I'm lying here on the floor where you left me
Je suis étendue là sur le sol où tu m'as quitté
I think I took too much
Je pense que j'en ai trop pris
I'm crying here, what have you done?
Je suis là en train de pleurer, qu'as-tu fait?
I thought it would be fun
Je pensais que ce serait drôle

Pricie venait de vivre un long cauchemar qui avait été la réalité. Des gens encapuchonnés autour d'elle, la tête qui tourne puis plus rien. Le réveil, puis ils ont mis une sorte de sceau pour la protéger sur elle et une question, une question pour laquelle elle avait tiré une tête qui voulait dire « Tentez de m'y obliger et vous finirez en enfer ! », bon ça elle ne l'avait pas dit elle l'avait juste pensée fort avec des yeux plein de fureurs, tester ses pouvoirs et puis quoi encore ? Elle aurait préféré se faire écraser par un millier d’éléphants ! Quoique non... Elle tenait à la vie quand même. Ils ne l'y ont pas obligé et elle en fut fière croyant avoir gagné une bataille mais certes pas la guerre.

Elle était donc dans les couloirs en direction de la chambre qui lui avait été attribuée, qu'elle avait décidé ne considérer jamais comme sa chambre, sa chambre, sa maison appartenait à autrefois, un rêve de se retrouver tous ensemble qui ne s'était pas réalisé.

Elle soupira avant de s'apercevoir qu'elle pleurait, Père disait toujours que devant l'ennemi il ne fallait pas pleurer, elle était chez l'ennemi ! En fait, ça lui donnait la nausée mais elle était devenue une ennemie elle aussi. Elle ne se reconnaissait plus, et pourtant elle savait que cela lui avait sauvée la vie. Alors... Oh et puis c'est finie de réfléchir un peu, elle avait besoin d'une bonne sieste. Elle essuya donc rageusement son regard brouillé de larmes, son père aurait voulu qu 'elle ne lâche rien, en fait, elle ne savait plus, elle n'en savait rien, elle savait juste qu'elle avait les nerfs à fleur de peau, la tête comme un ballon à force de se torturer l'esprit et surtout de suite besoin d'arrêter de réfléchir.

C'est alors que son regard se tourna vers la porte ouverte de la cafétéria. Et...Soit le type sur l'affiche était un sacré pervers soit c'était une blague. Elle resta un instant pensive devant l'affiche, des filles passèrent derrière elle gloussant allègrement un prospectus en main, Pricie leur adressa un rapide coup d’œil, curieuse la jeune adolescente aimait comprendre. «  Le pauvre quand même... » dit le garçon suivant les deux Demoiselles, bon Pricie pensait à un autre dénomination plus insultante mais je pense qu'il vaut mieux rester à « Demoiselles ». Elle soupira (encore) pensant : * Pauvre gars, avec toutes ses brimades, il doit se sentir aussi mal à l'aise que moi  ici...* Pour la première fois depuis son arrivée elle ressentait de la sympathie pour quelqu'un de cette école.

« Tiago Martinaz » lut-elle à voix haute. Elle sourit doucement : « Tiago c'est pourtant un joli prénom, il est peut-être ici aussi mal que moi, apparemment en tout cas ! Vu l'état de la cafétéria... »

La jeune de treize ans grimaça : « Barf puisqu'on est du même coté je vais l'aider ! », elle arracha la première affiche avant de sentir une présence derrière elle.

Pricie se retourna et bredouilla sans pouvoir s'en empêcher : « Tu toi as tu entendu ce que j'ai dit tout haut ? Je j'ai ... » Elle reprit contenance et annonça bougon d'avoir perdu ses moyens face à son aîné qu'elle avait reconnu par, uniquement le visage selon son point de vue,  sur l'affiche : « Je vais t'aider aller , il faut vite enlever ces conneries ! »

Et elle se retourna rouge autant de colère que de timidité vers le mur arrachant affiche sur affiche avec fureur. Après tout malgré les conseils de son père qu'elle voulait vraiment suivre, elle restait une petite fille de treize ans et non une super soldat révolutionnaire.

* Et dire que je m'étais promis de ne pas leur parler au maximum !* pensa t'elle s'en voulant en arrachant les affiches au mur.

Raaaaah putain mais qu'est-ce qu'il me gave ce p'tit con !! Et évidemment, j'ai eu beau faire le tour des couloirs pour arracher une majorité de ces horreurs, je finis toujours par tomber à nouveau sur un nid ! Je n'sais pas combien ça lui a coûté, mais là on ne peut pas dire que c'est moi qui a des problèmes avec l'écologie !!

Bref, il se trouve que le nouvel endroit qui me demande de déployer de grandes quantités d'énergie pour nettoyer ses conneries (nan mais oui, parce qu'en plus j'y suis pour rien mais c'est ENCORE moi qui me tape le sale boulot !! Comment vous voulez que je reste calme dans ces conditions séreux ?!!) n'est autre que la cafetaria. Il abuse vraiment ! Parce qu'il n'a pas pensé aux gamins qui passent ici pour venir bouffer, comme n'importe qui... Ouais bon, j'en ai peut-être rien à foutre que l'innocence de ces chères tête blonde puisse être mise à rude épreuve, c'est juste que ça me permet de le faire passer pour un type irresponsable, ce qui m'arrange bien. Pour une fois que ce n'est pas moi.

Et quand on parle de gamins... Je suis en plein boulot quand je remarque une silhouette un peu trop jeune pour s'intéresser à ce genre d'art raté. Et en plus... Elle parle toute seule ? Nan mais qu'est-ce qu'elle raconte ?! Bien sûr que je l'entends, je suis à cinq mètres ! Mais elle par contre, elle n'a pas l'air de s'en rendre compte. Sauf que ça devient hyper gênant là ! Parce que je ne suis pas encore assez désespéré pour avoir envie de confier mon honneur à une ado. Du coup, bien sûr que je m'approche pour mettre fin à ce malentendu ! Sauf qu'elle me devance en faisant un volte face auquel je ne m'attendais absolument pas.

- "O... Ok, eh, on se calme, pas besoin de t'arracher les ongles là-dessus. La plupart des gens ici l'ont déjà vu alors, tu peux ralentir le rythme."

Je me rapproche de la petite pour m'occuper des affiches épargnées par son enthousiasme un peu trop évident. J'avoue que ce comportement m'intrigue pas mal. Déjà parce que je n'ai jamais vu cette môme avant. Et je ne comprends absolument pas pourquoi est-ce qu'elle voudrait effectivement "m'aider". Pas comme s'il y avait grand monde à Terrae qui s'occupait effectivement de préserver ma dignité. T'façon, j'en ai rien à foutre, j'me débrouille très bien tout seul. Enfin, ce n'est pas la question.

