__–Le message était passé, ou plutôt les deux, vu qu’Aylan avait fini dans les bras de Nicolas. Sa peau chaude, sa prise ferme mais confortable, assurée en fait, les odeurs de café et de tabac qu’il reconnaissait et n’étaient pas assez fortes pour devenir entêtantes ou désagréables, il avait bien besoin de cela. Son besoin d’un expert pour délier ses pensées et paroles et de réconfort physique comblé, il put se laisser porter avec l’esprit bien moins envahi par les soucis – du moins pour le moment.
__–La directrice. Pour Aylan, elle était moins cela que la mère de Riku et Dai, soit une figure bien plus rassurante que sa position d’autorité pouvait lui donner. Aussi lui fit-il un petit coucou et ne fut-il pas particulièrement ennuyé qu’elle le fixât. Il est vrai que dans l’absolu, sa présence, entre un master et la préfet des Eaux, était assez singulière pour qu’on devinât qu’il était sinon le sujet de cette entrevue, au moins très lié à celui-ci.
__–Hideko leur proposa des verres d’eau, qu’il accepta d’un hochement de tête. C’est qu’après sa glace, il avait soif. Aussi quitta-t-il les bras de Nicolas, mais non sans rester collé à lui, pour attraper son verre.
__–En revanche, sa solution temporaire ne lui convenait pas. En vérité, Aylan avait mentionné Ryu parce qu’il était le seul des trois masters sonores qu’il connaissait et parce qu’il l’avait déjà vu affronter le Centre : il saurait y faire face à nouveau. Sa personne importait moins que ses capacités et son expérience. Ce qu’Ariana avait elle aussi très bien compris. En revanche, il ne saisit pas les implications de sa dernière question : « On va bien aller les chercher, pas vrai. » Comme s’il pouvait en être autrement.
__–Son verre fini, Aylan se blottit plus contre Ariana, qui avait manifestement autant besoin de contact physique que lui.
__–« On peut lui expliquer au téléphone mais il faut qu’il soit là. »
__–Attendre était insupportable. Chaque instant qui passait, était un de plus où sa famille souffrait. Mais Aylan avait gâché trop le temps à, au choix, se morfondre de leur perte ou espérer dans le vide leur retour.
__–Réfléchis, Aylan.
__–Ils avaient déjà par sa faute attendu près d’un an. Ils pouvaient attendre jusqu’à la prochaine pause de Ryu.
__–HRP : À partir de là vous pouvez considérer qu’on a Ryu en haut parleur si vous voulez.
__–« Là où j’étais quand vous êtes venus me chercher. Il y avait aussi la fille d’Aria qui s’appelle Lola et d’autres enfants qui étaient mes amis et… » C’était déjà un exploit que d’avoir dit autant sans s’effondrer en larmes. « J’ai besoin de Ryu parce que… » Et ce fut un exploit de le comprendre entre deux sanglots. Qui finirent, là encore, par être répandus contre Ariana.
__–Aylan en avait marre. Marre de lui, de ce qu’on lui avait fait subir et qui l’empêchait à cet instant critique d’aider les siens. C’était une mécanique trop bien huilée, trop insidieuse, trop subtile contre laquelle il luttait sans même la comprendre. Marre d’être si faible, alors qu’il était le seul à pouvoir les secourir. C’est qu’on l’avait conditionné à cela. Même comparé à Lizbet, Aylan était le plus sensible, le plus instable émotionnellement, le plus fragile et c’était pour cela qu’il avait subi plus, que lui avait droit à la torture par l’eau quand on se contentait des coups et privations pour les autres, qu’il avait été isolé dans cet avion : que ce fût là-bas ou ici, Aylan était le maillon faible, le seul qui ne pouvait pas garder sa peine pour lui et ferait s’effondrer tous les siens s’il venait à tomber. Lola, indiscutablement et peut-être plus encore que Miguel, était le maillon fort ; voilà pourquoi il l’aimait.

La directrice, calme, analyse la situation et agit en conséquence... Je l'avais dit hein mais comme "un lundi à Terrae". Son "humour" ne fait rire personne et ils se dirigent vers le canapé. Il installe Aylan entre lui et Aria et remercie Hideko qui lui a aussi ramené un verre d'eau... Il va pas le boire tout de suite mais c'est pas dit qu'il se déshydrate aussi au cours de la conversation. Ryu ne peut pas venir mais ils peuvent l'avoir au téléphone... D'après les mots d'Aria, Aylan avait besoin de lui pour parler. Elle prend sa main, lui propose d'attendre, de parler aussi, enfin, d'essayer. Nicolas comprend plusieurs choses avec cet échange : Aylan a réalisé qu'il avait un blocage et qu'il pouvait le briser avec un Master Sonore... mais il a demandé spécifiquement Ryu, donc, ça ne servait à rien de lui proposer quelqu'un d'autre avec qui il ne serait pas à l'aise. Ensuite, Aria fait preuve de beaucoup de force mentale pour le petit, ce n'est pas étonnant venant d'elle même si elle insiste souvent pour dire qu'elle galère avec les mômes... Pour finir, ils allaient avoir des informations qui manquaient aux Masters pour enfin agir et potentiellement récupérer les autres gosses... mais ça n'expliquait que le tourment d'Aylan, pas celui de sa meilleure amie.

