Cela fait déjà un peu plus d'une semaine que je suis arrivée. Les nouvelles, les découvertes ce sont rapidement enchaînées, donnant à mon esprit peu de répit. Ici, les gens sont spéciaux. Nous sommes tous réunis, pour des raisons extrêmement différentes mais qui aboutissent au même endroit: Terrae. Pourquoi ? Pour moi, je ne m'en souviens pas. A mes yeux, pour le moment, rien ne m'a l'air cohérent. Comme si tout n'était qu'une grotesque farce, une erreur idiote de la part de quelconque fanatique. La connexion entre tous les éléments que j'observe ne m'a pas encore sauté aux yeux et cela me laisse un sentiment de frustration que je ne saurais évacuer.
Pourtant, tout ce que l'on a pu me raconter à propos de ces capacités étranges, ces histoires saugrenues qui nous lient malgré nous... Tout cela s'avère vrai. Les faits sont là, je l'ai vu et tout le monde ici semble en avoir fait son quotidien.

Durant cette semaine il m'a donc fallut mémoriser les quelques noms importants... A vrai dire, je n'ai fais l'effort qu'avec celui de la directrice, Hideko. Il me faudra du temps pour les autres.
J'ai croisé et discuté avec quelques personnes, mais rien de bien profond si on omet le rendez-vous psychologique. Je ne suis pas encore entièrement à l'aise, même si l'ambiance générale m'a semblé joviale. Heureusement, la puce de traduction aide à briser la glace.
Je n'ai pas vraiment eu l’occasion de contempler depuis mon arrivée. J'ai visité sommairement l'Institut, jugé en biais son état et son entretien et gravé dans un coin de mon esprit les lieux que je voulais découvrir plus amplement. A ma grande surprise, il s'avère que la liste est plutôt longue. J'ai réfléchis quelques heures avant de me décider par où commencer. Il me faut de nouvelles bases ici. Urgemment. Le mieux serait un repère, un lieu de prédilection, un probable refuge, en somme, un terrier.

C'est sur cette réflexion que je me rends à la salle d'astronomie. Espérant la trouver ouverte. Je ne me souviens pas avoir pu utiliser un télescope un jour. Après tout, si c'était mon seul souvenir, cela aurait été bien triste.

Je traverse donc les couloirs, passant devant les salles de classes, vides à cette heure, cherchant à me repérer jusqu'au lieu de mon désir. Heureusement, tout est indiqué de manière claire et précise ici, il est difficile de se perdre. Physiquement en tout cas. Pour le reste, mon esprit est en perdition dans de multiples réflexions.

Déjà, la plus importante d'abord. La dernière que je me pose en arrivant à la salle.
Comment on utilise un télescope ?

Ce n'est pas trop la joie à Terrae, en ce moment, même si l'ambiance s'est quelque peu réchauffée depuis les événements de cet automne. Le travail nous tombe dessus à la pelle — missions à préparer, donc le terrain à prospecter, les volontaires à contacter, les risques à évaluer, les consignes à donner. La seule idée de commettre une erreur me met dans des états épouvantables, mais au moins, je fais mon travail correctement, je crois. Ce soir-là, je reste un peu plus longtemps dans la salle de repos des Masters pour terminer de remplir un récapitulatif que l'équipe en charge de la mission devra récupérer le lendemain. On en a un peu discuté ensemble tout à l'heure mais il manquait des détails essentiels.

Avec un soupir las, je recule ma chaise et m'étire, me retenant d'aplatir mon front contre mon clavier le temps que les papiers s'impriment. Après les avoir rassemblés, mis dans une pochette et posés avec un post-it sur la table, je m'apprête à sortir quand je tombe sur une écharpe que je reconnais bien. Une grimace m'échappe et je me tortille un peu sur place, hésite, réfléchis, me prends à moitié la tête entre les mains, puis me décide à la récupérer. Ca ne peut pas être une si mauvaise idée que ça, hein ?