- "Pourquoi tu veux à ce point tout enlever ? J'veux dire, c'est moi qui est visé, t'as rien à voir là dedans... Si ?"

Ah, j'ai soudain comme une illumination qui me traverse l'esprit et qui arrête subitement ma geste en cours. Je lâche le morceau de papier que j'avais encore en main pour choper la petite par les épaules et la forcer à me faire face, le regard d'un coup beaucoup plus suspicieux.

- "Ou alors, t'as aidé Akihiko à pondre ce truc et tu cherches un moyen de racheter ta conscience en voyant ce qu'il en a fait ?"

Bien sûr que je suis sérieux ! Même si le résultat final est suffisamment moche pour que cet idiot ait pu le réaliser sans aide extérieure (surtout quand on considère le temps qu'il a mis à mettre à exécution ses menaces....), je suis bien obligé de m'en assurer !

« O... Ok, eh, on se calme, pas besoin de t'arracher les ongles là-dessus. La plupart des gens ici l'ont déjà vu alors, tu peux ralentir le rythme. »

Le garçon était plus grand que Pricie, on aurait dît un adulte. Il avait des cheveux blancs, Pricie s'y attarda une seconde, était-il seul ? Comme Jack Frost ? Elle secoua vivement la tête, fini les enfantillages ! Jack Frost n'existe pas Se dit elle, elle violentait psychiquement l'enfant qu'elle était, elle voulait l'effacer, le détruire pour être plus grande, plus forte. Le mieux était qu'on l'oublie. Mais puisque Zéphyr son chien en peluche était son seul ami ici, elle était seule à se battre. Seule...Elle l'a tellement été. A ses cinq ans elle pleurait déjà dans la rue sous la flotte cherchant comment guérir sa mère. Mais fini de s'apitoyer se dit-elle, je veux être forte, je veux être adulte, à présent c'est à moi de protéger maman seule... Pour cela elle ne doit pas apprendre ma mort, je dois vivre, sans la contacter cependant. Terrae sa magie l'a détruit et j'y suis à présent. Oui vivre et ne pas donner de nouvelle lui permettra de guérir j'espère.

Elle répondit enfin à la question du jeune homme : «  Je veux t'aider c'est tout. Car tu es comme moi ! » Son regard s'assombrit et elle serra très fort les poings pour ne pas pleurer en se répétant en pensée qu'elle était adulte.


« Pourquoi tu veux à ce point tout enlever ? J'veux dire, c'est moi qui est visé, t'as rien à voir là dedans... Si ? »

Pricie répondit ou plutôt répéta en haussant les épaules ayant réussi à refouler ses larmes :  « Tu es comme moi ! » Elle se retourna pour continuer son arrachage d'affiche. Chaque mot la culpabilisait mais comment faire autrement ? Elle devait bien aider ce garçon, et puis ce n'était pas un crime non ? Après tout il était malmené et vu les affiches cela ne devait pas être tous les jours roses pour lui ici. Alors elle pouvait, Papa aurait dit oui , non ?

Mais elle n'eut pas le temps d'arracher plus d'affiches. Le garçon la prit de force par les épaules et la força à fixer ses yeux marrons. Petit soldat Pricie avait peur mais pour garder contenance elle se répétait dans sa tête qu'elle était forte et brave. Le garçon posa une question :
« Ou alors, t'as aidé Akihiko à pondre ce truc et tu cherches un moyen de racheter ta conscience en voyant ce qu'il en a fait ? »

La gamine le repoussa à plusieurs reprises et quand au bout de grands efforts, le garçon était bien plus fort qu'elle physiquement, elle se dégagea et s'énerva rouge de colère : « Je veux juste t'aider j'ai le droit non ? Oh et puis je n'ai pas besoin de ta permission je les arrache si je veux ! » Elle se retourna, se calma puis haussa les épaules et grogna : « Je ne suis pas amie avec ce type ! » Une ombre passa dans son regard : «  Si ça peut te rassurer je n'ai pas d'ami ici.. » Elle haussa les épaules pour empêcher ses yeux humides de pleurer et expira puis inspira. Il y avait bien sa peluche Zéphyr en amie mais ça personne ici n'avait à le savoir.

Elle arracha une autre affiche et se mit à chanter maladroitement mais joliment pour calmer la colère qui bouillonnait tel un volcan en elle :

« For all my hard talk, I'm still just a daddy's girl »
Malgré ma grande gueule, je ne suis encore qu’une fille à papa
« In this hard shell, there's tiny cracks from a big world »
Dans cette solide coquille se montrent les fissures d’un monde immense
« And there's still monsters in my closet and they want to come and play »
Et il y a toujours dans mon placard des monstres qui veulent sortir et venir jouer
« There's still sounds in the dark, I wish they'd go away »
J’entends toujours dans le noir des bruits, j’aimerais qu'ils disparaissent
« I know, I know, I know, I know I'm a big girl now »
Je sais, Je sais, Je sais , Je sais que je suis une grande fille, à présent
« I know, I know, I know, I know I better work it out »
Je sais, Je sais, Je sais , Je sais que je ferais mieux de trouver une solution à tout ça

Elle ravala sa salive et dit au garçon d'une voix apparemment calme : « Tu veux bien t'occuper de ce  coté là s'il te plaît ? Je m'occupe de ce mur là ! » Elle sourit, resplendissante, enfin et dit dans un clin d’œil : « On va la nettoyer vite la cafétéria ! » Et elle se remit au travail chantant toujours avec une maladresse évidente mais d'une voix assez jolie :

« I've got a little girl of my own and she looks at me »
J’ai une petite fille en moi et elle me regarde
« Like I'm a badass and you know that I wanna be »
Comme si j’étais une dure-à-cuire, et tu sais, c'est ce que j'aimerais être…
« And now there's monsters in her closet and they wanna come and play »
Et il y a maintenant dans son placard des monstres qui veulent sortir et venir jouer
« I start looking for my dad to come and make 'em go away »
Je me mets à chercher mon père pour qu’il vienne les chasser
« I know, I know, I know, I know that it's my job now »
Je sais, Je sais, Je sais ,Je sais que c’est maintenant mon rôle
« I know, I know, I know, I know I better work it out »
Je sais, Je sais,  Je sais, Je sais  que je ferais mieux de trouver une solution à tout ça


