J'étais prête, je veux dire vraiment prête et de bonne heure ce matin. J'ai déjeunée, je me suis lavée et habillée, puis je suis revenue dans ma chambre histoire de faire passer le temps. Peut-être même un peu trop en avance d'ailleurs, et c'est ça qui m'a poussée à me recoucher. Grappiller quelques minutes de sommeil, ça paraissait une bonne idée à la base non ? Enfin, ça le paraît beaucoup moins maintenant que j'ai les yeux grands ouverts avec  l'heure affichée en rouge devant mes yeux.

En retard pour le cours de Maths, tu parles d'une poisse ! J'aime pas vraiment, enfin, pas du tout la matière, mais le prof m'a pas eu l'air hyper hyper sympa et j'ai pas envie de me le mettre à dos ! Ça ferait tâche pour une nouvelle arrivée et j'ai pas trop envie de me faire remarquer.

Bon, j'ai encore une dizaine de minutes alors j'suis pas non plus hypra pressée, mais j'aimerai bien arrivée avant lui quand même, ça fait meilleure impression que la fille qui arrive à la bourre en s'excusant devant toute la classe, la honte.

Je saute du lit pour mettre mes bottines, un serre-tête à oreilles de chat (peut-être qu'il aime ça les chats, le prof), mes écouteurs parce qu'il me reste quand même du temps pour écouter un peu de musique, et sort en trombe de ma chambre, direction les escaliers pour rejoindre les salles de classes. Je m'y engouffre sans vraiment faire attention à la personne qui allait s'y engager et lève la main en passant devant lui pour m'excuser de l'avoir bousculé sans le vouloir.

- Pardon, j'suis en retard ! Désoléééée !

Ça doit être la faute de cette fichue électricité, j'ai l'impression d'être montée sur le 220 volts... Je suis un peu trop dynamique aussi, et le combo ça aide vraiment pas.

J’ai le temps de descendre quelques marches mais, à ma surprise générale, je m’arrête sur place pour faire volte-face. Je ne sais pas si c’est mon stress d’être en retard qui m’a fait couper la musique ou ma surprise en entendant ce qu’il vient de me dire.

- Je te demande pardon ?

Enfin, avec la musique dans les oreilles j’ai peut-être mal compris, mais j’ai un gros doute quand même.

- Je suis désolée pour ta chemise, mais je ne pense pas que ça mérite un langage aussi fleuri !

Ses insultes, il les garde pour ses potes si ça le chante, mais on n’insulte pas les inconnus de cette façon en plein couloir ! Heureusement que l’heure des cours arrive, sinon tout le monde aurait entendu ça et ça aurait été la honte grave. M’enfin je crois que je vais arriver en retard maintenant alors foutue pour foutue… Je baisse les yeux sur sa chemise puis tends la main :

- T’as qu’à me la donner ta chemise, elle sera lavée pour demain si tu y tiens…

Quoique dit comme ça, ce n’est peut-être pas l’idée du siècle de demander à un inconnu de se déshabiller dans le couloir. Même si c’est un canon, c’est à éviter et surtout s’il est énervé. Et puis il avait qu’à éviter d’être si lent sur le chemin aussi… Je retire ma main et détourne les yeux :

- Ouais, enfin pas tout de suite quoi, tu m’as comprise… Mais il se serait passé quoi au fait, hors des locaux hm ?

Je préfère demander quand même parce que vu la tête qu’il fait, il n’a pas l’air commode et je suis curieuse de voir à quel point. Il n’irait quand même pas jusqu’à frapper une fille quand même ? Je plisse des yeux en le fixant. Les bad boy c’est agressif en vrai. Mais bon, qu’est ce qu’ils sont canons quand même… Je reprend quand même contenance histoire de pas perdre la face, il faut que je règle cette histoire de chemise ! J'ai pas envie d'avoir des problèmes dès maintenant, m'enfin ça dépendra aussi de lui et je pourrais toujours essayer de rattraper le coup un jour non ?

Attendez un peu, c’est quoi ce délire ? Il n’a pas ouvert la bouche mais j’ai pourtant bien l’impression de l’avoir entendu. J’ai des hallucinations ou quoi ? Le truc c’est que lui aussi il a l’air surpris. Ou alors… Attendez y’a des pouvoirs de télépathie dans cet internat ???

