__–L’anniversaire de Lola.
__–Pour Aylan, la première fois qu’il pouvait le fêter, disons… proprement.

__–Il n’avait eu que deux occasions, auparavant. Lors de la première, ils ne s’étaient rencontrés que depuis quelques mois et stationnaient dans une base du Centre en Sibérie. Même si on était au cœur de l’été, il faisait à peine dix degrés. Pendant toute la semaine, Aylan avait échafaudé un plan pour braver le couvre-feu, rester à l’extérieur du blockhaus souterrain lors de la tombée de la nuit, puis rentrer sans se faire remarquer, pour éviter toute punition. Lola n’était alors qu’une nouvelle arrivante, qui s’était certes déjà faite remarquer pour sa force physique, mais qui restait perdue, dans cet environnement extrêmement hostile.
__–Il lui avait permis de voire une aurore boréale.

__–Lors de la seconde, ils étaient cette fois en plein désert du Sahara. Philippus, qui connaissait bien sûr la date, avait décidé au dernier moment d’envoyer l’escouade Villa faire un exercice sur le terrain. La nouvelle avait été reçue par Aylan comme un vrai coup du sort : il avait là aussi prévu quelque chose, qui supposait qu’ils auraient bien eu droit à leur petit moment de temps libre, qui était prévu dans l’emploi du temps. Cet exercice devait être particulièrement pénible, en plus, vu qui consistait en devoir transporter une lourde caisse en métal sur plusieurs kilomètres, avec des adultes qui tendraient des embuscades.
__–Cela dit, une fois que les cinq gamins furent débarqués au milieu des dunes, le petit Air eut la surprise de trouver un mot dans sa poche, qui portait l’écriture de son instructeur, lui indiquant d’ouvrir la caisse. Et, à la place des pierres qui devaient simuler le poids de l’équipement à l’intérieur, un gâteau d’anniversaire. (Liz était dans le coup depuis le début, évidemment.) (Il y avait aussi un diable repliable pour la transporter plus facilement et un plan de la région pour éviter les ennemis. Ça aussi, c’était une idée de Liz.)

__–Alors, certes, c’était la première fois qu’Aylan pouvait fêter l’anniversaire de Lola dans un contexte plus… normal, autant que pouvait l’être Terrae. Aylan s’en était longuement torturé l’esprit. Il avait à sa disposition des moyens inégalés, pour faire des treize ans de son aimée une célébration exceptionnelle. Le vertige de fêter à la fois son anniversaire et leur liberté retrouvée était immense. Il pensait à acheter – ou fabriquer – des feux d’artifice, demander à Luna de lui prêter la salle du bar, répartissait dans son carnet d’adresse qui pourrait servir à quoi, à qui il pourrait demander des services… Et puis, après avoir passé une nuit blanche à réfléchir, élaboré des plans – principalement parce qu’il s’angoissait tellement à cette idée qu’il n’avait pas réussi à dormir –, il était arrivé à une conclusion qui avait fini par enfin l’apaiser.
__–Peut-être qu’un anniversaire normal, ce serait bien. Quelque chose avec ses amis et sa mère, un goûter, des cadeaux emballés dans du papier coloré, une chanson ridicule mais qu’on aimait autant chanter qu’écouter, des bougies. Peut-être que plus que tout, c’était de cela dont Lola avait besoin, elle qui n’était pas tout à fait sortie de son mode d’urgence, qui ne pensait qu’à préparer la suite de l’offensive, qui ne voyait Terrae que comme une étape et non une destination pour eux tous ; là où vivre sa vie, où y apprécier une certaine banalité. tranquille.
__–Plus il y pensait, plus il aimait l’idée. Et puis. Après un moment – qu’il espérait joyeux plutôt que tendu – avec Ariana, sans oublier Miguel, ils pourraient… s’éclipser. Se trouver un instant à eux. Admirer le coucher du Soleil sur le mont Fuji depuis le toit. Se prendre dans les bras. Se dire des choses. Ou ne rien se dire.

__–Alors il avait préparé cela, avec Ariana. Ils avaient cuisiné ensemble un moelleux aux pistaches, découpé des lettres dans du papier coloré pour en faire une guirlande – Lola détesterait autant qu’elle serait touchée –, s’étaient donnés avec Miguel des idées sur quoi lui offrir et avaient gardé le secret. Le jour J, Aylan lui avait envoyé un message pour qu’ils se retrouvent dehors, sortent un peu, aillent traîner dans le village, jouer à la salle d’arcade, s’amuser un peu avec leurs pouvoirs.
__–Lola se doutait de quelque chose, évidemment. C’était d’Aylan, dont on parlait ; il n’esquivait un sujet que pour ménager son effet, jamais pour le fuir. Mais, elle se prit au jeu.
Pendant ce temps, ses deux compères avaient investi la chambre de Lola et tout installé, pour qu’elle ait la surprise à son retour.
__–Et bien sûr, il lui avait offert un cadeau. Quand il l’avait vu passer, il y a des mois de cela, il l’avait tout de suite commandé.

Le cadeau :

Nous avons assez développé sur l’état d’esprit de Lola au réveil de sa journée d’anniversaire ; pourtant, à bien des égards, la visite pas si impromptue que cela d’Ariana en début de matinée a réussi à lui remonter le moral. Lola en a ensuite profité pour rejoindre son petit Air, profitant de leur petit-déjeuner ensemble ; elle peut lire en lui son enthousiasme et sa joie pour la journée à venir, et cela l’emplit elle aussi de ravissement. Il ne lui faut jamais beaucoup pour l’occuper, mais passer du temps avec Aylan, est certainement la définition d’une excellente journée. D’autant plus qu’elle a pu découvrir le monde de la salle d’arcades — elle avait pour habitude de regarder Aylan jouer dans sa chambre, quand ils ne faisaient pas quelques parties en multi joueur — et faire des bêtises dans les espaces verts. Et alors qu’elle roule dans l’herbe avec lui, après quelques chamailleries, les cheveux pleins de brindilles, elle sent ses éclats qui rire qui se libèrent.

Mains dans la mains, ils reviennent jusqu’à l’institut, où elle imaginait déjà ce qui a pu se prévoir. Des guirlandes ! Et un gâteau. C’est une fête minuscule, mais qui la remplit encore plus bruyamment de bonheur. Elle échange quelques rires de plus, plus discrets ; et, les joues rosies alors qu’on lui chante son anniversaire, elle aimerait se cacher derrière le gâteau qu’on lui a posé devant elle.

Lorsqu’elle souffle ses bougies, Lola sait déjà quel voeu faire ; mais hélas pour vous, c’est un grand secret qu’elle garde au fond du coeur.

Et ce sticker pour veste… lorsqu’elle le découvre, elle a presque les larmes aux yeux, mais elle est bien trop fière pour le montrer. C’est d’un baiser sur le nez qu’elle remercie Aylan, et d’un câlin pour Miguel. Pour Ariana, ce sera un autre sourire, et les yeux dans les yeux, cette fois.

Et pour plaisanter, elle lâche :

—Tu sais… même les fleurs sont très fortes. Elles résistent parfois à des climats très difficiles.

Enfin, Lola, elle reste quand même une sacrée bombe à retardement, alors, elle l’accepte aisément. Tenant l’objet tout contre son cœur, elle se sent rassurée. On ne lui demandera jamais d’être forte, ici.

Et c’est très bien comme ça.