__–Fort heureusement pour la volonté d’Ariana de faire dévier la conversation, Justine venait de débarquer.
__–Fort heureusement aussi pour le caractère encore – étrangement – non assumé de leur relation, celle-ci était d’une classe impériale à toute épreuve, qui ravit au plus haut point le petit Air et lui fournit une distraction de poids.
__–Hélas pour Justine, il était trop jeune pour savoir qui était Morticia Addams.
__–« OUUUUUAAAAAH MAIS COMMENT T’ES TROP CLASSE EN SORCIÈRE TOI AUSSI ! Salut Tina, c’est ça ? J’crois on s’est déjà vus mais je sais plus où… Je suis le, euh… Il aurait été quelque peu trop long de lui expliquer pourquoi il aurait pus se présenter comme l’amoureux de la fille d’Ariana, aussi préféra-t-il se contenter d’un : Je suis son pote et puis c’est elle qui a fait mon déguisement ! J’suis en Sephiroth ! »
__–Il dégaina son bokken, non sans faire voler sa pointe à un ongle du nez de Justine.
__–« Tu sais c’est le méchant dans Final Fantasy VII ! Il est réussi mon costume hein ?? Et puis moi nan ça va j’veux rien merci, enfin sauf si tu fais un truc pour toi quoi. J’ai trop méga hâte d’aller à la fête, y’aura plein de costumes trop méga super giga bien je parie ! ’faut TROP que tu viennes avec nous ! »
__–Et puis il eut un éclair de compréhension :
__–« AH MAIS SI !!! C’est toi qui vivait avec Ariana ! »
__–Ce qui alluma une lueur dans son esprit. Il les regarda… Les regarder le regarder… Se regarder… Leurs expressions, leurs mimiques, les attentions qu’elles s’adressaient l’une à l’autre… Ne dit rien, plissa les yeux.
__–« Mais attendez. »
__–Il les pointa toutes les deux du doigt.
__–« Ah mais en fait j’ai compriiiiiis vous avez pris le même thème de déguisement… Sauf que t’as pas de chapeau, c’est dommage. »

L'exclamation d'Aria la fait sautiller un peu sur place ; c'est que Justine s'était un peu perdue en examinant le costume de son amie. Elle aussi était une sorcière, mais une sorcière toute lumineuse, avec une robe de tulles qui allait de paire avec les couleurs flash de ses cheveux. Quoiqu'il arrive, Ariana pétillait toujours. Justine a un petit sourire pendant qu'elle la noie d'informations. Elle se penche un peu quand elle fait mention d'Aylan et elle le reconnaît comme le petit qui l'avait percutée à la fête de la Master Alice. ...Et puis c'est à son tour de balancer des informations à la pelle.

Justine entre, calmement, refermant la porte derrière elle et s'approche d'eux. :

-Merci Aria, c'est gentil. J'aime beaucoup ton costume aussi, c'est une bonne idée d'adapter la couleur de tes cheveux. Ça ne me dérange pas qu'Aylan nous accompagne.

Si elle ne se recule pas devant le geste brusque d'Aylan quand il dégaine le bokken, voyant bien d'avance qu'il n'allait pas la toucher, elle l'encourage à faire attention en tapotant la main du garçon. :

-Désolée, je ne connais pas Sephiroth, mais en voyant ton costume, je sais qu'il est forcément très classe. Oui je vivais avec Aria, c'est moi. Et je venais justement pour le chapeau qu'il me manquait... Si tu en as un à me prêter bien sûr.

Et puis comme si elle était de nouveau chez elle, elle s'avance jusqu'à la petite cuisine. :

-Je vais faire les boissons chaudes Aria, ne t'embêtes pas. Tu dois finir le superbe maquillage d'Aylan ! Chocolat chaud j'imagine ? Avec des marshmallows ?

Efficacité Tina.

