Un génie, un génie on repassera. Normalement c'est moi le génie quand même, surtout quand on voit les états dans lesquels il se met si rapidement !

Je le fixai avec un grand sourire moqueur alors qu'il m'envoyait un coussin à la figure après m'avoir traitée de...

-A... A... Abrutie ?!

Je fis mine d'être terriblement touchée et baissai les yeux. Je me re-téléportai pour arriver en face de lui, laissant mon téléphone retomber dans ma poche avec lenteur.

-Nan mais t'inquiète, pas besoin de resto. J'voudrais pas t'imposer ma présence d'abrutie... Alors que moi j'essaie de fixer les choses. De les arranger pour que tout se passe bien entre toi et Elfie.

J'essuyai les larmes imaginaires qui perlaient au coin de mes yeux.

-En tout cas, j'suis contente de voir que ça va s'arranger ! Et d'ailleurs, j'ai été très surprise par ta performance, je ne savais pas que tu savais téléporter les objets ! Alors que t'as été absent si longtemps, félicitations !

Je tendis une main vers lui pour reprendre le calendrier.

-Par contre, j'reprends ça, faut que j'le montre aux Masters ; j'ai pas l'impression qu'ils soient au courant, sinon j'en aurais entendu parler en réunion !

Je lui offris un large sourire, me tournant ensuite vers la sortie. Mais alors que j'allais partir, mon attention fut happée par le groupe de tout à l'heure qui était en train de... Attendez mais what, quoi, ils font quoi là, MAIS ILS VONT DETRUIRE CE BIJOU !!!!

-MAIS ARRETE !!! N'importe quoi, t'es en train de détruire l'emplacement où faut mettre la cartouche ! OMG mais on fait pas de mal à une SEGA comme ça, EN PLUS Y A LE JEU SONIC MAIS MEILLEUR JEU EN FAIT !!! BITO FAUT QUE TU TIENNES TES GAMINS EN LAISSE STP !

Le visage de Bito montre un peu plus de son dépit face au piètre jeu d'actrice de Mitsuki.

– Mouais, excuse moi de t'avoir "blessée"... Lâche-t-il faussement désolé.

Puis elle lui fait un petit commentaire positif sur sa téléportation à distance. Bito n'a pas eu l'objet qu'il souhaitait, mais cela reste une petite victoire pour lui.

Il pose donc ses poings sur les hanches pour se vanter un peu.

– Mon talent t'épate, avoue.  Je me suis un peu entrainé en scred'.

En fait, ce n'était pas du tout de l'entrainement...
Bito essaye souvent de téléporter des objets lorsqu'il a la flemme de lever son cul. Prenons par exemple cette chère manette de Playstation qui, on ne sait pas pourquoi, se trouve toujours trop loin du canapé. Il a essayé plusieurs fois de la téléporter et c'est ainsi qu'il en a cassé 3, dont une qui s'est noyée en faisant un plongeon dans la cuvette des toilettes.

Bito rend ensuite gentiment le calendrier, car il doit bien ça à Mitsuki.
De toute façon, notre héros sait qu'il percera un jour le mystère du calendrier érotique des Masters et volera la place tant convoitée du mois de Décembre à Mitsuki.

Il répond au sourire de Mitsuki en faisant de même et la regarde partir. Quand tout à coup celle-ci nous pète un plomb sur une vieille console de jeu.

– Déjà c'est pas MES gamins. Et ça va, c'est qu'une...

Et ça fait tilt dans sa petite tête.

– Putain une Megadrive ! QUE PERSONNE NE BOUGE !!

Tout le monde s'arrête de bouger, même ceux qui ne sont pas concernés...

Bito aurait-il le pouvoir d'arrêter le temps lui aussi ? Ou serait-ce son autorité qui s'est développée ? Ou bien juste l'effet que ça fait quand un mec avec une antenne TV sur le crâne se met à hurler au beau milieu de la pièce ?
Ça, je vous laisse deviner...

Il toussote et reprend avec sa voix de pédagogue.

