• Prénom : Justine
• Nom : da Silva
• Âge : 20 ans (née le 01/11/2001)
• Affinité et pouvoir : Eau Lunaire - Morphe

Justine est l'incarnation de ce qu'on appelle "un petit bout de femme", dépassant à peine le mètre cinquante. Tout est étudié pour être sexy : elle prend grand soin de ses très, très longs cheveux lisses arrivant jusqu'à ses genoux, teintés en roux -noir à l'origine-, elle maquille subtilement son visage rond pour faire ressortir le bleu clair et glacé de ses iris et ses lèvres rondes, elle a mis en valeur sa petite poitrine avec un tatouage de belladone -une plante toxique- sur son torse.

Elle s'habille souvent de longues robes qui mettent en valeur sa taille fine et dévoilent ses jambes charnues. Si elle dévoile autant sa peau pâle aux regards, elle arrive toutefois à cacher toutes les cicatrices qui parsèment son corps. Elle n'a pas de piercings, hormis pour les classiques boucles d'oreilles qu'elle ne met que lors de grandes occasions. Elle n'a pas beaucoup de bijoux, met très souvent un  simple collier ras-de-cou noir. Vous ne la surprendrez jamais dans un "mauvais jour". Toujours impeccable, de la tête aux pieds. Elle n'est pas forcément très musclée et forte, mais elle est très souple au point qu'il est difficile de l'immobiliser.

Justine passe facilement pour une séductrice, et qui pourtant reste distante tout à la fois. Elle n'a pas beaucoup de relations "normales" et part souvent du principe que si un/e inconnu/e vient lui parler, c'est un/e client/e. Mais au fond d'elle, Justine est remplie de tendresse. Loyale et attentive, si elle prend soin de vous, c'est qu'elle vous apprécie sincèrement. Si elle n'est pas capable d'apporter une solution à ses amis dans le besoin, elle sera présente émotionnellement. Curieuse de tout, un peu rêveuse, elle aime découvrir de nouvelles choses. Elle ne se considère pas comme une artiste, mais aime s'attarder sur "les détails qui changent tout", surtout quand elle cuisine et quand elle danse.

Par contre, ce n'est pas parce qu'elle est adorable qu'elle ne peut pas être terrifiante. C'est peut-être parce qu'elle a autant d'imagination qu'elle est capable d'innover quand il s'agit de cruauté. Le pire, c'est que vous avez la certitude que c'est de sa faute si vous souffrez... mais vous n'aurez jamais de preuves. ..."les détails qui changent tout". Justine n'a jamais eu besoin de lever la voix pour se faire respecter... Si elle est en colère, ce sera avec le sourire... Ce qui n'est jamais rassurant quand il s'agit de quelqu'un qui peut vous tuer à distance.

Avec la façon dont elle se présente, on pourrait penser que Justine aime les choses délicates, chères... Pas du tout. Elle apprécie la nature qui lui a toujours donné ce dont elle avait besoin ; de la nourriture, des armes,... Une fois qu'elle a eu une rentrée d'argent sûre, elle a choisi d'être végétarienne puisqu'elle adore les animaux. Toutefois elle est fan de glaces, de gâteaux et de crème chantilly, se priver de ça lui fait de la peine. Passionnée de botanique, elle ne peut passer une semaine sans "adopter" une plante en pot, s'occuper d'une fleur croisée sur un chemin, ramasser des feuilles d'arbre qu'elle collectionne ensuite dans un herbier. Quand elle était petite, elle voulait être danseuse étoile. Vous pouvez souvent la voir en train de sautiller, bouger sur une musique qu'elle seule peut entendre. Elle adore se mettre au chaud, possède plus de plaids qu'elle n'ose l'avouer. Elle dort roulée en boule dans ses couettes, en hiver comme en été. On lui fait souvent remarquer que ses doigts sont froids, elle s'en rend à peine compte, même si instinctivement, elle se rapproche des zones de chaleur. Son endroit préféré est le sauna. Elle y va aussi souvent que possible parce que c'est bon pour sa peau, et elle en apprécie la moiteur.

Alors évidemment, elle n'aime pas trop l'hiver. Le froid et la nuit omniprésente la font somnoler, et quand elle a beaucoup à faire, ça l'agace. Elle fait moins souvent confiance à la gente masculine au premier abord... Elle aime faire à manger, mais pas la vaisselle. Elle ne supporte pas quand on lui dit de sourire plus souvent, quand on la réveille alors qu'elle dormait bien, quand on lui dit d'arrêter de bouger.

