Hors RP:

La fatigue est un sentiment agréable pour celui qui ne la ressent pas. Moi j’en suis à mon troisième jour sans sommeil et j’vous jure que j’la ressens et que j’en ai ras le cul. Déjà de base une journée dans dormir c’est pas la chose la plus agréable au monde, on se sent à côté de ses pompes et ralenti. La troisième journée c’est la pire de toutes, c’est celle qui te dit fuck the world de toute manière ton cerveau a été remplacé par de la purée mousseline. Je suis juste claquée et à bout de nerfs pour que dalle…
Que dalle ? Oui en effet c’est loin d’être un problème de vie ou de mort qu’il fasse si chaud à Tokyo ses derniers temps. Bon, en vrai une petite canicule est potentiellement un problème de vie ou de mort pour une partie de la population dont je ne fais pas partie… (Et éventuellement une solution à un problème de surpopulation, d’augmentation du prix du logement, et pour parler franchement, aux politiques économiques budgétaires de merde, enlevez un poids à la société, elle évolue beaucoup plus sereinement…) Mais pour l’heure cette foutue canicule va avoir ma peau, j’vous jure !
Déjà devoir porter des bas de contention en hivers c’est pas le gros kiff de ma life, mais en été… En été c’est vraiment un supplice ! Je transpire plus de trois litres d’eau des pieds j’en suis certaine ! J’ai essayé de pas les mettre, j’ai fini avec les jambes en forme de poteaux et des vertiges en fin de journée. Faut pas déconner avec les oedèmes des membres inférieurs parait que c’est un signe d’alerte… Adieux petites sandales salutaires, bonjour ballerines trop chaudes… Le pire dans l’histoire ? C’est que je ne peux pas mettre de mini-jupes parce que sinon on voit le haut de mes bas et c’est moches (oui je sais on mérite ce qu’on a et bla et bla et bla…) Bref c’est l’horreur la journée et quand vient enfin la nuit rédemptrice je me retrouve comme une conne à espérer que le thermostat repasse sous la barre des trente degrés, ce que ce connard ne fait pas. Donc je ne dors pas et je meurs le jour suivant. J’aimerais tellement pouvoir retourner à la piscine, mais j’ai fait trop de grabuge la dernière fois que j’y ai foutu les pieds pour qu’on m’y accepte encore. Le monde entier s’acharne contre moi.

Aujourd’hui j’ai décidé que j’allais tenter d’aller m’trouver un coin pas trop chaud ni trop fréquenter… Les salles de classes sont des endroits désertés pendant les vacances… Et comme j’suis passé hier pour y fermer les volets elles devraient potentiellement être fraiches… Enfin toujours plus que ma chambre… JE VEUX RETOURNER A LA BIBLIOTHEQUE POURQUOI ILS ME FORCENT A PRENDRE DES VACANCEUH ? Ouai j’ai grave la rage de ma life là sisi.

Un grand bruit me fait sortir de ma pseudo-rêverie où je râlais en ralliant un endroit potentiellement frais. Je me crispe, ça doit être un couillon qui s’est perdu (oui je ne vois pas d’autres raison d’aller arpenter les couloirs des salles de classes pendant les vacances…) (à moins que quelqu’un n’ait eu la même idée que moi ?) (MAIS GENRE JE VAIS TE LE DEGAGER DE LA VITE FAIT !) J’entends les pas se rapprocher je m’arrête dissimulée par l’angle d’un couloir et attend que l’importun (ou l’importune) le franchisse pour gueuler vachement fort :

« BOOOOOOOOOOOOOOOUH ! »

Et me foutre à rire comme une débile. Okay, quand j’manque de sommeil je crains.

Hors RP:

Alice marchait tranquillement, elle se perdait dans ses pensées. Doucement, elle s'en va, elle réfléchit, tout en marchant et en suivant les couloirs. Son regard est vague, son cerveau en mode automatique lui fait perdre la notion du temps.
Son père... La cabane... L'internat... Un pouvoir... Elle est si étrange que ça ?... Maman... A-t-elle bien pensé à prendre ce livre ?... Tant de choses à penser. Son arrivée toute récente a bouleversé son petit train de vie tranquille. Elle a hâte de découvrir les cours, les autres élèves. En y pensant, Alice appréhende un peu... A quoi ressemble-t-il ? Elle espère profondément qu'ils ne parlent pas trop fort, comme beaucoup trop de gens dans ce monde. Le silence est bien plus doux et assourdissant à la fois qu'une dispute d'idiot. Et il comporte beaucoup plus d'intérêt également.
Et puis, découvrir qui elle est réellement. Quels sont ses pouvoirs, pourquoi, quelle est sa...

Un cri retentit d'un coup juste à coté de son oreille. Alice recule brutalement de deux pas. Expression crispée, mâchoires serrées, pupilles dilatées, bras en avant... Elle a vraiment eu très, très peur. Pourtant ce n'était pas une attaque surprise simplement... Simplement quoi d'ailleurs ? Alice se concentre sur la source de ce cri : une jeune fille. Alice la détaille rapidement : blonde, ses cheveux sont longs... Qu'elle est jolie... Elle a même un chouette pantalon, elle doit s'y sentir vraiment bien dedans. Puis Alice décide de tenter de lui parler et... Violets, ses yeux sont violets. Les yeux de Yang étaient violets... Alice se ressaisit, et plante son regard clair dans celui de la jeune femme.