– Cette petite merveille est une console 16bits, la troisième qu'a conçu Sega à l'époque. Et il faut que... que nous nous assurions qu'elle fonctionne encore ! Où est la télé ?
– On est en train d'essayer le Totoscope dessus.
– Le magnétoscope tu veux dire...
– Ouais, c'est pareil...

Il laisse à Mitsuki le plaisir de regarder l'état de la console pendant qu'il se charge de trouver la vieille télévision pour la brancher.

– Qu'est ce que vous regardez ?! Eteignez moi ça tout de suite !

Sur l'écran, c'est un vieux film d'horreur tout pixélisé qui défile.

– Stop, ça va vous choquer ! Ce film m'a traumatisé quand j'étais gamin !
– Mais y'a pas de couleurs...
– Et les monstres c'est marionnettes...
– Mais y'a le mot interdit qu'il faut pas prononcer, sinon un malheur va s'abattre sur nous !
– Ha oui, "Arioch".
– Chut !
– "Arioch" ?
– Oui je l'ai lu sur la jaquette du film, si on prononce trois fois le mot...
– ChuuUUUuutt !

C'est pas "ses" gosses, n'empêche qu'il prend direct des allures de daron qui sanctionne ses gamins dès qu'il voit que la vie de la console est en jeu. J'arquai un sourcil amusé, observant cette petite mise en scène, avant de retenir un éclat de rire face à l'appellation "totoscope" pour désigner le magnétoscope. J'me demande bien comme ils comptent réussir à le faire fonctionner avec les vieilles prises qu'il fallait utiliser. Les télés sont même plus équipées pour brancher une PS2 de nos jours, alors branche un magnétoscope me paraît bien ambitieux.

Je me retrouvai bien vite avec la console entre les mains et j'observais Bito se diriger vers... Ah, ben problème réglé, ils ont aussi trouvé une vieille télé. Mon dieu mais cet endroit c'est le paradis en fait !!! Imaginez ce que je vis en tant que Tonnerre là. Tous ces vieux branchages, cette antiquité, MAIS C'EST TELLEMENT LE FEU.

Je fus tirée de mon extase par Bito qui s'agitait à nouveau. Je relevai le regard vers le groupe qui se trouvait en face de moi, en train de regarder visiblement un vieux film d'horreur. Je fronçai les sourcils. C'est quoi ce film dont j'ai jamais entendu parler ?

-Arioch ?? Comme dans le film Beetlejuice ?

Visiblement j'ai p't'être dit une connerie, car tout d'un coup, quelque chose fit un bruit monstre derrière nous, en direction d'un des placards de la salle. J'sais pas c'qu'il s'est passé dans ce placard, mais visiblement y'a quelque chose de vivant là-dedans.

-Bon, j'te laisse t'en charger Bito, moi j'branche la Sega, déclarai-je tranquillement en m'approchant de la télévision pour retirer le magnétoscope et y mettre à la place la console.

Mitsuki prononce une fois de trop le mot interdit et un long frisson parcourt le dos de Bito dans toute sa hauteur... sa largeur aussi... et sa diagonale, sa transversale... Bref, il frissonne quoi !

– Foutu Master à 3 Yen ! Tu nous as tous...

Et aussitôt le bruit de monstre surgit, aussitôt notre héros pétochard disparaît. Non, il ne s'est téléporté, il est juste sortit du champ de la caméra en se couchant au sol pour aller ramper derrière le canapé de la salle commune. De là, il attrape une vieille couverture qui traine et s'enroule dedans.
Bonne initiative, car on sait tous que sous une couverture les monstres ne peuvent pas nous atteindre, pas vrai ?! Bien sûr il faut faire attention à ne pas laisser dépasser ses pieds, car ils aiment bien nous chatouiller les pieds ces batars de monstres, surtout celui qui se cache sous notre lit.

Maintenant en sécurité (ou pas), Bito refait son apparition. Emmitouflé dans sa grosse couverture il ressemble à une larve géante dans son cocon, seul son visage est à découvert.

– Donc je disais... Reprend-t-il calmement avant de s'écrier : Tu nous as tous condamné !!

Un des gosse, un aussi craintif que ce cher Bito, demande alors.

