Aujourd'hui, c'est balade dans le parc. Il fait assez beau aujourd'hui, le printemps nous offre quelques belles journées. Pas que Fai craigne vraiment le froid (on pouvait s'y attendre), mais moi oui. Je suis encore emmitouflée dans ma grosse veste et ma grosse écharpe, alors que Huo pourrait presque se balader en t-shirt, c'est injuste. Fai, lui, n'a heureusement pas son mot à dire, et je l'oblige encore à porter une veste. J'ai aussi promis à son papa que s'il ne l'empêchait pas de mettre le feu à ladite veste, qui a coûté une véritable fortune, ils allaient avoir des problèmes tous les deux. Enfin, surtout Huo, étant donné que Fai a seulement un peu plus de neuf mois maintenant. Comme le temps passe…

Laissant Huo diriger la poussette, je marche à côté mains dans les poches, jetant quelques regards autour de nous. Fai, lui, s'agite un peu, alors je m'accroupis auprès de lui pour vérifier si tout va bien.

—Tu as besoin de quelque chose mon chéri ?

Trop de lumière ? Faim ? Soif ? Couche ? Il veut sortir ? Je teste la première hypothèse, mais il enlève ma main en visière, comme si je le dérangeais. Je lève alors un regard désespéré vers Huo.

—Tu crois qu'il a envie de marcher ?

A quatre pattes dans l'herbe humide. Mais bien sûr.

J'ai failli proposer une balade au bord du lac en rigolant que comme ça on avait de quoi éteindre notre torche humain de bébé en cas de problème. Aoi m'a regardé d'un air noir pour me faire comprendre que j'étais pas drôle et que mes blagues pourries je pouvais les garder.

J'y peux rien, ok ? Au début je paniquais beaucoup sur les flammes incontrôlées de Fai mais on a appris à se relaxer un peu depuis. Enfin un peu… Soyons clair je suis la mesure de contrôle parce que ça commence à revenir cher en termes de budget fringues on va pas se mentir.

Je pousse Fai tranquillement dans le parc en prenant mon temps. Ça fait du bien de se balader et de profiter du printemps un peu. Les gens me regardent pas trop bizarre quand je me promène en manches courtes c'est sympa. Ça me change.

Aoi se penche sur Fai et j'arrête la poussette un instant. Je hausse une épaule quand elle me demande si bébé pourrait avoir envie de marcher. Pour le moment il teste la station quatre pattes et la nage sur parquet en vrai. Pas sûr que l'herbe mouillé le tente des masses.

— Hm, détache le pour voir ?

Je bloque la poussette avec les freins et me penche un peu pour regarder le petit. Il gigote un peu et agite ses bras d'un air concentré.

— T'en penses quoi, Fai ? Tu veux aller dans l'herbe ?

Fai lance un regard tout émerveillé à Huo alors qu'il agite les bras pour qu'on le prenne. Un sourire s'étire sur mes lèvres et je le détache tranquillement, mais pas assez vite pour monsieur qui chouine un peu. Détendons-nous, petit impatient… Hop : je le sors de la poussette et le passe à Huo avec un bisou. J'ai mal aux bras, lui qui est musclé, il peut bien le porter un peu !

—Hmm, il a l'air plutôt bien comme ça, je m'amuse en observant le duo, sourcil haussé.

C'est presque comme si Fai avait compris le stratagème pour qu'on le porte…

Aoi détache Fai et me le passe. Je le cale bien dans mes bras, un sourire aux lèvres. C'est marrant, il commence à avoir un peu plus de tonus maintenant du coup j'ai moins besoin de le tenir droit. Par contre ça veut dire qu'il gigote plus donc ça me demande plus d'attention.

— Il a surtout capté qu'il suffit d'agiter les bras pour finir dans les nôtres, je rigole.

En même temps, je profiterais aussi à sa place. C'est fatigant de se déplacer mine de rien. Fai tape mon épaule en poussant un petit cri joyeux et je suis son regard. Les balançoires… Bon en même temps y a des cris d'enfants qui en profitent donc intéressant pour lui mais balançoires ?

— Balançoires ? Je demande à Aoi.

—C'est malin, un bébé, que veux-tu, je me moque gentiment.

Tant que ce n'est que ça, tout va bien ; mais attendez un peu qu'il tente des bêtises, pour voir jusqu'où il peut aller. C'est une période que je n'ai pas hâte d'expérimenter, à vrai dire, mais en même temps elle me rend curieuse. C'est challengeant tous les jours, un enfant ; il s'éveille de plus en plus et apprend à communiquer différemment, avec plus de nuances à chaque fois. On essaie de lui parler normalement sans trop faire bébé, pour qu'il puisse apprendre les mots correctement. Déjà qu'on parle japonais et chinois, autant lui rendre les choses faciles… Mon apprentissage du chinois n'est pas encore une réussite, il faut dire.