Bon, tout va bien. Après avoir dégluti bien comme il faut, je me décide à l'attraper et commencer à marcher vers les escaliers... Et évidemment, il y a de la lumière dans la salle d'astronomie. MERDE PUTAIN JE PANIQUE OK. Ok tout va bien. Respire. Allez, euh, comment je peux lui parler déjà ? Le visage neutre, ouais, c'est ça. Genre, bien neutre. Ensuite, euh "Ah, salut Haley, j'crois que c'est à toi, tu l'as oublié dans la salle de repos." ? Non, c'est trop long. "Tiens, t'as oublié ça ?" Nan c'est pas assez sympa... "Sinon comment ça va depuis le temps ?!" URG NOPE

Un rire nerveux m'échappe alors que j'essaie de retrouver mon calme (ça marche super bien) et que j'arrive près de la salle. J'en pousse la porte, jette un oeil rapide dedans, puis comprends qu'il n'y a… littéralement personne. Ok. Mes épaules s'affaissent pendant que j'avance dans la pièce ; quelqu'un a dû oublier d'éteindre la lumière en sortant, c'est pas très malin. Content de ne pas avoir à me coltiner une discussion avec miss mauvaise humeur, je pose l'écharpe sur le bureau de la prof et sautille jusqu'à la sortie de la salle… sauf que je me retrouve nez à nez avec une meuf.

—OH PUTAIN SAMER, je beugle en faisant un bond en arrière, une main sur la poitrine pour essayer de contenir ma crise cardiaque.

C'EST HALEY ? C'EST- non c'est pas Haley, putain, J'AI EU SUPER PEUR. Je souffle lourdement et m'appuie dos contre le mur pour essayer de retrouver mes esprits.

—J'suis désolé, j't'avais pas vue, j'me suis fait peur tout seul.

Ouais, t'es con quoi.

C'est complètement perdue dans mes pensées que je pénètre la salle d'astronomie. En passant la porte, je me rends compte que la lumière est allumée. Tiens il y a quelqu'un ? Je relève les yeux et découvre que oui, effectivement, quelqu'un est encore là.
J'observe un instant, immobile à l'entrée de la salle. Au bout de quelques secondes, je me décide enfin à avancer afin de saluer l'inconnu. Mais celui-ci tourne les talons et nous nous retrouvons nez à nez. Il hurle, l'air surprit. Par réflexe je sursaute à mon tour, lance un regard en arrière, avant de me rendre enfin compte que je suis la raison de la surprise de mon interlocuteur.

"J'suis désolé, j't'avais pas vue, j'me suis fait peur tout seul."

Je reprends contenance et lui sourit d'un air enjoué.

"Salut, désolée de l'intrusion, je ne voulais pas vous faire peur."

Après quelques secondes de silence à jauger mon interlocuteur, je reprends.

"Je m'appelle Lys, je suis nouvelle ici. Enchantée. Je voulais savoir si il était possible de passer un bout de la nuit ici. Je ne sais pas trop à qui m'adresser pour ça. Vous êtes un enseignant ou un élève ?"

Je m'écarte de la porte d'entrée et pénètre plus avant dans la salle, la scrutant du regard. Une écharpe trône sur le bureau. Globalement, c'est une salle de classe, avec des télescopes en plus.

"J'ai le droit d'être ici si je ne suis pas les cours ?"

Mon sourire ne me quitte pas. Je suis désolée de l'avoir surpris. Je ne souhaite pas l’embarrasser non plus.
Par tic je passe ma masse de cheveux blonds sur mon épaule, dégageant mon dos de la chaleur qu'elle lui imposait jusque là.
Depuis mon arrivée, j'ai pu retrouver des airs plus présentables. Mes cheveux sont propres, mes cernes ont disparues, mes lèvres se rétablissent des différentes blessures qu'elles avaient subies... En somme, je ne ressemble plus tant à la Lys perdue dans son trou à rat. J'ai même l'air en forme !

Tout va bien, ce n'est pas Haley. Un soupir m'échappe et je me passe une main sur le visage, puis fais signe à la fille que ce n'est rien, l'autre main toujours sur mon coeur qui gigote. Enfin rien, rien, j'aimerais bien lui dire ça avant qu'il ne s'arrache définitivement de ma poitrine, mais avec quelques exercices de respiration rapide, ça va déjà mieux.

—C'est bon t'inquiète. Aaron Williams, je fais en me présentant à mon tour, daignant me décoller du mur. Je suis prof, techniquement.

Oui, techniquement parce que… voilà. En dehors des salles de classe, j'suis encore un mec normal, j'aime pas me présenter directement sous mon titre de Master — parce que ça pue. La blonde, elle, est déjà en train d'observer la salle avec attention, comme si c'était la première fois qu'elle en voyait une de ce type. Je dois dire qu'à l'ouverture de la salle, j'avais aussi été surpris et ravi.