– Et... et qu'est ce qui va nous arriver ?
– Tout d'abord on va être plongé dans l'obscurité totale, ensuite les gens vont disparaître un à un et après...

Quand soudain un gosse que personne ne regarde, branche un vieux ventilateur sur une prise et le disjoncteur de la salle saute dans un grand claquement.

– HA ! Qu'est c'que j'disais !!

Avant d'ajouter autre chose, Bito tente de pointer Mitsuki du doigt, mais il est trop bien enveloppé dans sa couverture pour y arriver.

– Maintenant profitez de vos derniers instants pour vous plaindre à la personne qui a provoqué tout ça... Moi j'démissionne.

Démissionner de quoi ? Bah... on ne sait pas trop.

Je nous ai tous...? Mais il délire ? MAIS IL A DISPARU. MAIS POURQUOI IL DISPARAIT.

Et voilà que d'un coup il réapparaît sous la forme d'une limace géante. Mais délire. Il est incroyable ce mec.

Alors qu'un truc retombe dans le placard, la lumière s'arrêta d'un coup, tirant un cri d'hystérique à Bito à quelques mètres de moi. Je retins un éclat de rire, sentant que le réseau électrique de la pièce semblait bien contrarié à cause des plombs qui avaient sauté.

Attirée soudainement plus par l'appel de l'électricité que la menace de Bito, j'arquai un sourcil, et me désintéressait totalement de lui pour me diriger vers le panneau de contrôle. J'ouvris la portière et posai ma main dessus pour suivre mentalement chacune des connexions du panneau. Mon regard se tourna vers un ventilateur branché sur le courant et je pointai du doigt le responsable.

-Jean-Charles, tu veux bien retirer ton ventilateur ?! Il fait même pas si chaud que ça, et ça nique tout le réseau électrique de la pièce, et visiblement de l'état. Alors débranche-moi ça et vite !

Oui, alors on a individualisé par étage, mais c'est pas encore par pièce, à regret. Parce que j'peux vous dire que les incidents électriques, avec les noobs de Tonnerre, ça arrive super souvent. Bon, l'avantage c'est que maintenant qu'on a amélioré l'ascenseur, ils peuvent plus nous le niquer !

Offusqué, le "Jean-Charles" débrancha son ventilateur et retourna dans le placard pour le ranger. A cet instant, je rétablis le courant, et me téléportai derrière Bito pour le pousser au niveau des épaules.

-Du coup, si j'te pousse, tu tombes ?

Je fis mine de compter les personnes qui étaient autour de nous avec intérêt, avant de recommencer le même schéma à voix haute.

-5...6... Je comprends pas. On n'était pas 7 tout à l'heure ? Bito, tu as vu quelque chose toi ?

– Hé ! Tu vas où là ? Tu peux pas invoquer le diable et te barrer comme ça... Fait-il lorsque Mitsu se désintéresse complètement de lui pour aller s'occuper de la coupure d'électricité.

Puis il se tourne de l'autre coté, en se donnant un air bien snob.

– Hmf, t'façon j'men fous j'ai démissionné.

Et tandis que Bito se dirige tant bien que mal vers la fenêtre pour prendre la fuite -en effectuant des petits bonds pour avancer-, il se retrouve dans l'incapacité d'aller plus loin. Ses bras prisonniers de la couverture dans laquelle il s'est enroulé, il est dans l'impossibilité d'ouvrir la fenêtre... et plutôt crever que d'utiliser ses dents sur cette poignée pleine de bactéries.

Il fera donc comme tout le monde : il passera par la porte. Mais c'est là que Mitsuki refait son apparition avec une question évidente...
– Du coup, si j'te pousse, tu tombes ?
– Bien sûr que...
Et il tombe.

Le dépit est gravé sur le visage de Bito, si bien qu'il n'arrive plus à se plaindre lorsqu'il rencontre le sol comme une patate qu'on aurait poussé du bout du doigt. Il ne peut plus se relever, alors rampe comme une chenille et arrive à coté de la catastrophe ambulante qui lui sert de camarade : j'ai nommé Mitsuki.

– Une disparition... comme par hasard... C'est pas comme si j'avais prévenu...