S'il était évident pour lui que le Centre, trop curieux des terraens et assez fou pour manipuler un enfant aussi jeune qu'Aylan, en avait sans doute récupéré d'autres, il ne pouvait pas répondre à la question d'Aria. Ça n'aurait été que lui, et il pense qu'elle le sait, mais il serait déjà parti à leur recherche, même sans moyen et sans aucune idée d'où peuvent se trouver leurs bases. Il a assez vécu comme une marchandise, un soldat, pour ne souhaiter ça à aucun gamin dans le monde. Mais il sait calmer cette pulsion ; si les Masters y vont ensemble, avec des infos sûres et un plan d'attaque, ils auront plus de chance de réussir...

L'instant suivant, Aylan s'effondre, presque littéralement. Ses bras attrapant Aria, ses sanglots le secouant, il dévoile d'un coup que l'un de ces enfants avec qui il a dût survivre et s'entraîner est Lola. Et Nicolas ne peut pas retenir la surprise de s'afficher sur son visage... Bien sûr qu'il connaît Lola. Depuis leur étoilisation ensemble, Aria n'en parle que rarement. Ça se compte sur les doigts d'une main. Mais quand elle le fait, il l'écoute avec attention. Ce sujet, c'est comme une tasse cassée dans le cœur d'Aria ; réparée avec soin, avec une fierté mue par un amour sincère mais aux cassures encore apparente, laissant voir les marques de colle blanche qu'on peut voir à l'œil nu, sentir sous les doigts... Elle en parle avec émotion de cette petite tasse qu'elle ne prend jamais, qu'elle ne voit jamais mais qui peut toujours servir tant que ce n'est pas elle qui la touche. ...Lola. Lola qui est maintenant on ne sait où dans les mains de gens affreux qui ne s'occupent pas de ce qu'ils peuvent briser tant que ça peut servir leur plan terrible.

Passé la surprise, Nicolas se rapproche d'eux, sa main allant attraper une nouvelle fois les épaules d'Aria qui câline Aylan, d'abord sans un mot. Il comprend enfin ce qu'il se passe, les raisons profondes des émotions qui les secouent tous les deux. Sa main libre va secouer la crinière blonde coincée entre lui et Aria, petite boule de frustration et de chagrin. Nicolas était angoissé à l'idée qu'il n'insiste à parler au point de se faire mal... :

-Doucement Aylan. On va t'aider.

Pour Aria, il n'avait pas de mots... Il la tenait fermement, sans forcer toutefois, juste... Il la tenait. Il la tenait pour être là, lui dire qu'il l'écoutait,...

La tension est palpable. Aria boit quelques gorgées de son verre, suivie par Aylan qui s'éloigne très légèrement de Nicolas pour se coller davantage à la jeune femme après qu'elle ait pris la parole. Son ton est calme, mesuré, contrôlé même ; elle va à l'essentiel, essaie d'expliquer les choses le plus clairement possible.

Je sens mes sourcils se froncer légèrement à la mention du Centre, même si je m'y attendais ; Aylan étant présent, je ne vois pas pour quelle autre raison ce trio aurait pu me rendre visite à cette heure tardive de l'après-midi. Ce que je constate en revanche, c'est que Nicolas n'était vraiment pas au courant, et qu'il n'avait pas non plus imaginé que ça puisse être aussi important.

L'adolescent Sonore prit enfin la parole, et accepta que Ryu soit sur haut-parleur, bien qu'il soulignât une fois encore l'importance de sa présence physique parmi nous. Ayant toutefois reçu son accord, j'appelai Ryu et lui expliquai vaguement la raison de mon appel avant de le placer en haut-parleur au centre de la table.

Aylan reprit donc la parole, tentant de se maîtriser, de ne pas craquer ; comment un si jeune enfant peut-il avoir déjà tant de poids sur les épaules ? Les informations fusèrent et se trouvèrent une place dans mes souvenirs. Là où nous sommes venus le chercher ? Je n'eus pas le temps de reprendre la parole que la voix de Ryu nous parvent du téléphone.

-Dans l'avion ? Ces autres enfants étaient dans l'avion, Aylan ?

Mes sourcils se froncèrent de nouveau, et mon regard se posa sur l'adolescent, qui ressemblait davantage à un enfant en peine qu'à un futur petit adulte à l'heure actuelle. Nicolas s'approcha de lui et lui apporta son soutien, restant physiquement présent pour Ariana qui ne devait pas être dans sa meilleure forme non plus. Et pourtant elle restait droite. Forte. Professionnelle. Je commençais à comprendre pourquoi Ashton avait finalement accepté de continuer à l'entraîner. A cet instant, je réalisais alors que je n'avais toujours pas répondu à sa seule question, ces quelques mots, pourtant si importants.

-Aylan, est-ce que tu te sens capable de nous en dire davantage afin que nous puissions nous organiser pour aller les chercher ?