Pink, ce lien qui la reliait encore à son père. Son père aux orbites vides. Pour ne pas hurler, pour chasser cette image traumatisante quelques instants, elle se mit à chanter plus fort :

« In the circle game, no one ever stopped to say »
Au jeu du manège, jamais personne ne s'est arrêté pour dire :
« Soon it's gonna change, it all just goes away »
Bientôt ça changera, tout s’en va
« Count your lucky stars that you had a chance to play »
Compte les bonnes étoiles que tu as eu la chance de jouer

Elle arrachait le affaires avec fureur quand soudain une idée lui vint, mais elle n'osa pas s'adresser de suite au garçon et continua son ouvrage, elle n'osait plus le regarder, autant fâchée qu'apeurée pour le moment. Elle s'en voulait d'avoir peur de sa brutalité alors elle mettait tout sur la colère. Elle chantait... chantait :

« I had a hard day, and I need to find a hiding place »
J’ai eu une dure journée et j’ai besoin de me trouver une cachette
« Can you give me just a second to make it through these growing pains? »
Peux-tu me donner juste une seconde pour me sortir de toutes ces douleurs croissantes ?
« And I know that it's just life and I must go through things alone »
Et je sais que ça n’est que la vie et que je dois traverser certaines choses seule
« But I'm feeling kinda small, I want his hand to hold »
Mais j’ai l’impression d’être trop petite, je veux pouvoir tenir sa main
« I know, I know, I know, I know I'm a big girl now »
Je sais, je sais, je sais, je sais que je suis une grande fille, à présent
« Yeah, I know, I know, I know, I know we all just work it out »
Oui, je sais, je sais, je sais , je sais qu’on essaie tous de trouver une solution à tout ça


Elle prit une grande inspiration et arrêta son œuvre mais après une pause de quelques secondes elle continua son ouvrage ne sachant pas si le garçon arrachait les affiches aussi, n'osant plus le regarder pour le moment. Elle déchirait les affiches avec rage, comme elle piétinait son enfance tant qu'elle le peut et tentait d'être forte, forte, toujours forte, tête haute, regarder en avant, tu as des responsabilités face à ta famille Pricie, ne t'arrête jamais, jamais ! Alors même si elle était à Terrae elle suivrait les conseils répétitifs de son père.

Son père... Sa voix tremblait un peu en continuant à arracher les affiches comme si sa vie en dépendait. Pour ne pas laisser la tristesse l'envahir de trop elle continua la chanson :

« What is old, can it be new again? »
Ce qui a vieilli, pourrait-il être de nouveau ?
« And what goes out, does it come back in? »
Et ce qui s'en va, pourrait-il revenir ?
« And we have to say goodbye, can we say hello again? »
Et si on doit dire « au revoir », peut-on dire « bonjour » à nouveau ?
« Oh, where's the book that shows you how to be a big girl now? »
Oh, où est le livre qui vous montre comment être une grande fille ?
« Can I fall apart one more time before I work it out ? »
Puis-je m’effondrer un dernier instant avant de devoir résoudre tout ça ?
« In the circle game, no one ever stopped to say »
Au jeu du manège, jamais personne ne s'est arrêté pour dire :
« Soon it's gonna change, it all just goes away »
Bientôt ça changera, tout s’en va
« Count your lucky stars that you had a chance to play »
Compte les bonnes étoiles que tu as eu la chance de jouer

Elle essuya son visage en sueur, il en restait beaucoup mais pour elle, c'était important de les arracher toutes. Enfin, elle se retourna vers le garçon dans un sourire éclatant : « Ça te dit un concours d'arrachage d'affiches ? Si tu gagnes, j'aurais un gage et si je gagne tu en auras un ! » Elle laissa planer un silence puis elle tira la langue laissant s'exprimer cette fois l'enfant qu'elle était : « Tu n'as pas peur de perdre contre une gamine de treize ans ? »

Elle avait cessé de chanter mais ce que le garçon venait d'entendre aux paroles de la chanson illustrait bien son histoire, son secret en un sens, presque un début d'aveu. Mais il n'était pas temps pour elle d'y réfléchir, elle voulait jouer, jouer avec quelqu'un de bon cœur, quelqu'un qu'elle voulait connaître comme elle ne l'a  pas souhaité, avant ce moment, depuis longtemps.

Je ne suis pas bien sûr de capter ce qu'elle veut pas par "tu es comme moi". Dans le sens où, comme n'importe qui à Terrae, on a ressenti ce Vide à un moment dans nos vies j'imagine. Je ne vois pas d'autre explication. Ça n'empêche que j'ai du mal à comprendre pourquoi est-ce qu'elle veut à ce point m'aider. Je ne suis peut-être plus sensitif, mais je n'ai pas besoin de ça pour remarquer qu'elle ne va pas super bien. Beaucoup moins que moi pour sûr. Mais je ne fais aucune remarque. Je ne suis clairement pas qualifié pour remonter le moral des gens. Encore moins des enfants !

Mais quand elle fini par me dire qu'elle n'a pas d'amis... Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai comme de la peine pour elle. Arh, j'suis sûr que c'est ce pouvoir stupide qui m'a tout déréglé là !! Depuis quand je ressens ce genre de chose moi ?! Je me retrouve un peu con à ne pas savoir quoi dire. Parce que si je m'améliore peut-être en matière de "ressenti émotionnel", pour ce qui est des réactions adéquates, je ne sais toujours pas.

- "Bah, si tu t'emmerdes à c'point alors vas-y, fait toi plaisir."

Je me contente juste de relâcher la gamine qui se met à chanter. Génial, en plus elle doit se croire dans l'une de ces comédies musicales à la con. Je crois que j'aurais encore préféré devoir me démerder seul. Ouais, c'est même sûr en fait. Mais on est juste nous deux dans la cafet, à cette heure-ci, personne ne se pointe, alors je peux bien lui laisser une chance. Et puis si ça l'occupe... J'essaie d'ignorer tant bien que mal ces paroles pas franchement joyeuses, pour me concentrer sur l'élaboration d'une vengeance envers ce sale traitre d'Akihiko.

Mais ce n'est pas un franc succès. Et puis la petite parait regagner d'un coup en motivation, prête à vider les murs de la cafeteria. J'acquiesce d'un signe de tête, réussissant même à lui adresser un demi sourire. Sourire qui disparait assez vite. Elle ne va quand même pas chanter non stop là... ? Mais j'ai peut être un peu peur qu'elle ne s'écroule en pleurs si je viens à la stopper (avec mon manque de tact et de délicatesse habituel), et je préfère encore supporter sa chanson que des larmes.