– C'est Hitomi qui a disparue !! S'écrie un gamin.
– Hitomi... C'est la gamine qui s'prend toujours pour une princesse ?
– Oui.
– C'est pas une grosse perte... mais j'me demande qui sera le prochain.

Son regard se lève sur Mitsuki comme pour montrer qu'il espère bien que ce sera elle, la prochaine sur la liste des disparus.

– Qu'est ce qu'on va faire ?! On va tous mourir ?!

Les gosses paniquent un à un, alors qu'un petit sourire en coin se dessine sur le lèvres de Bito.

– Heureusement que quelqu'un ici a vu la fin du film et sait comment conjurer le sort.

Bito parle bien évidemment de lui-même et, maintenant que la panique commence à se faire ressentir, il est temps pour lui de jouer les héros... ou plutôt les exorcistes.

– Trouvez moi un objet auquel elle tient, il faut que j'entre en contact avec son esprit prisonnier des ténèbres. Et du chocolat... parce que j'ai la dalle.

Un sourire étira le coin de mes lèvres alors que je regardais Bito se redresser comme il le pouvait pour faire le grand qui connaît la fin de l'histoire. En vrai, vous croyez que les autres y croient vraiment là ? Nan mais parce qu'on est à Terrae quand même, même si JAMAIS un jour les trucs qui se passent dans les films d'horreur devraient vraiment se passer ici, mais ce serait la folie avec nos pouvoirs ! En deux secondes le mec du film d'horreur est maîtrisé et on est tranquille ! Aucune raison d'avoir peur.

Je tournai la tête quand une des ados présente annonça le prénom de la fille qui manquait à l'appel. J'adore comme Bito a fait genre c'est pas ses gosses, et pourtant il a très bien retenu les noms de chacun d'eux visiblement, même si il les a aussi associés à d'autres trucs moins cools.

Quand Bito reprit la parole, je ne pus m'empêcher de sentir l'excitation monter en moi. Nan mais c'est un truc de fou ce qui est en train de se passer, je ne peux absolument pas en rater une seule miette ! Mais j'ai TELLEMENT envie de truquer son machin pour que tout parte en live, juste pour voir comment il réagira ! Genre, comme un adulte, ou juste en criant et en se cachant à nouveau dans sa carapace ?! Magique, je veux je veux je veux !

Je donnai un coup dans l'épaule d'un gamin à côté de moi.

-Mais t'as pas entendu ou quoi ?! Dépêche-toi de trouver un truc qui lui appartient pour qu'on puisse voir ça !!

Le chocolat, ils se démerderont, j'suis pas une commis non plus hein. Surtout qu'à tous les coups on va la voir revenir dans quelques minutes en nous indiquant qu'elle était aux toilettes, alors ce serait cool de se dépêcher.

-Toi ! Arrête de manger tout de suite !

Je téléportai dans ma main la barre de chocolat que le gamin était en train de croquer, et la donnai au même garçon qui était à côté de moi depuis tout à l'heure (et qui avait pas franchement l'air de chercher efficacement un truc qui aurait pu appartenir à sa pote).

-Tiens, j'ai fait ma part du marché avec le chocolat. Allez là, dépêche-toi de trouver un truc qui lui appartient ! C'est ta pote ou pas ? C'est dingue ça !

Et soudain, un cri se fait entendre !
– ARrgH !!
...
– Pu.. naise ! Oui, pas gros mots devant les enfants. Fais gaffe où tu mets les pieds !
– Pardon !

Fausse alerte, c'est juste un gosse qui vient d'écraser le pied de Bito en passant.

Mais reprenons les choses sérieuse !
Les gosses et l'autre Master là... sont plutôt efficaces. Une barre de chocolat ainsi qu'un petit diadème en plastique, le fameux objet lié à la petite disparue, arrivent rapidement dans les mains de Bito.

– Il m'faut des bougies aussi ! Affirme-t-il.
– Y'a pas de bougies, mais on a trouvé des lampes torches.
– Ça fera l'affaire.

Avec un morceau de tissu qui traine, Bito se fait un bandeau avec lequel il attache les deux lampes torches, lumières vers le haut, autour de son crane. Il perfectionne ensuite tout ça en déposant le diadème de la gamine au sommet de crinière.