J’essaye de me retenir de réagir même si mes joues chauffent un peu quand ils parlent de se retrouver dans une chambre avec lui, non pas que l’idée soit déplaisante parce que bon… Comme j’ai dit les badboy c’est canon… Mais sérieux il se prend pour qui ?! Sa remarque sur ma crédibilité me fait froncer les sourcils et, il a beau être plus grand, je le fixe en plissant les yeux quand il s’approche de moi. Qu’est-ce que…

- "Les filles qui portent des trucs aussi mignons devraient se contenter de s'intéresser aux gentils garçons."

Ah mais ça veut dire que…  Y’a pas que ses pensées qui fuitent alors ?! Merde il faut que je fasse gaffe ! Je me racle la gorge en balayant sa main de mon serre-tête, détournant les yeux en gardant un minimum de contenance, la tête haute :

- Je m’intéresse à qui je veux et je m’attire des ennuis si j’ai envie, j’suis sûre que t’es pas du genre à t’en priver toi d’ailleurs !

Je pose mes points sur les hanches puis le fixe d’un air interrogateur.

- Mais on fait comment pour ta chemise, au fait ?

A ce que je sache, on ne se connait pas et il aura peut-être du mal à mettre la main sur moi dans ce bâtiment non ? Avec toutes les chambres qu’il y a, ça ne va pas être une mince affaire. Même s’il a dû en visiter quelques-unes, je ne sais pas si j’assumerai qu’il vienne me rendre visite à l’improviste, tout comme je n’oserai pas mettre les pieds dans la sienne. Il ne se passerait rien dans tous les cas, il doit avoir quelques années de plus que moi, mais l’idée de me retrouver toute seule avec lui me dit que c’est quand même territoire dangereux. On appelle ça l'intuition féminine, je crois non ?

J’ai toujours fait comme je voulais, assumer ou non… ça c’est une autre histoire ! Mais c’est pas mon genre de reporter la faute sur les autres, ça c’est sûr. Là je compte bien assumer alors je m’empresse de lui demander comment on règle cette histoire de chemise.

Sa réponse me donne l’envie express de faire marche arrière mais je l’écoute en me mordant la joue, histoire de ronger mon frein. Aller nettoyer ça, ça prendrait au moins une heure avec le cycle de lavage + séchage, du coup je devrais sécher le premier cours… Mais en même temps ça me laisse un peu de temps pour discuter avec Tiago et me faire pardonner, parce que mine de rien je n’ai vraiment pas envie de m’attirer ses foudres en l’énervant. Ce genre de badboy, qui sait de quoi il est capable ! Je réfléchis et quand il s’arrête, je le fixe. Qu’est ce qu’il a derrière la tête ?

- Ou alors ? Allez, accouches !

Je grommelle un peu sur son image de gentille fifille toute sage mais change vite d’expression quand il me demande de lui laisser mon numéro et tous les sous-entendus qu’il laisse derrière. Attendez, qu’est ce qu’il me fait là ? Je sens mes joues chauffer et j’essaye de me contenir tant bien que mal, mais c’est chaud là. Je serre les mâchoires en me repassant ses paroles dans la tête, j’dois rêver. Il ne peut pas me faire des avances, il bluffe j’suis sure ! Il doit avoir des tas de filles à ses pieds et il est trop vieux de toute façon, pas moyen que je le laisse faire. Faut juste que je me contienne, sinon il va encore me mettre l’esprit en vrac ! Je me racle la gorge et le regarde avec un peu plus d’assurance d’un coup :

- On va régler ça maintenant ! J’suis pas à un cours près, y’en aura plein d’autres dans l’année.

Et il est hors de question que tu entres dans ma chambre. Que tu sois canon n’y changera rien ! Je tire sur le col de mon uniforme pour m’aérer un peu, je préfère de loin mes tenues habituelles mais pour aller en cours il n’y a pas trop le choix. J’avance vers Tiago et l’embarque en le tirant par le bras :

- Allez, dépêche-toi ! J’ai pas que ça à faire non plus…

Et si je passe trop de temps avec toi, je sens que vais dire trop de conneries. Je m'arrête et le lâche, réalisant que je ne sais même pas où aller en premier. Il a parlé d'aller chercher autre chose à se mettre non ?

- Euh.. t'es dans quel dortoir au fait ? Quoique je peux t'attendre à la laverie en fait, j'ai pas besoin de te suivre...

HRP:

- CA N’A RIEN A VOIR AVEC MA CHAMBRE !

