Le parc Nara : un endroit où des cerfs se baladaient librement. Lorsque Bito l'avait mentionné, je lui avais demandé si ça existait réellement. J'ignorais qu'un tel endroit existait ! Il m'avait ensuite invité à y aller avec lui pour y faire un pique-nique, explorer le reste de la ville et pour conclure, aller admirer ensemble une pluie d'étoiles filantes. Oh my, tu parles d'un rendez-vous parfait ! Je l'avais aussitôt embrassé en guise de réponse.

Sortir de Terrae n'était pas dans mes habitudes. Je ne parlais pas japonais, donc ça compliquait les choses. Savoir dire « bonjour », « idiot », « attends », « excuse-moi » et tous termes communs qui étaient souvent répétés dans les animes n'allait pas me permettre de tenir des conversations. Mais là, comme j'étais accompagnée de mon petit ami dont le japonais était la langue maternelle, ce ne serait pas un problème !

Près de deux semaines passèrent (qui parurent bien plus longues) avant que le jour de notre excursion arrive. Pour l'occasion, je m'étais vêtue d'une robe rose mi-longue aux manches bouffantes et de divers bijoux assortis. Je rejoignis Bito à sa chambre et nous nous rendîmes à la gare pour prendre le train. Nous avions trois heures de route devant nous, ce qui n'était pas si mal. Je discutai avec Bito et m'émerveillai devant les paysages qui m'étaient inconnus à travers la fenêtre.

Une fois arrivés à la station de Nara, je saisis le panier à pique-nique en osier et nous sortîmes du train. Plusieurs regards se posèrent sur moi. L'habitude. Je fis un petit coucou à une fillette qui me fixait et elle fit de même. Puis, je pivotai vers Bito.

— Nous y voilà ! Tu ouvres la marche, mon guide ? demandai-je en prenant sa main.

Mon sourire s'élargit en voyant la réaction de Bito. Ce qu'il pouvait être adorable. Main dans la main, je le suivis au travers de la gare. Mes yeux s'affairaient aux alentours, curieux, même s'il n'y avait rien de si intéressant. Le parc allait certainement être plus excitant : j'avais hâte d'y être. Selon Bito, cela n'allait nous prendre que peu de temps avant de parvenir à notre destination.

Effectivement, après une courte marche, nous arrivâmes au parc. Émerveillée, je fis mon premier pas sur le chemin pavé. Il y avait des arbres à perte de vue. Un énorme temple se dressait au bout du pavé. Je pus aussi apercevoir un pont et quelques autres bâtiments à l'architecture typiquement japonaise. Et puis, bien entendu, des cerfs étaient éparpillés partout dans ce superbe paysage.

— Wooow, c'est magnifique !

J'avais juste envie de courir vers les cerfs pour aller les caresser. Mais j'utilisais mon bon sens et conclut que c'était une mauvaise idée. Bito m'entraîna à une boutique et dit qu'on pouvait acheter des biscuits pour les donner aux cerfs. Une fois acquéris, il m'expliqua la méthode à utiliser.

— Il va hocher la tête ?!

Talented, brilliant, incredible, amazing, show stopping, spectacular. Une minute, s'il ne hochait pas la tête, je faisais quoi ? Est-ce que ça signifiait qu'il me rejetait ? Noooooon !! Ça ne pouvait pas arriver.

— J'y vais. Souhaite-moi bonne chance !

Je laissai le panier de pique-nique à mon petit ami et m'avançai doucement vers un groupe de cerfs. Je me mis face à face au premier dont je croisai le regard. Puis, je levai le bras et attendit. Après quelques secondes, il hocha la tête et mon visage s'illumina. Je lui tendis la nourriture et il commença à manger dans ma main. Je tournai la tête vers Bito et déclara d'une petite voix :

— J'me sens comme une princesse Disney.

Bito ricana à l'entente de ma remarque. J'admirai son visage et me mit à rire moi aussi. J'adorais son rire. Ça me faisait quelque chose à l'intérieur. Je me sentais légère et remplit de joie par le moment présent. Alors que je l'observais amoureusement, il prit parole.

— Mais je cause déjà avec les souris Bito !!! plaisantai-je.

Puis, un cerf s'approcha de lui et approcha son visage du panier de pique-nique, sûrement pour pouvoir mieux inspecter l'odeur de son contenu. Le japonais leva le panier et le réprimanda un peu avant de lui offrir un biscuit. Ce fut à mon tour de sortir mon téléphone et de prendre une photo. Une fois que l'animal eut terminé sa gaterie, Bito me demanda si j'avais une préférence pour la suite.

— J'ai faim ! Mangeons avant.

