Le temps d'aller à l'institut pour rejoindre les membres de l'équipe choisis par Hideko pour m'éviter de faire un génocide (il paraît que je suis pas calme, sans déconner), j'ai eu le temps de m'inquiéter mille fois, de stresser encore plus, et donc d'être d'une humeur encore plus massacrante que lorsque j'étais dans le quartier des Masters. Je garde mon portable bien sagement dans ma poche, et j'essaie d'éviter de me laisser pousser des griffes et des crocs — sinon, c'est sûr, on va pas me laisser partir. La contrepartie, c'était : on te laisse partir mais tu fais pas de merde, merci. Donc j'ai intérêt à me tenir à carreau.

J'inspire. J'dois les attendre devant l'entrée de Terrae. Et ils prennent leur temps, putain. On leur a dit que c'était urgent, ils peuvent pas se bouger ? Pourquoi c'est deux personnes qui m'accompagnent, en plus ? Pourquoi pas une ? On m'fait pas confiance, c'est ça ?

J'ai toutes mes pensées qui tournent dans ma tête, alors je croise les bras et agite nerveusement ma jambe, appuyé contre la rembarde de l'escalier de la cour. Toutes mes pensées sont dirigées vers Lou actuellement, j'arrive pas à penser à autre chose. Et j'me retiens vraiment de pas spammer Houston pour avoir des news. Mais recevoir des "Alors ?" à répétition va rapidement le saouler.

Soudainement, j'entends du bruit et regarde derrière moi… Keitaro descend les escaliers. Son regard est fixe, sérieux, mais je lis un brin d'inquiétude pour moi. On est pas les meilleurs potes, mais on est arrivés quasiment en même temps donc forcément, on s'connaît bien. Et j'me dis que si Hideko l'a contacté, c'est pas pour rien… Il gère la diplomatie, actuellement.

—Ca va aller ? me demande-t-il posément.

J'essaie de pas lui renvoyer un regard outré, l'air de dire "putain oui super je vais trop bien, merci, ta gueule". Heureusement qu'il est plus télépathe, putain.

—T'es quoi, toi, déjà ?

Ouais, j'ai perdu approximativement toute ma sympathie en même temps que mon chill. Depuis la cour, j'entends un autre type de pas étrange qui m'indique que notre coéquipière arrive. Mais sérieuuuuuuuuuuuuuux deux Terres ?!!!!! DEUX TERRES ??? C'est du foutage de gueule. On croit pas en ma capacité d'être calme, là, c'est pas possible, en fait.

—Marionnettiste, répond Keitaro, avant de saluer doucement Athéna. Bonsoir.
—B'soir, je grogne, en rogne, mais alors tellement en rogne du temps qu'on perd pour des conneries mais sérieux, j'en peux plus.
—Je suis allé récupérer un cristal de téléporteur en salle des Masters. Avant qu'on y aille, je voulais juste m'assurer que… Enfin.

Il me fixe. J'le fixe aussi, outragé.

—Quoi ?!
—Que tu ne vas pas-
—Ca va c'est bon, merci, j'm'appelle pas Gaetano-je-vais-génocider-un-laboratoire-de-scientifiques-tout-seul, donc c'est bon, j'sais même pas qui est derrière ça et on veut juste récupérer Lou, donc, est-ce qu'on peut y aller et discuter après s'te plaît ? (Puis j'me tourne vers Athéna.) T'es quelle affinité cette fois ? Ca aurait été pratique, sensitive…

Keitaro lance un regard un peu inquiet à Athéna. Mais vas-y. C'est bon, qu'est-ce qu'il y a ? J'ai vraiment des raisons de m'énerver ??? C'est bon, c'est des journalistes et des connards, on va sortir Lou de là, basta, aucun problème. Mais il a l'air déter à nous faire un rappel des règles.
Des.
Règles.
Mais what. MAIS WHAT TACRU J'ETAIS UN INITIE TEUBE ?

On m'a appelé alors que je commençais à ranger l'atelier au rez de chaussé de ma maison.
J'ai essayé de garder un rythme décent, mais il faut croire que je ne m'en sors pas sans quelques heures supplémentaires. Mais j'ai reçu cet appel. De Keitaro ? Je décroche. Une mission, urgente. Je suis un peu fatiguée, je m'apprête à refuser, mais quelque chose dans le ton de sa voix m'intrigue. Ça ne ressemble pas à l'urgence des Vides, c'est plus... Un vieux frisson remonte le long de mon dos alors que j'accepte et qu'il me dit qu'il m'envoie les informations sur mon portable. Je roule jusqu'à mes prothèses de combat, que j'ai eu le temps de rafistoler depuis mon combat contre Chris (ça n'est pas parfait, mais ça tiendra).
Puis mon regard tombe sur un tiroir, fermé à clé... Mettons toutes les chances de notre côté, je saisis un cristal de titan avec encore trois utilisation, un des seuls cristaux de sensitif que j'ai réussi à produire, une béquille, et me dirige vers la sortie.