Tsk, et puis quoi encore ! Je roule des yeux quand il me dit de me détendre, j’ai envie de le frapper à force de faire le malin ! Enfin je n’aurai peut-être pas dû crier comme ça, heureusement que les couloirs sont vides… Au lieu de batailler pour lui retirer ce sourire mesquin sur son beau visage, je lui attrape le bras pour l’emmener à la laverie. Trêve de plaisanterie ! Ce qui est drôle, et à la fois bizarre, c’est que ses pensées semble lui échapper encore une fois…

Hahaha, Je suis sûre que ça ne doit pas lui arriver souvent de se sentir comme ça ! Peut-être que je devrais essayer de le refaire un peu plus tard, s’il m’embête un peu trop… Ce serait un bon moyen de me venger. Je me raidis en l’entendant dire que je suis mignonne, faisant la moue pour éviter de rougir à nouveau. Je me suis déjà assez embarrassée comme ça, retrouve ton assurance Leo allez !

- Ok ça va, je t’accompagnes alors… Mais pas de « au cas où » ! Si je reviens dans ta chambre, ça ne sera QUE pour te ramener ta chemise ! Je suis sûre que c’est le bordel dedans en plus et j’ai pas envie de voir les sous-vêtements de tes conquêtes traîner partout !

Je lui souris toute fière de lui lancer des piques à mon tour, puis le suit jusque l’aile des personnes « Feu ». L’aile la plus cool de cet institut ? S’ils sont tous comme lui, j’imagine que ça doit être la fiesta tous les soirs et qu’il doit y avoir de beaux garçons partout… De belles filles aussi évidemment. Peut-être que je reviendrais y faire un tour en fait… Tant qu’ils ne se mettent pas à tout cramer, c’est déjà pas mal j’imagine !

Je m’adosse au mur à côté de sa porte pendant qu’il la déverrouille pour aller se changer, puis sors mon téléphone histoire de passer le temps en l’attendant. Ça ne devrait pas être long pour lui de retirer sa chemise et d’en passer une autre. Je passe la tête par l’encadrure pour voir s’il a fini mais il est tout juste entrain de mettre la nouvelle, chemise entrouverte donc. Et je ne suis pas déçue du spectacle… Jolis tatouages dis donc… sans parler du reste. Je retourne m’adosser discrétos dans le couloir et me racle la gorge avant d'en remettre une couche pour le taquiner :

- Ca y est, t’as fini ? T’es plus long qu’une fille pour te changer !

Je me retiens de lui dire que, pour que ça arrive il faudrait déjà que j’ai ne serait-ce qu’un mec, et puis dans tous les cas je ne laisserai rien trainer chez personne. Vous imaginez un peu la honte le lendemain dans les couloirs en mode « Hé Léo, t’as oublié ton soutif dans ma chambre hier ! » BONJOUR L’AFFICHE ! Enfin, le commun des mortels préviendrait discrétement, par message. Et puis faut-il encore que j’en arrive en enlever mon soutif et ça c’est pas gagné…

Mais je me perds là, on se concentre. Qu’est ce qu’il dit lui déjà ? D’autres trucs qui traînent ? Ça pourrait être quoi d’autres ? Sa poupée gonflable ? QUoiqu’il en soit, je préfère rester dehors à l’attendre, j’ai pas envie de voir des horreurs et imaginer le pire. Même si je dois avouer que j’ai jeté un œil ou deux pour le voir lui, mais juste pour vérifier qu’il lui arrivait rien pendant qu’il retirait sa chemise, juré…

Je tapote du pied en rythme avec la musique que j’écoutais tout à l’heure, celui-ci ne quittant pas mon esprit, et lui lance une petite pique pour qu’il accélère. Bien sûr, monsieur n’a pas la modestie dans sa poche.

- Style parfait, style parfait… J’avoue que t’es pas mal maiiiiiis j’suis sûre qu’il y a mieux que toi dans les parages !

Je lui fait un grand sourire, un petit clin d’œil et on se met en route vers la buanderie. Une fois arrivée, j’observe les produits pour choisir ce qui convient le mieux à sa chemise. Ce serait bête de se tromper de lessive, j’suis sûre qu’il ferait un caca nerveux si elle réduit au lavage ou qu’elle devient toute rêche sur sa peau recouverte de tatouages… Il en a pas mal quand même, de ce que j’ai vu d’ailleurs, mais ce serait déplacé de lui en parler et de poser des questions là-dessus, sinon ce serait grillé direct que je ne suis pas juste restée dans le couloir. J’attrape la chemise en lui souriant l’air de rien, puis réponds à sa question :

- Oh, oui pardon. Avec tout ça j’en ai oublié de me présenter… Je m’appelle Leona Tsukuyomi. Et toi, c’est comment ?