Je lui offris un sourire doux, ce sourire que l'on sert aux enfants pour les réconforter alors qu'il vienne de chuter et qu'ils saignent, ce sourire qui réchauffe un peu le coeur et qui aide à oublier, l'espace de quelques instants, la douleur qui perdure.

J'attrapai la boîte de mouchoirs qui se trouvait sur l'un des coins de la table, et la poussai en direction d'Ariana.

-Tu n'as pas à porter ce fardeau seul.

Et tu n'aurais jamais dû avoir à le porter seul une seule fois dans ta vie.

HRP : Je suis désolée pour le retard, j'vais pas vous servir d'excuses à la con, juste. DESOLEE VOILA

Ses émotions sont un peu déconnectées, comme envolées loin. C'est mieux comme ça, durant un temps au moins, le temps qu'elle puisse poser les mots, qu'elle puisse se concentrer, réfléchir, prendre les décisions. Elle a envie de pleurer tout le long, et sa voix chevrote un peu, mais elle fait de son mieux, comme une adulte. Faire un peu semblant, elle fait ça tout le temps, alors c'est facile, même si elle est toute cassée dedans. Serrer Aylan, ça lui permet de se concentrer sur autre chose que l'impression terrifiante d'être en train de se briser sur le sol.

Et Aylan explique, et il parle tout de suite de Lola. Il dit "la fille d'Aria", comme si c'était su de tous, comme si c'était simple, comme si elle-même l'acceptait. Une partie d'elle espère que c'est une autre Lola — elle espère, pourtant elle sait — et l'autre arrête d'écouter. Son regard se brouille, fixant le vide, très loin devant elle, fixant la route qu'elle avait voulu prendre y a quelques années, celle juste avant qu'un Master ne vienne pour lui demander si elle voulait le suivre. Mais Aylan pleure, alors elle le serre dans ses bras. Fort, fort, fort, l'océan au bord des yeux, et la rage au bord des lèvres.

Le contact de Nicolas ne tarde pas à venir. Il ne dit rien. Il sait. Elle sait. Elle non plus ne sait pas quoi dire. Et puis, pas besoin, enfin, pas le moment. Aylan. Aylan d'abord. Aria ensuite. Un jour. Peut-être. Elle aurait aimé pouvoir le dire à Nicolas elle-même, mais elle se rend compte qu'elle n'y serait jamais parvenue. Qu'il aurait sûrement dû deviner.

—Je crois qu'ils étaient dans une base, arrive platement à expliquer Aria, la gorge serrée à l'extrême. Il a dit qu'il était dans une base dans le désert, avant ça.

C'est comme si sa voix sortait d'un autre être qu'elle. Elle jette un regard inquiet à Aylan à la question de la Directrice. Au moins, ils iraient les chercher… Sortir ces enfants de là. Lola, aussi.

Aria lève les yeux vers la boîte de mouchoirs et l'attrape mécaniquement, la fixe un peu avant de plonger dans les yeux très bleus de la Directrice. Elle ne les voit bientôt plus ; les larmes coulent toutes seules. Elle en tire un mouchoir pour Aylan, qu'elle lui donne en balbutiant quelques mots d'encouragement, essuyant un peu ses joues, son nez avec un autre.

L'autre main, elle, reste crispée sur la boîte de mouchoirs. Tant qu'elle ne regarde ni Nicolas, ni Hideko, ça devrait aller.

—Prends le temps…


HRP : désolée pour l'attente, j'ai eu du mal à m'y remettre !! En plus mon post sert à rien mdr désolée- par contre "professionnelle" MDR hum-

__–Comment faire pour exprimer quelque chose qu’on ne peut pas dire ?
__–Ce n’est pas une question philosophique que je vous pose ; mais purement technique.
__–Aylan n’avait envie que de rester dans les bras d’Ariana, de sentir la douce chaleur de Nicolas, de faire disparaître le temps, ou plutôt, de le suspendre. D’attendre, mais sans qu’il y ait de but derrière, quoi que ce soit qui devait arriver. Attraper cet instant de tendresse et le faire durer, l’étirer.
__–Mais, cela ne pouvait pas être. Ou plutôt, ce n’était pas pour lui que cela le devait. Dans les bras d’Ariana, Aylan sentait bien qu’il n’était pas à sa place, mais à celle d’un, – vous l’aurez compris, d’une – autre. Après quelques instants, il finit par lui paraître évident que s’il y avait un instant qu’il voulait suspendre et faire durer une éternité parmi tous, ce serait celui où Lola serait dans les bras de sa mère.
__–Et il n’y avait qu’une seule personne, parmi toute l’humanité, qui pouvait rendre cela possible : lui. Mais encore une fois. Comment faire pour exprimer quelque chose qu’on ne peut pas dire ? Comment expliquer qu’on ne peut pas parler sans faire usage de la parole, comment détailler les processus cognitifs qui l’en interdisait quand ceux-ci le bloquaient dans sa capacité à les dévoiler, c’était là un paradoxe insoutenable, que seule une astuce aurait su résoudre.
__–Réfléchis, Aylan.
__–Il se redressa un peu, pour regarder la directrice. Il essuya son visage du coin de sa manche, son regard se perdit dans le vide un instant, puis il bougea les bras. Toucha son torse. Tapota sa tempe. Joignit ses doigts près de sa bouche et ouvrit la main. Joignit ses deux poings et fit un signe comme si on brisait un bâton. Et comme si ce n’était pas assez clair, il présenta sa paume face au plafond et y planta ses ongles de l’autre, puis refit le signe de briser un bâton, puis toucha sa tête.
__–My mind, my speech, break.
__–Center broke my mind.

