Depuis qu'il avait croisé ce môme, Ewen, Ys affrontait chaque jour son reflet. Du moins, il y prêtait un peu plus attention. Il avait coupé un peu ses cheveux, parce que les couettes c'est dépassées, et une douche. Au moins une tous les deux jours... Ouais bon, c'est pas terrible mais allez trouver une motivation à vous préparer quand plus rien n'a de sens autour de vous.
Et puis quoi? A qui faut-il plaire? Qu'il change de chaussettes chaque jours est déjà un évènement à fêter en soit. N'en demandez pas plus! Et puis la barbe de quelques jours donne un certain charme.

Les fêtes de fin d'année sont passées... ENFIN!! Ce n'est pas tant qu'il déteste ces fêtes et leurs illuminations mais seul, c'est.... compliqué.
Depuis qu'ils s'étaient quittés sur le bas de la porte, Ys n'avait pas revu Mitsu. En vérité, il préfère l'éviter désormais, trop honteux. Alors certes, la voire sourire et heureuse est tout aussi important à ses yeux, mais si c'est pour que se soit avec un autre homme, sans façon. Il n'est pas suffisamment fort pour supporter cela.
Alors, il avait évité de sortir si ce n'est pour se rationner, évitant alors un visage familier. Maintenant que les fêtes étaient terminées, il y avait moins de monde qui se rendait au bar. Parfait.
S'il ne côtoie plus une seule vieille connaissance, l'alcool, en revanche, est devenu son meilleur ami.

"Ah... on peut pas le manquer..."Marmonne-t'il pour lui même tandis qu'il scrute l'écriteau de l'établissement.

Que dis-je? CET ENORME ECRITEAU!!!!
Mais le mec qui avait fait ça, il avait peur que les pochtrons du coin n'est plus assez d'odorat pour ne pas le retrouver?! T'inquiète gros, les âmes soeurs se retrouvent toujours!

Jetant le restant de sa cigarette, Ys ne tarde pas d'avantage et fait enfin irruption. Pour sûr, ils sont en plein travaux ici. Et côté décoration, soit le boss est d'affinité Terre, soit c'est Mère Nature la patronne des lieux. A tout moment, t'as Bagheera qui peut te surgir dessus!
Non sans rire, c'est pas que c'est moche mais c'est... différent.
Tout semble différent d'autrefois.
De toute manière, le jeune homme est venu pour noyer sa solitude, pas pour donner son avis. Et puis lui et la décoration d'intérieure, c'est pas son truc. C'était Mitsu ça.
Mitsu....

"Ton alcool le plus fort!"Lâche-t'il comme pour chasser des pensées.

Il s'est contenté d'agiter sa main vers une silhouette inconnue. Une jeune femme semblerait-il. Mais il ne s'en préoccupe pas d'avantage car sous ses yeux se dresse une multi de d'informations et pas des moindres.

ATTENDEZ! Pourquoi Ipiu apparait là sur le mur? C'est elle le boss de la boite?!!

HRP> Bonne année :D

HRP : Hihihi c'est parfait, bonne lecture ~


__–Hé mais attends, je le connais, ce mec. La preuve, je l’ai jamais vu.
__–… Oui alors, contexte.
__–Ces derniers temps, je suis pas mal travaillée, j’ai un peu la tête ailleurs. Pricie, avec qui je vis et que j’appelle ma petite sœur, quand-même, a des cauchemars récurrents, rapport au retour au bercail d’une vieille légende de Terrae, qui se serait taillée buter du terroriste juste avant que j’arrive. Ça n’a pas été annoncé, mais ce multi-meurtrier complètement pété du casque avec un côté Léa passion torturer des enfants se promène maintenant, pépère, après avoir juste perdu ses pouvoirs.
__–Hm.
__–Pricie m’en a parlé. Elle m’a raconté des trucs. À quel point elle voulait le voir crevé, ce type, aussi. Au bout de la je sais plus combientième fois à nous faire au milieu de la nuit un gros chocolat chaud et sécher ses larmes avec notre chien sur nos genoux pour faire passer une nuit écourtée, ouais, j’ai fini par avoir une idée assez précise du lascar.
__–Et là, ce mec. L’air de connaître, mais d’avoir jamais vu mon bar. Un bras en moins, puis encore quelques habitudes qui restent, ce qui veut dire que c’est super frais, ce que je vois tout de suite parce que je connais bien. Alcoolo au dernier degré, sûrement, aussi. Tête à avoir tellement de PTSD que ses cheveux sont sûrement une couleur et qu’il a pas eu besoin de se décolorer avant de l’appliquer. Bugue sur Ipiu, donc la connaît, donc vraiment pas un novice fraîchement arrivé. Correspond à la description que j’en ai eu.
__–Hm.
__–« Ys, c’est ça ? »
__–Putain de merde, c’est lui, c’est sûr. Qui est là. Dans mon bar. Le terroriste. Le master déchu.
__–Je lui sers un rhum arrangé maison, poivre-cannelle.
__–« J’m’appelle Luna. Je suis ta plus grande fan. sympa, hein, ce que j’ai fait du coin ? Je suis arrivée ici vraiment, quelques mois à peine après ton départ, mais j’aurais bien aimé te connaître avant. Quoique, je serais sûrement partie avec toi… Pour des raisons évidentes, je vais pas afficher ta tête sur mon tableau, là – celui des gens qui payent pas –, mais tout ce que tu prends est offert par la maison, c’est la moindre des choses. »
__–Aaaahhhh j’suis trop conteeeeeeente c’est comme si Joakim Brodén venait d’entrer dans mon bar ! J’espère qu’il voudra bien me raconter des trucs !!!