De mémoire, il me semble que ça n'a jamais dérangé Haley de laisser l'accès à la salle ; c'est bien pour ça qu'elle n'est jamais fermée à clé. Du moins, tant qu'on laisse son matériel en place. Je n'aimerais de toute manière pas être à la place de l'abruti qui voudrait voler ou détériorer l'un des téléscopes ; pire idée du monde.

—Oui, oui, bien sûr. Les salles d'astro et de musique sont ouvertes pour tout le monde, je souris en glissant mes mains dans mes poches. La prof d'astronomie est...

... je peux pas dire sympa, désolé. J'ai essayé au moins, hein !

—... enfin elle laisse les élèves faire, quoi. Il faut juste éviter de tout casser, mais ça me semble logique. Après, si jamais tu veux prendre des cours avec elle, t'as pas besoin d'être collégien ou lycéen pour ça, c'est comme des ateliers.

Je dois dire que j'ai passé tellement de temps à fuir cet endroit que j'ai l'impression de ne pas y avoir mis les pieds depuis plusieurs années au moins. Est-ce que je ne suis pas simplement venu déposer des dossiers, l'une ou l'autre fois ?

—Tu viens juste d'arriver, du coup ? Tu arrives à t'acclimater, ça va ?

"Vous êtes donc un Master c'est ça ?"

Je lui offre un grand sourire. Le dernier Master que j'ai rencontré et avec qui j'ai pu discuter est... fameux. Je me demande comment est celui-ci. Apparemment il faut s'attendre à tout ici.

Je note la légère hésitation lorsqu'il répond à ma question. Je la trouve sympathique, cette prof, de laisser la salle ouverte à n'importe qui. Il faut avoir une sacré confiance en ses élèves pour ça, à mon avis.
Je continue mon inspection tout en écoutant Aaron. Je trouve son prénom assez joli. Il sonne bien dans ma tête.

Je me tourne vers lui pour répondre à mon tour:

"Oui je suis arrivée il y a à peu près une semaine. J'ai eu un peu de mal au début. Il y a beaucoup de choses qui me sont étrangères. Ici et en général alors c'est un peu compliqué de tout comprendre. Mais je vais m'y faire. J'ai visité un peu, l'endroit a l'air intéressant."

Je m'arrête un instant et lève les yeux au plafond quelques secondes le temps de réfléchir.

"Je cherche des activités à faire, des coins que je pourrais adopter. Ce genre de choses. Histoire de me poser des bases. Je ne sais rien des étoiles et ça m'inspire. Elles m'ont beaucoup tenu compagnie alors je me suis dis qu'ici serait le bon endroit pour débuter à Terrae. Je vais peut être m'inscrire à un atelier dans ce cours... Cela me tenterait bien."

Je lance un petit sourire au Master.

"Vous pourriez m'indiquer le nom du professeur et comment faire pour m'inscrire ?"

Il est peut être un peu tard pour ça, mais mieux vaut tenter. J'aurais du mal à trouver toute seule dans ma situation actuelle.

La blonde me renvoie un sourire et j'acquiesce un peu avec la même expression, pas vraiment fâché de sentir mon coeur ralentir un peu la cadence pour le coup.

—Ca va de paire, en fait : soit on se tape les missions, soit on se tape les gamins. ... Enfin, j'aurais pas dû le dire comme ça, je me marre quand je me rends compte de ma connerie.

Aaron, ferme ta gueule et réfléchis un peu avant de parler, tu veux bien ? Avec un rire nerveux, je vais m'assoir sur la table la plus proche tout en l'écoutant. Ouais, toute nouvelle du coup. Un sourire en coin s'étire sur mes lèvres.

—Ouais ça ferait sûrement plaisir à Haley... C'est la prof, j'explicite. Haley Lindley. En soi tu peux voir l'emploi du temps en dehors de la salle, je pense que si tu viens la voir à son prochain atelier en te présentant y aura pas de problème. Sinon tu peux toujours essayer de la trouver en salle des Masters, mais je saurais pas trop dire si elle y est régulièrement ou pas…

… Sachant que je m'arrange systématiquement pour ne pas m'y trouver au même endroit qu'elle, lel. Un jour, faudrait quand même qu'on dépasse cette haine qu'on a l'un envers l'autre — enfin elle sa haine, moi ma connerie, et que j'm'excuse peut-être. ... Ouais, non, j'vais pas m'excuser putain, c'est elle qui s'amuse à me tourner en ridicule à chaque fois ! (J'Y PEUX RIEN SI SON MEC ME PREFERAIT A ELLE OMFG.)