« Bien joué, j'ai vraiment eut très peur. »

Et puis Alice sourit. Elle sourit d'une façon douce qui enveloppe cette fille, elle ne paraît pas du tout dérangée par ce que la demoiselle vient de faire. Elle l'accepte avec simplicité... Et ne cherche même pas à se venger ou quoi que ce soit.
Elle se rend compte alors qu'elle est épuisée. Sa façon de rire est vide, elle rit parce qu'elle rit, elle doit être exténuée. Ses yeux aussi, ont l'air épuisés. De grands demi-cercles noirs soulignent ses jolis yeux. Qu'est-ce qui a bien pu la mettre dans cet état. Alice n'est pas inquiète : si c'était grave, elle ne serait pas là.

« Tu n'as pas dormi depuis combien de temps ? »

Sa voix est douce, protectrice, mais pas maternelle pour un sous.
Mais... Elle est habillée bien trop chaudement. Certes, son pantalon est bien joli mais qu'est-ce qu'elle fait accoutrée d'un tissu aussi chaud en pleine canicule. Alice, ornée d'une robe rouge chatoyante qui s'arrête au genou, se sent presque dénudée devant cette fille aussi enveloppée. Cela la fait sourire, au moins, elle n'est pas la seule à ne pas être en uniforme.

Assise sur le fauteuil je ne peux pas vraiment bondir sur la jeune femme, j’dois avouer que ça gache un peu l’effet de surprise… Mais l’intention est là, j’ai bien envie de me distraire un peu à ses dépens. Quoi ? C’est mal ? Ce n’est pas comme si j’l’avais harcelé ou quoi, j’l’ai juste fait sursauter. Puis la gueule qu’elle a fait, boudiou. C’est tellement bon ! Tiens en parlant de sa gueule, je ne la connais pas, ça confirme peu ou prou mon pressentiment : novice perdue. Je n’oublie jamais un visage inconsciemment (et j’ai tellement de mal à me forcer à oublier…) (en général je pense juste à autre chose…) (fuir plutôt qu’affronter ce qui est immuable ce n’est pas de la couardise mais de l’intelligence quoi…)
Elle a l’air d’avoir eu vachement peur et au fond de moi je suis juste trop fière de mon coup, quoi je devrais ressentir un peu de culpabilité ? Non, la culpabilité je la réserve pour ce que je n’assume pas. Là non seulement j’assume mais en plus je revendique, vous auriez vu sa tronche vous comprendrez. Faut pas te perdre dans tes pensées ma belle, tu risques de croiser des gens comme moi pour te foutre la trouille. Okay je jubile, je sais en plus que c’est pas drôle mais que voulez-vous ça m’éclate !
Et si elle avait un problème au cœur et qu’elle m’avait fait une crise cardiaque dit le petit relou du premier rang ? Non mais regardes-moi ! Je suis un défibrillateur à pattes ! Si c’est pas beau la vie, j’aurais pu relancer son cœur (ou en faire un steak cuit mais je le nierais fermement…) C’était absolument sans risques… Puis je dois vous rappeler que c’est elle qui est venue empiéter sur mon territoire. Les étudiants c’est censé fuir les salles de classe.

HEP MAIS D’OU TU MATES MES CERNES ! Mais c’est perso, tu ne veux pas regarder sous ma jupe tant que tu y es ? Bon, certes c’est un panta-jupe, mais je ne t’ai pas demandé combien tu pèses ! On n’a pas élevé les torchons et les serviettes ensembles. Bon okay, je suis grave en manque de sommeil. Là même moi j’me rends compte que mon cerveau est à côté de mes pompes.

« Un certain temps. »

J’vais pas te dire que ça fait trois putains de nuits que j’ai pas réussi à dormir, soixante-dix-neuf putains d’heures depuis mon dernier somme, et j’t’épargne les minutes et les secondes d’accord ? Putain mais j’veux une chambre froide ! J’veux des somnifères, je sais pas quoi… Mais j’en ai marre :

« D’après toi combien de temps mettrait une glace au schtroumpf à fondre ici ? »

J’ferais bien le test, genre chrono plus caméscope. Juste pour prouver qu’il est physiologiquement impossible de dormir ici avec cette chaleur. Comment aucun rapport ?

Alice remarque la joie de la jeune femme. Elle a l'air réellement fière de son coup. Cela ne la dérange absolument pas. Elle se dit que quelqu'un d'autre aurait pu mal le prendre, l'engueuler, se mettre en colère... Mais à quoi bon ? Cela la rend heureuse, il n'y a aucune raison d'être en colère. La jeune femme a l'air plus âgée qu'elle de quelques années. Pourtant, son attitude, son regard et sa façon de lui parler ne ressemble pas à son âge. Et puis Alice se rend compte qu'elle aussi a du faire face au Vide.
Un certain temps ? Alice l'interprète comme beaucoup de temps.

« D’après toi combien de temps mettrait une glace au schtroumpf à fondre ici ? »


Cette question la surprend un peu. Elle finit vite par comprendre que sa question est en rapport avec la chaleur actuelle. Ainsi, elle n'aime pas la chaleur, et cela l'empêche même de dormir. C'est ennuyeux, en effet. Alice, elle, adore la chaleur. Elle peut évoluer avec facilité, et a la chance de ne transpirer qu'après un gros effort et à un stade de chaleur déjà assez élevé. Elle adore sentir l'air chaud tout autour d'elle. La nuit pour dormir, elle ne porte presque rien et se glisse sous un drap fin. La chaleur l'assomme un peu et très vite, elle s'endort... Mais il est fort probable que la fille en face d'elle ait déjà tenté cette solution, sinon elle ne serait pas épuisée à ce point.