HRP : Déso Alice, mais voilà, pour Luna, Ys c’est son bébou maintenant.

__–Ouah, je me doutais bien qu’il devait pas être super bien reçu le mec, mais à ce point ! Après… Trois ans de cavale à se faire poursuivre par une secte ultracatho, le Centre (du moins, je suppose, mais secte terroriste ennemie de Terrae, ennemis de Terrae qui est connu pour soutenir des sectes terroristes, y'a pas à chercher très loin pour faire le lien), des autorités nationales et Terrae, ouais, il a pas dû avoir droit à beaucoup d’accueils positifs.
__–« Nan attends, écoute ! Pour de vrai ! Laisse-moi t’expliquer, juste le temps de finir ton verre si tu veux, après tu te tailles si tu préfères, ok ? On est pas que en train de parler d’éclopée à éclopé, là, mais aussi de vétérane à vétéran. Rien à voir avec mon bras, mais j’ai aussi participé à des offensives contre le Centre et j’y ai aussi perdu des bouts. Et, si tu veux, je me suis un peu renseigné sur ton histoire, sur l’attentat terroriste d’il y a trois ans et demi, pourquoi t’es parti… J’ai pas tout le tableau, mais, juste. T’as des couilles en acier trempé. En duo contre les karasus puis le Centre, ça impose le respect. »
__–Je vais juste pas détailler sur qui est ma principale source. Et non, c’est pas te trahir, Pricie :
__–« Bon, tu t’en doutes, je suis pas trop pour les méthodes, hein. On est arrivé à de bien meilleurs résultats en bossant tous ensemble et sans kidnapper et terroriser de gamines, ou sans se foutre sur la gueule entre nous. Mais avec combien de temps de retard ? Combien de personnes crevées, d’années de torture pour les enfants qu’on a sorti de là qui auraient pu être évitées, si la direction s’était bougé le fion ? Et, sérieusement. Il faudra que tu me racontes, genre s’il te plaît je veux tout savoir, mais franchement. Si t’avais pas foutu autant de boxon pendant ces trois ans. Si t’avais pas diminué autant les forces de notre ennemi. Est-ce qu’on aurait pu réussir nos propres opérations ? »
__–Je lui tends la main. La droite. Celle en métal. Ouais mais il peut pas m’en serrer une autre, aussi. Ma voix se fait plus douce. J’étais vraiment enthousiaste avant, là je suis plus en mode… en mode j’essaie d’imiter la gentillesse d’Alice, dans le sourire, l’intonation.
__–« Alors franchement, mec. J’vais te dire. Plus jamais il y en aura des comme toi et c’est clairement pas plus mal. Mais je pense que t’étais une étape nécessaire. Que sans toi, on serait vachement plus dans la merde que les autres masters veulent bien l’admettre. Alors, merci. On a dû pas mal te chier dans le cou, mais je parie que personne a pris le temps de reconnaître que, quand-même, tu t’es pas contenté de rester assis derrière des murs pendant que nos ennemis nous attaquaient, donc juste pour ton courage complètement débile, merci. À toi de voir si tu veux me la serrer ou te barrer, je jugerai pas. »

HRP : Je n'ai pas posté avec le mauvais compte. Je n'ai jamais posté avec le mauvais compte. Signalez quiconque dira l'inverse à votre commissaire politique le plus proche.

