Ne me demandez pas ce que je fais. Ne me demandez surtout pas ce que je suis en train de faire. Aujourd'hui, c'était un des seuls jours où je n'avais pas cours à 8h du matin... Alors vous vous dites sans aucun doute : « D'accord, t'as fait une grasse mat' et t'es encore vautré sur ton lit, mais encore ? »... EH BAH NON ! Tout faux ! Ahah ! J'vous ai butéééé ! … Enfin bref.
J'étais assis à mon bureau, des tonnes de papiers éparpillés dessus ainsi que dans tout l'appartement, à vrai dire. Certains de ces papiers concernaient des rapports de mission, des renseignements sur les activités des scientifiques partout dans le monde, d'autres étaient remplis de formules dont je ne vous expliquerais même pas la teneur, étant donné que vous ne comprendriez de toute manière absolument rien à mon charabia excessif. Il faut avouer que je réservai ces sublimes calculs à mes trèèèès chers élèves, histoire de leur montrer un peu ce que c'est que des maths ! Juste pour rigoler et voir leur visage blêmir d'une façon aussi amusante qu'exquise. Je rigole, je rigole.
Enfin bref, je reprends. J'étais assis à mon bureau et je planchai avec une assiduité évidente sur ces bouts de papiers froissés, et-... Quoi ? Quoi quoi quoi ? Roooh ! Bon, ok, ok ! J'étais assis à mon bureau, étalé de tout mon long sur mes notes. J'ai le DROIT de prendre une pause ! Mon cerveau en a besoin, d'abord ! C'est à cause de personnes comme vous que des génies finissent par devenir fous ! Ouais, je suis un génie, et je vous emmerde tous ! Vous connaissez quelqu'un d'autre qui serait capable de résoudre tous ces problèmes, heiiiiiiin ?! Eh bah nooon ! Ah ah ! Et puis bim. Et puis toc. Peufeuteuh.
SOUDAIN ! … Mon téléphone sonna. Ouais, bon, c'est pas extraordinaire, mais bon... J'me suis tellement effrayé que j'ai failli basculer en arrière (Et que ma tasse de café s'est brisée sur le sol. Elle était pleine.) ! Attrapant vivement l'appareil, il affichait un numéro que je ne connaissais ni d'Adam ni d'Ève.

- Allo ?

Un court silence.

- … Allo ?...

… Hein ? Nan mais mais mais...

- Mais je rêve ? C'est moi ou cet abruti a raccroché ?! Mais quel espèce de chieur ! Déjà qu'il appelle, il pourrait au moins avoir la politesse de...

Oui, oui, oui, je m'énerve pour de la merde, je sais. C'est pas grave. Calme, zen. Respire, Aaron ! Respire ! Fiouuuuuuuuu...
Me levant en soupirant d'agacement, je ramassai les bouts de porcelaine éparpillés sur le sol, les jetai à la poubelle et allai chercher du papier absorbant ainsi qu'une éponge. Oui, j'ai la flemme de chercher une serpillère, ça te dérange ? Et NON je ne passerais pas l'aspirateur. J'ai plus d'aspirateur, c'est carrément devenu un « aspiratueur ». Il a essayé de m'aspirer les cheveux la dernière fois, sérieux. Enfin, après avoir tenté de m'étrangler, hein. Du coup, il est en petits morceaux dans un carton hermétiquement fermé, que j'enverrai bientôt à la casse. Je tiens à ma vie ! Déjà que je dois supporter mon portable qui m'envoie des coups de jus, mon ordinateur qui me marque n'importe quoi dans les dossiers avant de les envoyer à la Directrice, ma lampe de chevet qui essaie de m'étrangler (et c'est la quatrième fois que j'en change en plus !), mon micro-onde qui fait exploser tout ce que je mets dedans et qui ouvre sa porte juste quand je passe à sa hauteur (histoire que je me le prenne bien dans la gueule), mon chauffage qui prend un malin plaisir à se mettre à fond en été et au minimum en hiver... Vous imaginez un peu ce que je subis chaque jours ?!
Je me rassis ensuite, reprenant ma place initiale. Je veux dormir, fichez-moi la paix !
Obtenant un ronronnement insolent de la part de mon ordinateur, lequel ouvrit word pour me noter quelque chose que je ne pris pas la peine de lire, quelqu'un sonna à la porte. Grognant en essayant de me déplacer une nouvelle fois dans l'appartement en désordre, j'arrivais (en vie) jusqu'à la porte d'entrée que j'ouvris immédiatement pour voir mon visiteur.