Aria s’est un peu perdue dans sa tête à l’arrivée de Tina, parce qu’elle était trop chou et super enthousiaste du compliment (deux Eaux qui communiquent quoi), mais elle est vite interrompue par la PANIQUE qu’elle ressent quand Aylan bazarde son sabre pile sous le nez d’une Tina qui…. ne cille évidemment pas. Est-ce que ça la surprend, pas vraiment ; est-ce qu’elle est paniquée quand même, OUI OUI OUI. Ca l’empêche de rougir au compliment et de poser ses deux mains sur ses joues en faisant “hihihi ouiiii j’aime bien changer la couleur de mes cheveuuux” comme elle en aurait eu l’habitude.

—Aylan !! s’écrie Aria à voix basse comme le ferait une daronne, ouais. Et ahaha merciiii Tina c’est gentil !

Non mais ça va pas de faire ça !! Elle aurait pu être blessée OU avoir peur OUUU…. Bon, d’accord, quasiment rien ne fait peur à Tina, on dirait, mais c’est pas une raison pour essayer de la faire sursauter comme ça non mais oh. Aria s’éloigne pour reprendre son attirail de maquillage et elle pouffe de rire en entendant son amie et ancienne colocataire répondre à Aylan. Qui semble en très très grande réflexion. L’Etoile sourit largement à Tina et désigne un coin de la pièce de la tête. C’est toujours autant le bazar chez Aria, il faut qu’elle investisse dans un local pour ses créations si elle veut pouvoir continuer à se déplacer dans son salon...

—Oui je t’en ai mis un de côté ! Tiens regarde, je l’ai posé sur, euh… La pile de tissu là-bas- Ahhhh j'ai trop hâte d'y aller avec vous aussi ! C'est toi qui aura le meilleur costume, Aylan, c'est sûr. Regarde cette classe international avec le sabre.

La rouquine a un sourire attendri face à son amie puis sautille sur place, toute heureuse, quand elle lui propose de faire le chocolat :

—Hiiiii ouiiii merci Tina trop bonne idée !!! Aylan aime bien quand c’est bien sucré, donc hésite pas à mettre la dose !! ALLEZ AYLAN VIENS OMG faut qu’on termine ça !!

Elle traîne le pauvre Air derrière elle et continue son ouvrage en babillant, tantôt pour un ami, tantôt pour l’autre… :

—Tu voudras que je te fasse une coiffure tout à l’heure, Tina ? Oh Aylan attends, ferme bien les yeux… j’en mets partout ohlala je suis tellement contente que j’ai les mains qui tremblent-

Et bla, et bla, et bla. La narratrice n'arrive plus à suivre, Aria parle trop.



HRP : en fait ils vont passer une soirée entre filles à boire du chocolat chaud, j’les connais
elle parle bocou, j'ai dû couper des trucs au montage en vrai.

__–C’était donc Tina.
__–Aylan était certes très enthousiaste, sautait partout, parlait fort et s’excitait d’un rien, comme il en avait l’habitude, mais son humeur était aussi volatile que l’élément qui était le sien. Bien que modérés, les gestes et paroles des deux adultes visant à éviter qu’il n’éborgnât qui que ce soit eurent leur effet et le firent se calmer un bref instant. Juste assez pour observer les deux femmes interagir.
__–D’un côté, une personne que rien ne semblait effrayer, qui allait droit au but et proposait avec la sérénité d’un lac de montagne des idées tout à fait lumineuses et riches en sucre. De l’autre, une qui bougeait partout, dans tous les sens, parlait vite, sautait d’un sujet au suivant comme d’un coin de son appartement à l’autre et déballait un flot de paroles pareil à celui d’un torrent qui dévalait les pentes.
__–Hm.
__–Il garda cela dans un coin de sa tête. C’est qu’avant qu’il eût pu ouvrir la bouche, Ariana l’attrapait par le bras, le faisait s’asseoir et lui ordonnait de rester immobile le temps de finir son visage. Cette tâche étant des plus importantes, Aylan ne se fit pas prier, pendant un instant qui aurait été paisible s’il n’eût tenu qu’à lui et non aussi à Ariana.
__–Ses yeux et sa peau accordés avec le reste de son déguisement, Aylan attrapa un miroir, se contempla et qualifia le travail de sa maquilleuse :
__–« Ouuuuuaaaaah comment tu l’as trop réussi ! Merciiii ! Ah et vous êtes ensembles ? »
__–C’était évident. Comme l’était la capacité d’Aylan à lâcher une bombe nucléaire sans s’en rendre compte, en pleine conversation.
__–« Et ouais j’veux bien un méga max de marshmallows dans mon chocolat steuplé ! Puis dis Ariana j’pourrai t’aider pour sa coiffure ? Promis j’sais faire et tout ! »
__–C’est que ses cheveux étaient effectivement aussi bien tenus que sa langue ne l’était pas.