– Tous assis... Ordonne-t-il. Sauf toi Mitsu. Mes chakras sont engourdis, je vais avoir besoin d'un petit massage pour être au top.

Evidemment ils ne se font pas de massages dans le film, mais la situation n'est jamais trop catastrophique pour en avoir un, pas vrai ?

Notre exorciste en herbe s'apprête ensuite à prendre un morceau de chocolat, mais il remarque que celui-ci est déjà mâchouillé.

– Ewh...

Il casse la partie souillée et la cache sous le tapis, avant de grignoter tranquillement.

– Maintenant il est temps de quesCHtionner les esCHprits !

Découpé sur le carton d'à coté, Bito écrit un "Yes", un "No", l'alphabet en hiragana ainsi que des chiffres pour construire une planche de Ouija, cette fameuse planche que l'on utilise pour communiquer avec les esprit.

Il s'assoit en tailleur et place le Ouija sur ses jambes croisées. Il place ensuite une pièce de monnaie sur le ouija.

– Esprits, gentils esprits êtes vous là ?

La pièce de monnaie se déplace toute seule sur le "Yes. Cela parait surnaturel, mais en fait c'est juste un aimant que Bito déplace discrètement sous son carton...

– Esprits, gentils esprits peux-tu nous dire qui te met autant en colère ?

La pièce de monnaie se déplace sur le "み"(Mi) puis sur le "つ"(Tsu).

– Evidemment.

Le regard accusateur des gosses se braquent automatiquement sur Mitsuki tandis qu'un sourire plein de malice se dessine sur les lèvres de Bito.

– Esprits, gentils esprits. Qui c'est qui pue d'la gueule ici ?

La pièce de monnaie se dirige doucement en direction du "み"(Mi)...

Un sourire sur les lèvres, j'observais Bito se plonger dans son rôle de grand exorciste avec un plaisir non dissimulé. Est-ce que je vous ai déjà raconté comment ma rencontre avec Bito s'est passé ? Et surtout, l'admiration que j'ai eu pour lui pendant toutes ces années ? Parce qu'il faut le dire, ce type est un véritable spécimen. En vrai, j'suis fan, à 2000%. La seule chose qui a changé, c'est qu'il est parti de Terrae pendant un long moment, et que du coup, j'ai un peu du mal à retrouver cette engouement que j'avais avant. Faut dire qu'il est revenu pendant une période un peu particulière, et même si je commence à aller mieux, j'ai quand même déjà été dans un meilleur état, alors ça non plus, ça n'aide pas.

Quelques minutes s'écoulent pendant lesquelles le grand gourou s'empare de tout le matériel dont il aura besoin, demandant à tout le monde de s'installer autour de sa table spécial esprits pendant que je...

Attendez, quoi, pause ???

D'accord, un autre truc qui a changé dans ma relation avec Bito, c'est les questions que m'a posées Elfie sur lui pour s'assurer que c'était un type bien. Et les disputes que j'ai déjà eues avec Ys quand il m'expliquait que quand on était en couple, il y avait certaines choses qu'on ne pouvait pas faire.

-Ok, pas de problème ! Tiens, toi, Jean-Michel, tu veux bien me filmer pendant que je le masse s'il te plaît ??

Un sourire s'étira sur le coin de mes lèvres, mais disparut tout aussi rapidement quand Bito commença à jouer à l'escroc. Mais oui bien sûr c'est moi qui ait tourmenté les esprits !

... Et oui, bien sûr c'est moi qui... MAIS ALLEZ LA.

-Bito, tu ne t'es jamais demandé pourquoi j'avais les cheveux blancs ?? demandai-je en relevant lentement le regard vers lui. Tu sais, ce n'est pas une teinture, hein...

Y'a bien un esprit dans le monde qui a les cheveux blancs, nan ?

-Les yeux violets, ce n'est pas très commun non plus d'ailleurs...

Et c'est là que j'suis dégoûtée de ne jamais m'être véritablement entraînée sur le magnétisme. Parce que si je l'avais fait, ça aurait pu être vraiment bien, bien plus drôle.