- Oooh ! Mitsuki-chan, bonjour ! Que me vaut le plaisir de ta visite ? la saluai-je en souriant légèrement.

J'observai le chat, qui me lançai un regard que je qualifierais moi-même de carrément mauvais. J'avais déjà dit que j'avais peur des chats ?... Non ?... Bah maintenant vous le savez. Ils ont le même regard qu'Hideko. J'ai peur, là. J'ai vraiment, vraiment peur. Éloignez cette chose de moi avant qu'elle me bouffe ! J'vous en suppliiiiie ! En plus, c'est tout plein de poils et et eeeeeeet... Et ça a des griffes et des dents, quoi !

Alors qu'elle me déposait le chat dans les bras, et qu'il hurlait son indignation en manquant de me mutiler le visage, je le lâchai presque immédiatement, reculant d'un pas.

- Euh... Non, nonononononononooooon, c'est absolument pas mon chat, ris-je TRES nerveusement, observant le chat qui... Qui venait d'entrer dans mon appartement ? Heyyyy, mais ressort de là, toi ! T'es pas chez toi !

Soufflant, exaspéré, je reportai mon attention sur la jeune fille.

- En tout cas, c'est quand même sympa, même si c'est pas mon... Enfin bref.

Pourquoi est-ce qu'elle s'est tout de suite dit que ce chat était à moi ? Je déteste les chats ! C'est méchant, pas beau, violent, ça empiète sur ton territoire (la preuuuuve !) et... Enfin bref. En plus, ce truc doit appartenir à quelqu'un d'autre, quelqu'un d'autre qui aiiiiime les animaux, et plus particulièrement les chats ! Comment je sais ça ? Mais je le sais paaaaas, ça coule juste de source ! Purée !
Puis, alors qu'elle me parlait de mon dernier cours de maths, je croisai les bras, réfléchissant. Mon dernier cours, mon dernier cours... C'était quoi, mon dernier cours, déjà ? J'étais pas attentif, m'sieur, d'solay ! Comment ça, c'est moi le prof et c'est pas possible que j'aie pas été attentif ? Mais j'vous emmerde, je le sais, ça ! Je me souviens juste plus, rohlala, qu'est-ce que vous v'nez encore me faire iech ?! Ouais, je me mets à parler en mode caillera, ça vous dérange ?
Heurm...
Nous disions donc ?

- Euh... Quel cours, déjà ?

Merde, c'est pas ce que je voulais dire ! Enfin, si, mais euh... Tourné différemment, que ça fasse moins... « Ah, ouais, j'vois aaaaaaabsolument pas d'quoi tu parles ! », même si c'est en fait carrément ça, mais on s'en tape le cornichon !
Puis, lui faisant un petit sourire, je lui fis ensuite :

- Mais noooon, je déconne ! Enfin presque. Et puis nooon, tu me déranges pas ! J'étais justement en train de m'em-...nuyer prooofondément ! lui répondis-je, me rattrapant vivement sur mon avant-dernier mot. (Me demandez pas pourquoi, c'est comme ça et c'est tout...)

Je penchai légèrement la tête sur le côté, me poussant légèrement pour lui faire de la place.

- Tu veux rentrer ? Ce sera plus simple si tu veux que je t'explique quelque chose. Enfin... Pardon, c'est le bordel...