Tina prépara donc les boissons comme demandé, avec la dose de sucre. Et un "méga max" marshmallows. Et un peu de cannelle. Parce qu'elle est perfectionniste. Elle ne manque pas de remercier Aria, quand elle lui indique qu'elle a bien un chapeau pour elle. Elle le mettra plus tard du coup, puisque les deux compères lui ont proposé de la coiffer. Elle sourit malgré elle ; elle se doute que sa longueur capillaire est tentante, elle a servie de cobaye pour quelques unes de ses filles, au village. :

-Je veux bien que vous me coiffiez. Je ne savais pas quoi faire.

Elle ne savait jamais quoi en faire en vérité, et les clients aimaient les tenir donc...

Justine sautille un peu en revenant vers eux, chocolats dans ses mains, au moment où Aylan s'admire dans le miroir et demande si elles sont ensembles. Tina répond sans détour. :

-Oh non on n'a pas fait exprès d'être ensemble... J'ai décidé de venir en sorcière hier je crois ?... Je n'avais pas d'idée, j'ai pris des vêtements à moi.

Ouais non, elle n'a pas compris le sous-entendus. Évidemment. ...Et d'un autre côté, elle prend délicatement la main d'Aria qui continue de trembler d'excitation. :

-Respire un coup. Le maquillage est superbe.

Aria sautille presque à côté d’Aylan quand il s’admire, observant avec appréhension puis amusement et joie sa réaction… Oui, non, il a l’air d’aimer, tout va b- Attendez, hein ? Quoi ? Mais pourquoi tout le monde leur pose cette question ?! Ses yeux s’ouvrent en grand, elle agite les mains, panique un peu, beaucoup, passionnément, et s’apprête à imploser d’embarras, rouge comme une tomate, quand… Tina répond.

Oh ! AH !

C’était donc ça, donc il demandait juste si elles étaient ensemble, genre, dans leur cosplay quoi, OK. Elle a les idées mal placées, c'est dingue. Elle donne de petites tapes dans le dos d'Aylan en riant.

—Aaaaaaaaah tu parlais de ça ! AHahaha oui non alors non, c’était pas voulu j’avais déjà commencé mon costume, et puis c’est pas parce qu’on est déguisées pareil qu’on est ensemble… ensemble quoi, enfin tu vois, aha, non c’est juste pour… clarifier, ‘fin parfois les gens ils sont déguisés pareil mais ils sont pas. Ensemble.

Mais qu’est-ce qu’elle rac- Tina lui prend la main tout doucement, et elle vibre tout entier de surprise, soudain encore plus rouge quand elle croise ses yeux. Elle serre la sienne par réflexe, sourit, évite très fort de la regarder trop longtemps, et encore plus de regarder Aylan. Ouaiiis alors c’est pas le maquillage qui. L’inquiète. Enfin. Oui, hein, bon. Est-ce qu’il faut commenter ? Non. Non, vraiment pas ; faut qu’elle arrête de se faire des idées là elle aussi ohlala pfiouh.