—J'espère que tu vas trouver de quoi faire en tout cas, rien qu'ici y a quelques ateliers sympa. Y a une salle de musique et une salle d'arts pla' aussi, si jamais ça te plaît aussi... Et un atelier pour, euh, pour faire plein de choses. Du coup t'as du choix !

À vrai dire, j'crois surtout que les gens s'en servent pour faire les conneries les plus innommables plutôt que pour repeindre ou construire leurs propres meubles, mais on va dire que ça m'amuse de voir des étudiants se faire engueuler parce qu'ils ont encore construit un robot chelou. Une fois, j'ai quand même croisé une meuf à dos de dodo robotique ; c'est quand même pas commun, hé. (Et pour une fois, ce n'était pas une tonnerre. Qu'on ne vienne pas dire qu'il y a que nous pour être chelous !)

"Ca va de paire, en fait : soit on se tape les missions, soit on se tape les gamins. ... Enfin, j'aurais pas dû le dire comme ça."

Je pouffe de rire avec le dit Aaron quand la blague monte à mon esprit. Je me retiens pour la blague facile à l'encontre d'Ys et l'écoute répondre à mes questions. Il s'assied à l'une des tables. Je prends quelques secondes pour arrêter de triturer les télescopes et le rejoins.
Donc, le professeur se prénomme Haley, je note. Personnellement, j'aurais plus tendance à aller la voir sur ses heures de cours qu'en salle des Masters. Ils ont l'air... un peu étranges. J'ai pas envie de me retrouver entourée de plein de Masters tout de suite.
Il enchaîne sur un rapide récapitulatif de quelques clubs qui, comme il semble le penser, me plairont. Bizarrement, l'atelier 'où on peut faire plein de choses' m'intrigue plus que le reste.

"Un atelier de construction ? C'est ça ? Hm... ça peut être drôle oui, j'y songerai. Je vais du coup, dans un premier temps, me renseigner auprès d'Haley Lindley. Ensuite, je verrais certainement pour le club de musique."

Je prends une nouvelle pause. Ah mais j'ai un Master en face de moi ! Bonne occasion.

"Vous êtes prof de quoi vous ? Vous avez quoi comme pouvoirs ? C'est comment d'être Master ? Vous veniez utiliser les télescopes ? Je vous ai interrompu ? "

J'en ai encore plein d'autres, mais on va dire que pour le moment... ça devrait aller.

C'est bon, elle a pas fait de tête trop cheloue, je vais pas me faire attaquer pour pédophilie, tout va bien. Non parce que je crois que ça causerait quelques problèmes vu le nombre d'enfants (???) chez moi... Oui, j'considère que Nico et Jérém sont encore des enfants, j'ai l'droit non ? Ils seront des adultes quand ils seront capables de s'occuper d'eux sans que j'm'inquiète de savoir s'ils ont bouffé correctement et s'ils se sont pas entretués pendant que j'avais le dos tourné, c'est-à-dire pas tout de suite.

—Je sais pas trop, y a du matos pour faire des constructions en bois ou mécaniques, donc en soi tu peux voir un peu comme tu le veux. Mais ouais si ça te plaît c'est cool, je souris en coin.

Et puis d'un coup, la vague de questions arrive. Je hausse deux sourcils, regarde autour de moi d'un air embarrassé — pourquoi j'étais venu ? J'ai déposé l'écharpe ? Ouais, c'est bon, c'eeest bon, du calme.

—Euh. Trop de questions, je ris. J'suis prof de maths, et je suis tonnerre. Sensitif. Ca veut dire que je ressens les émotions des gens.

Coucou je suis un psychopathe qui ressent tes émotions et qui peut les contrôler. Faut pas m'emmerder, hein, j'suis un bonhomme moi ! (Non.)

—Et, euh- Je venais juste déposer un truc qu'a oublié ma. Collègue. (Pourquoi ce mot m'arrache la gueule putain.) Donc t'inquiète. Pourquoi tu m'demandes tout ça, t'es une espionne en fait ?~

J'dis ça en riant, mais bon, si c'était le cas je crois que ça m'étonnerait même plus lel. Trop de personnes cheloues ici.

Bon, même si j'ai l'impression de l'avoir gêné, ma foule de question le fait rire alors qu'il y répond. Je prends note de ses capacités, ça peut toujours servir qui sait ? Est-ce qu'on peut gruger les pouvoirs d'un Master ? 'Hm non.'