« J'imagine qu'il lui faudrait... »

Alice réfléchit rapidement, et répond quasiment instantanément :

« Deux minutes et des poussières, si tu veux que la glace deviennent réellement liquide. »

Alice sourit doucement. Malheureusement pour la demoiselle, elle n'a aucune solution miracle pour échapper à la chaleur, à part éventuellement s'enfermer dans un frigo... Mais ce n'est sûrement pas une bonne idée. Alice aimerait pouvoir l'aider... Et voilà, sa nature reprend le dessus, et comme elle peut, elle réfléchit au meilleur moyen que pourrait trouver la jeune femme pour dormir. Boire de l'eau. S'allonger, fermer les yeux et se concentrer sur l'image d'une rivière. Alice pourrait lui lire une histoire ? Elle adore raconter des histoires aux autres, lire à voix haute et partager un univers seulement par des mots. C'est si beau de lire aux autres, être ensemble tout en s'éloignant dans un monde de mots communs qui nous offrent des visions propres à chacun.
... Mais non, vu son comportement, ce n'est pas une bonne idée... Alice semble hésitante. Pourquoi pas après tout ? Et puis, elle n'a pas l'air nouvelle, si jamais elle refuse, Alice lui demanderait simplement où se trouve les dortoirs des novices et s'en irait... En espérant qu'elle ait la gentillesse de ne pas lui compliquer la tâche. Alice retient un soupir. Elle pense trop... Mais elle a était confrontées à tant de situations absurdes de la part des autres qu'aujourd'hui, elle réfléchit à toutes éventualité. Finalement, elle se décide.

« Sinon, je m'appelle Alice. Si tu veux dormir, je peux te proposer de te lire une histoire. »

Evidemment, le ton d'Alice parait tout à fait naturel. Elle est sûre d'elle, et lui propose ceci comme si c'était tout à fait courant... Après tout, est-ce plus logique de se présenter à elle en lui hurlant dessus ?

Je crois qu’il y a un gros problème chez moi en ce moment. J’ai l’impression que ma bouche est une usine à conneries, je dis d’ailleurs presque toutes celles qui me passent par la tête avec le plus grand sérieux… Oui je suis très sérieuse quand je demande le temps qu’il faudrait à une boule de glace pour fondre ici, c’est une manière de déterminer si j’ai des chances de pouvoir venir y pieuter ou si je dois me résoudre à me taper la tête contre un mur pour pouvoir dormir. En toute franchise ? Je préfèrerais la première option mais les mots de ma jeune camarade me détrompent.

Enfer et Damnation, pourquoi tant de haine ? Ce monde est grave cruel ! Vous croyez que je peux me griller les neurones temporairement pour déconnecter ou que je risque de me retrouver avec un cerveau ressemblant à du flamby comme celui de Michigan. Dans l’doute l’option du mur me semble vachement attirante. Je suis littéralement en train de péter un câble dans ma tête. Bien évidemment j’ai déjà passé plus de temps que ça sans m’allonger sur un lit, mais même lors de mes entrainements les plus ardus, j’arrivais toujours à grappiller quelques poignées de minutes par-ci par-là. A cette époque-là je ne réfléchissais pas, uniquement concentrée sur mes ordres mon esprit et mon corps étaient bien plus dociles.
Là… Je crois que je vais vraiment me taper la tête contre un mur j’vous dit. Bon, j’peux encore essayer de me distraire un peu aux dépens de la petite novice, mais comment dire ? Ce n’est que pour repousser l’inéluctable. J’ai perdu mes longues jambes et si j’abîme mon petit minois, j’aurais vraiment plus rien pour moi. Vous comprenez ma douleur n’est-ce pas.

Sa proposition vient troubler mon monologue intérieur. J’la regarde perplexe, est-elle sérieuse ou cherche-t-elle à se venger en se payant ma trogne ? A sa place j’aurais cherché à me venger mais elle est sérieuse. Elle est étrange, peut-être un peu simplette non ? Bah, après tout c’est pas mes oignons. J’peux tenter sa méthode, si ça m’évite de me retrouver défigurée pourquoi pas ?

« BONNE IDEE ! Allez je te présente à ma chambre c’est décidé ! »

Parce que clairement NON je dors pas sur ce fucking fauteuil… Déjà c’est chiant d’passer la journée dessus j’vais pas en prime me le farder pendant la nuit. Puis que ce soit clair, comment je fais pour me retourner toutes les quatre-vingt-dix minutes… Vous savez le pire dans l’histoire, j’viens de me rappeler de ce détail. Je hais les escarres d’accord, j’les encules. J’ai pas dormi depuis je sais plus quand, alors j’prends le risque si elle m’endort je DORS.