__–Ben mon tonton, j’aurais pas pu te le dire avant, c’est la première fois qu’on se voit. Mais ouais. Je pense que je saisis où il veut en venir. À sa deuxième réplique, par contre :
__–« Ouais, en vrai, c’est possible. »
__–Non mais c’est vrai. Je ne vais pas lui dire qu’il a eu raison. C’est pas ma place, j’en sais pas assez. Il a fait ce qu’il pensait être juste, ce qui est déjà incroyable. Il s’est sorti les doigts. A pris une décision difficile. Ce qui est pas donné à tout le monde. Une décision de Tonnerre, hein. Mais une décision.
__–Comment expliquer, parce que c’est un peu le bordel, là, j’imagine, un coup je dis que c’est pas bien, un coup je dis que c’est bien… Écoutez, si vous voulez, j’ai pas tous les éléments de contexte, mais je sais une chose, c’est que à cette époque, Terrae s’était faite voler sa culotte par surprise et était complètement paumée sur quoi faire. Et alors, on a un de ses masters qui en a marre de la discutaillerie et qui décide d’aller faire quelque chose, quitte à sacrifier absolument toutes ses amitiés, justement pour les protéger.
__–Ça, c’est quelque chose que je ne peux pas ne pas admirer. Mais, vous savez, c’est cette admiration qu’a un soldat avec un flingue quand il voit charger un enfant avec un canif. C’est beau, c’est brave, tu pourrais peut-être même servir à quelque chose, mais couché et laisse les adultes s’en occuper. Et là, l’enfant avec un canif, il a torturé ma petite sœur. Ça la fout quand-même assez mal. C’est pour ça que je ne veux pas l’encourager. Je veux certainement pas non plus qu’il recommence. Il mérite sûrement tout ce qu’il s’est pris dans la tronche comme punitions – peut-être même de perdre son membre.
     C’est une histoire que me racontait mon grand-père, ça, celui qui a fait la Seconde Guerre mondiale. Quand il était en Italie à buter du fasciste, un type de son unité, alors qu’ils étaient sous le feu d’un nid de mitrailleuses ennemies, a désobéi à l’ordre donné de tenir la position, a fui, genre, comme ça, avec la moitié des grenades de son escouade. Un type et autant de munitions en moins, en pleine attaque ennemie, c’est la merde. Mais le gars, il avait en fait contourné le nid adverse en rampant dans la boue, sous les barbelés, puis avait balancé tous ses explosifs sur les fortifications italiennes. Et complètement niqué leur dispositif défensif, ce qui a permis de prendre toute la colline. Et le gars, paf, bombardé chevalier de l’ordre du mérite militaire… Et rétrogradé de sous-lieutenant à seconde classe. Pour désobéissance à un ordre direct qui aurait pu foutre en l’air toute son escouade.
     vous voyez, ce que je veux dire ? On peut punir et récompenser un acte de bravoure complètement stupide.
     Non, en fait, je veux qu’il aille bien. Je veux qu’il puisse vivre sa vie avec dignité, dans le calme, rassuré de voir que c’est bon, elle a mis du temps à arriver, mais la relève est là ; on a plus besoin des sacrifices de héros solitaires, quand on a une armée.
__–Se faire pardonner, ça, c’est pas de mon ressort. Je lui souhaite, mais ça ne pourra pas être mon problème.
__–Par contre, s’il veut noyer ses traumas dans l’alcool comme les ¾ des gens qui reviennent de la guerre avec des bouts en moins et des blessures psychologiques plus impressionnantes encore – que de perdre un fucking bras, ça laisse songeur –, en fait, non. Ça, comme c’est moi qui tiens les stocks de binouze de cet institut, c’est totalement mon problème.
__–Je claque des doigts avec ma main libre.
__–« Alors c’est ça, ton nom de famille ! Non mais c’est vrai, au final tout le monde t’appelle par ton prénom. Vasconcelos, du coup, pour moi. Luna Vesconcelos. Ça doit te faire bizarre de revenir ici après, quoi, trois ans ? Pas mal de nouvelles têtes et de changements, hein. Comment ça se passe, depuis ton retour ? Hideko t’as tapé sur les doigts, j’imagine ? Toujours master ? Tu le vis comment ? »
__–La seule différence, entre un barman et un psy, après tout, outre le cadre, la fréquence, la durée et le but des rencontres, et le diplôme, c’est que le client peut baiser avec le premier sans que ce soit une faute professionnelle.