Je vais finalement m'asseoir à la même table que lui. Je ne vais pas rester debout pendant toute la discussion ... Je prends donc place en face de lui et répond à sa propre question par un immense sourire.

"Peut être."

Je m'étires un peu puis finis de m'installer, droite sur ma chaise. Je secoue finalement la tête en rigolant.

"Je ne pense pas être une espionne, je suis juste curieuse, ça m'intéresse. Si je suis destinée à passer un moment ici, autant commencer à prendre les renseignements intéressants dès maintenant, non ?"

Un sourire, amical cette fois, se dessine sur mes lèvres.

"Je me dis que ce serait bien aussi de rencontrer et de discuter avec différents Masters. Vous êtes ici depuis un moment. Vous maîtrisez vos pouvoirs, vous avez quand même pas mal de classe globalement -à ce que j'ai pu en voir- alors..."

Moi aussi je veux avoir la classe comme vous ! Master-sama

Je prends une pause de quelques secondes et jette un regard à l'écharpe sur la table.

"C'est ça le truc que vous deviez ramener à votre ... collègue ?"

Peut-être, peut-être... Tssssssk j'te crois pas, c'est bon ! Un rire m'échappe face à sa réaction. Nan mais en fait, les gens de cet institut sont tous des gamins, ou comment ça se passe ? Bon, ok très bien, je sais qu'ils sont en majorité des personnes de moins de vingt-cinq ans, ce qui fait d'eux… des gamins, et de moi un vieux, ok. Je note. J'm'auto-trolle beaucoup sur mon âge depuis quelques temps, nan ?

Cela étant, je ne peux qu'acquiescer ; vaut mieux amasser le plus d'infos possibles en soi, ça évite les mauvaises surprises. Déjà, elle est au courant pour les pouvoirs donc ça m'évite de faire le super speech à la "hey hey on a des pouvoirs ici coucou". Mon sourcil se hausse néanmoins, avant que je ne lui renvoie son sourire. Bah oui voyons, le principal atout des Masters, c'est qu'ils ont la classe, non ? Rohlala.

—Ohoh~ Et tu en as déjà rencontrés quelques-uns, à part éventuellement la personne qui t'a ramenée à Terrae ? T'en as tiré quoi ? Dans tous les cas, j'comprends ta curiosité, Terrae est un peu fascinante au début.

Après on s'habitue, et c'est presque le monde normal qui nous paraît chelou. (Et c'est encore plus bizarre de le penser de manière aussi évidente.)

—Mais, euh, ouais, c'est ça le truc qu'a oublié ma collègue, je réponds une fois de plus en insistant bien sur le mot. Elle l'a oublié en salle des Masters tout à l'heure, et j'me vois pas vraiment aller toquer chez elle pour faire "Hey salut Haley, j'passe juste trente secondes pour te rendre ton écharpe, stp m'envoie pas de boule de feu"…

Quoique c'est une scène qui me laisse une vague impression de déjà-vu (oh, rien de ouf, juste. une bonne cinquantaine de fois probablement)(j'exagère)(presque) alors voilà, j'connais l'issue, je veux pas perdre des cheveux, tout ça tout ça.

—Hmng, on est pas en très bons termes elle et moi. Lui dis pas que tu m'as parlé, elle pourrait te faire la misère juste pour ça.

Bon, c'est faux, je bitche un peu, mais j'ai surtout pas envie qu'elle bitche sur moi. J'suis déjà assez vénère que la moitié des Masters ait assisté au moment ridicule où elle nous a baffé, Gaetano et moi, parce qu'il avait eu la mauvaise idée d'essayer de le tromper avec moi. (Et moi je pouvais pas deviner qu'il était encore avec elle, genre, ils se voyaient jamais ?!!)

Je le laisse répondre à mes questions, silencieusement. Le mot 'collègue' semble lui arracher la bouche. Sans effort ma curiosité remonte. Je la range un instant, le temps de lui répondre à mon tour:

" Hum... Non. Effectivement, à par le Master qui m'a amenée... et vous du coup, j'ai pas vraiment eu l'occasion d'en rencontrer d'autres. Mais Ys a déjà un bon niveau de classe, alors j'ai de l'espoir pour les autres ! "

On va garder son surnom de 'Coco l'Asticot' pour de futurs marchandages.