—M-merci Tina…. … Et merci pour le chocolat chaud. (Elle ne laisse pas de flottement de la gênance s’installer, puisqu’elle reprend immédiatement.) Je te laisse t’installer Tina, comme ça on peut s’occuper de tes cheveux, je vais, euh, chercher la brosse et des élastiques ! Bien sûr que tu peux aider Aylan du coup ahah !

Elle passe à côté d’Aylan et lui fait les gros yeux. T’es ouf de poser des questions ambiguë comme ça, ça se fait pas omg, sois clair quand tu parles !! Ariana ne tarde pas à revenir avec tout son matériel de coiffure, avec dans l’idée de lui faire des tresses… Elle leur montre des idées sur son téléphone :

—Vous voulez faire quoi ? Y a ça que je sais faire, puis ça, ça t'irait bien, et puis,...

(Quelques instants de silence pour le cerveau d’Aria.)

__–Hm.
__–Aylan prit une gorgée de son chocolat chaud. Il était succulent, mais son air était grave. Il écouta avec attention les réponses des deux sorcières.
__–« Non. »
__–La situation était vraiment étrange, pour lui. Ariana rougissait. Elle était gênée ? Quelle gêne y avait-il à avoir à être en couple avec une personne aussi charmante, tant d’aspect que de personnalité, que Justine ? Ne vivaient-elles pas sous le même toit ? N’avaient-elles pas des attentions l’une envers l’autre typiques de cette situation ?
__–« Vous avez pas du tout compris en fait. »
__–Qu’est-ce que c’était que ces adultes qui n’osaient pas s’avouer leurs sentiments. Ne savaient-ils pas que la vie était bien courte, ces choses là bien volages et que si on se refusait à en jouir quand on y avait encore accès, elles prenaient le risque de disparaître ? Aylan en savait quelque chose.
__–« Pourtant chaipas c’est simple et puis tout le monde le voit en plus ! »
__–Quelque part, les voir ainsi se refuser l’une à l’autre lui fit un petit pincement au cœur. Il voulait qu’Ariana soit heureuse et la voyait présentement dans le meilleur état  qu’elle avait connu depuis ce fatal mois d’août. (Passons sur le fait qu’il est tout à fait probable qu’il surinterprétât complètement la réalité de la situation et y injectât bien trop de son vécu… et de son absence totale de subtilité.)
__–« Vous êtes amoureuses. Ça ce voit trop. »
__–Il prit une autre tasse.
__–Peut-être qu’il y avait autre chose au programme que de la coiffure.

Aria panique et Justine pense que c'est parce qu'elle a eu peur que son maquillage ne plaise pas. C'était logique dans sa tête, surtout qu'après lui avoir tenu la main, elle se calme un peu et la remercie pour le chocolat. Alors la réaction du petit la prend un peu de court, mais elle l'observe patiemment, attendant qu'il dise plus précisément ce qu'il pense. C'est simple et tout le monde le voit ; apparemment elles sont amoureuses. Tina tourne son regard fixe vers Aria le temps d'une petite seconde et se tourne à nouveau vers Aylan. :

-Non Aylan, ce n'est pas simple. L'amour c'est très beau, c'est vrai, mais c'est aussi très fort. Certaines personnes ne connaissent pas ce sentiment, et ils peuvent avoir peur ou ne pas le comprendre et elles doivent apprendre avant d'en parler à la personne qu'ils aiment, pour éviter de la faire souffrir... ou d'autres justement en ont déjà souffert et ont besoin de temps, ou même tomber amoureux mais ne rien faire parce qu'ils préfèrent prendre soin d'eux d'abord. Avoir un amoureux ou une amoureuse, c'est faire parti d'une équipe précieuse et ce n'est pas simple... parce que partager avec une autre personne, ce sont les joies et les peines à la fois, et certains ont besoin de prendre leur temps. ...Je serais très touchée si Aria était amoureuse de moi, mais je préfère que ce soit elle qui m'en parle tu sais ? Fais attention quand tu dis ce genre de choses tout haut d'accord ? Tu pourrais blesser sans le vouloir.