Et puis finalement, elle peut avoir de bonnes idées. Tout en sachant se montrer provocante ? Parfait, voilà qui me parle beaucoup plus. Parce qu'il faut bien reconnaitre que si la miss s'est bien défoulée sur ces affiches, je n'ai pas foutu grand chose. Mais à chaque fois que je pose mes yeux sur l'une d'entre elles il faut que je me fasse violence pour ne pas retourner étriper immédiatement Akihiko. Ouais, j'ai peut-être déjà passé mes nerfs sur lui, mais je crois que ce n'était pas suffisant.

- "Ah ouais ?! Parce que t'as cru que t'avais une chance face à moi avec tes mini doigts ?! Crois pas que j'te ferais de cadeaux parce que t'es une gamine !"

Un sourire de défi qui se cale rapidement sur mon visage, je regarde la petite un peu différemment. Ouais, elle m'étonne un peu, je ne m'attendais à ce qu'elle fasse une telle proposition. Mais ça me va carrément mieux !

- "Attend, je vire tout ça." J'attrape tous les tas de papiers déjà au sol pour les amener dans les grosses poubelles à disposition de sorte à ce que plus rien ne traine au sol. "Je mets mes affiches dans ce coin là, t'auras qu'à mettre les tiennes plus loin, et on fait le compte une fois qu'il ne reste plus rien sur les murs ! Ça te va ?!"

[Hrp : si tu veux, on peut tirer le résultat de ce petit concours aux dés ^-^]

« Ah ouais ?! Parce que t'as cru que t'avais une chance face à moi avec tes mini doigts ?! Crois pas que j'te ferais de cadeaux parce que t'es une gamine ! »

Elle répondit à son sourire de défi par un : « Je ne te demande pas ça, Monsieur Frost ! » Les deux derniers mots avaient été un peu moqueurs mais pas méchants, elle trouvait que ce surnom lui allait bien même si soyons clair elle ne croyait plus à Jack Frost depuis un bail. Mais taquiner le plus grand l'amusait, elle avait besoin de blaguer ou dans sa mouise elle allait étouffer.

« Attend, je vire tout ça. » continua le garçon en mettant à la poubelle les papiers au sol, normal il avait sa fierté et Pricie aussi alors pas question de tricher !

« Je mets mes affiches dans ce coin là, t'auras qu'à mettre les tiennes plus loin, et on fait le compte une fois qu'il ne reste plus rien sur les murs ! Ça te va ?! »

Pricie lui tira la langue jouant : « Que de sérieux Monsieur Frost ! Et bien sûr que ça me va ! On commence à cinq et pas de triche si t'as l'honneur ! »

« Un »

Pricie se mit en position.

« Deux »

Elle s'approcha du mur un peu plus.

« Trois ! »

Elle avança ses mains avec un sourire plein d'assurance.

« Quatre »

Son sourire déterminé en disait long sur son implication dans le défi.

« Cinqqqqqqqqqqqqqqqqqq ! »

Elle se mit à arracher les affiches deux à deux, parfois trois par trois, les balançant s'en s'arrêter dans son coin désigné au fur et à mesure qu'elles s'enlevaient. En vrai petite lionne elle se déchaînait sur les murs avec férocité et ardeur. Elle gagnerait, l’adrénaline montait , elle ne faisait pas attention à sa fatigue, sa santé fragile ne l'arrêterait pas, elle était Allay et comme disait Papa rien n'arrête les Allay ! Elle n'eut cependant pas le temps de déprimer sur le drame qui avait pris la vie à son paternel. Elle était trop occupée à réduire en charpie les affiches afin de les balancer du mur au tas.
Elle travaillait à la chaîne à une vitesse qui lui aurait valu une promotion si elle travaillait dans une usine.

Peu à peu, la cafétéria retrouva à peu près des murs propres malgré les traces d’adhésifs qui avaient collé aux murs à cause de ces affiches maudites. Pricie se mit devant son tas fort conséquent prête à éclater d'un rire de triomphe.

« Alors Monsieur Frost, dis mois que tu as perdu, que je réfléchisse à ton gage ! » Même si c'était elle qui en avait un, elle ne regrettait pas ce défi, elle s'amusait tellement avec ce sûrement paria comme elle. Elle pensait s'être trouvée un allié et en était fière et heureuse. Mais l'heure n'était pas à la réflexion, l'heure était de savoir qui avait joué le mieux.

[HRP : Je te laisse lancer le dé ! ^__^]

Mr. Frost ? Ok, ce nom me faire sourire. Autant pour la référence (même si en étant Feu c'est assez ironique), mais aussi parce que j'ai bien en tête quelqu'un ici qui porte ce nom. Cela dit, il faut admettre que je ne lui ai toujours pas dit comment je m'appelait. Et je suis plutôt content qu'elle ne se contente pas des informations qui transparaissent sur ces affiches... Mais de toute façon, ce n'est pas le moment. Est-ce que je vais vraiment me lancer dans un défi stupide avec une gamine ? Ouais, grave, mais osef. Je crois que j'ai besoin de ça pour évacuer une partie de cette tension qui m'embrouille depuis ce matin.

Bien sûr que je suis sérieux ! Je ne fais pas les choses à moitié. Et comme je lui ai dit, pas question que je la laisse gagner sous prétexte qu'elle atteint tout juste le stade de l'adolescence.

- "T'inquiète, j'ai pas besoin de m'embêter à tricher pour gagner !"

Un sourire provoquant (non, décidément je ne vais pas changer mes façons de faire parce que j'ai face à moi une enfant), j'attends qu'elle lance le décompte eeeeet... C'est parti !! Au moins, elle a l'air hyper motivée ! Ce qui est assez plaisant ! Du coup, peut-être que ça me donne le coup de fouet dont j'avais besoin pour me mettre sérieusement à la tâche.

Je m'occupe de mon côté avec vigueur, ne laissant aucune chance aux affiches qui passent sous mes doigts. Je jette un coup d’œil de temps en temps à la gamine. Elle ne fait pas les choses à moitié... Elle ne va pas me laisser l'occasion de ralentir le rythme ! Je joue donc le jeu à fond, jusqu'à la fin. Plus une seule affiche de collée sur les murs de la cafet. Ouah. Ok, c'est efficace ce genre de défi.