Mais bon, au moins, j'pourrais virer le chat !... Roooooh, mais ça va, quoi ! Ca fait des mois qu'on est pas venu me rendre visite, alors je fais ce que je veux ! C'est même pas moi qui fout le bordel partout, c'eeeeeest toutes ces machines ! Enfin presque.

C'est pas son chat ? Comment ça c'est pas son chat ?! Et le mensonge, il connait pas ?! Il aurait au moins pu faire semblant ! Il est vraiment naze je trouve. Enfin bon... Aussi pitoyable qu'il puisse être à cet instant -je tiens à dire que c'est magnifique de le voir aussi affolé juste à cause d'un chat- je dus faire des efforts surhumains pour ne pas éclater de rire. Surtout face à sa négation nerveuse, suivie de son rire encore plus nerveux que nerveux !
Puis, après que la bête soit entré sans la maison, il se tourna vers moi, et sembla vouloir changer de sujet. Enfin, j'imagine, vu son "Enfin bref". Souvent, c'est pour résumer une situation et amener à un changement de sujet, nan ? mais siiii roh.
Je l'observai donc, silencieuse, un sourcil levé. Il sembla se plonger dans ses pensées. Quoi ? J'avais une mouche sur le bout du nez et il savait pas comment me l'annoncer ? Fuck !
Je me mis brusquement à loucher, persuadée que j'allais trouver une tâche noire sur mon museau. Bizarre que je l'ai pas senti quand même... Un moucheron peut-être ?
Je sursautai pourtant lorsqu'il me demanda... De quel cours il s'agissait.
Cessant de loucher, je le dévisageai. Je crois même qu'insctinvement, ma tête pencha sur le côté. Il se fout de ma gueule, hein ? Ouiii, oui, c'est obligé...!
Il s'exclama ensuite qu'il... "déconnait", et ajouta que je ne le dérangeais pas, étant donné qu'il était en train de s'em...merder. Oui, pas la peine de se reprendre quoi, c'est bon, j'ai pas 5 ans, pas besoin de censure ! Rahlàlà.

- Tu veux rentrer ? Ce sera plus simple si tu veux que je t'explique quelque chose. Enfin... Pardon, c'est le bordel...

J'écarquillai les yeux. C'est marrant, depuis tout à l'heure, j'avais pas sorti un mot, trop préoccupée par... Les expressions de mon visage. Vous l'avez deviné, je voulais devenir... Mime ! Je serais super quoi... Sûrement la meilleure de tous les mimes du monde ! Je pourrais aller à Londres. Il parait qu'y a plein de mimes là-haut !
Constatant qu'il s'était décalé pour me laisser entrer, je ne pris pas la peine de me remémorer les paroles de ma mère, qui ressemblaient à "Ne jamais être proche de son professeur !" Hahaha. Il était quand même bizarre, Aaron... Aaron-san ? Sama ? Ouais, nan, mais nan, c'est moche... Il a pas un prénom asiatique en plus, ça colle pas !
Une fois dans l'appartement, bieeeen bordélique, je m'accroupis au sol et appelai le chat, glissant mon doigt de droite à gauche sur le sol en espérant que cette petite créature viendrait jouer un peu pour que je puisse le chopper. En fait, je crois que même s'il était assez sauvage, j'aimais bien les animaux...

-Ah, enfin !

Le garnement s'approcha de moi, et je le pris dans mes mains, m'affalant ensuite sur un fauteuil sans permission pour le câliner sur mes genoux.
Haha, il plante ses griffes dans mes cuisses, youhou.

-Bon, alors, tu... T'aurais pas un cours sur papier à me prêter s'il te plaît ? demandai-je.

Ouais, je sais, la politesse, je connais qu'à peine, puisque je le tutoie, alors que jusque là... Je m'étais remise au vouvoiement. Je sais pas quoi !
Sans doute le fait d'être DANS son appart'...