« Allez viens suis moi ! » je la guide dans les couloirs de Terrae pour atteindre le dortoir des tonnerres « Moi c’est Ipiu sinon, j’suis tonnerre, si tu vois des ampoules griller dans les couloirs ne t’en formalise pas, c’est les initiés qui se disputent avec. »

Les tonnerres sont parfois bien con quand ils étrennent leurs pouvoirs. Nous voilà bientôt devant la porte de ma chambre, c’est le bordel… Avec Aaron dans les cartons j’peux plus le motiver à venir ranger ici… Aussi un gros tas de linge sale dépasse de la corbeille et des livres trainent partout en hauteur. Le sol par contre est dépourvu de tout objet l’encombrant… Je tiens à pouvoir circuler :

« Bienvenue chez moi. »

Le doute envahi Alice, devant la mine perplexe de sa camarade. L'idée ne lui a pas plu... En même temps, quelle idée. Rares sont les gens qui comprennent qu'une histoire peu apaiser, calmer, et permettre de se reposer. Puis la jeune fille s'exclame, et Alice affiche une mine surprise. Alors comme ça, elle l'accepte. Très bien, cela lui fait plaisir, et elle affiche un petit sourire. Elle accepte et la suit, docile. Alors comme ça, la jeune fille a l'air réellement motivée. Alice ignore à quel point elle désire dormir, mais elle espère pouvoir l'aider, au moins pour pouvoir connaître ses réactions dans une situation normale.
Elle suit donc la jeune femme le long des couloirs, en observant tout autour d'elle. Alors, Ipiu est tonnerre... Et dire qu'Alice ne sait toujours pas qui elle est. Cependant elle suit la jeune femme avec docilité.

« Enchantée. Je retiendrai, merci. »

Elle regarde autour d'elle les couloirs changer, ce ne sont plus des salles de classes, mais bien des chambres, plus ou moins individuelles. On a dit à Alice qu'elle serait tout d'abord dans un dortoir, alors ce ne doit pas être ici. Néanmoins, s'il elle réussi, elle atterrira dans un endroit de la sorte un jour. Alors elle regarde, les lumières grillées, la lumière qui passe par les quelques fenêtres, les portes plus ou moins décorées. Il doit y avoir des personnages de tout âges, avec des goûts différents... Mais ici, ce sont majoritairement des décorations franches.
Alice aimerait pouvoir rejoindre le rang des initiés elle aussi. Savoir qui elle est, se trouver un peu plus. Mais pour le moment, elle passe la porte de la chambre d'Ipiu. Alice s'arrête un temps pour observer. L'espace est libre au niveau du sol... Logique, pour qu'elle puisse se déplacer. Par contre... C'est très en bazar tout autour. Du linge sale, des lits mal faits... Et des livres, partout partout, cachés, tombés, chamboulés. Mais des livres. Aaaah, chouette. Un environnement familier.

« Merci. Est-ce que tu as une préférence pour une histoire en particulier ? Ou j'improvises ? C'est comme tu préfères. »

Alice a de nouveau son regard calme et doux. Elle sourit à la jeune femme, attendant avec une tranquillité surprenante sa décision.

Un point positif pour miss mèches de feux, elle sait de quoi je lui cause quand je parle de tonnerres. Ou du moins elle ne relève pas, ce qui somme toute est une bonne chose. J’en ai marre de passer mon temps à expliquer ce que sont les pouvoirs… Je vous jure, les masters font grave pas leur job sur ce sujet ! Ils abusent, et moi j’passe ma vie à expliquer le pourquoi du comment aux gens. Et j’en ai marre, alors la prochaine fois je raconterais de la merde que j’enroberais sous couvert d’une histoire tout aussi crédible que celle de Terrae. Ouai parce que là on vous implante des pouvoirs parce que vous avez ressenti le vide… C’est un peu creux, j’suis certaine que je peux faire mieux avec un peu d’imagination.

« Tu peux t'asseoir où tu veux, j’ai gardé une chaise de bureau pour les invités. »

Tiens elle ressent un sentiment de familiarité en rentrant dans ma chambre ? Elle doit être bordélique elle aussi… Je réfléchis à sa proposition, en fait j’ai juste pas fait gaffe à la langue qu’elle parlait. Du coup je ne sais pas quel genre de livres ou d’histoire j’pourrais lui faire me lire… Si j’avais fait un peu plus gaffe à son accent j’aurais pu deviner plus ou moins la mythologie dans laquelle elle avait grandi et les contes qui avaient parsemés son enfance… Mais évidemment j’avais la tête ailleurs, erreur de débutante. J’imagine que je perds mes vieux réflexes, et ce n’est peut-être pas plus mal.

« Et si tu me racontais ton histoire préférée ? »

C’était un bon moyen d’en apprendre plus sur les gens. Par exemple mon histoire préférée était celle du monstre sans nom… Comme quoi. Je suis certaine que Freud trouverait ça comique, même moi j’trouve ça comique. C’est grave l’histoire de ma vie en fait… Enfin, une sorte de métaphore. Bref, on s’en fout.
Je tire mes draps, enfonce les freins de mon fauteuil et utilise le truc qui m’aide à faire des transferts compliqués. En gros c’est un guidon sur lequel je me hisse à la force des bras et qui tourne à droite quand j’appuie à droite et à gauche quand j’appuie à gauche. Sans ce truc je serais obligée de vivre en milieux hospitalier, ou du moins avec du personnel soignant (ce qui serait mieux sans doute)(mais ça existe pas à Terrae)(je veux pas vivre à l’hosto okay ?) Je m’installe sur mon lit avant de me pencher pour défaire les freins du fauteuil et le pousser vers la tête de lit. Ensuite je remonte mes jambes dans le lit en les portant avec bras, les soulevant au niveau du genou, l’une après l’autre. J’en profite pour retirer mes bas de contention et les jeter sur la pile de linge sale.
Je m’allonge sur mon oreiller, éreintée par toutes ces préparations, je regrette un peu le temps où il me suffisait de me jeter sur mon lit pour m’endormir…