- "Vas-y, rêve encore le temps que je termine de compter ! Mais n'espère pas trop quand même hein !"

Un ton moqueur, je me mets à la dure tâche du décompte. Parce qu'il y en a du papier par terre... Et que certaines affiches se sont retrouvées déchirées en plusieurs. Et après un comptage acharné...

- "46 à 43. Désolé gamine, mais on dirait bien que t'as perdu."

Wait, y avait vraiment autant d'affiches que ça là dedans ?? Putain il n'a pas fait semblant cet idiot ! Enfin au moins, je ne me suis pas fait ridiculiser par une môme, et c'est déjà pas mal. C'était juste ok, mais c'est le résultat qui compte.

- "Donc... C'est à moi de t'filer un gage... Hum... Va me chercher un café à la machine, j'en ai bien besoin après tout ça. Et profites en pour te prendre un chocolat, ou j'sais pas c'que tu bois à ton âge."

Je lui tend un billet en même temps. Je n'ai pas l'intention de racketter une gosse non plus. Mais si je peux me faire servir, je ne vais pas me gêner !

- "Avec la dose de sucre au max ! Ah, et n'oublie de balancer tous ces papiers à la poubelle !"

Et je pourrais faire bien pire en matière de gages. Mais l'objectif n'est pas non plus de l'effrayer. Il faut admettre qu'elle m'a bien aidé sur ce coup et en plus, je suis beaucoup moins sur les nerfs actuellement alors... Je peux bien me montrer clément pour cette fois ! Et me contenter de m'étaler tranquillement sur une chaise en attendant que mon café arrive !

« Vas-y, rêve encore le temps que je termine de compter ! Mais n'espère pas trop quand même hein ! »  se moqua Monsieur Frost. Mais Pricie ne s'en vexa pas. Elle le trouva vraiment marrant ce Monsieur Frost.

« 46 à 43. Désolé gamine, mais on dirait bien que t'as perdu. » triompha Monsieur Frost.

Pricie croisa les bras une seconde ou deux, mais son air boudeur était juste pour la forme, quand il annonça : « Donc... C'est à moi de t'filer un gage... Hum... Va me chercher un café à la machine, j'en ai bien besoin après tout ça. Et profites en pour te prendre un chocolat, ou j'sais pas c'que tu bois à ton âge. »  Elle leva les yeux au ciel c'est à dire au plafond pâle de la cafétéria : «  Je ne suis plus une enfant, je buvais très souvent du café le matin avec pa... » Elle s'arrêta toute sombre.

Le billet tendu la ramena à l'instant présent et elle sourit moqueuse à Monsieur Frost avant de faire une révérence dans un rire cristalline. «  Très bien Monsieur Frost, deux cafés et que ça saute ! »

«  Avec la dose de sucre au max ! Ah, et n'oublie de balancer tous ces papiers à la poubelle ! » Pricie mit les papiers à la poubelle puis sautilla vers les machines dans le couloir à coté et brusquement...

« Eh, mais c'est la gamine qui nous a ridiculisé ! » cria un grand adolescent. «  On s'est fait enguirlandé a cause de toi, gamine ! » continua une adolescente un peu plus jeune mais plus âgée que Pricie. Pricie soupira agacée : « Ils sont où vos autres potes ? Ils font la grasse mat ? » «  A cause de TOI, l'un d'eux fait de nouveau pipi au lit et l'autre tente de le consoler t'es vraiment une Maladie la gamine ! » Pricie haussa les épaules : « Dommage pour vous que la bande ne soit pas au complet. » Elle ne dit pas un mot de plus et s'approcha de la machine à café mas le grand ado se mit devant un sourire mauvais sur les lèvres.

« Où crois-tu aller comme ça ? » demanda méchamment le grand type.

Dans un haussement d'épaules calme et lasse, d'un soupir elle répondit : « Acheter du café ! »

Le premier coup partit sans prévenir, le grand adolescent la prit dans ses bras pour la retenir.

« Flanquons là dans le placard à balai et et fermons le à clef ! » Dans un soupir l'enfant répéta : «  Je vais acheter du café. »  Mais le groupe ne fit pas attention trop amusé par la nouvelle blague, la colère de Pricie monta peu à peu puis à toute vitesse, Tiago, elle avait un café à lui apporter si elle ne pouvait pas peut-être qu'il ne serait plus son ami...NON !

Elle se retourna vers le type qui la retenait et cria : « Je dois acheter du café, bordel ! » Sans faire exprès des flammes sortir de sa bouche, peu, toutes petites mais assez pour terrifier le garçon qui la lâcha et fuit avec son groupe dans un : « Cette fille est un dragon, un monstreeee ! » Pricie à terre toussa un long moment, sa gorge lui brûlait fortement. Mais Tiago attendait, Monsieur Frost !

De peur de perdre cette amitié naissante, elle prit et fit bien attention aux cafés, une fois à la cafétéria, elle le vit sur une chaise, elle hésita, dormait-il ? Au final elle se lança: « J'ai réussi à sauver les cafés Monsieur Frost et en plus j'ai pensé à vous mettre plein de sucre c'est super hein ! » L'enfant s'approcha de Tiago et tout sourire fière malgré son œil au beurre noir et sa gorge qui la brûlait comme si elle avait attraper un gros coup de froid, même si c'était plutôt un coup de chaud sur ce coup là.

Mais ce n'est pas grave elle avait réussi le gage ! Et elle avait Monsieur Frost ! Elle avait un ami à présent ! Tout ira bien !

Je m'installe à une table pendant que la gamine disparait dans le couloir, prête à aller me chercher mon café sans rechigner. Elle balance même les papiers à la poubelle, visiblement de bonne constitution. Je sors donc mon téléphone pour surfer sur les sites d'actualités en attendant de me faire servir.

Sauf que les minutes commencent à s'écouler, et toujours pas de trace de mini black. Elle ne se serais quand même pas barrée avec mon fric sans avoir l'intention de revenir avec les cafés non ?! Quoi que, à sa place c'est très probablement ce que j'aurais fait... Oh putain, la petite garce !

Mais alors que mes plans de vengeance commencent à tourner dans mon esprit, je vois la demi portion qui refait surface dans la cafet, les mains prises par deux gobelets. Le soulagement ne durera pourtant pas plus de cinq secondes. Le temps que mon regard remonte des gobelets à son visage...

- "Merde qu'est-ce que.... Qu'est-ce que t'as foutu ?!!"