Alors qu'elle entrait dans l’appartement et prenait ses aises (nan mais vous l'avez vue un peu ?! La malpolie ! J'lui ai jamais dit qu'elle pouvait s'asseoir ! J'ai juste envie deee... la faire dégager de là, voilà ! Peufteuteuh !), je refermai la porte avant d'enjamber à grande peine les tas de feuilles empilés un peu partout dans le salon. Lorsque je vis le chat revenir vers elle, je fis un pas en arrière, prétextant faussement que je cherchais... quelque chose en tournant la tête vers une des étagères, où trônait une... lampe. Une lampe. Ahah. Faut que je m'éloigne. Doucement, doucement... Douuuceeeeeeeemennnnt... Ettt... Aïe, merde, fuck !
Le cable de la lampe enroulé autour de ma jambe, je ne pouvais pas aller très loin, en fait. Jetant un regard exaspéré à cette chose censée être dénuée de vie, je poussai un soupir las en écoutant la requête de la jeune fille.

- Ouais, faut juste que je le retrouve... C'était le dernier cour, sur les suites arithmétiques, nan ?

Bah, ouais, je sais de quel cours elle parle ! Enfin, avant, je savais pas, mais maintenant, je me souviens ! Je leur avais refilé quelques pages d'exercices à faire pendant que je sleepais, c'était cool ! J'ai failli en griller un sur place quand y en a un qui est venu pour me reprocher mon manque de discipline. Peufteuteuh ! C'est moi le prof ! Pour la peine, je l'ai foutu en colle. Ahahaha ! C'est fou ce que je l'adoooore ce job de prof ! C'que c'est jouissif de pouvoir mettre des heures de colle à des élèves qui t'emmeeerdent ! J'adore, j'adore, j'adore ! J'ai toujours voulu faire prof de maths, moi, en plus ! Ô joie.
Je donnai ensuite un subit coup de pied dans le vide afin que ce fuckin' fil électrique me lâche, mais la lampe s'éclata par terre sans que j'ai pu la retenir. En miette, par terre, le cable se déroulant ENFIN (bah c'est pas trop tôt ! J'avais presque plus de circulation dans la jambe.), je contemplais avec un sourire les restes de cette « chère amie ». Ô joie.
M'éloignant légèrement, je regardais autour de moi pour essayer de repérer le papier promis à mon élève. Alors alors... Où que c'est ? Ah, oui, dans le bureau !
J'entrai à l'intérieur, dégommai quelques trucs en fouillant dans un tiroir, menaçant mon ordinateur avec mon reste de café pour qu'il arrête d'écrire des conneries sur ce fuckin' logiciel word, pour finalement trouver le bout de papier à moitié déchiré qui se trouvait être le cours en question.
Je ressortis finalement de mon bureau, comme un survivant d'une bataille, avant de dire à Mitsuki en lui montrant le carnage :

- Bon, euh... Écoutes, vu la tête qu'à le papier, j'vais te réécrire le cours, ok ? C'est plus simple et plus pratique comme ça.

Ouais, ouais, j'ai décidé d'être sympa, j'aurai pu lui donner le lambeau de feuille en lui disant de se démerder. Vous avez vu comme j'suis sympa ?!
M'asseyant sur un autre fauteuil en face du sien, je pris un livre au hasard comme support et une feuille blanche d'un bloc posé sur la table basse, ainsi qu'un stylo noir.
Bon bon bon ! Alors !
Je marquai sur la feuille les différentes formules et tout le reste, puis la lui tendis dès que j'eus finis.

- Voilà ! J'crois que c'est ça... Enfin normalement, hein.

Puis, avec le sourire, j'ajoutai :

- Je rigole, je rigoooole ! Faut smiler dans la vie.

Oui, oui, qu'elle se rassure tout de suite, j'ai bien marqué CORRECTEMENT tout ce qu'il y avait à marquer. Je suis pas si méchant que ça, roh !
Ensuite, après m'être relevé pour reposer tout ce qui m'encombrait les mains :

- Ah, au fait, j'ai appris que tu avais été Étoilisée... Félicitations !

Ouais, la première Étoile ! Ca se fête, quand même.