« C’est quand tu veux ! »

Alice cherche des yeux la chaise et va l'emmener près du lit. Elle laisse le temps à Ipiu de s'installer tout en réfléchissant. Alice est curieuse, que va-t-elle lui demander comme histoire à raconter ? Une histoire qui fait peur ? Une histoire douce ? Ou alors peut être qu'elle en a aucune idée... Alice a quelques propositions si jamais elle ne sait pas, vu le tempérament de la jeune femme, elle a bien quelques histoires intéressantes...
Son histoire préférée ? Cette réponse la surprend un peu, on lui demande rarement ce genre de chose. C'est quelque chose de personnel, son histoire préférée... Mais pourquoi pas après tout. Alice réfléchit alors, sans rien ajouter, à quelle histoire elle va faire référence. Elle a plusieurs histoires... Une histoire qu'elle aime vraiment beaucoup, suffisamment pour pouvoir amener Ipiu avec elle dans sa tête...
Ok. Elle a trouvé.

« Je vais te raconter l'histoire d'Alba. C'est une histoire qui se passe en Afrique. J'espère que ça te conviendra. »

Alice attend patiemment que sa jeune camarade tire ses couettes et s'installe confortablement. Il faut se sentir bien pour partir dans une histoire tout en entier. Alors, Alice s'assoit le dos contre le dossier de la chaise, pose ses mains sur ses cuisses, et raconte tranquillement.

« Alba a 5 ans aujourd'hui. Elle est assise sur une pierre devant la maison, et elle attend. Elle attend le retour de son père. Il lui avait promis d'être de retour pour ses 5 ans. Son père n'arrive pas. Alors Alba demande à un groupe de fourmis qui passait par là : « Avez-vous vu mon papa ? ». Les fourmis répondirent qu'en effet, elles l'avaient vu le matin même, très tôt, et qu'il était parti vers la forêt. »

La voix d'Alice devient douce, grave, et très calme dès qu'elle commence à raconter son histoire. Alice vit son histoire pour tenter de la faire vivre de la sorte à Ipiu, elle veut l'emmener dans son monde.

« Alors Alba décide d'aller dans la forêt. Elle marche, un long moment, sans trouver son père. Alba entend le chant des grenouilles, alors elle décide d'aller leur demander si elles ont vu son père. « Bien sûr ! Répondirent les grenouilles. Il est passé par ici il y a quelques heures. Il a dit qu'il se dirigeait vers la savane. » Alba remercia poliment les grenouilles, et se dirigea vers la savane. Elle marcha longtemps. Elle croisa des oiseaux avec de longues pattes qui lui indiquèrent le cœur de la savane. Alba marchait depuis le début du matin, et le soleil était maintenant bientôt en train de retomber dans le ciel. Alba s'arrêta pour demander à un groupe de zèbres s'ils n'avaient pas vu son papa. « On a vu ton papa, ce matin. Il a dit qu'il voulait voir le ciel. ». Alors Alba s'assit, elle en avait assez de chercher.
Elle avait 5 ans aujourd'hui, et son papa n'était toujours pas avec elle. Et puis elle vit deux girafes s'approcher paisiblement. Elle dresse la tête, et demanda doucement « Excusez-moi, vous n'auriez pas vu mon papa ? ». La plus grande girafes baissa la tête, et posa ses yeux aux longs cils sur le visage de la petite fille. « Oui j'ai vu ton papa Alba. Il a dit qu'il t'aimait beaucoup, puis qu'il voulait voir le ciel. Alors je l'ai fait monté sur mon cou. » Alba demanda si elle pouvait aussi le faire. Alors la girafe laissa Alba escalader son cou, et se redressa lentement. Alors Alba ouvrit grand ses yeux. Elle voyait tout. La savane, la forêt, même la plaine avec sa maison. Elle comprit pourquoi son papa voulait voir le ciel. Elle voyait tout. Les zèbres, les hippopotames, les grands oiseaux, elle entendait les rénettes. »

Alice se tait doucement, sa voix envoûtante s'éteint. C'est la fin de l'histoire. Elle relève la tête. Alice fixait le vide en racontant son histoire et n'avait pas fait attention. Elle pose ses yeux sur Ipiu, pour voir l'effet qu'elle a eu.

Tiens, elle ne me dit rien celle-là, pourtant je suis plutôt calée en contes pour enfants. J’dirais que c’est un peu ma passion, ce qui en soit est bizarre venant de moi. J’ai quelques souvenirs assez flous d’une femme me lisant des comptes alors que j’étais très petite. Ouai, quand je dis que c’est super flou, c’est que j’en ai presque un souvenir, genre le souvenir du moment vous voyez, sans me rappeler le moment. Un peu comme si je me souvenais m’être vue sur une photo sans me souvenir du jour où elle avait été prise. C’est plus clair ?
Hm, un protagoniste haut comme trois couilles à plat ventre et sans doute super mignon ? ça le fait assez comme choix de héros d’un conte. En général l’élément perturbateur est plus simple. Quoi que… Enfin là c’est pas superbement méchant, son père s’est pas pointé pour son anniversaire. Bon déjà à ce niveau de l’histoire on se doute que le paternel il est soit mort, soit retenu par des trolls quelque part dans la forêt. Bon, peut-être des panthères vue que l’histoire se passe en Afrique… Des Djins, mais me semble que l’Afrique où il y a des forêts n’est pas la même que celle où il y a des djins… des esprits peut-être ?
Ouai par contre la fin libre comme ça j’aurais pas osé. C’est nase, alors il est mort et il est au ciel ? Ou alors Alba elle le retrouve sur le cou des girafes ? Genre ils pourraient se faire une course à dos de girafe et voir qui arrive le premier. Ça ça serait fun, j’attends la suite et ça ne vient pas. J’la regarde complètement frustrée :