Quand j'arrive vers l'entrée, je suis la dernière à arriver.
A nouveau, pas besoin d'être sensitive pour remarquer à quel point Aaron fulmine sur place, et c'est surprenant de voir la différence entre maintenant et le jour de l'attentat, quand il m'a aidé. Lorsque j'approche, je sens le regard lourd de reproche que le Master tonnerre nous porte, et je réponds par un calme olympien. Pas que je prenne la chose à la légère, au contraire, je suis concentrée.

Keitaro me salue, je lui réponds un hochement de tête aimable et d'un petit sourire. Il explique qu'il est allé prendre un cristal téléporteur, et à nouveau je hoche la tête, jusqu'à ce que la conversation dérape et que Aaron prouve exactement le contraire de ce qu'il raconte. Keitaro me lance un regard inquiet, et je balaye pratiquement tout son pitch par un mouvement d'épaule. Il est en colère, c'est normal, je le suis aussi. Mais au moins, il l'est pour nous trois. On aurait été avec Ys, ça aurait été différent, mais il s'agit d'Aaron. Il se tourne vers moi et demande avec son humeur du moment si je suis pas sensitive, parce que ça serait pratique. Je lève un sourcil.

_ Non, je ne pense pas que ça serait pratique. Je suis Guérisseuse, et toi Morphe c'est ça ?

Question rhétorique. J'évite de lui parler du cristal que j'ai embarqué, je comptais lui donner à la base, mais je préfère le garder pour le moment. Un pressentiment. Au niveau des pouvoirs au moins, notre combinaison est parfaite, plutôt complémentaire, je reconnais bien Keitaro dans son choix. Même si je sens que ça  agace encore notre référent, Keitaro se lance quand même dans un débrief rapide de la mission.

_ Non, il faut vraiment qu'on discute maintenant... Une fois dans le feu de l'action, ce sera plus difficile de communiquer. Aaron, c'est toi qui va diriger la téléportation, vu que tu connais les lieux. Etant donné qu'il va y avoir beaucoup de journalistes, l'idéal serait de se retrouver directement dans l'appartement. Si on peut éviter d'avoir affaire aux journalistes ce serait bien, dans le cas contraire, c'est moi qui me charge d'eux. Et j'insiste -dit-il en fixant Aaron- c'est moi qui m'en charge.

Il sembla reprendre une respiration, afin d'entrer plus vivement dans son explication.

_ Les journalistes à scoop sont des... Disons clairement des emmerdeurs, ils sont capables des pires mots pour nous faire réagir, la seule chose à faire si on les croise, c'est de les ignorer. C'est dur, mais c'est le seul moyen. On va s'arranger pour que vous n'ayez pas à les croiser toi et Louisa, mais si ça arrive laisse moi gérer. Concentre toi uniquement sur Louisa.

En somme, Aaron était plus celui qui accompagnait la mission que l'inverse. En réalité, il représentait plus un risque pour la situation qu'autre chose, mais il était aussi notre meilleur atout pour sécuriser sa fiancée. L'insistance que Keitaro mettait sur ce point faisait facilement comprendre que c'était la chose qui pouvait faire déraper la mission le plus facilement. J'avais déjà été confronté aux journalistes, mais c'était en France, dans une conférence de presse, rien à voir avec les paparazzi et la presse à scandale américaine.
Je resserrais ma prise autour de ma béquille, à l'écoute de la suite.

_ Je fais quoi, moi ?
_ Tu fais la zone tampon, si j'ai les yeux fixés sur les journalistes je n'ai pas de prise sur ce qu'il se passe autour, j'aimerai que tu sois très attentive à tout le reste.
_ Ok. Comment on te récupères si tu dois faire diversion ?
_ Je ne peux pas prendre le risque de sortir mon portable devant eux mais Aaron pourrait venir me prévenir en se transformant en un animal. On verra ça, mais je chercherai un signe.

Je hoche la tête. Dur de prévoir ça avant d'être sur place, de toutes façons.

_ Si ça va à tout le monde, on peut y aller, dit-il finalement en tendant la pierre devant lui.

Je prends une inspiration. Bon ok, donc si tout se passe bien on se retrouve dans un appartement avec une foule de psychopathes qui frappent à la porte. On va bien s'amuser.