- Désolé, j'étais absent le jour où tu l'as été, donc je sais pas comment ça s'est... Enfin breeeeef, tu arrives mieux, avec tes pouvoirs ?

Ouais, je sais, j'ai changé de sujet comme ça, d'un seul coup, maiiiiis j'vous emmerde ! Me demandez pas pourquoi, bordel ! C'est juste que je me suis senti responsable d'avoir séché ça, puisque je l'ai (bon, pas vraiment, mais même !) auto-proclamée mon élève. Enfin, j'ai pas tellement séché, j'avais une bonne excuse ! Genre j'étais parti eeeen... En mission secrète. Voilà. Et puis toc... D'abord ! Ah ah ah... Putain la bonne excuse que je me cherche encore.
Pff.

Je levai un sourcil, haussant les épaules.

- Dans n'importe quelle réalisation, il y a des imperfections. Même dans les miennes, il y a des failles que je n'arrive et n'arriverais jamais à combler.

Me laissant retomber sur le fauteuil, je me laissai me caler dedans le plus confortablement possible, les yeux fermés, tête à moitié rejetée vers l'arrière. C'est fou ce que je suis fatigué...

- Je suis certain que tu as bien progressé.

Ouvrant un œil torve, j'aperçus le chat posé sur le bord de la fenêtre, et priai de toutes mes forces pour qu'il tombe. Bah quoi ? Moi, sadique ? Trop pas. J'aime pas les chats, c'est tout, qu'est-ce que vous avez contre ça ?! C'est fou, un chat ! Suffit de voir l'espèce de chat dans Alice au Pays des Merveilles ! Effrayant ! Ma mère avait le même regard et le même sourire, c'était une horreur. OUI, c'est pour ça que je n'aime pas les chats, ça vous pose un quelconque problème ? Non mais parce qu'on sait jamais, au cas où !
Je soupirai en entendant ses derniers mots, plus de soulagement qu'autre chose. Bah quoi, on sait jamais ! Y en a qui arrivent pas à contrôler leurs pouvoirs, après Etoilisation, et c'est super dangereux si y a pas des gens à côté pour aider. Oui, je suis paranoïaque, et je vous emmerde, je l'ai toujours été !
Tentant de me redresser légèrement, je penchai la tête sur le côté, retenant de bâiller.

- Tu veux bien me montrer comment tu te débrouilles, maintenant ?

Oui, je suis chiant et je la fais bosser pendant que je reste assis, mais elle n'avait qu'à pas me déranger durant ma sieste improvisée, non mais oh ! Quand même. J'ai beau être prof, j'reste un humain, quoi que vous puissiez penser !
Tandis que je lui demandai ça, la radio se mit toute seule en marche, le son à fond, me tirant un soupir exaspéré.

- 'Tain, ça arrête pas...

Je me passai une main sur le visage et me levai, me dirigeant ensuite d'une démarche fatiguée vers la machine, que j'éteins avant de reprendre toute l'électricité que je lui avais moi-même donnée sans le vouloir.

- Tu vois, quand je parle de failles, je parle de ça. Ces trucs deviennent vraiment vivants, c'est une horreur. Ça fait flipper, en plus...

Ouais, et puis, ils me pourrissent la vie, aussi ! Normal, pour des appareils électro-ménagers, quoi !
Me rasseyant sur le bord du fauteuil en soupirant (encore ?!), j'attendis la réponse de Mitsuki.