Je me pinçai la lèvre inférieure, tandis que les lampes torches sur les côtés du front de Bito commençaient à clignoter.

-Quand j'étais encore en vie, mes parents m'ont élevée pour faire de moi une parfaite voleuse... Moi je crois que dans le fond, ils l'ont surtout fait pour faire de moi une parfaite meurtrière...

La pièce de monnaie arrive sur le "み"(Mi) puis se dirige vers le "つ"(Tsu).

Bito, bien trop fier de ridiculiser cette pauvre Mitsu, ne montre aucun signe de peur... du moins pour le moment.

– C'est vrai que t'es chelou comme meuf, mais c'est surtout ton haleine qui gêne les esprits là. Répond-t-il lorsqu'elle lui parle de ses cheveux et de ses yeux.

Les gosses ricanent, puis lèvent les yeux vers Mitsu, qui se trouve juste derrière Bito et... qui semble tout à coup bien flippante à faire clignoter les lampes torches et à parler de sa petite passion pour le meurtre !

– Nan mais assume de...

Notre héros s'arrête brusquement de parler lorsqu'il voit la tronche des gosses se décomposer par la peur. Il tilt enfin les paroles menaçantes de Mitsuki.

– "Encore en vie" ? ... "Une meurtrière" ?!

Serait-ce une aura maléfique qu'il ressent là ? Le flipomètre de Bito se met est en alerte, il bondit automatiquement sur place et envoie valser son Ouija improvisé par la même occasion. Instinct de survie... ou plutôt de réflexe de pétochard.

Mais, comme Bito et accident vont de paire, il met magnifique coup de boule à Mitsu dans son élan...
En même temps, ce n'est pas très malin de la part de Mitsu de mettre sa tronche juste au dessus de la catastrophe humaine qu'est Bito.

C'est donc un magnifique coup de boule qu'il met à sa vieille camarade... Oui, encore un !

Et maintenant, on le voit en train de rouler par terre comme un joueur de foot qu'on a à peine toucher.

– Yaïe Yaïe Yaïe ! T'as le crâne beaucoup trop dur pour un esprit malfaisant !

Les autres acolytes de Bito commencèrent à paniquer et je retins un sourire satisfait, préférant garder mon air sérieux. J'arquai un sourcil provocateur quand le Tonnerre répéta mes mots sous la forme d'une question. Haussant une épaule, j'allais en rajouter une couche quand il se leva brutalement pour venir m'asséner un coup de boule. J'écarquillai les yeux sous le coup, avant de saisir brusquement mon nez. Je plissai les paupières, serrant mon arête en sentant un liquide ferreux remonter là. Wallah mais il va me faire saigner du nez le con !

Je baissai les yeux sur lui qui se roulait par terre en se tenant le crâne. MAIS SERIEUSEMENT ?! IL ME FAIT SAIGNER DU NEZ ET IL FAIT LA GONZESSE DERRIERE ?!

-Et toi t'as le crâne beaucoup trop dur pour quelqu'un de pas si intelligent que ça !!!

Ok, c'était grave méchant, j'ai pas réfléchi, c'est parce que je souffre du nez ok. Choppant un mouchoir dans une boîte de mouchoirs qui traînait au milieu de la pièce, je roulais des yeux en tombant nez à nez avec la table improvisée de ouija qu'avait faite Bito, tous les outils de son jeu traînant à mes pieds. Je soupirai, avant de me retourner à nouveau vers le Téléporteur.

-Désolée, j'le pensais pas.

La culpabilité j'vous jure.

-Par contre, en tant qu'esprit... Le sang appelle le sang. Alors que proposes-tu pour réparer ce que tu viens de me faire ?

Bito arrête son cinéma et se relève pour faire face à Mitsu.

– "Quelqu'un de pas si intelligent que ça" ... ?

Il affiche une mine bien dépitée.

– Et tu t'excuses... ?

Maintenant c'est un mauvais mélange de désespoir et de pitié qu'il ressent pour Mitsuki... Est-ce qu'on peut dire qu'il éprouve de la "désespité" ? Ouais, on va dire ça !