Je n'ai même pas envie de la vanner sur un possible affrontement avec la machine à café. Parce que non, les traces qu'il y a actuellement sur son visage, je suis absolument sûr qu'elle ne les avait pas au moment de quitter cette pièce. Et là tout tourne très vite. Nan, ça ne peut pas être pour ça qu'elle a mis autant de temps ?!

Je me relève un peu précipitamment et attrape les deux cafés pour les poser (trop brusquement si on en juge au débordement mais là j'en ai rien à foutre). Je place l'une de mes mains au niveau de son menton pour pouvoir observer ce résultat qui me fout direct sur les nerfs, sans lui laisser le choix.

- "Assieds-toi là et raconte moi comment t'as fait ça !"

Mon ton est beaucoup plus sec que précédemment. Parce que ça m'fait chier. Mais comment c'est possible de revenir avec la gueule en vrac alors qu'elle était juste partie chercher des cafés ?! C'est pas comme si je lui avais demandé de se jeter du toit en tentant une réception sur les mains !! Arrh fais chier !

Et sans attendre, pendant que je la laisse commencer son récit, je me dirige vers la fontaine à eau. Je prends un gobelet que je remplis au trois quarts avec de l'eau froide pour lui rapporter.

- "Et colle ça à ton œil. Ça va piquer un peu mais ça évitera que ça ne gonfle trop."

Ouais ouais, bien sûr que je vais l'amener à l'infirmerie, mais pas sans avoir davantage de détails sur ce qui vient de se passer.

« Merde qu'est-ce que.... Qu'est-ce que t'as foutu ?!! »

Pricie haussa les épaules sans comprendre : « Bah j’ai acheté du café ! » elle regarda la pendule au mur et rit embarrassée : «  Pardon j’ai du retard ! »

Mais Monsieur Frost se leva vivement et prit les cafés qui débordèrent légèrement. Le corps de Pricie se glaça d’incompréhension et de peur.

« Assieds-toi là et raconte moi comment t'as fait ça ! » dit le garçon aussi sèchement qu’une gifle de vent glacé, Monsieur Frost semblait fâché, Pricie ne comprenait pas, elle avait pourtant ramené le café et lui il l’avait renversé…

« J’ai eu peur que tu ne sois plus mon ami. » fut tout ce qui sortit des lèvres de la petite adolescente d’une voix tremblante. Ne pas pleurer, être forte, ne pas pleurer...Pricie se mordit la lèvre alors que Monsieur  Frost alla au lavabo puis revint avec un verre d’eau froide.

« Et colle ça à ton œil. Ça va piquer un peu mais ça évitera que ça ne gonfle trop. » annonça t’il.

Elle obéit en silence et réussit à ravaler son chagrin. Elle regarda les cafés tristement  avant d’avouer : « Ne t’inquiète pas ce sont juste des monstres qui ont voulu se venger car ils m’avaient embêtée et que je les avais ratatinés l’autre fois...enfin j’allais les ratatiner si l’adulte n’était pas arrivé... » Elle haussa les épaules du haut de ses treize ans : « Ça revient au même ! »

Manger ou être mangé n’est-ce-pas Pricie, du moins était ce qu’on t’avait appris.

Pricie  se leva et elle posa tranquillement le verre d’eau froide sur la chaise.

Elle alla vers les cafés puis dans un sourire un peu triste les récupéra, elle posa le plus rempli sur la table près de Monsieur Frost. Le liquide chaud la fit tousser tant sa gorge était enflammée par le feu. Elle posa le verre et sourit doucement : « La malédiction a cramé ma gorge, ça passera. » Oui car tout passe petite lionne, petit soldat qui en a déjà vu trop.

Dans un sourire malicieux, la jeune adolescente leva son verre : « Allez je suis bonne joueuse trinquons à ta victoire ! »

Joueuse...

Un rayon de soleil passa sur la visage de la fillette :  «  Quand j’étais petite, il y avait plein d’enfants qui avaient une télévision et une manette de jeux vidéos ! » Pricie haussa les épaules : «  J’ai bien eu des consoles mais jamais quelqu’un à affronter. Dommage je me débrouillais pas mal !  »

Pricie leva un regard défi à Monsieur Frost : « Tu sais jouer aux jeux vidéos ? Et tu te débrouilles Monsieur Frost ? »

Elle lui fit un clin d’œil dans un : « Si c’est possible j’aimerais bien jouer contre toi ! » Puis, elle fit une moue amusée :  « A moins que tu aies la trouille ! En ce cas je gagne par forfait et tu me dois un gage ! »

Le jeu n’était pas terminé, loin de là !

Est-ce que j'y vais trop fort ? C'est qu'une gamine ok, mais c'est pas contre elle que je m'énerve ! Ça s'voit non ?!! Rah c'est bon, j'suis sur les nerfs là !! Et ses explications ne sont pas pour m'aider à retrouver mon calme. Pourtant, quand je vois son air effrayé, je me fais violence pour contenir toute la haine habituelle qui voudrait naturellement sortir.

Que je ne sois plus son ami... Putain, depuis quand on devient amis après seulement avoir arraché des affiches ?! Je n'ai aucune idée de ce qu'elle a pu subir, mais on dirait bien que ce n'est pas sur moi qu'elle aurait dû tomber. Eh, j'suis pas le mec le plus calme et compatissant qui soit ! Sans compter que j'n'ai jamais été doué avec les gosses un peu trop innocents. Et là, j'ai soudainement l'impression de me retrouver face à une môme élevée dans un couvent !

- "Ouais... Trinquons."

J'essaie de suivre son enthousiasme forcé en attrapant mon gobelet. Mais je n'arrive clairement pas à suivre le cours de sa pensée. Comment est-ce que je le pourrais avec son visage tuméfié juste en face de moi ?!

- "Non."

Raaaah mais putain c'est quoi cette façon de parler de jeux videos maintenant ?!! Bien sûr que je n'ai absolument pas dans l'idée de jouer à un jeu avec elle !! Déjà parce qu'il va falloir que je m'assure qu'il n'y a pas d'autres de ces putains d'affiches qui trainent, mais surtout, je ne peux pas aller allumer une console (que je n'ai pas en plus !) alors qu'elle doit faire un détour par l'infirmerie ! Sauf que je ne sais pas comment je suis censé parler à cette gamine sans l'effrayer putain !!

- "Non, on ne va pas jouer. J'ai... Grave la trouille."

Ahah... J'me déteste. Comment est-ce que je peux sortir un truc aussi absurde ?!