« C’est tout ? »

MAIS REMBOURSEZ ! J’me redresse sur le lit attrapant un coussin pour le serrer contre mon torse essayant de passer ma frustration sur le pauvre objet qui n’a rien demandé. Je soupire.

« D’abord, pourquoi elle a abandonné ses recherches ? Enfin, son père elle l’aimait pas vraiment ou quoi ? Puis elle aurait pu demander de l’aide à sa maman ! D’ailleurs sa mère elle faisait quoi ? Non parce que la gamine elle est partie dans la forêt toute seule hein ? J’veux pas dire mais elle s’est barrée toute la journée ! »

Ouai, je viens de rentrer dans cette catégorie de gens qui rendent responsable les parents du petit chaperon rouge responsable du meurtre de mère-grand. Bref, je suis rentrée dans le camp des connasses mal baisées et en manque de sommeil…

Alice a un sourire amusé quand elle voit qu'Ipiu continue d'attendre la suite. Une enfant qui n'a pas comprit, encore une... Elle laisse échapper un rire en la voyant se relever. Cependant, son rire est dépourvu de toute moquerie, le fait qu'elle soit aussi impatiente, et qu'elle ne veuille pas la fin de l'histoire l'amuse énormément. Elle lui sourit, le sourire calme qu'ont les conteurs du soir, ceux qui racontent les histoires dans les chalets des montagnes, avec le regard qui a déjà vécu les histoires, et qui les a racontées maintes et maintes fois.

« Calme-toi, rallonge-toi, s'il te plaît. »

Alice connait les personnes qui veulent la fin de l'histoire, qui refusent de créer la leur. Elle en a rencontré bien trop souvent, et a même était comme eux. Cependant, Alice a apprit à accepter la fin de l'histoire comme elle est, et si elle en a besoin, s'invente la fin, toujours différente à chaque fois. L'histoire d'Alba n'est pas sa préférée pour rien. C'est tout d'abord la première histoire qu'elle a su lire avec sa maman. Elle voulait déjà une vraie fin, sa mère ne la lui donna jamais. Alice a ensuite connu l'histoire pendant les voyages de sa mère. Alba cherchait son père, Alice attendait sa mère. Et un jour sa mère ne revint jamais. Alice n'entreprit aucun voyage, mais Alba le fit pour elle. Et puis, Alice, tout comme Alba, attendit son père. Elle partit à ses cotés, pour aller le chercher, essayer de le trouver. Son périple fut bien plus douloureux que celui d'Alba, bien plus long. Et un jour, Alice comprit que la fin de l'histoire ne pouvait pas être changée, elle comprit que la fin de l'histoire est propre à chacun, car chaque lecteur est un voyageur différent, chaque lecteur entreprendra un voyage aux cotés d'Alba qui différera des autres.

En voyant la frustration d'Ipiu, Alice secoue légèrement la tête. Décidément, cette fille a besoin de tout, d'un coup, tout de suite. Elle se cale un peu dans son dossier. Sa voix est calme, basse.

« Alba aimait son père, c'est pour ça qu'elle l'a cherché. Elle a simplement décidé qu'elle l'a trouvé. »

Quand Ipiu parle de sa mère, le regard d'Alice se voile petit à petit. Elle ne sait pas trop quoi répondre à Ipiu... Oh, est puis après tout, Alice peut bien raconter sa version actuelle. Plongeant ses yeux glacés dans ceux d'Ipiu, elle lui répond simplement :

« Sa mère est morte. Alba n'est partie que pendant une journée, son père est parti pendant trop longtemps pour revenir. Alba ne peut pas faire revenir son père. »

Elle croise les bras, et lui lance, avec un peu plus de douceur.

« Si ça ne te conviens pas, raconte-moi la fin de l'histoire. »

Elle me parle comme à une gamine ? ATTENTION JE VAIS PETER UN CRISE. Okay, là j’ai un comportement de gamine. Même moi je dois le reconnaitre, mais la fin de son histoire est tellement frustrante. En fait, j’aime pas. C’est trop vide, trop de possibles, trop de voix qui s’ouvrent et que mon esprit arpente rapidement. Ce n’est pas juste, quand on demande à quelqu’un son histoire préférée, cette personne peut au moins nous faire le plaisir de nous raconter sa fin préférée quoi ? C’est relou à la fin.
Puis elle m’a dit de me recoucher comme si j’étais une gamine quoi ! J’peux pas obéir, sinon… sinon je ne sais pas quoi, mais mon esprit de contradiction d’empêche d’obéir voilà, c’est simple je tape mon oreiller et le place dans mon dos, me saisissant de quelques autres sur le bord du lit pour me caler confortablement. Je fais ma crise d’ado vous avez-vu ? Je suis dans l’opposition ! J’me rebelle et tout.