– Déjà ta vanne elle était pas ouf... alors si tu t'excuse juste après ça fait vraiment pitié ! Vous devriez apprendre à vous clasher en salle des Master, au lieu de faire de nude pour un calendrier... Parce que là, on comprend pourquoi les méchants vous respectent pas.

Puis il pose ses poings sur les hanches avec un sourire fier.

– Il serait peut-être temps que vous laissiez votre place à une nouvelle génération de Master.

Genre une génération comme Bito ? Avec tout dans la gueule et rien dans les bras ?  Même si sur le coup ça parait être une bonne idée... c'est une très mauvaise idée !

– Mouais bon... t'es pas ouf esprit non plus. Les esprits ça saigne pas. Mais au moins tu m'as permis d'éclaircir un mystère ...

Et il pointe son doigt sur Mitsuki, comme le ferait le célèbre avocat dans un jeu vidéo.

– TU AS KIDNAPPÉ HITOMI !!

Il vous défonce le nez et vous accuse ensuite d'avoir enlevé un gamine... Bito est vraiment le meilleur ami qu'on puisse avoir.

Puis soudain, le bruit dans le placard se fait de nouveau entendre.
Evidemment Bito flippe, mais il reprend son "courage" à deux mains lorsqu'il commence à faire un lien entre ce bruit à la disparition de la gamine.

– ET TU L'AS ENFERMÉE DANS CE PLACARD !!

J'arquai un sourcil quand il répéta mes mots, avant de presque baisser le regard honteusement quand il affirma que je faisais pitié. J'fais déjà suffisamment pitié depuis plusieurs mois, je suis pas sûre d'avoir envie de l'entendre à nouveau...

Je ne relevai même pas quand il lança l'idée de laisser la place à une autre génération de Master, et relevai seulement le regard vers lui quand il m'accusa d'avoir kidnappé la fameuse Hitomi. J'eus envie de soupirer mais je me retins, me contentant d'hausser une épaule.

-Ouais c'est exactement ça, c'est moi qui l'ai enfermée là-dedans au moment où elle est partie aux toilettes, je me suis dit que ça passerait inaperçu...

Et tout en parlant, je m'avançais vers le placard pour l'ouvrir en grand. La planche bancale qui semblait responsable de tout ce raffut s'écroula au moment où j'ouvrais, et tout ce qui était entreposé dessus tomba sur le sol dans un bruit assourdissant. Je mimais le choc, posant mes mains sur ma bouche, hurlant presque.

-MON DIEU !!!!! Mais que s'est-il passé ?! Où est Hitomi ?!!!

Ouais, j'suis une super bonne actrice, je sais. Je me tournai vers Bito et le pointai à mon tour du doigt. C'est cool, j'ai l'impression d'être dans une série américaine, et les autres doivent avoir l'impression d'assister à un match de tennis où on ne cesse de se renvoyer la balle.

-Il est temps que tu avoues tout !

Bon, j'suis dans une série américaine, mais quand même, on va pas se leurrer, j'suis aussi au fond du trou. Mais il est hors de question que j'le laisse paraître, pas encore, je dois apprendre à gérer mes émotions maintenant.

Je posai mes mains sur mes hanches, adoptant la posture de la confiance en soi.

-Alors ? Qu'as-tu fait de son corps ?

Le regard des gamins font des allés retours entre Bito et Mitsuki qui se rejettent la faute. Ils assistent là à un magnifique duel d'accusations bidons. Mais Mitsuki semble être la moins crédible des deux, Bito n'a plus qu'à lui asséner le coup fatal.

Après le vacarme de l'étagère bancale et le jeu d'actrice "incroyable" de la Master, Bito bondit sur place et se frotte le menton signe qu'il ...

– Oh j'ai l'impression que tu as une idée ! Lui dit une gamine.
– Nan, j'avais juste une miette de chocolat sur le menton...
– Ha...

Puis c'est à son tour de pointer son doigt vers l'accusée.

– T'es qu'une mytho et une rageuse ! Tu vaut pas mieux que ton abrutis de mec...