Mitsuki fut soudainement envahie d'un profond trouble, alors que son regard se perdait sur l'écran de télévision. Une sorte de tristesse, mélangée à un peu de mélancolie. J'allai lui poser la question sur le pourquoi d'une telle réaction, lorsque la télévision changea d'elle même la chaîne. Un documentaire sur les chats ? Non mais quelle idée ! Bestioles répugnaaantes ! Aaaah mais y en a plein partout en pluuus ! Noooon ! Pitiééé ! Ils vont sortir de la télé et me mangeeeer !
… Heurm, du calme, Aaron, du calme. Respirons calmement...
Donnant un coup à l'écran pour lui faire comprendre qu'il devait arrêter ses conneries, je l'éteignis en lui lançant un regard mauvais, signifiant très clairement : « Toi, tu t'allumes, j'te balance à la déchetterie. »
Alors que je me retournais pour m'asseoir, mon invitée se détourna pour tenter, semblait-il, de créer un éclair. Histoire de pas se taper la honte peut-être ?
Je fermais les yeux lorsque je sentis son éclair échapper à son contrôle. Maintenant, le problème était différent. Ce n'était plus la phase création qui posait problème. Comment lui expliquer ce qu'elle devait faire pour que ça devienne plus simple de contrôler cette énergie... ?
Je rouvris les yeux alors qu'elle se tournai vers moi, souriant nerveusement.

- Pas besoin de me le remontrer, c'est bon, souris-je, indulgent.

Je penchais la tête sur le côté, la fixant un moment, tandis que je réfléchissais.

- Pour essayer de contrôler tes éclairs, tu dois te fondre en eux. Ils doivent être un membre à part entière de ton corps, comme ta main ou ton bras.

Je repris, emporté dans mon élan.

- Essaie de penser à quelque chose d'heureux, une personne, un souvenir, qui te rend particulièrement heureuse. Généralement, on devient plus calme, et on se rend à peine compte du contrôle qu'on exerce sur nos pouvoirs. Il ne faut pas seulement rester concentré dessus à fond ; chez certaines personnes ça marche, chez d'autres c'est la voie des sentiments qui leur permet de contrôler leur affinité.

Je marquai une pause, me frottant la nuque.

- Mais bon, tu n'étais pas venue pour ça, à la base, donc j'arrête de t'embêter avec ça ! Je sais à quel point c'est chiant de rencontrer quelqu'un qui te demande de t'entraîner quand tu n'es absolument pas là pour ça... soupirais-je.

Je lui adressai un sourire discret, un peu gêné.

- Enfin bref, tu... As besoin d'autre chose ?

Non, mais j'essaie trop pas de clore la discussion le plus vite possible ! Ni à la jeter dehors ! Je demande juste ! Parce qu'elle a sans doute pas que ça à faire de sa journée, hein ! Nan mais c'est vrai. Genre elle a rien à faire, aprèèèès ! J'la croirais trop pas ! Et...
Bon, d'accord, ma gueule.

J'eus un petit sourire en la voyant perdue dans ses pensées, ignorant complètement tout ce que je venais de lui dire. Ou peut-être pas ? Son humeur s'améliora nettement.
Je secouai légèrement la tête, ne relevant pas le fait qu'elle n'avait absolument pas répondu à ma question. J'avais très envie de lui dire que ça ne servait à rien de tenter de cacher sa nervosité (je vois pas pourquoi elle était aussi nerveuse, en fait !), étant donné que je suis un Sensitif, à la base, et que, toujours à la base, les Sensitifs ressentent les sentiments des autres. Les jeunes, de nos jours ! Ils réfléchissent plus du tout, ces nazes !

- Non, personne n'est jamais parti d'ici sans autorisation.

Je me mordis la lèvre, fronçant légèrement les sourcils.

- Enfin, de leur plein gré, je veux dire...

Je chassai ces vieux souvenirs qui recommençaient à hanter mon esprit, comme souvent depuis un certain temps.

- Pour sortir, il faut aller voir la Directrice... Et si tu veux régler une affaire personnelle, tu devras être accompagnée d'un Master. C'est la règle, et c'est tout à fait normal. C'est bien trop dangereux, dehors.

Dehors, c'est encore pire qu'à l'intérieur. Parce que, même ici... Personne n'est en sécurité. Personne n'est à l'abri de la malveillances de ces esprits détraqués, assoiffés de sciences, de sang, de cris et de larmes.
Je relevai légèrement un sourcil, gardant l'autre un peu froncé :

- S'il te plait, quoi que tu penses faire, ne fais pas de bêtise, soupirais-je. Je ne suis pas idiot au point de ne pas remarquer ce qu'il te passe par la tête, même si je ne sais pas de quoi il s'agit.