Les paroles de la femme aux cheveux sombre me laissent pantoise. Comment ça Alba a trouvé son père ? Enfin décidé qu’elle avait trouvé son père. JE SAIS !

« EN FAIT ALBA EST UNE PUCE ! Elle a dit bonjour à ses copines les fourmis, elle parle aux grenouilles mais ne s’arrête pas parce qu’elles ont le sang froid, et au final elle monte sur les girafes et se rend compte que la vue y est belle, le gite et le couvert assuré et elle finit par retrouver son père derrière une touffe de poil. Voilà la fin de ton histoire. »

Déjà si elle me donne pas tous les détails comment elle veut que j’trouve quelque chose de cohérant, ensuite elle me balance des trucs complètement contradictoires, ça n’aide pas non plus. Enfin faut qu’elle se décide, soit la môme elle considère qu’elle l’a retrouvé soit il est parti trop loin… Bon après que la mère soit morte, ça s’explique parce que le chien sur lequel Alba est née et qu’il a été traité par un programme spécial d’une ONG quelconque et tout à fait chelou qui préfère s’occuper des animaux que des gens. Si ça existe, j’vous jure.

« Ou alors Alba n’a jamais existé et c’est le rêve d’une girafe qui s’ennuie. Elle n’a jamais eu de parents et quand il aurait fallu que la girafe en imagine elle s’est endormie. Donc l’histoire n’a pas de fin. »

Je peux continuer longtemps hein avec des pseudo-fons toutes plus farfelues les unes que les autres… Mais au final je serais toujours aussi fatiguée, et ça ne m’aura avancé à rien. J’veux dormir… C’est trop demandé j’imagine, puis j’ai chaud j’attrape une bouteille sur la table de chevet pour me désaltérer et je désigne le pack abandonné dans un coin de la pièce.

« Si tu as soif… »

Serais-je en train de l’amadouer ? Juste un peu…

« Je peux avoir une autre histoire ? »

Je suis définitivement une enfant gâtée et pleurnicharde aujourd’hui… Imbuvable. On va faire avec hein ?

Alice est impressionnée par la frustration de la jeune femme ainsi que de ses réactions. Elle associe rapidement ça au manque de sommeil marqué sur le visage d'Ipiu... Ou peut être que les tonnerres ont ce genre de caractère... Elle n'en sait trop rien, Alice a rencontré trop peu de personnes pour être capable de donner un avis vraiment réel.
Elle sourit, et hoche la tête. Oui pourquoi, la fin de son histoire peut être tout à fait possible. Alice aime bien regarder les histoires sous un autre angle. Inventer autre chose, quelque chose d'inattendu. Elle a l'air réellement satisfaite de la fin proposée par la blonde trop fatiguée pour réfléchir correctement. Alba pourrait en effet être puce et retrouver son père. Pourquoi pas.
Ce qui amuse le plus Alice, c'est la façon dont la jeune femme s'accroche au fait qu'Alba doit retrouver son père, elle veut absolument le retrouver. Elle cherche un fin heureuse. Le premier réflexe des enfants qui veulent tout décider dès le début. C'est amusant.

Ah, elle a encore une proposition ? Alba serait un rêve... Hm, moui. Cette fin lui plaît moins, ce serait trop simple. Juste un rêve ? Ce serait trop dommage de rabaisser cette histoire à un rêve. Mais après tout, chacun à le droit de trouver sa propre fin.

« Je préférais ta première fin. Moi j'ai envie qu'Alba existe, quelqu'elle soit.. »

Au final, Ipiu ne dort toujours pas. Alice ne sait pas trop quoi faire pour arranger la situation, pour réussir à la faire s'endormir ou se reposer. Elle  réfléchit un peu, mais ne trouve aucun moyen pour l'aider.

Elle secoue la tête quand Ipiu lui propose de l'eau en souriant, puis cherche ce qu'elle peut faire. C'est à peine si elle entend sa question, il était évident qu'un deuxième essai s'impose. Cependant Alice a du mal à trouver une histoire, elle connait trop peu son auditrice pour pouvoir trouver quelque chose de bien. Il lui faudrait des indices, des indications sur ce qu'elle aime. Machinalement, Alice parcourt les étagères pleines de livres des yeux, cherchant à comprendre ce qu'aime écouter la jeune fille, dans quel monde préfère-t-elle se réfugier.

« Est-ce que tu as un genre d'histoire préféré ? Avec une fin joyeuse ou triste ? Quelque chose de classique, une histoire qui sort un peu de l'ordinaire ou plutôt quelque chose de farfelu et d'amusant ? »

Ca y'est, Alice est en action, elle veut savoir, aider, connaître, comprendre. Son but est de faire se reposer Ipiu. Elle peut déjà voir qu'elle est fatiguée rien qu'à son comportement. Peut être qu'en temps normal elle se comporte comme ça également, mais ça, Alice n'en sait rien du tout. Pourquoi s'est-elle retrouvé ici déjà ? Ah oui, parce qu'Alice ne veut qu'aider les autres, les comprendre. Et qu'elle est toute douce et adore rencontrer des gens. Ma foi, cette fois-ci elle n'est pas déçue. Le soleil est bientôt couché, et Ipiu ne dort toujours pas... Quelle rencontre... !