Athéna arrive, et elle est calme. Keitaro est calme aussi. Super. Trop bien. Des Terres dans toute leur magnifique splendeur, j'ai envie de leur hurler dessus d'être un peu plus actifs, un peu plus pressés, et surtout, d'arrêter d'me regarder comme si j'étais un volcan qui allait entrer en éruption dans deux minutes. La Master balaie complètement mon argumentaire de "ce serait pratique d'être sensitive là maintenant", et je me renfrogne. J'inspire.

—Ouais.

Mes mains me démangent, mais Keitaro fait bien attention à ne pas me donner le cristal tout de suite, malgré son explication. J'inspire. Ca va aller, y a pas de raison que ça se passe mal. Pas vrai ? Putain, voilà que je stresse de nouveau, c'est malin.

Je plisse le nez à l'insistance de Keitaro, croisant les bras pour m'éviter tout geste ou toute parole déplacés. Il a raison, et je le sais. Je réagirais de la même manière en cas de problème, mais c'est bien ça le souci : là, il s'agit de Lou, il s'agit de ma famille, et même si je sais que je ne pèterai a priori la gueule à personne, s'il y en a un qui a une parole de trop, il va manger cher. Donc c'est pour le mieux, quelque part. Hideko n'a pas eu tort en les contactant tous les deux. Alors j'inspire et je ferme ma gueule. Parce qu'ils ont raison, et que ça m'énerve encore plus.

Zone tampon. Ouais, c'est mon bodyguard, en gros. Super.

—En animal, ça risque d'être compliqué.

Sauf si vous avez envie que j'me transforme en panthère et que je leur arrache la gorge, lol.
Keitaro semble avoir compris le message implicite. Je roule des yeux. Ca va, j'déconne, c'est juste pas sûr que je maîtrise, calme ton stress.


La pierre est à peine tendue que je la prends entre mes doigts, fébrile, et attrape leurs bras à tous les deux pour nous téléporter dans le salon de Lou.

Je redonne immédiatement le cristal à Keitaro et commence à naviguer dans la pièce, alors que j'entends du bruit derrière la porte et des coups qui y sont portés. Ca me donne envie de l'ouvrir en grand pour leur gueuler d'arrêter de faire du bruit, mais y a plus urgent, là.

—Lou ? je l'appelle, cherchant dans chaque pièce de l'appart. Lou, c'est moi, t'es où ?

J'commence à sentir la panique me tordre l'estomac, jusqu'à ce que je remarque la fenêtre entrouverte du balcon. Oh nan. Oh mais nan, sérieux ?

Je m'approche, ouvre et constate qu'elle est assise sur un coin du balcon, très en retrait, genoux ramenés contre elle. Toute la tension dans mon corps s'envole quand je la vois, malgré son sursaut.

—C'est que moi, je souris faiblement, m'accroupissant près d'elle pour la serrer dans mes bras.

Son étreinte est tremblante. Elle a dû se réfugier ici pour ne plus entendre les bruits à la porte.

—Tu as mis du temps, souffle-t-elle, les yeux humides.
—Je sais, excuse-moi. Je suis venu avec des amis, ils vont nous aider, d'accord ? J'ai déjà demandé à ce qu'on fasse retirer tout ça d'internet, et on va gérer les journalistes ensemble. On a un pro de la diplomatie avec nous...

Doucement, j'effleure sa joue pour l'essuyer.

—Je suis là. Je suis là maintenant, c'est promis. Tu veux bien qu'on rentre ? Je vais te présenter.

Elle ne veut pas se lever toute suite. D'abord, une autre étreinte. Je la serre fort contre moi. Pourquoi je la mets toujours dans ces états-là... Qu'est-ce qui cloche chez moi... Qu'est-ce qui cloche à Terrae ...?

Puis, à son rythme, je l'entraîne à nouveau vers le salon, tout doucement, avec une attitude très différente que celle que je leur présentais un peu plus tôt.

—Je, hm. Je vous présente Lou. Lou, c'est Keitaro et Athéna. Ils sont très gentils tous les deux, et on peut leur faire confiance.

La téléportation est toujours aussi désagréable.
Peut-être même encore plus lorsque mon lien à la terre m'empêche de me repérer directement en arrivant. Le bruit des tambourinements sur la porte me met immédiatement en état d'alerte, et bien que tout me soit inconnu, je fais très rapidement un tour du regard. Je reconnais un appartement. Je me détends un instant, soulagée de ne pas avoir été projetée au milieu d'une foule de journalistes, au moins Aaron savait où il allait.

L'ancien Tonnerre est d'ailleurs le plus réactif de nous trois, à peine arrivée qu'il appelle celle que nous sommes venus cherchés. Elle n'a pas l'air dans l'appartement, mais je laisse cela à l'appréciation de notre escorte. Alors qu'il se dirige vers le balcon, mon regard se tourne vers Keitaro et d'un signe de tête, nous commençons à scruter en détail les lieux. Bon. Rien de dangereux en vue, à part les coups de tambour à la porte. Je m'approche doucement de ladite porte, afin d'écouter les sons au dehors. Il semblerait qu'un voisin de palier ait essayé de les chasser mais se retrouve lui même sous le coup des questions.