La souffrance embaume la pièce d'une certaine odeur qui lui donne presque du mal à respirer... Mais Nicolas ne dit rien, il écoute. Entre la patience de Hideko et son mari au téléphone, Aria qui lutte pour rester calme et Aylan qui même dans sa douleur reste déterminé, il absorbe le moindre mot, le moindre geste. Sur le coup, comme Aria, il est surtout inquiet de l'état de Aylan... C'est un petit garçon qui porte le poids de beaucoup trop de peines en lui. Comme si d'un coup le reflux de ce qu'il avait... ce qu'on lui avait ordonné d'ignorer était trop. Trop à son âge. Et s'il n'a pas la même expérience, quelque part, Nicolas le sait. Il faut maintenant ajouter à ça que la fille d'Aria est sans doute dans une situation terrible et là, tous ses instincts de grand frère, de protecteur de meute sont éveillés à leur maximum. Et il ne pouvait pas rester là... même s'il voulait s'occuper d'eux, il fallait avancer... Et ce sont les gestes d'Aylan qui l'ont convaincu.

Nicolas connaît quelques mots dans le langage des signes. La LSF particulièrement parce que oui, il y a des spécificités qui lui échappent largement s'il doit maintenir une conversation avec un anglais qui communique en langage des signes mais aussi un français qui préfère la LfPC. Toujours est-il qu'il comprend parfaitement le mot "casser" que fait Aylan, et s'il ne sait pas vraiment le mot qu'il veut communiquer en touchant sa tête, c'est une évidence dans le contexte et dans les émotions qu'il dégage. Il serre un peu Aria de sa main, embrasse son front, murmure qu'elle reste près d'Aylan et qu'il reviendra vite : "Tu n'es pas toute seule.". Il se lève et fait face à Hideko. :

-Aylan veut parler. Mais il ne peut pas... Il a besoin de Ryu pour casser... ce qu'il a dans sa tête. Je crois qu'il lui fait confiance donc c'est lui ou personne... Je vais le chercher, et garder Dai et Riku s'il faut.

Il marque une pause avant de souffler. :

-S'il-te-plaît Hideko... Est-ce que tu veux bien ?

Nicolas ne tutoie jamais la directrice hein. Vous savez que c'est important du coup.

Mon regard jonglait de l'un à l'autre sans s'arrêter vraiment. Les mots d'Ariana, les larmes sur ses joues, les gestes d'Aylan, la demande de Nicolas... Mes yeux se fermèrent un instant, alors que je cherchais l'énergie de Ryu. Energie qui m'avait déjà trouvée. Lorsque je rouvrais les paupières, une étincelle rouge se dissipa dans mes prunelles alors que mon attention se portait sur Nicolas.

-Non.

Un mince sourire délicat étira mes lèvres.

-Tu dois rester ici.

Je me levai lentement, récupérant mon téléphone posé sur la table au passage.

-Ryu est déjà là.

Je pris la direction de la porte et l'ouvris pour tomber sur Ryu et les enfants qui se jetèrent dans mes bras. Il me glissa un "J'ai fait aussi vite que j'ai pu, désolé" avant de pénétrer dans la pièce, saluant les jeunes adultes et l'adolescent d'un bref signe de la tête concentré. J'attrapai Riku et Daisuke par la main pour les entraîner avec moi en dehors de la pièce, leur adressant un sourire doux accompagné d'un "Allez, on rentre à la maison maintenant.".

-Je vous laisse là, soufflai-je. Ryu me racontera.

Mes yeux s'attardèrent quelques instants sur chacun d'entre eux, avant qu'un léger sourire se peigne sur mes lèvres en guise d'au revoir. La porte se referma derrière moi, et je sentis l'énergie de Ryu s'approcher du petit groupe, avant que mon attention ne soit happée par mes enfants inquiets que je rassurais rapidement avant de prendre le chemin du retour.



-Je suis là maintenant, souffla le Master.

Il s'installa en face des Terraens et ancra son regard dans celui d'Aylan.

-Dis-moi ce que je peux faire pour t'aider.

Elle s'était arrêté de respirer.

Ariana n'a pas eu besoin de comprendre les signes d'Aylan. Simplement le voir aussi peiné, traumatisé et la voix bloquée dans sa gorge la fait trembler. Elle s'imagine, même si elle aimerait arrêter de penser. Elle se force à se retenir, se contenir. Elle coupe un peu, sûrement.