Bito  plaque ses mains sur sa bouche mais trop tard, ses mots blessants sont sorti. Et soudain, il remarque que la gamine qui lui a parlé juste avant n'est autre que la fameuse Hitomi.

– Mais t'es là toi ?! T'es enfin revenu des T...
Il va dire "Ténèbres", mais la gamine termine sa phrase :
– Des toilettes.

Bito affiche sa plus belle tronche de blasé.

– Du coup j'ai accusé et insulté Mitsu pour rien ...
– Et tu lui a défoncé le nez comme un gros naze.
– J'ai plus qu'à aller m'excuser et à culpabiliser toute ma vie pour ça ...
– Oui.
– J'avais pas besoin que tu confirme...

Il jette un regard encore plus dépité à la gosse. Il comprend pourquoi personne ne l'aime celle là, elle est trop... pragmatique.

Bito se tourne donc vers Mitsu et inspire un bon coup avant de s'excuser.

– Je... hum... je pensais pas c'que j'ai dis et... Il baisse la tête. Faut dire que je suis assez à cran en ce moment... L'amour de ma vie est mal au point, pas un jour ne passe sans qu'elle ne se casse quelque chose, elle fait des bruits bizarres et elle a des fuites de partout. C'est incontrôlable !

Bito regarde tristement le fond d'écran de son téléphone. Il y dépose une petite caresse en reniflant...

– Elle est mourante !

Son fond d'écran est en fait une photo de sa trottinette. Et soudain, un nouveau message s'affiche sur son téléphone.

– Et Elfie m'a envoyé un cœur bleu !!

Il est sur le point de chialer. Attention, c'est un haut level de drama que nous avons là...

Que mon...

Mes pensées arrêtent de fuser un instant. Mon regard se vide. J'ai beau cherché à me raccrocher à quelque chose, je sens déjà cette boule immense gonfler dans mon ventre et me priver de l'ensemble de mes sens.

Je ne vaux pas mieux que mon "abruti" de mec...

Ma gorge se noue et je baisse le regard pour fixer mes pieds, n'entendant même plus ce qu'il se passe autour de moi. Je ne sais même pas quoi penser que cette phrase. Tout porte à confusion.

Tout d'abord, est-ce que c'est encore mon "mec", hein...?

Et valoir mieux que lui, c'est quoi ?

Ai-je le droit de le juger ? Avons-nous le droit de le juger ?

Ses dernières actions déterminent-elles tout ce qu'il faut à présent penser de lui ?

Sa vie se résume-t-elle à tout ça ?

Et moi, dois-je être déçue ? Dois-je être en colère qu'on me compare à lui ? Ou qu'on dise que je suis moins bien ?

Oui, moi, qu'est-ce que je dois ressentir comme sentiment, exactement ?

Je sens l'électricité pulser au bout de mes doigts, ne demandant qu'à sortir. Mon coeur s'agite un peu dans ma poitrine et je finis par relever une main vers mon visage pour essuyer les larmes qui se sont nichées dans le coin de mes yeux.

La voix de Bito m'interpelle et je relève le regard vers lui. Mon coeur se serre et je l'observe s'excuser, des excuses qui dérivent rapidement.

Il n'a pas fait exprès. Je sais très bien qu'il n'a pas fait exprès, et que les mots se sont échappés. Mais ça fait quand même terriblement mal.

Mes lèvres s'étirent en un sourire tremblant. Je n'ai pas envie de faire une scène ici. Je n'ai pas envie de pleurer devant tout le monde.

Alors, courageusement, je lève ma main devant moi et la secoue, rythmée par mon rire minable.

-Haha ce n'est rien, ne t'inquiète pas ! Et je suis sûre qu'Elfie n'a rien contre toi. Tout va rentrer dans l'ordre.

Les mots sont confus et la concentration est moindre. Je ne sais même plus ce que je dis, non, je ne sais même plus ce que je dois dire. Je dois juste partir d'ici.

-Je vais rentrer chez moi, il me reste du travail, je me suis trop attardée ici. Bonne après-midi tout le monde !

Et sans attendre la moindre réponse, je me téléporte chez moi.

Chez moi où je suis seule.

Sans lui.