Je reviens à une position normale, à côté de Keitaro, servant mentalement de rempart entre le couple et les sons sur la porte, lorsque Aaron et Louisa reviennent dans le salon. Elle a l'air fatiguée, lui s'est radicalement adoucit. C'est comme si mon propre épuisement venait de s'envoler en voyant le visage de la personne que nous sommes venus aider. Elle a besoin d'Aaron, elle a besoin de nous, et elle n'a pas besoin des problèmes de Terrae. Je me remets droite et fais le sourire le plus chaleureux possible lorsqu'il nous présente (oh alors comme ça elle peut nous faire confiance, heureuse de le savoir~).

_ Enchantée de te rencontrer Lou, je dis avec un entrain mesuré, tendant la main qui n'est pas appuyée sur ma béquille. Je me doute que la situation n'est pas idéale pour le moment, mais tu peux te reposer sur nous maintenant.

Keitaro se présente également, avec les formalités d'usage, bien que je sens que sa concentration aille à droite à gauche, et j'en profite pour sortir de ma poche ce que j'avais tenu caché pour le tendre à Aaron. Je pense que c'est bon maintenant.

_ Fais en bon usage, je dis en lui tendant le cristal sensitif. Bien, comment est ce que vous voulez qu'on procède maintenant ?
_ Est ce que vous besoin d'un peu de temps pour vous concerter ? demanda ensuite Keitaro.

Il est vrai que nous procédons à une extraction d'urgence, mais nous ne nous sommes jamais rendus coupables d'enlèvement, il est hors de question que nous n'écoutions pas l'avis de Lou.

Notre étreinte me calme. Ca m'apaise parce que j'ai pas le choix que de m'apaiser, de lui montrer que je suis là, que je la laisserai pas vivre ça toute seule. C'est de ma faute si elle l'a vécu toute seule jusqu'ici, je veux plus que ça dure, c'est terminé. Ca m'fait de la peine, parce que j'ai pas envie de lui dire de venir à Terrae dans ces conditions, que je veux pas qu'elle nous déteste. Mais là, je crois qu'on a plus vraiment le choix ?… Et quelque part, ça m'fait peur aussi. J'ai pas envie qu'elle vive ça. J'ai pas envie qu'elle aille mal. Je veux juste qu'elle soit heureuse…

Alors quand on arrive dans le salon, main dans la main, et que je la présente à mes collègues, j'me sens un peu comme un enfant qui présente sa copine à ses parents, et surtout un peu fautif parce que j'ai cassé les couilles pour aller à la boom à laquelle j'étais pas autorisé à aller. Lou est un peu surprise par l'attirail d'Athéna mais lui répond d'un demi sourire (elle est réservée dans ces situations-là) en attrapant sa main.

—Ravie aussi. Je… Merci beaucoup.

Elle serre aussi la main à Keitaro, très formel. Il est concentré, et le bruit dans le couloir ne nous aide pas à rester sereins non plus.

Mon coeur bondit dans ma poitrine quand Athéna me tend un cristal avec l'énergie distinctive des sensitifs condensée dedans. Je l'attrape délicatement, un peuf fautif, comme si je ne le méritais pas.

—Merci.

Soudain un peu paniquée à la question de Keitaro et Athéna, Lou se tortille les doigts.

—Comment ça nous concerter ?

Doucement, je l'entraîne vers le canapé pour l'inviter à s'y asseoir. Elle est chez elle et je lui impose encore des inconnus chez elle, ptdr j'en ai marre. J'inspire. Avant que je n'ai pu poser la question, Keitaro explique le contexte :

—Ca a été relayé par les médias donc tu es sans doute déjà au courant (il me jette un regard interrogateur et j'acquiesce) mais nous avons été attaqués il y a peu. Le problème actuellement, c'est que ce sont ces groupes anti-Terrae qui ont publié des photos de toi et Aaron, donc on peut s'attendre à ce qu'ils te prennent pour cible dans un avenir plus ou moins proche. Quelqu'un s'occupe déjà de les retracer et essayer de les retrouver, mais pour commencer, on a besoin de savoir s'ils sont rentrés en contact avec toi pour évaluer le degré de la menace.
—Et en fonction… Je t'avoue que ça m'inquiète un peu de te laisser rester ici, je reprends, très mal à l'aise.
—Donc… Vous prévoyez de me faire venir… à Terrae ?

Lou semble avoir du mal à articuler. Ses yeux fixent le sol, elle est toute pâle.