" C'est vrai que Terrae sort... pas mal de l'ordinaire. Je dirais que c'est un peu stressant aussi. Se dire qu'on va sûrement hériter de pouvoirs aussi puissants dans leur finalité, ça met quand même un sacré poids sur les épaules. Quand je vois ces types qui peuvent balancer des éclairs ou cramer n'importe qui en un simple claquement de doigts... C'est un peu effrayant. Regardez par exemple, vous, vous pouvez décrypter mes sentiments du coup. Il manquerait plus que des télépathes... "

Je hausse un sourcil.

" Dites moi qu'il y a pas de télépathes. Pitié. Je veux dire... N'importe qui que je croise ici pourrait me sentir déprimer ou euphorique, lire ce que je pense et moi... J'en saurais rien et je pourrais rien y faire. C'est cool comme pouvoirs, mais c'est vachement intrusif. Vous gérez comment les gens qui utilisent leurs capacités pour... bah pour tromper les gens quoi ! "

Je me tourne une nouvelle fois vers cette écharpe.

" Par exemple, votre collègue, elle, elle sait faire quoi ? Pourquoi vous êtes en froid ? Je peux éviter de lui dire que je vous ai parlé si ça vous va, personnellement je m'en fiche un peu. Je parle bien à qui je veux, non ? Vous disiez qu'elle était sympa, mais ça a l'air forcé finalement. Pourquoi vous essayez de faire passer des mensonges pour des vérités ? C'est par hyper sympa. Après je vais aller la voir, elle me mangera et ce sera votre faute. Vous ne m'aurez pas prévenu comme il l'aurait fallut. "

Et toc.

D'accord, là j'suis obligé de m'étouffer de rire, pardon, mais ça m'a échappé. Ys, bon niveau de classe ?! J'sais pas si on parle du même Ys, mais ptdr, j'dois quand même rappeler que c'est le mec qui arrivait encore à fail ses téléportations l'année dernière, gros teubé.

—Ys a un bon niveau de classe, je répète en essuyant une larme. Ah putain, c'est bon ça. Désolé. J'me moque pas, juré. Mais Ys...

Nan bon, ok, j'suis vache : il fait vachement bien son taf, il fait juste peur à avoir l'air trop sérieux. Puis, euh, bon, il a largué ma Mitsu d'amour ALORS J'AI LE DROIT DE ME FOUTRE DE SA GUEULE OK. On ne rend pas triste Mitsuki, on ne la fait pas culpabiliser et on la fait encore moins pleurer. Puis c'est de sa faute, làà, il avait qu'à pas la demander en mariage ! Tu demandes pas ça à quelqu'un au bout de quoi, deux, trois ans ?! Ptdr j'ai rapporté une gamine à Gae au bout de deux ans, j'ai rien à dire, tuez-moi.

Mon sourire ne s'en va plus, maintenant, c'est malin. Bon, c'est bon signe, j'arrive à smile et penser à c'con, c'est qu'il me manque pas tant que ça.

—Aha alors déjà j'suis désolé pour toi, mais y a des télépathes ! Les initiés contrôlent pas forcément leurs pouvoirs, du coup ça arrive qu'ils lisent dans la tête des autres sans leur autorisation. Mais les sensitifs c'est un peu pareil avec les émotions, du coup. Faut juste apprendre à les contrôler. C'est un peu la première étape en fait... Pour les gens qui sont relous, par contre, on leur parle, on peut poser des sanctions s'il y a eu des plaintes. Histoire que les gens profitent pas trop non plus, c'est certes un don, mais faut pas trop abuser non plus.

Ah, ok, c'est moi qui dis ça. Rappelle-moi comment tu faisais quand t'étais pas encore Master ? Tu passais à la cafète juste pour faire avoir des crushs inopportuns aux gens, leur faire avoir la peur de leur vie ou se vénère parce qu'on leur a pas passé le sel dans la demi-seconde. Non ben non, personne ne trompe les gens, personne ne les manipule, mdr, c'est faux.

Par contre mon super sourire se transforme en grimace. Mais pourquoi elle insiste avec Haley omg.

—Nan mais, mais non, je bredouille, un peu pris de court. Elle est vraiment cool, c'est juste que ça fait plus de dix ans qu'on se côtoie et euh, on peut pas dire qu'on s'aime beaucoup. Enfin, elle, elle m'aime pas beaucoup. Il se pourrait que je lui ai uuun peu chourré son mec à l'époque, donc bonnn... Enfin ! Pour ma défense ! je rajoute en fronçant les sourcils. Je savais pas qu'ils étaient encore ensemble ! Et il ne s'est strictement rien passé ! Il avait qu'à mieux contrôler ses hormones. Au final, c'est grâce à moi s'il l'a pas trompée ! Elle aurait dû m'remercier, plutôt que de m'afficher !