Tout ça pour dire qu'un jour, il va se rendre compte qu'il peut nous embobiner, et nous, on devra se débrouiller pour ne pas être trop conciliants. C'est dur de voir les limites à poser !

Pour l'instant, il attire notre attention en babillant et en désignant, ce qu'il fait avec la balançoire. J'hésite un instant, puis me dit que pourquoi pas ?

—Tu peux le mettre sur tes genoux pendant que tu te balances, peut-être ? J'ai envie de voir sa tête quand il essaiera !

Et je prépare l'appareil photo sur mon téléphone…

Il est même très malin, Fai. Je roule un peu des yeux en riant. Ce qui me fascine surtout avec lui, c'est de le voir apprendre tout ce qui fait une personne. Bouger, manger, babiller, tout. Il regarde tout et il apprend. Il nous montre aussi et ça me fait quelque chose de voir que oui, il a déjà son propre caractère. Les gens qui pensent que les bébés sont tous les mêmes sont des idiots. Fai sait déjà ce qu'il aime ou pas, ce qui lui fait plaisir ou le rend triste.

J'aime beaucoup le regarder et je me retiens de prendre trop de photos mais en même temps… Je pourrais le voir porter des body adorables qu'une fois dans sa vie. Je profite.

— Hm… Si je fais pas craquer les cordes en m'asseyant dessus.

Je rigole et cale bien bébé contre mon torse en me dirigeant tranquillement vers les balançoires. Regard un peu suspicieux d'une gamine qui a l'air de penser que je vais lui piquer sa place jusqu'à ce que je lui explique que c'est pour faire profiter Fai. Extase devant le bébé parce que c'est trop mignon. Fai fait le beau quand il entend son nom et fait un grand sourire à la petite qui le lui retourne. Déjà un charmeur celui-là.

— Bon, on va pas haut, hein. J'ai qu'un bras de toute façon, j'explique au petit. Si tu veux voler c'est avec Maman.

Je me mets avec précaution sur le siège de la balançoire en tenant bien Fai contre moi et prend un peu d'élan en me poussant en arrière. Fai fait un couinement d'excitation. Mon fils est un adrénaline junkie...

Un rire m'échappe et je l'embrasse sur la joue.

—Ne t'inquiète pas. Si tu tombes, je te rattraperai.

C'est dit avec humour, mais il sait que je le ferai. Symboliquement, déjà, et ensuite parce que je n'ai pas envie de voir mon fils de quelques mois s'éclater dans l'herbe après un accident de balançoire. C'est beaucoup trop courant comme blessure. Je m'appuie contre la poussette en observant le meilleur papa du monde négocier avec une petite fille. Ahlala, ces Feux…

Attendrie, je prends quelques photos de loin, leur laissant ce moment à eux. Puis je rapproche la poussette et observe l'air heureux de Fai, en train de rire et babiller de bonheur. Bon, et je prépare aussi le coussin d'air au cas où. AU CAS OÙ, J'AI DIT.

—Tu as l'air d'aimer ça, Fai, je ris, avant de sourire en coin, mutine. Et Papa aussi.

Je m'accroupis face à eux :

—Une petite photo ? Allez, on sourit ! Regarde Maman !

Je souris en coin. Évidemment qu'elle me rattrapera. Déjà, parce que je la connais : j'ai bébé dans les bras donc à aucun moment elle va prendre le risque qu'il se fasse mal. Puis bon ce serait dommage d'abimer mon nez comme ça.

Je profite un peu et marche sous la balançoire d'avant en arrière en tendant les jambes à l'horizontale par moment. Bah oui, j'peux pas trop me pencher en arrière pour augmenter le balancier, j'ai qu'une main libre.

Fai pousse des petits cris de joie en rigolant chaque fois que la vitesse augmente. On va pas vite pourtant mais ça me fait tellement plaisir de le voir s'amuser comme ça. Je fais un grand sourire à Aoi qui nous prend en photo et j'essaye de faire en sorte que Fai soit dans la direction approximative du téléphone.

— Je crois que c'est devenu son jeu préféré. On devrait lui installer une zébulette à la maison.

C'est qu'il est actif le petit maintenant qu'il commence à piger comment se déplacer tout seul.

Un rire m'échappe. Ils ont l'air heureux tous les deux, comme ça. C'est doux, comme moment. La petite fille les regarde aussi d'un air émerveillé. C'est pas tous les jours qu'on voit un si petit bébé, ici.

—Une zébulette ? Qu'est-ce que c'est ?