Nicolas essaie de la rassurer, l'embrasse sur le front, lui dit quelque chose, mais elle lève juste des yeux grands ouverts, terrifiés, vers son ami. Le contact sur son front la brûlait presque, elle a l'impression qu'elle va s'effondrer à son contact, alors qu'il ne se passe strictement rien dans la pièce. Elle se tend, se recule, acquiesce lentement.

Et puis Hideko interrompt Nicolas, et la porte s'ouvre, et il y a Daisuke et Riku, et Ariana les regarde sans rien dire. Même quand ils sont sortis, elle continue à fixer encore un peu la porte, à moitié absente, un peu hagarde, des larmes au bord des yeux, comme des flaques qui s'accumulent sans couler.

Ça tourne un peu.

Peut-être qu'elle devrait laisser les adultes gérer.

... C'est aussi une adulte.

Elle se rassied correctement sur le siège, les mains l'une dans l'autre, sur ses cuisses, le dos droit.

—Aylan a besoin de votre voix de Sonore pour pouvoir expliquer, chuchote-t-elle presque, avec l'impression de devoir répéter en boucle les mêmes phrases, mais incapable d'être agacée.

Après ça, elle ne dit plus rien.

__–Quelque part, Aylan n’aurait sans doute pas aimé être vu dans cet état devant Dai et surtout Riku. Alors qu’ils quittaient la pièce, la petite semblait atteinte par ce qui se passait. Même à son âge, on peut comprendre quand quelque chose de grave se déroule sous nos yeux. Quand le garçon qui fait le kéké devant elle dès qu’il la croise, se retrouve dans les bras d’une adulte qui a l’air morte à l’intérieur, que sa mère, son père et Nicolas parlent avec un air et une voix sérieuse, c’est qu’il y a quelque chose en jeu de considérable. Même Riku, son rival – autoproclamé, mais qu’importe – devait avoir eu bien assez d’empathie pour se sentir peiné.
__–Aylan aurait voulu leur dire que ça allait, que c’était pour retrouver d’autres enfants et qu’ils allaient pouvoir se faire d’autres copains super. Que ce n’était qu’un mauvais moment à passer et qu’après il serait à nouveau heureux.
__–Mais d’abord, il fallait les retrouver.
__–Pour un instant, un seul, Aylan voulut être fort comme Lola, résolu comme Miguel, intelligent comme Liz et déterminé comme Brad. Il ne lâcha pas Ariana, il avait encore trop besoin de son contact – et elle du sien, probablement – mais planta son regard droit dans celui de Ryu lui aussi. Pour un instant, il fallait être sérieux. Il fallait considérer le problème qu’on avait devant soi, ne plus voir son propre esprit, ses émotions et l’intense formatage douloureux et dévastateur qui l’empêchait de venir en aide à ses amis et à son amoureuse. Il fallait voir une citadelle bien défendue, mais pas inattaquable et proposer un plan d’assaut. Il fallait agir.
__–« Il faut que tu utilises tes pouvoirs de Sonore d’hypnose pour que je puisse dire ce que je peux pas dire. Je sais où il sont mais, euh, ben à Terrae quand quelqu’un part hé bien vous faites un truc à sa mémoire. Ben moi c’est pareil. Enfin, non c’est pas pareil parce que vous êtes gentils mais euh… ’fin voilà quoi. »

N'importe qui d'autre aurait dit "non" à Nico dans cette situation sans enchaîner tout de suite avec une bonne raison aurait droit à un "Non mais je fais ce que je veux en fait". Mais petit un, s'il a posé la question c'est qu'il voulait son avis, petit deux, c'est Hideko. Il ne l'a pas tutoyée à ce moment précis pour rien. Alors elle n'a pas eu besoin de préciser qu'il devait rester ici pour qu'il hoche déjà la tête, lui signalant qu'il avait compris et allait le faire... ce qui le rassurait ; il n'avait pas envie de partir de toute façon.

Ryu est déjà arrivé, accompagné par le reste de la petite famille. Nicolas le salue d'un mouvement de la tête avant d'observer les petits qui ont les regards fixés derrière lui. Nicolas est le premier à dire que ça ne sert à rien de mentir aux gamins ; ils ont leur pouvoir bien à eux, et ça n'a rien à voir avec la magie de Terrae. Par contre, ce n'est pas une raison pour leur faire subir de front toute l'inquiétude et la peine du monde ; ils auront le temps de subir ça pour le reste de leur vie. Nicolas, qui connaît bien Dai et Riku à travers sa petite sœur, se décale donc légèrement et leur fait signe de la main avec un sourire. Il ne cache pas que ce qu'il se passe est important et fait mal, il épargne. Il épargne autant qu'il peut Aylan d'être vu, il épargne des inquiétudes à Dai et Riku. Et il sourit, un sourire sans dents mais sincère, avant qu'ils ne partent en compagnie de leur mère.