Mon regard partit à la recherche d'un bon spot. L'idéal serait sous un arbre suffisamment éloigné des cerfs et des autres visiteurs du parc.

— Là !

Je pris Bito par la main et le menai jusqu'à l'endroit parfait. Je sortis ensuite la nappe du panier et la posai sur le sol. Alors qu'il s'apprêtait à s'asseoir, je le stoppai.

— Attends ! Faut faire un truc super important avant, dis-je, amusée.

Je l'attirai contre moi et l'embrassai.

Ça m'arrivait de l'embrasser à des moments randoms comme celui-ci. Si ça me passait par la tête et que j'avais envie de le faire, alors pourquoi pas ? J'avais manqué d'amour pendant longtemps. La romance avait toujours été l'un de mes sujets favoris. Et pendant toute mon adolescence et le début de ma vie d'adulte, je m'étais contentée de regarder les histoires d'amour des autres. De peur que, si j'en vivais une, ça n'en vale pas la peine comparé à la souffrance que ça me causerait si ça virait mal.

Il fut d'abord surpris : il ne s'attendait pas à mon attaque furtive. On s'embrassa pendant un moment. Il posa sa main sur ma joue et je fondis de l'intérieur. Puis, on sépara nos lèvres et on se fixa pendant quelques secondes, souriant bêtement.

Soudain, nos ventres s'agitèrent en même temps. Woah, la synchro de dingue ! C'était quoi les chances que ça arrive ? Je ris doucement et je m'installai sur la nappe. Bito sortit des chips ainsi qu'une boîte dont il dévoila fièrement le contenu. Je mis mes paumes l'une contre l'autre, les yeux brillants.

— Oooh !

C'était trop mignon ! Des onigris-chats ! En plus, ils avaient tous leurs propres expressions. Le japonais me demanda ce que moi, j'avais préparé.

— Oh, moi c'est pas aussi cool que toi hein, m'exclamai-je en me grattant la joue d'un doigt, un peu embarrassée.

J'ouvris le panier et sortit deux plats à lunch. L'un d'eux contenait des sandwichs au poulet coupés en triangle et l'autre une petite salade de pâtes aux légumes crémeuse. J'ouvris les contenants.

— C'est assez simple. Tu sais qu'en cuisine, tu me bats de loin.

Bon, j'avais super faim moi ! Je pris d'abord un onigri. Je me sentais presque mal de le manger.

— Pardonne-moi petit chanigri.

Et je pris une première bouchée.

Trop booon. Je me régalais de ce que Bito avait préparé. Mes sandwichs étaient bons, standards. Quant à ma salade de pâtes, ce n'était rien de complexe, mais je n'en avais jamais fait avant, et elle était bien réussie ! Malgré que je ne sois pas à son niveau, Bito avait l'air enthousiaste de manger mon mets. Il déclara même que c'était le meilleur pique-nique qu'il avait mangé de toute sa vie. Quel flatteur !

— Pwahahah, n'importe quoi !

Nous mangeâmes tranquillement tout en discutant et en faisant des pauses bisous (). Entre autres, j'appris qu'il s'était déjà retrouvé enfermé dans un placard avec Ys, et moi, je lui racontai l'histoire de ma rencontre avec Elisha : elle était débarquée bourrée chez moi, je lui avais fait croire que j'étais une vraie elfe et que je pouvais produire de l'eau magique, puis on avait dansé. Drôle de soirée. Putain, elle me manquait.

Ensuite, on continua de parler de mes relations.

— Senri ? Ouais, on se voit au club d'arts martiaux, et parfois on se parle quand on se croise, mais on est pas amis. En même temps, c'est le némésis de Tiago.

Et là, je crus comprendre que le colombien n'inspirait pas confiance à Bito. Il déclara qu'il avait entendu qu'il vendait de la drogue et de le prévenir s'il me proposait des « trucs bizarres ». Hahahah... Bon, euh... En plus, il continua, et je crus pendant un instant qu'il allait dire qu'il le tabasserait. Ce qui m'aurait étonné, mais sa tournure de phrase semblait mener à ça.

Humph. Je n'étais pas certaine de comment il allait réagir si je lui avouais ça. Toutefois, je n'avais pas envie de le cacher. Le sujet n'avait jamais été mis sur la table, donc je ne lui avais pas dit, mais là...

— Hehehe... J'ai une confession. En fait, ça m'est déjà arrivé de fumer de l'herbe avec lui. J'étais 100% d'accord hein, il m'a pas forcé. Faut pas t'inquiéter, je le connais depuis quelques années maintenant, il est mon ami et c'est un type bien au fond.