Les adultes sont compliqués en même temps. Enfin, pas tous, Tina se considère très simplette mais elle a d'autres problèmes de son côté. Elle s'est penchée pour voir la proposition de coiffure d'Aria, comme si de rien n'était, et en pointe une avec de jolies tresses. :

-Vous sauriez faire celle-là ? J'aime beaucoup ces tresses-là.

Quoi non. Quoi on a pas compris. Il veut se battre ou quoi ??? Aria lui lance un regard d’abord interloqué. Pas compris quoi ? Il lui semble qu’elle a bien clarifié, pourtant : elles ne sont pas ensemble. Ensemble…. ensemble, quoi. Mais de quoi tout le monde le voit ? De quoi c’est simple ? De quoi il parle ??? Il peut pas regarder les tresses qu’Aria lui montre, là, au lieu d’essayer de dire n’importe quoi ??

Le visage de la Morphe — l’espagnole — enfin la rousse — merde euh ARIA QUOI — devient doucement encore plus rouge. Amoureuses, oui, aha, oui, c’est ça. Aria ouvre la bouche en grand, un peu figée, le ventre tordu désagréablement, et puis c’est tout chaud, et elle est très gênée — comme prise sur le f- — NON ELLE EST JUSTE TRES GÊNEE C’EST TOUT c’est parce qu’il raconte n’importe quoi et juste il comprend rien et POURQUOI IL INSISTE EN FAIT.

[Le narrateur ne sait plus qui est en train de parler, par contre il est très conscient de ce qu’il se passe contrairement à Aria.]

Alors Aria se tourne vers Tina, le souffle bloqué entre ses lèvres, comme pour jauger sa réac- — non c’est pour qu’elle comprenne qu’Aylan dit vraiment n’importe quoi et qu’il est vraiment zinzin, eh, oh, hein, hé, voilà. Et puis Tina répond, et Aria souffle, parce qu’elle se dit qu’elle va répliquer que non, c’est pas ça, et ça la rassure — enfin jusqu’à ce que Justine sorte une tirade digne d’Edouard Baer dans Astérix: Mission Cléopâtre.

La seule réaction possible d’Aria est de se rouler en boule sur le canapé en se cachant le visage, avec la plus GROSSE ENVIE DE CANER DE L’ANNEE, et pourtant on se pose là dans le genre année de merde.

Woah putain, qu’est-ce qu’elle a chaud partout dans son ventre et sa poitrine, c’est pas des papillons, c’est une bouillotte qu’elle a sous le t-shirt ou quoi.

ELLE SERAIT TOUCHEE SI ARIA ETAIT AMOUREUSE D’ELLE ?? CA VEUT DIRE QU’ELLE LA JUGERAIT PAS ????

Non mais attendez, faut comprendre Aria, elle s’est jamais posé la question, mais là ça lui ouvre toute une piste de réflexion qu’elle s’était JAMAIS autorisée à avoir. Non parce que, Justine c’est Tina ; c’est son ancienne merveilleuse colocataire, la fille la plus douce et gentille qu’elle ait jamais vue, cette personne qui l’accepte telle qu’elle est, qui ne la juge pas, ne la regarde pas de travers, lui ramène des fleurs des champs et lui fait du chocolat pour lui remonter le moral. C’est précieux pour elle, tout ça, et jamais, jamais elle voudrait gâcher ça avec un crush stupide et insipide qui risquerait de tout niquer et en plus si ça se trouve elle voudrait plus lui parler après mais- RESPIRE ARIA, RESPIRE.