J'espère que c'est pas une petite balançoire, sinon c'est mort.

Fai gigote un peu contre moi dans son excitation et je resserre gentiment ma prise sur lui. On me la fait pas à moi, jeune homme.

— Heu… C'est un genre de… C'est une salopette suspendue à ressort ? Tu mets bébé dedans et tu l'accroche au plafond et il peut sauter dedans.

Oui c'était très clair comme explication. En même temps le concept est simple, hein. C'est juste que c'est pas hyper facile à expliquer à quelqu'un qui en a jamais vu. J'suis sûr que même Hideko elle en avait pas pour ses gamins.

Une salopette suspendue à un ressort ? Il me le vend pas bien du tout, là. Je fronce les sourcils et tape le mot sur internet... puis acquiesce lentement. Ok. Bon. Ok, j'accepte. Mais quand même !

—C'est pas un peu dangereux ? Imagine ça se décroche ?

J'suis pas anxieuse.

Je souris en coin en voyant son air suspicieux. Mais enfin, chérie ! Fais moi confiance un peu, tu crois vraiment que je mettrais notre bébé en danger comme ça ? J'suis pas inconscient ni suicidaire.

- C'est étudié pour, tu sais.

Fai gigote encore un peu et fais un bruit déçu quand il sent que je me balance moins et je rigole.

- Dans tous les cas, il y aura toujours l'avion avec Maman, pas vrai ?

Il couine quand je mentionne l'avion et je souris en coin. Il reconnait tout de suite les mots importants, hein. En même temps, il adore vraiment l'avion.

Huo essaie de me rassurer, mais je choisis de l’embêter un peu :

—Les parcs d’attraction aussi c’est étudié pour, et pourtant il y a des accidents !

Je le taquine à demi, je ne le pense pas tout à fait. … Pas à cent pour cent, en tout cas, mais c’est une inquiétude qui me traverse malgré tout. Alors je m’appuie sur mes genoux, toujours accroupie, et souris aux deux hommes de ma vie.

—Quand tu veux pour faire l’avion, Fai. Je pourrai t’emmener sur le balais volant que m’a offert Athena il y a quelques années ; peut-être que je pourrais lui demander d’ajouter une petite selle pour Fai à l’avant ?

Je croise son regard et réplique avant qu’il n’ait eu le temps de reprendre.

—Quoi ?! S’il vole avec moi, il ne tombera pas !

T’es dingue ou quoi.

Je roule des yeux. C'est nul comme contre argument, chérie. Dans la vie si on prend pas de risque, on a rien en échange, eh. Bon après je risquerais jamais la sécurité physique ou émotionnelle de notre bébé, hein. Mais j'suis sur ça lui plairait un jouet du genre.

— J'accepte le siège bébé sur le balais volant seulement si on met une ceinture.

Puis l'argument est fallacieux ! Je sais qu'actuellement bébé est moins à risque parce qu'il a pas encore d'Affinité définitive à part les nôtres et que donc il peut potentiellement se rattraper tout seul s'il tombe mais on va pas trop compter dessus.

Je fais un grand sourire à Aoi qui nous regarde accroupie devant les balançoires. Fai commence à chouiner et agite ses bras vers sa mère parce que j'ai mentionné l'avion et qu'il est encore dans mes bras. Impatient, va.

— Ok, ok. Dire que pour une fois c'était moi l'attraction cool.

Je rigole et soulève Fai à bout de bras pour laisser Aoi le soulever. Il est trop gâté ce petit.

Arrête de rouler des yeux, je sais ce que tu penses, je te connais par coeur. Je lui tire la langue et souris finalement en coin, reprenant une photo de sa tête blasée. Il est trop beau dessus, ahhhh je l’aime trop.

—Evidemment qu’on va mettre une ceinture, il tient déjà à peine assis pour l’instant ! Ce n’est pas contre toi chéri, je rajoute à l’attention de Fai, qui s’agite un peu.

Mohhhh mon petit bébé, viens dans mes bras ! Je le soulève et le serre contre moi, déposant plein de bisous sur ses joues dodues. Son rire fait fondre mon petit coeur. Je redonne son appareil photo à Huo et lui tire la langue.

—En même temps, tu cherches, rien ne peut égaler l’avion. Tu as envie de voler mon coeur ?

Je m’éloigne de la balançoire de quelques pas.

—Comment tu fais l’avion, avec les bras ? Elles sont où tes ailes, mon coeur ? Ouiii, c’est bien comme ça…

Et tranquillement, je le fais décoller, un rire coincé dans ma gorge. Fai agite ses pieds et ses bras, content de quitter la gravité terrestre durant quelques minutes, comme s’il essayait d’y nager.