Nicolas se réinstalle dans le canapé pendant que Ryu demande ce qu'il peut faire. Il note qu'Aria s'est redressée, droite, comme pour relancer sa détermination, sa force, quand sa voix est toute fatiguée. La main de Nicolas voyage instinctivement au-dessus d'Aylan, toujours entre eux, pour qu'elle vienne encore se poser sur l'épaule de son amie, lui rappelant à nouveau qu'il était là. Aylan expliqua un peu mieux ce pourquoi il avait demander l'aide de Ryu et Nicolas était un peu déçu... Bon il n'était pas siii loin d'avoir compris, mais il nota pour plus tard qu'il fallait vraiment qu'il révise les quelques mots de langage des signes qu'il connaissait. Il serre les dents quand il apprend ce qu'est capable de faire le Centre à des gosses pour garder ses secrets, pince ses lèvres quand Aylan rappelle que Terrae fait la même chose... pour différentes raisons. Si le monde ne tournait que parce qu'il y a des méchants d'un côté et des gentils de l'autre, Nicolas se demande brièvement si ce ne serait pas plus le chaos encore -déjà que c'est sacrément bancal.

En attendant il fixe Ryu, n'ayant rien d'autre à ajouter encore une fois. S'il peut faire quelque chose en tant que Sensitif, Ryu saura lui dire, et pour le reste... ce n'est qu'une question de temps.


HRP : putain mettre autant de temps à rép pour au final rien faire ou dire c'est vraiment de l'abus, je suis désolé

Ryu fronça légèrement les sourcils, concentré sur les paroles et les gestes des trois jeunes qui lui faisaient face. Il reporta assez vite son attention sur le jeune garçon, après avoir quitté la jeune fille du regard. Un étrange sentiment s'éveilla en lui quand Aylan prit la parole, sentiment qu'il ne parvint pas à analyser vraiment. D'un côté, le jeune Air était suffisamment intelligent pour avoir compris que l'information devait passer le plus rapidement possible, quitte à utiliser les pouvoirs pour le forcer à parler. De l'autre, n'était-ce pas dévastateur d'en arriver là ?

La situation était urgente, alors il ne se fit pas prier. Mais au fond de lui, plusieurs questions continuaient à tourner en boucle. Briser un blocage psychologique par l'utilisation des pouvoirs n'était pas la solution pour lui. C'était dangereux, ça pouvait être encore plus destructeur. Et en même temps, la demande venait directement de la cible, qui avait pesé le pour et le contre, qui connaissait les risques, et les acceptait ; ce qui réduisait en grande partie la dangerosité psychologique d'une manoeuvre pareille. Et pourtant...

Ryu se pinça les lèvres, avant de souffler, sentant son conflit intérieur prendre possession de sa voix animée par son pouvoir de Sonore :

-Je t'écoute, Aylan. Parle-moi. Dis-moi où se trouvent ces personnes.

HRP : Désolée pour la longue attente !!

Ils essaient de convaincre le Master. Aylan prend un air courageux, réexplique. Ariana lui serre simplement la main, et l’écoute ; la main de Nicolas l’aide à tenir, c’est comme ça entre eux. Ils ne parlent pas, parfois, et ils se comprennent comme ça. Il n’aurait pas été sensitif que cela aurait certainement été similaire entre eux. Elle ne peut que lui glisser un regard attristé mais reconnaissant.

Quand la voix de Ryu retentit autour d’eux, la Morphe ferme les yeux. Elle presse encore la main d’Aylan, pose l’autre sur la sienne. Et elle attend.

Il donne les informations qu’il peut, celle qu’il possède seulement. Les mots sont durs, c’est violent ; elle essaie de ne pas imaginer, alors elle respire et se contente de se concentrer sur ce que dit Aylan. Lorsqu’il s’agite trop, elle rouvre les yeux et le regarde. L’encourage sans rien dire. Ca va aller. Ca va aller, Aylan. Je suis désolée que tu aies vécu tout ça.






Lorsque leurs échanges se terminent, lorsqu’ils sortent enfin de cette maudite pièce, Ariana se rend compte qu’elle n’a plus décroché un mot, à part pour dire qu’elle aimerait pouvoir aider. Elle n’explique pas pourquoi ; ce n’est pas qu’elle n’en a plus la force, mais elle n’en a plus l’envie.

—Vous avez faim ? Ou alors, tu as envie d’un chocolat chaud ? demande-t-elle à Aylan.

Elle fait ce qu’elle peut, à sa manière.



[Si vous voulez mettre des interactions entre Ryu, Aylan et Nico entre, hésitez pas. De mon côté, je me désengage jusqu’à la conclusion du RP comme ça vous avancez tranquillement, elle a pas grand-chose à dire ; elle va raccompagner Aylan après, j’imagine qu’ils vont peut-être échanger quelques mots — si c’est pas avec Aylan, au moins avec Nico et Justine, une fois qu’il sera couché.]