N.d.a : Luna s’est sûrement montrée particulièrement injuste et de mauvaise foi envers Terrae ici. (Et ailleurs.) C’est normal. Comme elle n’avait aucune connaissance des opérations menées par Terrae avant l’Opération Thémis, comme celle effectuée au Royal Casino de Séoul par exemple, ce qui s’explique aisément par le fait que personne n’en parle jamais, elle a tiré la seule conclusion qu’elle pouvait tirer avec les informations qu’elle avait.

HRP> T'as de la chance, je t'ai pas grillé B)


C'est étrange de se faire "presque" féliciter pour avoir commis des meurtres. Certes, la méthode n'était pas la bonne, mais le jeune homme était en proie à une telle colère incontrôlable, qu'il n'existait à ses yeux aucune autre alternative. Alors oui, si aujourd'hui il est isolé du reste de Terrae, il le comprend, mais il a mal.
Mais il y a cette femme, qui sort de nulle part, et qui semble si sincère qu'Ys préfère baisser sa garde.
Une fois la poignée de main échangée, le garçon reprend place au comptoir pour saisir son verre tant désiré. C'est alors que Luna, dénommée Vasconcelos, enchaîne avec une multitude de questions. En vrai, c'est un véritable interrogatoire, ce à quoi l'ancien Master ne manque pas de relever avant de tremper ses lèvres.

"Tu penses à respirer quand même?!"

Elle déborde trop d'énergie cette fille, une mince affaire quand l'interlocuteur d'en face est molassant. Ceci dit, l'une de ses dernières questions pique. C'est sûr, étant donné qu'elle n'est pas Master, elle ne peut pas le ressentir. Mais Ys n'est désormais qu'un simple humain insignifiant, errant au milieu des dieux.

"Non, je n'ai plus de pouvoir."

Après cet aveu, il prend une gorgé d'alcool. Ah oui, c'est serré!
Une légère grimace lui échappe tandis qu'il reprend en reposant lourdement son verre sur le comptoir.

"Je confirme, y' a trop de choses qui ont changé. Alors comme ça, c'est toi qui gère cet endroit? J'ai cru un instant que c'était Ipiu."

Avec cet écriteau, il pensait que l'auteur de la décoration était une vielle amie. LOL depuis quand Ipiu a un gout pour la décoration intérieur? En trois sans, énormément de choses peuvent changées mais quand même à ce point.... Trois ans. C'st long et pourtant durant leur périple, le temps leur avait semblé comme suspendu.

"C'est assez original ici..."

__–Oui, bon, j’avoue, je suis un peu enthousiaste. Un peu.
__–Plus de pouvoirs, donc. Hm, c’est emmerdant. Enfin, qu’on se comprenne. C’est une punition largement méritée, donc je ne vais pas lui dire oh non mon pauvre, c’est pas très gentil, parce que, à bien des égards, on pourrait trouver ça presque trop gentil. Est-ce qu’on a laissé une seconde chance à Ys, ou est-ce qu’il est ici parce qu’il en sait trop et que c’est le seul moyen de le retenir dans un endroit à portée des masters ? Quelque chose me dit qu’il est moins de retour à la maison qu’en prison… Mais passons.
__–Si je dis que c’est emmerdant, c’est que je comptais un peu sur sa magie pour faire fonctionner un petit cadeau que j’ai pour lui. Enfin, avec quelques bricolages, on devrait se démerder. Avec des batteries de téléphone, par exemple. Je vois assez bien le système. Il faut que j’y réfléchisse.
__–« Ipiu ? Oooooh non. Elle est bibliothécaire, maintenant – si elle l’était pas déjà à ton époque. Si elle est sur ce tableau, c’est justement parce qu’elle a un peu abusé sur les consos. Pour leur propre protection, certaines personnes sont interdites de boissons alcoolisées. »
__–Et toi aussi, si tu fais pas gaffe, mon pote.
__–« Mais ouais, tu sais ce que c’est : je me fais recruter comme serveuse un jour, l’ancien patron se taille, je récupère l’affaire, engage du personnel… Et voilà. Puis comme tout Terre qui se respecte, je transforme tous les coins où je vais en jungle. Tiens, d’ailleurs, ‘faut que tu me goûtes un truc. »
__–Je file en arrière-boutique et reviens avec une petite bouteille de blonde, avec pour seule étiquette un post-it qui dit, cerveja Terrae.
__–« Tiens, essaye ! Tu seras le premier à pouvoir la goûter. La première bière brassée ici, avec des machines à cristaux Eau et Feu. C’est encore au stade du test, on en apprend tous les jours, on essaye… Dans quelques mois, j’espère, ce sera bon pour l’exportation ! »
__–Pour le moment, ça ressemble à une blonde assez classique, légère, mais pas dégueu, assez proche de la Goudale, pour ceux qui voient. C’était déjà un exploit en soi d’arriver à faire un truc buvable, pour nous qui n’y connaissons absolument que dalle. Ce sont l’étiquette et la provenance qui vont faire tout l’argument de vente, concrètement.
__–« Et… »
__–Je vous jure, je vous JURE, c’est pas tendancieux.
__–« J’ai un autre petit truc pour toi. J’y ai pensé dès que je t’ai vu entrer. Mais il faudrait que tu me laisses prendre tes mesures. T’en voudrais un comme ça ? »
__–Je lui montre mon bras robot-plante.