—Il y aurait pas d'autres solutions…?

Mon coeur se serre. Elle reprend vite.

—Je sais qu'on en parle depuis un moment, mais j'ai peur que ce soit précipité, et...

Elle se tait. Sa tête rentre dans ses épaules. Elle me dit pas tout, j'le vois, et ça m'rend ouf.

—Qu'est-ce qui t'inquiète ?

Elle me répond pas... Alors je regarde Athéna, un peu désespéré. Peut-être qu'avec elle, ça marchera...

Elle n'a pas l'air à l'aise, et je la comprends.
Voir des inconnus débarquer chez soi, dans la situation actuelle, c'est probablement la dernière chose qu'elle a envie de vivre. Sans compter que les coups derrière la porte continuent, et qu'il va bien falloir qu'on les fasse taire, à un moment. Dommage que nous n'ayons pas pris un cristal sonore, ça aurait pu être utile.

Elle semble ne pas être aussi avancée qu'Aaron sur l'idée de partir de chez elle, et je comprends. Je ne sais pas ce qu'ils avaient convenu entre eux, mais les circonstances feront que de toutes manières, elle se sentira forcée. Et il y a une différence entre désirer quelque chose, et se le voir imposer, même si la différence des timings n'est que d'une semaine. Keitaro expose les faits et je l'écoute. Il est certes très réaliste sur la situation, mais il bloque aussi les autres chemins de pensées, ou autre possibilités qu'elle pourrait avoir.

Lorsque Aaron lui introduit la raison réelle de notre arrivée, elle semble se bloquer. Il y a visiblement quelque chose qui l'inquiète... Mais elle se terre dans le silence. Je perçois le regarde d'Aaron et je fronce un peu le sourcils. Hm, bon, tentons autre chose. Je m'approche et viens me placer en face d'elle, quoiqu'en rentrait.

_ Hm, je peux m'asseoir ? Merci.

Je tire une chaise pour y prendre place avant de prendre une grande inspiration.

_ Ce n'est pas forcément définitif, je dis dans un anglais à l'accent cyrillique, sans vraiment me concerter avec mes deux supérieurs. Au vu de la situation exceptionnelle, nous pensons que tu serais plus en sécurité à Terrae, mais ça ne veut pas dire qu'une fois entrée tu ne pourras plus en sortir. Comme l'a dit Keitaro, il nous faudra un peu de temps pour mesurer les risques et pour s'assurer que toi et tes proches ne risquez rien. Avec la prochaine phase de l'Eclipse qui arrive bientôt, je dirai qu'il nous faudra à peu près un mois pour être sûrs.

Je lui laisse quelques instants pour intégrer l'idée que c'est n'est pas forcément un adieu à ces lieux, plus un au revoir. Lui laisser la possibilité de se rétracter, de se confier. Elle n'a vraiment pas l'air bien, à croire que personne ne peut franchir la porte de cet Institut en toute possession de ses moyens.

_ Et si quelque chose t'inquiète en particulier, nous sommes ici pour ça, j'ajoute. On peut répondre à tes questions, on peut aussi voir les demandes ou les attentes que tu pourrais avoir, ou des problèmes à régler avant de partir... N'en déplaise aux abrutis derrière la porte, on a tout notre temps.

Je finis avec un sourire calme. Je ne pense pas que ça plaira à Aaron non plus, mais elle est entourée de trois Masters, de la loi américaine sur la propriété privée, et elle a un choix difficile à faire, alors ça prendra le temps qu'il faut.

Je capte un reflet dans le coin de mon œil et tourne la tête, remarquant qu'il y a un spot plus bas d'où on pourrait prendre des photos. Je désigne les fenêtres d'un coup de tête discret à Keitaro, afin qu'il aille fermer un peu les rideaux. On n'a pas besoin d'encore plus de photos.

(C'est venu plus facilement du point de vue de Lou, déso—)



Lou joue avec ses doigts, silencieuse. Elle rearde ses pieds un moment, hésitant à répondre ; pas pour les ignorer, mais pour réfléchir à la meilleure manière de s'exprimer. Elle inspire… relève les yeux vers l'étrange jeune femme qui s'installe face à elle. Elle acquiesce pour lui faire comprendre qu'elle peut faire comme chez elle ; l'infirmière n'est plus à cela près.

Sur ses lèvres danse un semblant de sourire ; évidemment, ce n'est pas forcément définitif… Elle n'est pas forcée de tout quitter, mais… La peur de laisser ses parents seuls, de les voir en danger… Être exposée ainsi ne met pas qu'elle en danger, bien entendu. Un mois… Elle inspire. Acquiesce.

—C'est… gentil, merci, répond-elle finalement, courageusement.