Parce que je me suis évanoui.
J'ai pas honte.
La honte c'est surfait.

—Donc euh. Ca devrait l'faire avec toi, j'suppose.

Ouais, parce que tu t'appelles pas Aaron Williams et que t'as pas une tête de con, quoi.

Quand j'aborde le sujet d'Ys, le Master en face de moi éclate de rire. Un rire sans retenue, qui le mène jusqu'aux larmes. Qu'est-ce que j'ai dis de si drôle ? Je le regarde, l'air perplexe, alors qu'il s'étouffe avec sa moquerie.

" Ys a un bon niveau de classe. Ah putain, c'est bon ça. Désolé. J'me moque pas, juré. Mais Ys... "

Il s'essuie une larme au coin de ses yeux. Je penche légèrement la tête sur le côté.

" Il a un super tatouage de dragon qui bouge ! "

Bah oui. Enfin je veux dire, si ça c'est pas classe, alors qu'est-ce qui est classe ? Moi ça me semble logique et cohérent ! Bon il est pas très futé, je veux accorder ça à Aaron, mais il est quand même Master... Je gonfle légèrement les joues (un peu rosées) :

" Même si Ys est moins classe que tous les autres Masters, il reste un Master. Dans tous les cas, cet état de fait reste classe quoi que tu puisses en dire. En plus, il a un tatouage de dragon qui bouge, je répète. "

Je l'écoute me confirmer la présence de télépathes dans l'Institut. Mais zuteuh ! Enfin ... Il faut de tout pour faire un monde. L'explication du Master est tout de même rassurante. A vrai dire, pourquoi je m'inquiètes ? L'Institut est là depuis longtemps, ils ont sûrement l'habitude de faire face à ces problèmes. Je peux avoir confiance. Même si ils peuvent avoir l'air incompétent sur les bords, si Terrae est toujours là, c'est que la majorité du travail est fait.
J'offre un petit sourire à Aaron.

" Je respecte quand même énormément le travail que les Masters doivent fournir. Tout ça ne doit pas être reposant. Vous avez du courage. "

Puis, le sourire qu'il trainait depuis tout à l'heure s'estompe. Son air devient un peu plus sérieux. J'écoute son histoire sans rien dire. Il a pas l'air super à l'aise avec cette histoire.

" Bah. Si il s'est rien passé, il s'est rien passé, non ? C'est pas ça le principal ? "

Bah oui. Enfin, ça semble logique, non ? Les gens sont bizarres.

" Non mais, je veux dire, c'est pas toi qui était son mec qui a essayé de la tromper. Du coup, pourquoi t'en vouloir à toi ? 'Fin si t'étais pas son mec, elle a rien à attendre de toi ? C'est la faute du mec, non ? "

Je fais plein de mouvements de mains en parlant avant de me perdre un peu dans ma réflexion. Je redresse les yeux vers le Master. Mes iris brillent, plein d'incompréhension.

" Elle est bizarre. Son raisonnement tient pas la route. "

Aled.

Pfffff. Un tatouage de dragon qui bouge, c'est pas un argument ! Je secoue un peu la tête, sans me départir de mon sourire en coin.

—Eh, moi aussi j'ai un tatouage qui bouge. Bon, c'est pas un dragon, mais même. Et t'inquiète, j'sais qu'il mérite son rang ; c'est contre moi qu'il s'est battu pour obtenir le titre, je ris. On s'est bien défoncé mutuellement la gueule, mais j'le respecte, il est cool et il fait bien son taf. Il est juste un peu con.

Ce qui est, pour le coup, un argument suffisant pour se marrer quand quelqu'un ose dire qu'il est classe. Mais comme il a sauvé la vie d'mon p'tit Nico dans la forêt, j'veux bien admettre qu'il est pas trop mauvais non plus ; j'aime bien le taquiner de toute manière. C'est ma manière à moi d'montrer que je l'aime bien j'suppose. (Même s'il a quand même fait bobo à Mitsu et qu'il vérite que je le pende pas les couilles pour ça.)

—Aha, c'est pas tant du courage, mais faut bien que quelqu'un fasse le taf... Puis, faut dire qu'on l'a voulu, sinon on se serait barrés. C'est surtout difficile par moments, mais rien de ouf non plus. Maintenant ça se calme un peu, comparé à tout ce qu'il s'est passé y a quelques mois.