__–Je note qu’il a des sous. C’est vrai qu’on dirait pas, comme ça. Ce sera plus facile de lui faire remonter la pente, parce que trouver un taf quand on est un pestiféré… bonjour, quoi. Et je sais de quoi je parle. À Manaus… Enfin c’est pas le sujet.
__–« Oh, t’inquiètes, ce ne sera pas utile. La règle, c’est juste que si je dois t’emmener à l’hosto parce que t’avais envie de te tuer avec mes produits ou que t’es trop con pour boire de façon responsable, tu reviens plus chez moi avant un boooon bout de temps. »

__–Je souris à sa plaisanterie. Pas envie de dire à voix haute « c’est ça, personne m’en voudra si tu meurs empoisonné », même si c’est exactement mon genre d’humour, parce que, pour le coup… c’est vrai. Du coup, c’est pas drôle.
__–Et on passe aux choses vraiment sérieuses. Je reprends ma tête d’Alice ; calme, posée, douce.
__–« Hm, t’as raison, c’est important d’avoir quelques éléments de contexte. Effectivement, je n’ai que quelques détails, ce qui m’ennuie un peu, on ne va pas se mentir, j’aimerais bien en savoir plus. En fait, tout ce que j’ai comme infos sur toi, comme les masters refusent de communiquer quoi que ce soit, ça me vient de Pricie. Qui est d’ailleurs la raison pour laquelle, désolé mon pote, mais tu ne pourras jamais passer chez moi, parce qu’elle y vit. C’est… en quelques sortes ma petite sœur, maintenant. Elle m’a raconté ce que tu lui as fait. J’ai cru comprendre pas mal de choses, sur des meurtres, des attentats, En recoupant des vieux articles sur des attentats inexpliqués un peu partout dans le monde et ce qu’elle m’a dit sur les Karasus, je crois avoir compris une partie de l’histoire, mais il me manque encore de gros éléments. »
__–Si si, je vous assure, je suis en mode gentille et tout, là. Hé, j’aime bien quand on tue des ennemis de Terrae, je vous rappelle. Enfin, ça ne me dérange pas foncièrement, en tout cas.
__–« Donc, a priori, je devrais être une des personnes qui te déteste le plus dans cet Institut, hmm ? Mais, sérieux. Y’a déjà trop de gens qui doivent de détester comme ça. T’as dû perdre bien assez de tes amis. Hé. Tu mérites une punition, pas l’Enfer. Et, finalement, qu’est-ce que ça peut me faire, qui tu es ? Je vois quelqu’un avec un bras en moins, je suis une des seules fabricantes de prothèses de l’Institut… Avec Mitsuki. Et Nico. Mais du coup, non. Voilà, y’a pas à transiger longtemps. T’es à Terrae, non ? T’es là pour aller mieux. Et normalement, on est là pour s’entraider. On est une communauté qui se soutient. »
__–Si j’ai bien suivi, c’est justement le fait qu’il ait pas très bien intégré la notion, qui l’a poussé à partir faire cavalier seul. Donc, assez logiquement en fait, quelle meilleure manière de lui faire comprendre sa leçon, que de lui montrer qu’on prend soin les uns des autres et que ça ne sert à rien de faire son héros solitaire ?
__–« Bon alors, elle t’a plu ma bière ? »