Malgré tout, ses yeux continuent à fuir le contact direct face à elle. Des problèmes à régler… Elle déglutit, réellement mal à l'aise. Un coup à la porte la fait sursauter ; elle inspire, laisse Aaron lui attraper la main pour la rassurer. Contact avec ses yeux. Il est inquiet, elle n'a pas le coeur de sourire réellement, mais lui envoie toute sa gratitude. L'autre homme est parti fermer les rideaux.

Ce serait facile de se dire que tout est de sa faute. Et pourtant… Pourtant, il avait été honnête. Elle devrait l'être aussi… pas vrai ? Ouvrant la bouche lentement, elle commence :

—Je… je vous fais confiance.

Pourtant, elle est terrifiée. Sa voix ne sort pas. Elle baisse les yeux à nouveau. Les doigts d'Aaron pressent les siens doucement, elle inspire. Comment elle est censée dire ça…

—Est-ce que vous ne croyez pas que ça va mettre… mes parents en danger ? Ma famille, mes amis… Je suis inquiète pour moi, mais si je me mets à l'abri, est-ce qu'ils ne seront pas pris pour cible eux aussi ?
—On ne peut pas le prévoir, lâche sombrement Aaron. Mais on va essayer de voir ce qu'on peut faire à ce sujet, je veux pas non plus qu'il leur arrive quelque chose parce qu'on n'aura pas été assez prudents.

Le Master jette un regard à ses collègues, s'humectant les lèvres. On sent qu'il veut ajouter quelque chose, mais il se contient, lui aussi. Il prend son mal en patience. Difficilement.

Je sens que je la perturbe autant que je l'aide, mais nous lui laissons le temps de gérer tout ça avec elle même. C'est une procédure exceptionnelle à pleins d’égards même pour nous : elle est la première à venir habiter à Terrae sans y être liée autrement que par... L'amour ? Je suppose qu'on peut dire ça, et elle a été prise pour cible sans que l'on puisse vraiment être libres de nos mouvements, surtout qu'elle n'appartient pas officiellement à l'exception que représente Terrae. Un statut compliqué.

Elle nous dit qu'elle nous fait confiance, même si ses mots sont hésitants. Je la sens déjà plus ouverte lorsqu'elle parle de sa famille, et je frissonne en pensant à la mienne. J'ai tellement d'amis, de cousins, de connaissances proches que je considère comme ma famille en dehors des murs qui nous protègent que je ne peux que comprendre. Aaron dit qu'on ne peut pas être sûrs, je serai pour ma part moins optimiste. Je dirais qu'il y a un risque, effectivement, un risque non négligeable, tout dépend à quel point ils ont cherchés à la contacter.

Aaron a l'air de vouloir en rajouter, mais il se bride, et j'en profite pour reprendre la parole, hochant la tête à la réponse de l'ancien sensitif.

_ On va en discuter et te proposer quelque chose, mais tu peux déjà faire une liste à Aaron de tes contacts les plus réguliers, amis et famille qui te tiennent à cœur, afin que nous leur fassions des proposions pour assurer leur sécurité sans que cela n'impacte trop leur vie professionnelle ou sociale.

Je capte un regard fuyant de Keitaro vers la porte. Il n'a pas l'air d'être contre ce que je raconte, mais on dirait vraiment que son attention est ailleurs. Je comprends alors que les tambourinements sur la porte et les voix des journalistes le préoccupent, normal, c'est son rôle dans cette mission. Je me relève un peu maladroitement pour me diriger vers lui, sans pour autant parler moins fort.

_ J'aimerai quand même qu'on les calme un peu...
_ Ils ne forceraient pas la porte, quand même, je demande, sceptique.
_ Non... Non mais ils peuvent camper toute la nuit devant...
_ Hm... Je suppose que le concierge n'y pourra rien, mais un voisin finira bien par appeler la police non ?
_ Et il pourrait tout simplement lui raconter qu'il y a du danger à l'intérieur... Je me demande si on ne devrait pas faire le premier pas sur ce coup là, et appeler nous-mêmes pour les dégager...

Je le laisse dans sa réflexion, et me retourne à nouveau vers le couple, me disant qu'effectivement, ça pourrait la rassurer. Mais est ce que ce n'est pas prendre un risque ? Je suis pour faire confiance à la police, mais je ne sais pas si Aaron sera de cet avis.