Elle ne serait pas aussi curieuse, sinon. Elle ne serait pas aussi curieuse de savoir si c'était déjà arrivé. Et, de toute façon, même si c'est effectivement arrivé, je ne lui dirais rien. Elle n'a pas à savoir des choses que même certains de mes collègues ignorent totalement. Même si mentir de la sorte est douloureux, lui raconter serait bien pire.
Je repris néanmoins, tentant un petit sourire triste.

- Si tu as des problèmes, parles-m'en, d'accord ? Ce n'est pas bien de garder certaines choses qui peuvent être douloureuses pour soi-même.

J'avais l'impression d'être un sale hypocrite, en cet instant. Un vrai salaud qui donne des conseils sans les appliquer lui-même. Je suis tellement inutile, en réalité. Comme professeur, je vaux pas un clou. Comme conseiller, encore moins ! Et comme ami... Bah j'en ai pas. Donc ça règle rapidement le problème, non ?
Poussant un petit soupir je me passai une main sur la nuque.

- Enfin bref... Tuuuu veux boire quelque chose ? demandais-je, pas sûr de moi.

Non, je suis absolument pas gêné, je vous emmerde ! Nan mais quelle idée de me demander ça, sérieux ! Vous êtes des espèces de sales débiles transgéniques venus d'un autre monde !
Hey, mais, comment vous êtes venus ici ?! C'est pas moi qui vous ai fait venir avec mon truc d'espace-temps, hein hein heiiiin ?! Nooooon ! Je cause ma propre perte ! Sales aliens, retournez d'où vous venez ! Retournez dans l'métro, sales pét-... Aïe, pas de briques ! Pas de briiiques ! Bordel !
C'est bon, c'est bon, je vais finir par le comprendre :
Ma gueule.

HRP : Joli avatar *.*

Mes yeux se voilèrent légèrement, mais je me levai et allai dans la cuisine pour lui faire un verre.

- J'dois bien avoir ça quelque part..., grommelais-je entre mes dents.

Je fouillais fébrilement dans le placard, me mordant la lèvre inférieure. J'avais failli (ou à vrai dire, je pense qu'elle avait compris ; elle n'était pas complètement idiote) me trahir ; trahir un secret que j'ai juré de garder. Que j'ai juré de ne jamais dévoiler à qui que ce soit qui soit étranger à l'Affaire. Je secouai la tête.
Et puis, il y avait Mitsuki. Mitsuki qui semblait vouloir faire je ne sais trop quoi à l'extérieur, inconsciente (ou peut-être pas tant que ça, au final ?) du danger qu'elle encourait. Et puis, je me sentais bête. Bête de lui dire de me parler de ses soucis si ils devenaient trop douloureux. Parce que, moi, j'étais assez bête pour ne pas le faire. Pour garder tout ce qu'il y a de plus sombre enfouit en moi. Parce que dire quelque chose de douloureux à quelqu'un nous aide rarement à nous faire aller mieux. Parce qu'après ils nous regardent avec cet air méprisable plein de pitié. De la pitié. Je l'ai toujours eu en horreur. C'est bien pour ça que, quoi que j'ai bien pu faire, j'ai toujours tout fait pour ne pas qu'on pose sur moi des yeux compatissants. Parce que la compassion, c'était bon pour tous ceux qui étaient faiblards. Et donc pas pour moi, en plus clair.
Je n'ai rien d'un lâche, d'un faiblard ! J'ai toujours été un battant. J'ai toujours obtenu ce que je voulais, et ce n'était surement pas maintenant que je changerais. Alors de la pitié ? Non merci.
Je trouvais finalement le sirop (qu'est-ce que ça fichait chez moi, ça ? C'était encore comestible ?... Au pire, si elle meurt, je dis que c'est pas de ma faute !) tant recherché, et allait lui chercher un verre. Verre que je fis presque immédiatement après tomber par terre. Et c'est partiiiii ! Et hop que je passe dans le salon en pestant dans ma barbe pour chercher la pelle et la balayette, sous les yeux sans doute ahuris de mon élève ! Voir moqueurs. J'ai pas envie de savoir.
En soupirant, je retournai dans la cuisine pour enlever les bouts de verre, en prendre un nouveau, et lui préparer (ENFIN !) sa boisson, que je lui rapportais.
Moi, nerveux ? Jamais. Et c'est pas de la maladresse, d'accord ? C'étaiiiit... De la maladresse, ok, c'est booooon ! Je suis maladroit que quand je suis nerveux, de toute manière ! Et, euh... Roh, je vous emmerde !
C'était juste... Tout ça. Tout ça qui devenait de jours en jours plus pesant encore.
Je lui tendis son sirop.