En plus tout est joli dans ce qu’elle dit, et c’est très vrai, c’est trop vrai — et c’est peut-être pas encore le moment, alors Aria va faire ce qu’elle fait de mieux et s’enfoncer dans son déni. Elle reprend son téléphone d’une main tremblotante d’émotion contenue, et elle sait même pas encore trop pourquoi. (Pourquoi elle la contient, ou pourquoi ça la gêne tellement ?)

—Ou-oui aha. C’est joli ce que tu dis. Et euh. Oui. Alors. Du coup. Oui je peux te faire cette stresse. Tresse.

Faire une tresse à son amie. C’est bien ça. Elle va pas répondre au reste.

__–Faire comprendre quelque chose à Aylan, du fait des conditions quelque peu particulières de son éducation, n’était que rarement vu comme nécessaire. Il suffisait de lui beugler un ordre dessus ; son travail n’était pas de comprendre mais d’obéir. Aussi peut-on comprendre à quel point il fut réceptif à Philippus et Miguel, quand ces deux personnes chargées de son éducation prirent réellement le temps de détailler le fond de leur pensée.
__–On peut sans peine, dans ses conditions, imaginer l’effet surpuissant qu’un long baratin avait sur lui. Peu habitué à ce genre de phraséologie mais toutes ses expériences de la chose étant liées à des personnes fort positives, il but les paroles de Justine comme du petit lait… Mais aussi d’une traite, sans les mâcher, les savourer, ou même les comprendre, en fait. Aylan n’avait pas saisi le sens du tiers de la moitié du quart de ce que déblatérait Justine – en partie parce qu’elle avait un ton assez monocorde, détaché, plus explicative et démonstrative qu’entraînante, ce qui était fort insuffisant pour retenir sa disparate attention – mais elle avait fait grand effet sur lui.
__–Et sur Ariana.
__–Ça, par contre, notre petite vicieux de protagoniste n’en loupa pas une miette.
__–Il la regarda fondre intérieurement. Révisa son jugement : peut-être que Justine n’était pas amoureuse, mais il y en avait une qui l’était à coup sûr.
__–« Hmm mm. »
__–Il prit une autre gorgée.
__–Après tout, Aylan estimait avoir fait son devoir. La suite était entre leurs propres mains, désormais.
__–« Bon mais euh du coup, on fait la tresse et on va au bar hein ? J’ai trop envie d’y aller moi. »
__–Un esprit mesquin pourrait dire qu’Aylan était fort bien au fait des effets de l’alcool, de la danse, de la fête et de tous ces rites sociaux et complicités partagés sur les couples qui n’osaient pas encore se définir comme tels, que ce soit de part sa propre expérience ou des racontars et vantardises diverses sur leurs conquêtes des divers mercenaires qu’il avait côtoyé, qu’il n’était pas sans savoir qu’Ariana était une fêtarde invétérée et avait une bonne descente et que si elle paraissait fort sobre, calme et mesurée de premier abord, tout portait à croire que Justine elle aussi saurait être une partenaire fort enjouée et donc, que s’il avait mis de côté son ambition de les faire se rapprocher l’une de l’autre, il n’avait en rien rétracté ses espoirs que cela se produisît et entendait bien être là quand cela se réaliserait.
__–Un esprit mesquin aurait uniquement raison s’il ajoutait que quand cela arriverait, inévitablement selon Aylan, celui-ci gratifierait les deux amantes d’un « je vous l’avais bien dit » qui n’aurait pas été immérité.

Le petit garçon sembla mesurer ce qu'elle avait dit... Peut-être jouait-il la comédie, pour ne pas à nouveau être inondé par un autre monologue mais il n'insista pas... C'est donc que Justine, quelque part, avait un peu réussi, tout bien considéré. :

-Parfait ! Alors, je vous laisse mes cheveux.