Fatalement Alba n’existe pas, ça c’est mon esprit cartésien qui l’affirme… Mais si elle veut y croire, j’la laisse faire. Chacun ses croyances, je ne suis pas encore une pétasse qui explique aux gens pourquoi dieu ne peut pas exister. Quoi que, si j’dors pas cette nuit j’vous promets que je me rends dans la première église/temple bouddhiste/mosquée venue et j’me mets à expliquer pourquoi c’est juste pas possible. Le pire dans cette histoire ? Comme toutes ces religions prônent le pardon et la miséricorde, c’est que s’ils foutent une handicapée à la porte, aussi chiante soit-elle, ils gagnent un cycle de réincarnation en vers de terre ou un séjour au purgatoire. Comme quoi, la religion ça peut être vachement con.

Par contre me demander un genre d’histoire préféré quand on voit ce qui traîne dans ma chambre c’est un peu un comble… Ou une nécessité, les polards jouxtes les Arlequins, les recueils de poèmes répondent au nouvelles, les romans réalistes aux romantiques, il y a de tout, de n’importe quoi. J’ai pas de préférence avant de commencer un livre, je ne juge s’il est bien qu’à la fin… Même si en général un aperçu des vingt premières me permet de me faire une idée assez correcte de la suite des événements.

« En fait j’aime être surprise, j’ai pas de préférence, j’me lance dans un histoire et j’décide après si elle me plait ou pas… »

Je sais je suis d’une grande aide, et une grande esclavagiste qui lui ferait raconter mile histoire avant de trouver la bonne, mais en même temps… Elle est pas logique, faudrait pas me demander ce qui m’intéresse mais ce qui m’intéresse pas si elle veut m’endormir non ?

« Juste une idée comme ça, mais si tu me racontes une histoire qui m’intéresse, comment je suis censée m’endormir ? J’veux dire j’vais luter pour savoir la fin quoi… Ce n’est pas comme si tu étais un livre que je pouvais reprendre en me réveillant demain… »

Logique quand tu nous tiens, et si plutôt que d’avoir un problème je trouvais une solution, parait que ça m’arrive parfois, rarement quand je manque de sommeil j’vous l’accorde mais quand même j’ai une réputation à tenir !

« Je sais ! Tu m’écriras la fin sur une feuille tu veux bien ? » je désigne les feuilles qui trainent sur le bureau accompagné de stylos. Le truc qui a pas bougé depuis des années que j’ai investi dans un ordi… Elles ne me servent que pour laisser des messages à Nathou qui lui se refuse à acheter un moyen de communication numérique…

« Ou alors tu as un numéro où je pourrais t’appeler pour avoir la fin ? » Silence. « Tu crois qu’ça crains de demander le numéro d’une fille comme ça ? »

Ça fait genre gros relou j’trouve, bon après… Dans l’genre je l’ai déjà embarqué dans ma chambre et forcée à me raconter des histoires. J’l’ai peut-être pas forcée en fait, mais c’est un petit détail.

C'était une conclusion logique. Elle veut être surprise. Pas déçue, pas satisfaite, surprise. Evidemment, c'est toujours plus compliqué. Une histoire surprenante... Alice se plonge dans sa mémoire pour tenter d'y retrouver une idée. N'importe quelle histoire... Une histoire surprenante pourrait être celle du Petit Prince, mais c'est beaucoup trop simple. Quelque chose de mieux... Hmm, elle a bien une idée. Mais ce n'est pas une histoire visant à être surprenante. Qu'est-ce qu'elle pourrait bien trouver...

Elle fronce le nez, et regarde Ipiu, surprise. Non... C'est inutile, c'est triste, c'est laid de chercher quelque chose qui ennuie. Elle secoue la tête, et retrouve rapidement son expression douce.

« Je n'aime pas cette idée du tout. Je peux toute de même essayer si tu veux, mais je trouve cela complètement stupide. Une histoire qui plaît permet de se détendre, de s'évader, et de dormir. Mais enfin... »

Ecrire la fin... Ma foi pourquoi pas. Alice hoche la tête après avoir jeté un coup d'oeil aux feuilles. Pourquoi pas...

« Tu crois sincèrement que ça te feras dormir ? Moi je veux bien mais bon... J'ai une histoire qui peut être amusante. Elle parle du tiramisu. Et la fin est... Surprenante, mais surtout amusante... En fait que je ne sais pas du tout si ça te plaira. Mais on ne sait jamais... »

Alice n'a pas l'air convaincue, mais ne contredit pas Ipiu. Elle est prête à le faire, et son expression douce est toujours accrochée à son visage. Si ça peut l'aider à dormir, alors elle le fera sans hésiter. A la dernière question d'Ipiu, elle sourit de plus en plus, puis rit un peu. Et puis, de façon générale, il paraît que c'est bizarre de demander son numéro à quelqu'un aussi rapidement.

« Au point où on en est, j'pense que c'est la chose la plus banale que tu m'aies demandé ! »

Alice accepte facilement, mais elle est loin d'être naïve. Elle sait tout à fait ce qu'il se passe et ce qu'elle fait. Elle sourit, et sort son téléphone lentement. Elle redresse la tête, et demande doucement :

« Tu préfères à l'écrit ou par téléphone ? Moi ça m'est égal. »

En y réfléchissant un peu, les deux jeunes filles sont dans une situation un peu particulière... Mais après tout, c'est comme ça que l'ont fait les meilleures rencontres... Non ?