- Tiens. T'as de la chance, j'en avais encore.

Et franchement, je me répète peut-être, mais Dieu seul sait ce que ce truc faisait là ! J'en ai jamais bu de ma vie, et jamais je remplacerais mon bon vieux rhum coca. Tiens, je vais m'en faire un !

- Je... reviens.

Ouais, je suis en mode alcoolique, je vous emmerde.
Je retournai rapidement dans la cuisine, me fis mon verre, et revins dans le salon. Et qu'elle ne me supplie pas, je lui filerais pas d'alcool !
Après un petit silence, je rajoutai, d'une petite voix, sachant pertinemment que, quoi que je dise, elle n'en ferait qu'à sa tête :

- Fais attention, tout de même.

HRP : Merciiii *3*

Lorsqu'Aaron partit dans la cuisine, je me laissai glisser dans le fauteuil que j'occupai, songeuse. J'allais faire quelque chose d'imprudent, certes... Mais je devais encore modifier l'idée, l'améliorer, la rendre parfaite avant de passer à l'acte. Est-ce que j'allais réellement être capable d'attendre la fin de cette préparation ? Seul Dieu le savait, mais une petite voix dans ma tête me soufflait la réponse : non, je n'allais pas attendre ; j'étais trop pressée.
J'eus l'impression que le Master Tonnerre resta une éternité dans la cuisine, mais je repris pourtant mes esprits quand j'entendis un verre se briser. Je ne m'y attendais pas ! Sursautant, je relevai les yeux et plantai mon regard sur la porte, d'où Aaron, agacé, ne tarda pas à immerger. Il fonça chercher de quoi nettoyer tout son bazar, et revint finalement quelques minutes plus tard avec mon verre qu'il me tendit, après m'avoir dit que j'avais de la chance qu'il en ait encore. Souriant avec amusement, je le remerciai d'un hochement de tête, avant de boire une première gorgée de ma boisson. Alors que j'allais tenter de relancer la conversation, je fus coupée par Aaron qui me prévint de son retour futur, tandis qu'il s'éloignait à nouveau en direction de la cuisine. Il revint quelques instants plus tard avec un verre rempli de coca. Sauf que la couleur était diluée... J'en déduis donc qu'il s'agissait d'alcool.

- Fais attention, tout de même, déclara-t-il d'une petite voix, brisant le silence.

Buvant une nouvelle gorgée de mon verre, je le posai sur la table basse en face de moi. Je lui adressai un petit sourire amusé. Le plus étrange, et je devais bien l'avouer... C'était de me dire que cet homme était mon professeur. Et qu'en plus d'être chez lui, je me permettais de sourire avec amusement en lançant des choses pas forcément très correcte.

-T'inquiète pas !

Et en le tutoyant aussi, j'avais oublié...

-Je ne vais rien faire de toute façon. Je ne vois pas qui t'as mis cette idée dans la tête.

Passant une main à travers mes cheveux, je constatai que mes pointes étaient légèrement abîmées. Je reportai cependant mon regard sur le Master, souriante.

-Sinon ! Tu faisais quoi avant que je ne vienne te déranger ?