__–Au vu de la teneur de ce qui va suivre, nous sommes dans l’obligation de faire à vous, lecteur, un constat d’échec. Il nous sera, en un mot comme en cent, impossible de narrer la suite, avant l’ellipse proposée par Ariana. (Si toutefois vous sentez le besoin d’en savoir plus sur les informations que délivra Aylan, je ne saurais que trop vos inviter à vous référer à ceci si ce n’est pas déjà fait, dont le présent sujet était censé, parmi d’autres événements, lui servir d’introduction non-officielle ; de déclencheur.)
__–La première raison à cette incapacité narrative, insuffisante en elle-même j’en conviens, est qu’Aylan était sous hypnose au moment des faits. Lui-même ne saurait pas vous dire ce qui ce passa réellement ; il n’en avait qu’un souvenir imprécis. (Qui n’est d’ailleurs probablement qu’une reconstruction intellectuelle. Il savait que des questions lui furent posées sur le Centre, il connaissait les réponses, avait une idée d’à quoi ressemblait la procédure d’hypnose, connaissait le visage de Ryu, en somme, il n’avait plus qu’à imaginer une scène floue et vague, qui serait très proche de la réalité.)
__–La deuxième raison est que nous nous refusons à entrer plus loin dans le détail. L’objet de ce sujet n’est pas et n’a jamais été de se complaire dans la torture psychologique d’un jeune enfant, même si elle devait être consentie et infligée pour le bien commun, celui de ses proches et le sien propre.
__–Enfin, la troisième est qu’entrer dans cesdits détails, narrer les séances d’hypnose, expliquer le ressenti d’Aylan, développer sur ses émotions, réactions et son état mental et physique après ses éprouvantes séances, reviendrait à leur donner une existence dans la mémoire de notre protagoniste ; une réalité qu’il n’est pas encore près à affronter, si tant est qu’il le sera, le voudra ou sera poussé à le devoir un jour. (À toutes fins utiles, la première partie de ce message en traite, plus succinctement que ce qui serait nécessaire pour l’appréhender dans sa totalité et avec le recul apporté par plusieurs mois écoulés après le moment qui nous occupe.)
__–Tirons donc notre révérence pour rejoindre Ariana quelques longs et très pénibles instants plus tard.


__–Si le préfet Eau n’avait pas décroché mot, Aylan s’était agrippé à elle comme à une bouée de sauvetage. Des mots, il en avait par ailleurs bien trop dit. À la question d’Ariana, il ne répondit pas, mais il n’y avait nul besoin de pouvoirs surnaturels pour comprendre qu’il ne dirait jamais non à du sucre, de la chaleur et de la compagnie.
__–Il était, pour le reste, épuisé. Allait sans aucun doute demander à être porté et s’endormir là où on le poserait, que ce soit sur un lit, un canapé… ou, à vrai dire, dans les bras de Nicolas.

La voix de Ryu. Celle d'Aylan. Au bout d'un moment, Nicolas a fermé les yeux. Juste le temps de peser tout le poids de ce qui était en train de se passer. Il n'a quitté Aria que quelques secondes, pour récupérer un stylo et du papier et noter un maximum d'informations. Il n'avait aucun doute qu'il allait les retenir, mais ça pouvait aider à ce que Ryu puisse en parler à Hideko par la suite, se concentrer sur Aylan plutôt que la montagne d'informations qu'il leur donnait. Une main notait des noms, des lieux, des dates, les forces en jeu, des plans,... L'autre était revenue à l'épaule d'Aria pour la soutenir. Au bout d'un long moment, d'une éternité, Ryu n'avait plus de questions et Aylan cessa de parler. Dans le moment de flottement avant leur départ, Nicolas tendit ses notes à Ryu. Il murmura malgré lui qu'il allait rester avec Aria et Aylan, qu'il le remerciait et serait disponible dès que les Masters se réuniront pour la suite.

Sortis, le silence était pesant. Nicolas leur laissa un peu de temps et Aria eut la force de leur demander s'ils avaient faim, si Aylan voulait un chocolat chaud. Il ne répondit pas. Nicolas regarda le petit garçon, sa fatigue, sa détresse,... Il avait parlé. Puis il se tourna vers Aria, sa peur, son chagrin,... Elle se battait. Alors il souffle, s'accroupit pour planter ses yeux dans ceux d'Aylan. :

-On va rester un peu chez Aria hm ?... J'vais devoir prévenir ta mère pour pas qu'elle se demande où t'es passé mais tu restes avec nous pour le moment. Aller.

Il pose son genou pour le porter à nouveau, le garder contre lui, le tenir en lui laissant les bras libre, qu'il puisse toujours garder la main d'Aria dans la sienne s'il le souhaite. Ils descendent jusque dans le couloir des Eaux, entre dans la chambre où Justine se tenait. D'un regard, il vit qu'elle avait compris que quelque chose n'allait pas. Il reposa Aylan et fit un signe discret de la main ; "après". Puis il s'adressa à Aria en glissant une main sur sa joue, doux, calme mais inflexible. :

-Je vais faire les chocolats avec Justine ok ? Comme ça, vous vous installez tous les deux. Vous devez vous reposer.

Nicolas attendit qu'ils obéissent pour se tourner vers la petite cuisine en compagnie de Justine qui le fixait, patiente mais qui attendait clairement des réponses. Il prit le temps de sortir les ingrédients avant de souffler, la voix basse. :

-Je ne peux pas en parler, ça concerne la vie d'Aria et d'Aylan... et c'est une affaire qui touche les Masters et les ennemis de Terrae.