- "Alors, tu vas pouvoir me filer un gage si tu veux mais avant... Tu vas arrêter de boire ce café parce que manifestement, y a un truc qui ne passe pas. En plus t'es encore trop jeune pour ça ! Ensuite, tu vas me laisser t'accompagner à l'infirmerie, qu'on trouve de quoi arranger tout ça sinon tu ne seras pas capable de te reconnaitre dans le miroir demain."

Et j'aurais bien besoin d'une clope pour faire passer tout ça. Ou de trouver ces merdeux pour me passer les nerfs dessus. Mais pour ça, il va d'abord falloir que je négocie un accès au système de caméra. Avec toutes celles qui trainent partout, il y a forcément moyen de les retrouver. Et après on vient m'engueuler pour de toute petite bagarres de rien du tout !

- "Allez, en route. Le temps qu'on te soigne, tu auras le temps de réfléchir à un gage !"

J'attrape mon café (parce qu'il est encore beaucoup trop chaud pour que je puisse le finir d'un coup), bien décidé à ne pas la laisser dans cet état sans soins.

« Non, on ne va pas jouer. J'ai... Grave la trouille. »

Le sourire amusé de Pricie se transforma en une mine étonnée : « Mais tu es super Monsieur Frost ! » Mais il ne sembla pas entendre la fillette car Monsieur Frost continua en ces termes : « Alors, tu vas pouvoir me filer un gage si tu veux mais avant... Tu vas arrêter de boire ce café parce que manifestement, y a un truc qui ne passe pas. En plus t'es encore trop jeune pour ça ! Ensuite, tu vas me laisser t'accompagner à l'infirmerie, qu'on trouve de quoi arranger tout ça sinon tu ne seras pas capable de te reconnaître dans le miroir demain. »

Pricie hésita puis suivit Monsieur Frost en marmonnant des mots qu’elle même ne saisissait pas, juste pour grogner en fait alors qu’il annonçait : « Allez, en route. Le temps qu'on te soigne, tu auras le temps de réfléchir à un gage ! »

Mais une fois devant l’infirmerie, elle vit des gens utiliser leur pouvoir pour guérir les patients. Pricie grimaça et se retourna prête à revenir sur ses pas : « En fait nope, je vais me débrouiller pour trouver du tissu et utiliser du savon. »

Mais Monsieur Frost n’allait sûrement pas être d’accord alors Pricie fut obligée de rajouter : «  Déjà que la malédiction m’a fait cracher du feu et m’a cramée la gorge… Je ne vais pas l’encourager pour quelques bobos ! »  L’enfant pesta : «  Plus je suis loin des dons mieux c’est ! »

« Oh Pricie, tu as un grand-frère de cœur à présent ? » s’exclama un infirmier. «  Ce n’est pas mon frangin ! C’est une victime de plus ici comme moi ! » lui tira la langue Pricie dans une attitude tout à fait  adulte.

L’infirmier sourit à Monsieur Frost : «  Pricie nous donne du fil à retordre ! Elle se bat souvent enfin c’est ce qu’elle dit. » Un air un peu triste passa dans les yeux du soignant : «  Moi je crois plutôt qu’on n’est pas gentil avec elle et que sur elle les coups partent trop souvent. »

« L’écoute pas! Il n’est pas comme nous ! Nous on est des soldats Monsieur Frost ! On se bat avec dignité ! »  leva la tête avec fierté la fillette.

L’infirmier soupira et lui prit le bras. « Allez sur ces bêtises, viens Pricie on va soigner tes blessures ! » Elle se dégagea vivement en poussant le bras de toutes ses forces : « C’est non ! »
Les sourcils de l’infirmier se froncèrent : «  Pricie, ne m’oblige pas à appeler les autres soignants pour te maîtriser pendant les soins comme l’autre fois s’il te plaît !»

« Essayez donc ! » défia Pricie le regard brûlant de fureur. L’infirmier se tint la tête visiblement migraineux. «  Écoute Pricie, on a trop de travail pour ça aujourd’hui, alors quand tu cesseras ta colère viens te faire soigner c’est tout ! » Il s’adressa alors à Monsieur Frost : « Convainquez la, là, pas le temps là ! »

Mais déjà Pricie, furieuse et la colère le cachant mais aussi terrifiée rebroussait chemin. Avec tout ça, elle en avait oublié le gage.

Pff nan mais vous me voyez moi, essayer de jouer au mec responsable ? J'suis tellement pas crédible. Mais je n'peux pas la laisser continuer à faire n'importe quoi comme ça ! Alors bien sûr, je l'emmène direction l’infirmerie, même si ça n'a pas l'air de lui plaire. Évidemment, qui aime aller dans ce genre d'endroit ? Enfin, autre que dans le cas où c'est une infirmière sexy, avec un super décolleté ouvert sur une sacré de paire de boobs, qui se penche pour mettre un pansement j'veux dire !

En revanche, je ne m'attendais pas à ce que la gamine s'arrête aussi subitement dans le couloir alors qu'on arrive devant l'infirmerie. Comment ça nope ? Je la regarde, pas franchement satisfait par son explication, avant de suivre son regard. Qu'est-ce qui ne va pas ? Pourtant, si sa façon de parler des pouvoirs qu'on reçoit en cet endroit particulier m'étonne, ce sont bien les paroles du mec qui s'adresse à nous qui manquent de m'étouffer ? Un grand frère de cœur ?! Et puis quoi encore ?! D'où j'ai la gueule pour un tel emploi moi ?!!

Et puis qu'est-ce qu'ils baragouinent les deux là ?!! Depuis quand on force les gens à se faire soigner contre leur gré ? En dehors d'un hôpital psychiatrique, évidemment. Je ne pige toujours pas très bien ce que la môme peut avoir en tête quand elle parle de soldat et de dignité, mais ce qui est sûr, c'est qu'il ne faut pas compter sur moi pour la forcer à quoi que ce soit. Je ne suis pas le roi du tact, mais même moi je sais qu'il y a certaines formes à mettre !

Bon, avec tout ça, je ne sais même plus quoi dire moi. Nan mais c'est quoi ce merdier ?!! Alors chaque chose en son temps. Je commence par poser mon regard sur celui qui a visiblement du mal avec les ados en pleine crise.

- "J'vais pas la convaincre de quoi qu'ce soit. Si elle ne veut pas, c'est son choix. Ah, et enlève toi tout de suite cette idée de frère de cœur de la tête, c'est complètement ridicule ! C'est le genre de conneries que les faibles en manque d'affection s'inventent, alors laisse moi en dehors de ça !"