Comme j'veux pas trop lui faire peur, j'insiste pas. De toute manière on parle d'Haley et ça me scrogneugneuh. J'suis tout gêné et j'parle un peu vite, je me passe même une main sur la nuque. Ouais, pas à l'aise quoi. Mais tout ça sort super naturellement, et j'sais même pas pourquoi j'me justifie ?!

—Mais oui !! C'est ce que je me tue à dire ! Bon, dans l'idée, on se supportait pas trop trop de base, j'la trouve un peu casse couilles, elle est Feu et elle essayait tout le temps de me cramer les cheveux… mais je suppose que c'est parce que j'étais chiant... merde je sais plus, ça remonte à trop loin maintenant ?

Le pire c'est que fut un temps j'pense qu'on aurait pu s'entendre. Ou juste continuer à s'envoyer des piques sympa. Mais j'sais aussi qu'après leur rupture, elle en a bien bien foutu dans la gueule de Gae. Comme il avait déjà perdu son frère à cette époque-là... 'Fin j'l'ai pas trouvée très arrangeante, du coup j'étais foutument en colère contre elle. On s'est engueulés comme des tarés dans une boutique de fringues, et depuis on évite au maximum de communiquer. Heureusement qu'y a suffisamment de Masters pour qu'on ait pas besoin de se demander des services mutuellement aha.

—Après... bon, est-ce que rouler des pelles à quelqu'un c'est tromper, déjà ? Moi j'dirais que non, pas quand on a un gramme cinq dans l'sang, surtout, y a quand même des circonstances atténuantes ! En plus je venais de me faire casser le bras, j'étais shooté avec les médocs ! Bon, on s'est maqués quand même après tout ça, mais- De toute manière maintenant on est plus ensemble, donc on s'en fout. Mais voilà. Morale de l'histoire : tu énerves pas tatie Haley, sinon elle te baffe et t'engueule devant tous tes collègues. Mais sinon elle est sympa.

Faut que j'arrête de bitcher... J'suis de super mauvaise foi aujo, ou bien ?

J'aime bien ce Master. Il est assez expressif et plutôt bavard mine de rien. Finalement, ma soirée ne se déroule pas du tout comme prévu, mais je trouve ça sympa. Cette rencontre inattendue est drôle et instructive. Aaron est sympathique et son rire est contagieux.
Mon air boudeur disparait et est remplacé par un petit rire. J'acquiesce : Ys est un peu con, ça se voit, ça se sent, ça s'entend. Mais je l'aime bien. Il me plaît.

Mon sourire ne s'efface plus de tout le reste de la conversation. Lorsqu'il renchérie sur Haley, c'est un hochement de tête vigoureux et un sourire soulagé qui lui répondent. Enfin ! C'est un raisonnement vachement puéril, même si ils s'entendaient pas de base. C'est à l'autre qu'elle aurait dû en vouloir. Ah. Apparemment ils en ont prit plein la face tous les deux.

...

On peut dire que c'est équitable au moins. Non ? Je secoue légèrement la tête. Elle n'est effectivement pas très compréhensive celle là. 1,5 grammes d'alcool dans le sang... Normalement une information comme ça, ça aurait dû calmer ses humeurs non ? Personne n'est dans son état normal avec tout ça dans le sang. Les Feux ont l'air vachement dangereux.

" Je dirais qu'avec tout ça d'alcool dans le sang, on peut pas trop vous en vouloir. Au pire vous passez pour deux cons et c'est finit. Mais de là à faire des scènes ... Je vois pas l'intérêt. En plus ça doit être vachement crevant de s'énerver autant pour un baiser baveux. "

Je soupire.

" En vrai, je peux pas juger. J'ai que ta version de l'histoire. Mais bon. C'est marrant de bitcher un peu héhé. "

Je lui tire la langue d'un air amical.

" Si je la croise je ferais celle qui sait rien tiens. En parlant avec elle, je ferais en sorte d'avoir son avis sur la situation. Je pourrais bitcher sur toi avec elle. Comme ça pas de jaloux. "

L'idée me plaît ! Je vais faire comme ça, ouais. Je ricane doucement à mon idée puis je reporte mon attention sur le Master.

" En tout cas, t'es plutôt sympa comme Master. Tu changes vachement d'Ys. C'est un peu rassurant. T'as l'air plus réfléchis quand même. "

Au moins, toi, tu réponds aux questions.