Athena a quelque chose de profondément apaisant en elle. S'agit-il de son visage, de son expression, de ses yeux ? De sa posture, de sa voix ? Quelque chose pousse Lou à la croire, quelque chose pousse Lou à se dire "oui, je peux lui faire confiance. oui, je veux bien prendre le temps de réfléchir, prendre le temps de me mettre en sécurité, prendre le temps de juste prendre le temps". Et en même temps, elle ne peut pas lui dire non plus pour la visite d'hier, elle a bien trop peur qu'Aaron explose, lui déjà si à cran. Et pourrait-elle lui en vouloir ? Elle aussi se mettrait en colère, elle aussi voudrait agir. Et pourtant…

Son visage se détend lorsqu'elle entend parler de la liste, et elle acquiesce vivement. Elle sourit à demi, un peu faiblement, comme le ferait quelqu'un au bord des larmes, mais qui essaie encore de se donner la force. Une chaleur intense s'insinue en elle et gonfle, menace d'envahir ses yeux aussi ; c'est rassurant et c'est doux. Elle inspire, s'accrochant à cette émotion, même si elle l'envahit un peu trop.

—Merci, est-elle seulement capable de prononcer.

Elle veut se lever et capte le regard d'Aaron, inquiet.

—Je vais juste chercher du papier dans ma chambre, j'arrive. Ca va aller.

Il acquiesce, caresse ses cheveux et embrasse son front. Lou entend les remarques quant à la police et se tortille les doigts, nerveuse, pendant qu'elle se déplace vers sa chambre pour chercher un bloc… mais surtout pour respirer un bon coup.

—Appeler la police va juste délayer le problème, faire du bordel ou, au pire, faire des blessés ; on peut pas leur faire confiance. Surtout que les journalistes sont techniquement autorisés à squatter où ils veulent tant que c'est pas une propriété privée, donc ils pourront rien faire ; j'rappelle que c'est la sainte Amérique où tout le monde a tous les droits, répond cyniquement Aaron. Là faut surtout voir ce qu'on veut faire passer comme message, ou si on veut faire passer un message tout court.

Le regard de Keitaro laisse entendre à Aaron qu'il serait plus sage d'appeler la police malgré tout, mais en même temps, que faire contre des gens qui vont invoquer leurs droits à se trouver ici ? Surtout s'ils arrivent à justifier que quelqu'un leur a ouvert : dans ce cas, ils ont tous les droits de se trouver dans l'immeuble…

—Parce que... Ok, habituellement, le seul moyen de faire taire ces rats est de leur donner ce qu'ils veulent, ou de leur piquer leur scoop. Ils vont pas lâcher tout de suite. Surtout qu'on sait pas s'il y a que des journalistes parmi eux... Bref, vous préconisez quoi ?

HRP : OMG DÉSOLÉE j'avais dis je répondais vite en plus T-T
Mood mission ON *^*



Je vois que le coup de la liste a réussi à la motiver un peu et ça me rassure.
Je ne cherche pas particulièrement à ce qu'elle fasse semblant d'aller bien, ni non plus qu'elle se sente complètement en sécurité (nous avons besoin qu'elle reste sur ses gardes), mais il ne faudrait pas non plus qu'elle panique. Lou se dirige vers sa chambre pour prendre de quoi écrire et la réaction de Aaron est presque automatique. Ah bah dès qu'elle est plus là il est loin d'être aussi rassurant sensei. Ça devrait me mettre sur les nerfs mais bizarrement ça me calme un peu, comme si la balance se faisait.

J'écoute ses arguments, qui sont plutôt logiques, avant de hausser une épaule.

_ Comme a suggérer Keitaro, on est pas obligés de dire la vérité. On se fait passer pour un voisin qui voit du monde attroupé dans son couloir, "oh mon dieu j'ai vu des gens qui font du bruit, des dégradations et qui empêchent la libre circulation des personnes" quelque chose du genre. Et je suis pas sûre qu'un couloir d'immeuble soit vraiment un lieu de libre circulation m'enfin...

S'il vous plaît, on peut noter mon jeu d'actrice svp ? Non ? Bon, ok. C'était juste pour détendre l'atmosphère. Evidemment le problème c'est que ça serait à Aaron de prendre le téléphone, je pense pas que mon accent russe fasse illusion. Quoique Keitaro se débrouille bien... Je passe une main dans mon cou avant de continuer.

_ Moi je suis pour qu'on fasse pas de communiqué.
_ Mauvaise idée, contra Keitaro. Ils risquent de prendre ça pour un enlèvement.
_ Pas faux. Mais à ce stade, même si on fait un communiqué officiel, on passe juste pour une secte qui a effectivement enlevé quelqu'un. Surtout qu'on est trois, pour n'importe qui ça représente une pression suffisante pour empêcher des potentielles victimes de parler.

Keitaro fronce les sourcils.

_ Il y a des moyens de faire passer ça plus diplomatiquement...
_ Avec de la presse people ?
_ Ok d'accord, pas eux. Mais on peut choisir notre média de diffusion, ça peut se faire.