Mon ton se fait particulièrement désagréable. Je n'ai pas envie de me lancer dans une longue discussion avec ce type. Et visiblement, il n'a pas non plus particulièrement envie de répondre quoi que ce soit. Tant mieux. Je n'ai le temps pour ça. J'ai une tête de pioche à rattraper moi. Pourquoi est-ce que je m'emmerde avec ça au fait ? Ah oui, je me sens peut-être légèrement responsable.

- "Eh, petite !"

Je la rattrape rapidement en quelques enjambées. Elle n'a vraiment pas l'air contente. Et quelque part, ça m'amuse assez de la voir ainsi. Ok, je crois que j'ai toujours eu un faible pour les rebelles.

- "Allez, suis-moi, on va s'occuper de tes blessures de guerre ailleurs qu'à l'infirmerie."

Ouais, j'ai tout ce qu'il faut dans ma chambre, évidemment. Et pas uniquement parce que je bosse à l'hosto, mais bien parce qu'il m'arrive beaucoup trop souvent de me retrouver avec la gueule en vrac. Et que je n'apprécie pas particulièrement me faire soigner...

- "Alors comme ça, t'as l'habitude de te battre avec les autres ? C'est quoi le problème avec l'infirmerie ?"

Oui, bah j'ai bien compris que c'était mort pour l'emmener se faire soigner dans ce genre d'endroit. J'ai encore beaucoup de mal à comprendre sa façon de penser, mais peut-être qu'en lui posant quelques questions, je finirais par y voir plus clair. En attendant, je prends la direction des escaliers. Non pas que ça m'enchante particulièrement de ramener une gosse dans ma piaule (j'ai pas franchement envie d'imaginer les conneries que certains pourraient aller raconter) mais au pire, suffira de casser quelques gueules plus tard.

Est-ce que je dois vraiment mettre en évidence le ridicule de la situation lorsque la gamine me fait remarquer que ce "petite" ne lui convient pas, alors qu'elle-même s'évertue à me refiler ce surnom stupide ? Je pourrais, mais j'ai bien autre chose à foutre que de lui faire une leçon de morale. Et puis c'est pas mon genre. Au moins, elle accepte de me suivre docilement jusqu'à ma chambre. Ouais, c'est plus pour avoir bonne conscience que je ne la laisse pas repartir dans son état c'est vrai.

Mais une fois de plus, sa réponse a de quoi laisser perplexe. Dans quel monde elle vit sérieux ? Pour un peu je serais bien tenté de croire qu'on lui refile des cachetons chelous aux effets secondaires un peu trop prononcés chez elle. Réflexion que je ne partage évidemment pas. Le problème, c'est que maintenant j'ai bien envie de savoir d'où cette vision lui vient. On peut ne pas apprécier quelqu'un, je suis assez bien placé pour le savoir, mais de là à invoquer autant cette vision du soldat, il y a clairement un truc qui ne tourne pas rond.

Enfin, au moins elle se montre docile désormais, alors je compte bien en profiter pour m'occuper de ses blessures. J'attrape de quoi faire dans la salle de bain avant de revenir vers Pricie qui est sagement installée. Ce qui contraste fortement avec ce que j'ai pu voir d'elle il y a quelques minutes. Ouais, c'est vraiment juste l'infirmier qu'elle ne doit pas supporter.

- "Ton gage, c'est que je dois écouter ton histoire... ? Eh bah, elle doit être sacrément ennuyante."

Comment ça ce n'est pas très délicat de dire ce genre de chose ? Comme si j'en avais quelque chose à foutre. De toute façon, le temps que je m'occupe de toutes ces coupures et contusions, je ne vais pas avoir bien mieux à faire que de l'écouter. Et au moins, ça m'évite de devoir faire la conversation à une gosse, donc c'est pas si mal.

Évidemment, le côté glauque de son histoire me surprend un peu. C'est vraiment le genre de truc qu'on raconte à des enfants de cinq ans ? Mais si j'essaie de me souvenir de tout ce à quoi j'avais déjà pu assister à cet âge, je me rends facilement compte qu'on intègre les éléments avec une vision d'enfant qui n'a rien à voir avec celle des adultes. Ce qui n'est en revanche pas sans répercussion quand on grandit. Je suis assez bien placé pour le savoir. Mais ce qui m'étonne le plus, c'est l'intégration de Terrae dans cette histoire, et le besoin de "libérer" cette fille qui s'y trouve. Ça en revanche, ça ne colle pas du tout avec ce que j'ai pu voir jusqu'ici. Mais je laisse Pricie poursuivre, son histoire m'intéressant finalement bien plus que ce que je n'aurais imaginé.

- "Soldat ou pas, personne ne devrait se détester quelle qu'en soit la raison."

Je ne suis toujours pas sûr de comprendre ce qui peut bien se passer dans sa tête pour qu'elle en vienne à de telles conclusions, pour que ses questions me laissent toutes plus sceptique les unes que les autres. Mais je suis sûr que cet air triste que je vois passer sur son visage l'espace de quelques secondes est beaucoup trop sérieux pour une enfant. Même si une fois encore, je sais à quel point l'enfance n'est pas qu'une question d'âge.

- "Et puis, tu as l'air beaucoup trop forte pour te soucier de ces choses là. Continue à faire les choses comme tu le veux, à passer du temps avec ceux que tu apprécies, ignore les autres, s'ils t'embêtent, montre leur que tu tapes plus fort, et tout se passera bien."

Chacun ses conseils... Mais vu le caractère de la miss, c'est encore ce qui me parait le plus approprié. En revanche, je ne m'attendais pas à ce qu'elle trouve un cadeau à me faire... Un ruban. Jaune. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir en faire ? En général j'accepte jamais les cadeaux, mais là ce n'est pas vraiment l'une de ces nanas que je fréquente et qui risquerait de se montrer relou, alors j'imagine que je peux bien faire une petite entorse à mes habitudes. Même si j'ai comme un doute que  je vais finir par le regretter.

- "Heu, merci... Mais tu n'as pas besoin de ça. C'est un peu de ma faute si tu as dû te battre. Tu veux un coca ? Pour te remettre de toutes ces émotions !"

C'est la seule boisson sans alcool qui traine dans ma chambre. Et je ne me vois pas la mettre à la porte aussi directement. J'ai quand même un minimum d'éducation. Puis elle a beau être chelou, ça la rend aussi plus supportable que la majorité des gosses. Enfin, à peu près. En tout cas, il y a clairement quelque chose d'intrigant chez elle.