Justine est née un début de soirée froide du mois de novembre... deux mois trop tôt. Sa mère, Alba da Silva, sous l'emprise de la cocaïne, s'était rendue aux urgences en pensant faire une crise d'appendicite... Elle accoucha quelques heures plus tard. Ce sont les infirmières qui ont choisi son prénom... Ce sont grâce à ses femmes qu'elle a survécu. Quand elle était jeune, elle leur en voulait tellement... Justine n'a jamais connu son père. Alba était une prostituée qui vendait son corps pour avoir ses doses... Ça pouvait être n'importe qui au village. Et d'aussi loin qu'elle se souvienne, elle n'a jamais appelé cette femme "maman". Alba était Alba. Plus une colocataire qu'une mère. Il y a quelques bons souvenirs, mais rien de ce qui s'approche d'une véritable relation mère-fille. Elle devait se débrouiller. Quand Alba disparaissait plusieurs jours de suite, on ne sait où, elle devait se faire à manger seule, ses devoirs seule, le ménage seule, signer des papiers à sa place pour éviter l'expulsion,... Et puis il a fallu travailler un jour, pour aider cette "coloc" à payer ses dettes, payer ses doses, et puis manger, même si c'était en option pour elle.

Elle n'avait connu que ça et s'en contentait. Quand on traitait sa mère de pute, elle haussait les épaules, parce que c'était vrai. Sa seule fierté était de savoir qu'elle arrivait à s'en sortir sans prendre le même chemin qu'elle.

-Sorcière, sorcière c'est bien fait pour toi ! Sorcière, sorcière retourne chez toi ! ~♪

Les autres enfants devaient penser qu'elle n'aimait pas qu'on la compare à une sorcière... Ça ne la dérangeait pas. C'était un peu vrai. Les bois autour du village étaient dangereux à cause des gangs, mais elle était si discrète qu'elle n'avait jamais été repérée lors de ses cueillettes. Elle connaissait aussi bien les poisons que les plantes médicinales... Elle avait d'ailleurs reçu de l'argent après avoir mis un laxatif dans les fontaines à eau de la cantine. Tout le monde avait pu profiter d'une semaine entière sans école. Le fait que ses sourires étaient rares n'arrangeait rien... Ses émotions cachées et son manque de réaction ont fait que tout le monde connaissait la petite da Silva, avant même qu'elle ne connaisse qui que ce soit.


Elle ne se souvient plus comment elle est entrée dans le gang d'Amadéus. Ça s'est fait de manière si naturelle que d'être appelée Petite Vipère du jour au lendemain ne l'a pas étonnée. Elle soignait les petits bobos des gros durs avec des pommades qu'elle faisait elle-même, avait conseillé sur les plantes qui coupaient discrètement certaines drogues. Elle était l'une des plus jeunes mais agissait comme une maman. :

-Rasta ! Minute ! J'ai pas fini de désinfecter ta blessure !

-Oui mais... Je dois- Je veux dire... On doit rejoindre Lloyd. T'sais. Ordre d'Ama.

Elle ne réagit pas... Elle comprend pourquoi le rugbyman cache ses sentiment pour le scientifique du gang. Être différent dans ce village pouvait être dangereux, il fallait tout cacher. Justine avait l'avantage de ne pas être expressive et de ne pas avoir "d'amis". Elle prenait juste soin du gang. :

-On ne part pas sans Oldie et Loup de toute façon tu sais bien.

Les affaires du gang importaient peu, mais il fallait tout de même qu'elle participe pour mériter son salaire... Et comme elle ne se battait pas, qu'elle ne dealait pas, qu'elle ne se prostituait pas, elle devait être présente pour de petites missions.


TW : attouchements

L'homme ne l'avait pas écoutée. Elle avait beau répéter qu'elle n'était pas une pute d'Ama, il avait insisté. N'importe quelle femme devient une pute si on la paye. Elle voulait de l'argent non ? Elle avait serré les dents pour qu'il ne l'embrasse pas, mais cela le l'avait pas empêché de lécher ses lèvres avec sa grosse langue enflée d'alcoolique. C'était un vieux con qui traîne souvent au bar le plus proche du collège, un pédophile qui matait les gosses impunément. Il avait ses mains partout sur elle, avec son odeur immonde de mauvais whiskey, de fumée et de sueur. Il respirait fort, comme un porc, et Vipère luttait pour ne pas mordre, griffer, bouger. Attendre patiemment. Ne pas bouger. Contenir le moindre tressaillement... Attendre...

Le souffle de l'homme devint plus chaotique, heurté d'inspirations brutales, les muscles de sa gorge se contractant comme s'il s'étouffait. Enfin, pensa-t-elle. Il se redressa, ses mains quittant son corps maigre d'enfant affamée pour aller cueillir sa gorge. Il posa des yeux paniqués sur elle mais elle n'y répondit pas, sortant un mouchoir de sa poche pour retirer le baume à lèvre toxique qu'elle portait dès qu'elle se risquait à sortir seule la nuit. Il comprit trop tard ce qu'il venait de se passer et tomba en arrière, s'étouffant dans sa crise d'épilepsie. Vipère resta là, longtemps, avant de le voir se tourner sur le côté pour vomir et s'évanouir. La dose était infime, c'était risqué pour elle aussi d'avoir ses lèvres couvertes d'une plante toxique, donc il ne risquait pas de mourir... Mais elle regrettait que l'ivrogne ait eu le réflexe de se tourner pour vomir ; il aurait dû s'étouffer et crever la bouche ouverte, la bite à l'air. :

-Vipère j'ai eu ton messa-... Qu'est-ce- ?