Ouais, moi, je fume. MAIS À L'OCCASION. TRÈS PEU. Hahahah. Oh putain. Il ne disait plus rien et il me fixait intensément. Est-ce que je venais de briser son image de moi ? Bon, il fallait bien qu'il sache que malgré mon air sage, j'étais pas si sage que ça. Je n'avais nullement l'intention de redevenir aussi coincée qu'avant ! Ma vie d'avant était nulle parce que j'étais nulle.

Je souris nerveusement. Il était temps qu'il réponde quelque chose là. Il ouvrit finalement la bouche et ses mots furent un soulagement. Pfffiou.

— Ah, moi non plus ! C'est super rare.

Devenir addicte ? Non merci. Pas intéressée. Du. Tout. Bito me tendit le sac de chips et je ris à son commentaire. Je comprenais ce sentiment. Ça et le popcorn, c'était difficile de s'arrêter. Je pris le paquet et commençai à manger des croustilles à mon tour. On finit de manger et on rangea la nappe et ce qui restait. Soudain, j'eus un flash.

— Ça te dérange si je fais une petite vidéo pour Tik Tok ? Avec ce paysage et les cerfs en arrière, ça va être chouette ! lui demandai-je. Une fois que j'eus son ok, j'ajoutai : Tu peux filmer ?

Je me levai et attendit le go de mon petit ami. Puis, je tournai sur moi-même (avec une robe, c'est obligé) et une fois de nouveau face à la caméra, je pris une pose mignonne, une jambe en l'air. Je m'approchai de mon petit ami et reprit mon téléphone.

— Merciii ! J'vais mettre ça en slow-mo et ajouter une chanson cute et mes abonnés vont adorer ! déclarai-je tout en m'assurant que la prise était bonne.

Elle l'était, wouhou !

— On va au temple maintenant ?

Les slow-mos, tout le monde en raffolait. Ça pouvait ajouter un effet cool, dramatique ou apaisant à n'importe quelle séquence. En fait, utilisés correctement, ils pouvaient quasiment tout faire ! J'en utilisais régulièrement dans mes vidéos. À ma mention, Bito eut l'idée d'utiliser l'effet pour une vidéo de recette.

— Carrément ! Et tu pourrais faire des gros plans comme dans les pubs de bouffe.

Puis, le japonais prit ma main et un doux sourire s'étira sur mes lèvres à sa caresse. Nous partîmes en direction du temple tout en admirant le paysage. Nous fîmes la rencontre d'autres cerfs et je pris quelques selfies avec mon petit ami quand l'arrière-plan en valait le coup.

Plus on se rapprochait, plus je me rendais compte de l'immensité du temple. Avant d'y arriver, nous devions passer par une arche japonaise. Je n'avais jamais su à quoi ça servait. Bito s'exclama qu'il s'agissait d'un portail vers le monde spirituel. Oooh. Il m'« avertit » que si je le traversais, les esprits ne me laisseraient probablement pas partir à cause de ma beauté.

— Quoi ?! Tu m'as emmené à un endroit aussi dangereux ? Oh la la, j'ai trop peur, déclarai-je en faisant semblant d'être effrayée.

J'utilisai mes deux bras pour prendre l'un des siens, me cramponnant à lui.

— Tu vas me protéger, n'est-ce pas ? demandai-je en le regardant avec des yeux de biche.

Parfois, c'est drôle de jouer la demoiselle en détresse.

Pfff. La tête de Bito était trop marrante. Son rire aussi. Quelque me disait que sentir ma poitrine contre son bras était loin de lui déplaire. À ma demande, il répondit qu'il allait effectivement me protéger, tout en m'appelant « ma poulette ». Ce n'était pas le meilleur petit nom, mais je voulais bien lui pardonner. Il était distrait.

Après s'être à peu près remis les idées en place, il m'expliqua plus en détails ce que représentait l'arche qui se tenait devant nous. J'appris que, en japonais, ça s'appelait un « Torii ». Il ajouta qu'au final, ce n'était pas bien compliqué, et fit un lapsus à la fin de sa phrase. Il se reprit rapidemment en se rendant compte de son erreur. Je ne pus m'empêcher de lâcher un rire.

— Hihihi. Merci pour les explications, mon poulet. Allons-y !

Comme la position dans laquelle je me trouvai présentement n'était pas idéale pour marcher, je lâchai son bras et prit sa main dans la mienne à la place. On passa à travers le portail et continua notre chemin jusqu'au temple. Quand on arriva à la base de l'escalier qui menait à l'entrée, je levai les yeux, impressionnée par la taille et la beauté du bâtiment.

— Woaaah, c'est énooorme.

Puis, on monta l'escalier et on entra à l'intérieur. Je fus également admirative en le voyant, avec ses grandes colonnes de bois rouges et... son Bouddha géant ?!

— Énorme !

Je n'avais apparemment que ce mot à la bouche.