Elle se tourne donc, arquant son bras pour faire glisser leur longueurs vers Aria et Aylan. Elle leur signala qu'elle n'allait pas avoir mal -elle a l'habitude qu'on la maltraite- avant de partir dans ses pensées. Elle avait fait tout un speech pour le petit mais en réalité, elle ne savait pas ce que c'était, être amoureuse. Elle s'en doutait, avait sa propre définition mais ça lui paraissait tellement loin de ce que les autres vivaient. Elle avait eu vent du mariage entre Chasseur et cette fille rousse qu'il a rencontré ici, mais elle n'avait pas encore au l'occasion d'en discuter avec lui. Et à chaque fois que Loup parlait de son partenaire, il partait trop loin, si loin qu'elle n'arrivait plus à suivre. Ses exemples d'amour sont monétisés si on ne compte pas ces hommes-là. Mais avec Aria, elle veut juste être à ses côtés. Quand elle rayonne comme à son habitude ou quand elle ne va pas bien. Avant, c'était son devoir de Madonne, d'être là... Est-ce qu'elle s'attache à Aria parce que Vipère s'accroche au passé ou parce que Justine veut vraiment essayer de construire quelque chose de nouveau ? C'est encore trop flou. Et même si elle arrivait à comprendre ses sentiments, même si Aria lui disait qu'elle était amoureuse, elle lui dirait que c'est trop tôt. Pas tout de suite. Elle l'aime c'est certain, mais elle ne saurait pas dire si elle peut lui apporter ce qu'elle souhaite dans une relation, tant sa vision des relations est malformée. Elle le sait. Et elle ne veut en aucun lui faire du mal par inadvertance, parce qu'elle n'est pas prête.

Et plusieurs manipulations plus tard, la voilà coiffée. Quand elle met le chapeau de sorcière qu'Aria lui prête pour l'occasion, elle se sent complète. Elle souffle, heureuse, après avoir un peu trop longtemps admiré, surprise et muette, la beauté de ce que ses amis avaient fait de ses cheveux. :

-J'adore... Et voilààà ! Si vous avez fini vos boissons, on peut aller au bar !

Il a pas l’air convaincu, Aylan. Non mais, ça tombe bien, parce qu’il y a évidemment personne à convaincre ici, hein, aha.

—OUI ON FAIT LA TRESSE.

Elle a parlé trop fort. Et Tina a choisi. Donc les voilà en train de s’appliquer sur les cheveux incroyablement longs et incroyablement soyeux et bien entretenus de Tina. Ohlala mais elle va être trop belle avec son chapeau pointu de sorcière, et… Allez, on se concentre, voilàààà. Si Aria ne s’est jamais trouvé grand talent, utiliser ses petites mains pour tout un tas de choses requérant précision et souplesse est certainement celui qu’elle s’autorise le plus à reconnaître. Ca l’aide toujours à ne pas penser, et son attention se pose, justement ; elle se calme, s’apaise, son sourire renaît alors qu’elle tresse et montre à Aylan où tenir les cheveux, comment, dans quel sens,…

Et puis lui tend son joli chapeau, et tend la main à Aylan pour qu’il lui fasse un high-five, tout sourire.

—T’es trop joliiiiiiiie ça te va si bien !! Ohlala j’adore. Ca donne envie de te coiffer tout le temps.

Ses yeux pétillent d’admiration pour son amie pendant qu’elle ajuste le couvre-chef… et elle enfonce le sien sur sa tête pour ensuite terminer rapidement sa boisson chocolatée, la mettre dans l’évier, mettre de l’eau dedans, commencer à ranger la cui- non pas le temps, et puis revenir comme une furie vers ses amis, les mains sèches, et les entraîner à sa suite.

—LETS’GO AU BAR !!! HANNNN j’ai une idée, vous voulez que je galope jusque là-bas ?! J’suis sûre qu’en cheval je peux transporter deux personnes !

Evidemment, Aylan va accepter, mais Tina, c’est moins sûr.