C'est con, si elle n'avait pas été menacée, elle aurait pu juste venir en avion avec son mec et ça n'aurait pas eu l'air si suspect de notre part... Je prends de grandes respirations pour chasser la frustration qui m'arrive depuis l'autre côté de la porte.

_ Le plus simple serait que ce soit Lou qui parle non ?
_ Evidemment, mais elle est trop exposée. Et pas préparée.
_ On peut repousser. On se replie pour le moment et on fera un communiqué plus tard ?
_ Hm, fais le Master, peu convaincu.
_ Ou alors on fait un live instagram et une annonce sur Twitter là tout de suite.
_ Qu'est ce que- Tu te moques.
_ Oui, je fais un avec un rire soufflé. T'en penses quoi Aaron ?

On a exposé le maximum de possibilités, à lui de décider ce qu'il se sent de supporter. Et c'est lui aussi qui connaît le mieux Lou.

HRP : J'ai mis du temps lol désolée— Honnêtement, j'ai dû relire mes deux rp solo avec Lou avant de réussir à être dans le mood, mais ME REVOICI. J't'attends tranquillement si t'as à nouveau envie d'écrire un peu avec, et sinon préviens moi et je finirai seule. Mais t'es encore la bienvenue si tu veux continuer ce RP


Dans la chambre, Lou hésite. Il y a le téléphone à côté du bloc. Ce n'est peut-être pas le moment d'en parler, mais une partie d'elle aimerait bien enlever ce poids de son coeur. Elle repense aux photos de ses parents, la cible dessinée sur leur tête, et contient un sanglot. Dos appuyé contre le mur, elle écoute d'un air absent les discussions qui ont lieu sans elle dans son salon. En même temps, elle fait la liste des personnes à qui elle tient, dans sa tête… Mais son attention est trop déviée pour qu'elle réussisse à réfléchir correctement. Elle déglutit. Un communiqué ? Comment elle en est arrivée là…?

Face aux deux Masters, Aaron respire  c a l m e m e n t. Ok, réfléchir ; faire les liens. Il n'a pas envie de se confronter à la presse people maintenant, il sent que c'est le moment où ils peuvent le plus déraper. Il est plutôt d'accord avec l'avis d'Athéna, pour le coup ; mais il prend aussi en compte l'avis de Keitaro, qui excelle dans le domaine. Dans tous les cas, faire disparaître Lou de l'appartement, ce serait le plus sage, mais ils risquent effectivement de croire qu'ils l'ont enlevée… Quelle plaie, ces people.

—Faire un communiqué avant de partir est important, Aaron concède à Keitaro, la bouche sèche. Mais on peut pas faire ça dans le couloir, il faut qu'on choisisse notre média, voire qu'on organise un moment pour répondre aux questions. Ca veut aussi dire qu'il faudra se préparer, et je ne le ferai que si c'est ok aussi pour Lou.

Parce qu'il en a marre de décider pour elle. Il veut ajouter quelque chose, mais sa phrase se perd alors qu'il entend des sirènes de police en bas. Vif, il saute du canapé et se rapproche de la fenêtre, collé contre le mur comme pour ne pas être vu, pour pouvoir observer ce qu'il se passe dans la rue en contrebas.

—Bah alors… Vous avez appelé les flics au final ? lâche-t-il, perplexe.
—Non...

Rapidement, il y a du grabuge dans les couloirs ; des voix résonnent plus fort dans la cage d'escalier. Peut-être que ça provient d'un voisin… Dans tous les cas, malgré son assertion précédente sur les flics, Aaron pousse un soupir de soulagement en constatant que la foule se fait refouler à l'extérieur de l'immeuble. Certains se dispersent, d'autres s'éloignent un peu, mais continuent à camper… Le bruit derrière la porte finit enfin par se calmer.

Comme l'agitation est moins vive, Louisa revient dans le salon, serrant son petit bloc-note contre elle. Epuisée.

—Je veux bien… faire un communiqué avec toi. Mais pour leur dire quoi ? Qu'est-ce qu'ils voudraient savoir ?
—On peut proposer une interview à un journal relativement correct… Ca t'éviterait peut-être d'être filmée ? L'idée c'est de raconter la vérité, ce qu'il se passe. Notre relation. Le fait que tu viennes avec nous car il semblerait que ton adresse ait été postée sur des sites anti-Terrae et qu'on a peur que ça te mette en danger. Ou que tu as eu des menaces, ou je sais pas quoi…

Aaron lance un regard à Keitaro et Athéna en biais, comme pour qu'ils lui confirment que ce qu'il vient de dire n'était pas complètement con. Lou, elle, pince les lèvres et baisse les yeux, sans rien dire, en espérant que personne ne la remarque. A la place, elle s'installe et commence sa liste en tremblant, en mettant tout en haut les noms de ses parents.