Il vit sa main trembler mais il la serra brièvement avant de la relâcher.


HRP : Yep, j'vais faire débarquer Justine finalement. J'ai pris la liberté de séparer Aylan et Aria d'un côté et Nico et Tina de l'autre le temps d'une prépa de choco mais si ça vous dérange, hésitez pas à me dire et je change vous-même vous savez. J'attends vos retours avant d'ajouter la réponse de Tina anyway.

Justine se laissait porter par son quotidien à Terrae. Elle qui était toujours aux aguets des nouvelles au village, toujours une information en avance sur les autres pour protéger les siens, ne savait que peu de choses à ce moment sur ce qu'il se passait au sein de l'Institut. Elle avait appris quelques anciens soucis, mais brièvement, comme si c'était encore trop frais pour que ses amis en parlent trop longtemps. Alors elle ne s'y était pas attardée, considérant qu'elle n'avait jamais été autant en sécurité de sa vie, et qu'elle pouvait donc abandonner complétement ses réflexes de Madonne, la mère du gang. Pourtant, elle ne fut pas étonnée que tous ses instincts de Vipère lui reviennent en voyant Loup, Aria et un petit garçon entrer dans la chambre qu'elle partageait maintenant avec la Préfète des Morphes. L'expression de son ancien collègue lui rappelait celle qu'il avait à chaque fois qu'il revenait blessé au quartier général et qu'elle devait le soigner. Celle d'Aria était à la fois lointaine et profondément triste, épuisée même, comme quand ses petits dissociaient après avoir vendu leur corps pour la première fois. Et le garçon... Vipère inspira et planta son regard dans celui de Loup qui lui fit signe qu'il allait expliquer plus tard, dans ces gestes qu'ils avaient appris au gang pour communiquer en silence.

C'était donc grave.

Calme, inexpressive, elle laissa Loup gérer la situation, proposant à Aria et au garçon de s'installer le temps de faire des chocolats. Une partie d'elle voulait rester avec eux, l'autre voulait tout savoir pour défendre le sourire qu'elle avait jusqu'alors toujours connu sur le visage de sa colocataire. Elle lui fit un petit signe avec un sourire léger avant de suivre le Loup en cuisine, comme pour lui dire qu'elle reviendrait vite. Il prit son temps pour parler, mais elle ne le lâcha pas des yeux en faisant chauffer le lait. Connaissant Aria, elle ajouta plus de sucre et de miel que de raison. Loup ne pouvait pas vraiment expliquer ; c'était à Aria et, Aylan qu'elle supposait être le petit, de le faire. Mais pas seulement, ça impliquait les Masters, un rang qu'elle n'avait pas et qui l'empêchait de tout savoir,... A la mention des "ennemis de Terrae", son sang se glaça, un frisson parcourut son corps... Bien sûr qu'un Institut avec des gens possédant des pouvoirs magiques faisait des envieux. Elle s'était trop reposée sur l'ambiance de paix qu'elle vivait pour croire que ce ne serait pas le cas. Peu importe où, les Hommes faisaient du mal aux Hommes. Elle vit le Loup trembler du coin de l'œil, serrer et desserrer son poing et elle sut automatiquement ce que ce geste voulait dire. Elle l'avait trop vu. Loup Noir était en colère. Une rage qu'elle avait connue immédiate et destructrice mais qui était maintenant contenue, maîtrisée... Nicolas avait changé et, malgré la sensation que le danger était à leur porte, Vipère sut qu'il avait priorisé le bien-être d'Aria et d'Aylan à son besoin d'aller abattre la menace. Elle ne dit rien, elle vit le moment. Lentement, elle leva une main, survola celle du Loup quelques secondes pour voir sa réaction avant de la poser dessus. Il avait des mains qui savaient tuer, mais elles étaient grandes et chaudes pour protéger maintenant. Celles de Vipère, petites et vicieuses, allaient le soutenir un peu. A la mesure de ses capacités et de ce qu'elle savait. :

-D'accord. murmure-t-elle. Merci Loup.

Elle versa la préparation prêtes dans des tasses, en prit deux pour les ramener au salon où elle s'attendait à trouver Aria et Aylan sauf qu'il n'y sont pas... Instinctivement, elle se dirige vers la chambre où elle trouve sa colocataire en train de border le petit garçon, disparaissant quasiment dans le tas de peluches. Justine déposa alors une table sur la table de chevet ; elle doutait que le petit le boive tout de suite et qu'il soit chaud assez longtemps, mais à son réveil, il saura qu'il n'y aura plus qu'à réchauffer la boisson réconfortante. Sa main libre vient délicatement vérifier qu'il dort profondément avant d'aller chercher la joue d'Aria. :

-Celle-là est pour toi. souffle-t-elle en désignant l'autre tasse. Viens, on va se reposer dans le salon.

Ils allaient s'enrouler tous les trois, petit tas humain chaud et rassurant, et seulement après, elle allait faire ce qu'elle savait faire de mieux.