__–Vous savez, il y a une partie de ma vie que je masque très bien. Et à tout le monde. J’ai été. Asseyez-vous. Fan de boys-band. Ouais je sais ça surprend. Il faut imaginer Miniluna, dix ans, qui s’éclate sur les Br’oZ passés à fond depuis notre vieille radio qui lisait des CD (qu’on achetait pas, on les obtenait), que nous avait offert papy. Et pourquoi je vous parle de ça, en fait ? Parce que, comme ça, vous avez une petite idée de ce que j’ai ressenti, quand seize ans plus tard, un beau ténébreux ayant commis beaucoup de crimes de guerre dit à une faucon comme moi qu’il me trouve « déstabilisante ». Alors, je suis plus une gamine, je vais pas faire « hiiiiiiiiii » avec un immense sourire et sautiller partout, mais si un télépathe passe dans le coin, il saura.
__–Non, à la place, j’ai un petit rire.
__–« T’as vu, hein. Je suis super confiante sur le succès de ce projet. »
__–Bref, parlons d’autre chose.
__–« Oh, comme je t’ai dit, vraiment pas loin après ton départ, en juin 2020. Quand je te dis qu’on s’est croisés… Et oui j’en ai, ma mère et mon père, à Manaus et mon grand-père, à Fortaleza, au Brésil tous les trois. Il a un garage et elle y fait la compta et tout l’administratif. Mon grand-père, Marcos, se père de ma mère, il… il a eu une vie mouvementée. C’est lui, là. »
__–Je lui montre une photo, juste au-dessus de celle avec Tiago, Mitsuki et moi, en tenues de combat, prêts à partir en Namibie – où on peut le voir avec son escouade. La date : 1945. Le lieu : Turin.
__–« La pomme est pas tombée très loin de l’arbre. Bon et toi, alors ? Raconte. »
__–Ce qui est bien, c’est que ça vaut autant sur, raconte-moi ce que t’a fait qui, à mes yeux, mérite que je t’offre un bras, ou raconte à quoi ressemble ta famille. C’est auquel des deux sujets est le moins difficile, quoi. Ou autre chose. Je suis pas difficile.

__–Ah ah ah ah… ah.
__–« La résistance ? Non. Enfin… Si, mais après. Il s’est engagé dans l’armée brésilienne à quinze piges, en trichant sur son âge. Et puis, comme il te dirait lui-même, il a jamais su s’arrêter, de tuer des fascistes. Je te fais pas toute l’histoire du Brésil dans ces années, mais on est passé d’une dictature à un coup d’État militaire à un autre coup d’État militaire…Donc, ouais, jusqu’à la fin des années 80, c’était un peu mouvementé. Et puis, c’était la Guerre froide. Pas étonnant, que papy parle un peu de russe. »
__–Et d’accord, orphelin, papa connard, je vois ouais. Par contre, réputé… Ochikawa ça me dit rien… Après, je connais pas trop le milieu, vous me direz.
__–« Il tient quelles boîtes, ton daron ? Que je sache quoi ne pas acheter. »
__–Le début de l’histoire est peut-être franchement triste, mais la fin est pire. S’il s’est barré de chez sa famille pour arriver ici, puis de chez Terrae, ça fait deux fois qu’il perd son foyer, j’imagine. C’est chaud. Ça pue un peu. Ouais. Puis, c’est carrément pas à moi de lui dire un truc du genre, bienvenue à la maison.
__–Mais bon ! On tourne autour du pot, là.
__–« Bon sinon, je comprendrais que t’as pas envie d’en parler hein, y’a pas de problèmes, mais là si tu veux, je serais super curieuse que tu me racontes un peu. On peut pas vraiment faire confiance aux autres masters – parce que oui, techniquement il en est toujours un, déso pas déso – pour partager ce genre d’infos, alors… »
__–Je veux bien qu’ils aient leurs raisons, mais je trouve ça pas cool. Notre ami Ys, là, ça a quand-même été le plus gros critique de leur politique. Et quelque chose me dit que c’est pas pour des mauvaises raisons. Alors, sans faire le fou, tabasser des gens, torturer des gamins et se lancer dans des attentats terroristes… ce serait bien d’avoir son avis, son point de vue. Qu’il y ait des raisons légitimes de le punir pour ses actes, ok. Pour foutre toute cette histoire sous le tapis et faire comme si rien ne s’était passé, qu’il n’y a jamais eu aucun problème dans la gestion de crise à Terrae, que tout est géré impec et qu’il n’y a aucune raison d’avoir des doutes, peut-être pas.
__–Hé, si les masters apprennent pas leur leçon, des Ys, ils en auront d’autre, c’est inévitable.