J’imagine qu’il n’a pas un nom 100% japonais lui non plus, vu son physique. Et il n’y a là rien de méchant, c’est un simple constat. Faut avouer que les japonais ont un certain charme, mais ce n’est rien à côté des hafu ou des étrangers… J'évite de trop me disperser dans mes pensées quand je me rappelle qu'il peut les entendre par morceau, et pense alors à un truc qui me rend curieuse d'un coup :

- Excuse-moi si ça peut paraître débile mais... c'est ton pouvoir de base, lire dans les pensées ?

J'ai cru comprendre plus tot qu'il n'etait pas habitué à ce truc, mais y'a ptete une raison ? Peut-être que je ne serai pas coincée à vie avec cet foutue éléctricité...

- Tiago, eh bien enchantée !

Pendant un instant j’ai cru confondre avec le perroquet de Jafar, mais y’a une lettre de trop pour que ça soit le cas. Et heureusement pour lui surtout, sinon le surnom était tout trouvé héhé…

- Si personne n’a ses pouvoirs, ça doit être un sacré bord-... bazar, je voulais dire bazar..

Les gros mots dans la bouche d’une fille, c’est moche qu’ils disaient, alors essayons de se tenir un petit peu ! C’est pas comme si je m’enfonçais depuis que j’ai croisé son cheminn mais presque ! Je me demande ce que c’est son pouvoir d’origine, et le mien aussi d’ailleurs. Je sais que c’est l’eau, mais il y a différents pouvoir liés et je ne sais pas encore lequel sera mien. J’ai vraiment aucune idée de comment ça va être concrètement, j’imagine que je vais pouvoir dévier la trajectoire de l’eau du robinet comme l’expérience en physique-chimie avec l’électricité statique, sauf que là ce sera uniquement moi la responsable ! Une charmeuse de serpent, mais avec de l’eau à la place, ouais c’est vachement stylé ça. J’pourrais même séparer l’eau de mon bain en deux, comme Moïse ! Je reporte mon attention quand il me dit que sa maîtrise n’est pas au top, puis hausse un sourcil :

- Ah mais c’est pour ça que tu lis dans ma tête, du coup. Si t’étais plus doué, t’aurais rien capté du tout en fait !! Haha, ça aurait été un peu moins gênant aussi, hm...

Je gonfle les joues puis me tourne pour mettre la chemise dans la machine, avant de refermer la porte. Je cherche rapidement du regard la poudre à lessive, puis part la récuperer histoire d’éviter de croiser le regarde de Tiago. Déja qu’il lit comme dans un livre ouvert, j’vais pas en plus prendre le risque de le regarder dans les yeux et de rougir comme une idiote…

- Je te remercie de reconnaître mon talent ! Des années d’expériences, mais rien de chelou hein bien sûr ! On a des yeux, c’est fait pour regarder. Et puis faire taire mon cerveau devant un garçon canon, ce serait comme dire à un feu de s’arrêter de brûler en jetant de l’huile dessus… c’est compliqué.

Et merde, il vient de me piéger et c’est sorti tout seul. Pourquoi je lui balance qu’il est canon ? Comme s’il s’en doutait pas déjà ! Et puis c’est quoi sa question là ? Bien sur que j’aurai préféré qu’il reste torse nu, j’aurai profité et puis j’aurai pu voir s’il a d’autres tatouages, parce que j’suis sure de pas avoir tout vu ! Quoique si je reste trop longtemps à le regarder, ce serait chelou… et puis j’ai pas envie de finir par saigner du nez et tomber à la renverse comme dans les animés non plus.

- Ah nononon, j’préfère que tu restes habillé hé. T’imagines si quelqu’un arrivait après ? Ce serait trop bizarre. Et puis, si tu restes sans chemise, j’vais devoir te questionner sur tes tatouages de mec ténébreux là… et crois-moi, quand j’suis lancée c’est compliqué de m’arrêter de parler ! M’enfin ça tu dois déjà l’avoir compris… Dis, rien à voir mais tu partais où comme ça ce matin ? T’avais pas l’air pressé, mais je t’ai pas mis trop en retard quand même ?