-Rat je-...

Elle réalisa seulement en voyant son ami à quel point elle avait eu peur, à quel point elle se sentait sale. Elle prit une profonde inspiration, sentant une larme unique couler sur sa joue. Grégoire, nom de code Rat, était un des rares garçons à avoir le droit de la toucher sans qu'elle ne panique. Il avait une aura de grand frère qui la rassurait. Il rengaina son épée pour pouvoir la prendre dans ses bras, caresser son dos pour la calmer... :

-Viens, ne t'occupes pas de ça. Je vais appeler la Madonne, prévenir les autres qu'il faut téj' ce client, ok ?

-...Ok.

C'était tout ce qu'ils pouvaient faire. C'était normal.


Elle aimait bien Loup aussi. Là où Rat était attentionné comme un frère aîné, Nicolas était le second, celui qui te traite normalement, converse normalement, pas comme les autres débiles qui pensent que "autiste" c'est un gros-mot. Il la laissait apprécier la moindre de ses moments d'hyperfixation avec cette tendresse animale dans le regard. Oui, du gang, elle faisait surtout confiance en ces deux-là.

Alors quand la Guerre a éclaté...

Tout le monde se souvient d'où il se tenait le jour où s'est arrivé... Le jour où les Vikings ont enfin décidé d'arrêter net l'ascension du gang d'Ama. Vipère était dans un des hangars, elle vérifiait ses stocks de médicaments et de pansements... Il était tard, il n'y avait plus grand monde, heureusement. Quelques membres de Vikings sont entrés, défonçant le cadenas avant de tirer des coups de semonces... Elle s'était aussitôt planquée dans l'ombre de la pièce, à savoir un coin poussiéreux au-dessus d'une armoire de métal. Les Vikings fouillèrent les lieux un instant, s'approchèrent d'un des plus vieux membres du gang d'Ama. Faucon était un capo, un des moins actifs, pourtant il fut abattu comme la plupart des adultes occupant une place importante dans le gang. Comme Loup avait vu Oldie mourir, Vipère ne put rien faire pour Faucon. Rat ne put rien faire pour Spy. Et la Madonne mourut seule, son meurtre maquillé en overdose.

Beaucoup partirent, se sachant plus du tout en sécurité sous les ordres d'Amadéus... Mais ceux qui n'avaient pas le choix, beaucoup d'enfants, restèrent. Et tout le monde avait peur. Ama ne faisait rien pour arranger les choses pour autant ; il passait son temps à engueuler Loup pour tout et rien à la fois, l'adolescent se taisant et supportant toute la souffrance du gang à lui tout seul, sous les yeux inquiets de Rat. Vipère s'est soudainement levée. :

-Amadéus. Ça suffit. On t'a laissé un peu de temps pour faire ton deuil mais c'est fini. Les gamins du gang ont faim. ON a faim. Et ta petite entreprise, c'est tout ce qu'on a pour survivre.

-Avec quel autorité hein ? Je n'ai plus personne pour gérer la boutique.

-Tu nous as nous.

Un silence suivit sa proposition. Rat, qui parle rarement, avait simplement redressé la tête et baissé les sourcils... De toute la clique, c'était celui qui n'avait pas forcément à rester dans le gang ; il avait des parents, il faisait parti de la classe moyenne. Loup, qui semblait de toute façon soit complétement éteint, soit affreusement en colère depuis la mort d'Oldie, avait choisi de fermer sa gueule. :

-Loup connaît bien le rôle qu'avait Oldie, il le suivait souvent. Rat connaît toutes les planques de Faucon. Et je-...

Elle soignait. Elle empoisonnait. Elle n'était pas utile dans ce moment critique du gang. Il fallait qu'ils puissent garder autant de marchés que possibles pour ne pas perdre leur place. Il fallait qu'elle fasse ce qu'elle avait toujours réussi à éviter jusque là. :

-Je vais remplacer la Madonne.

Les garçons ont voulu contester mais Amadéus les a arrêté en se mettant debout. Il n'a rien dit... Il a posé une main sur leurs épaules, un par un, plongeant son regard dans celui de Vipère en dernier. Cet homme avait au moins dix ans de plus qu'eux, il paraissait en avoir six fois plus à ce moment. Fatigué, il sortit en leur disant qu'il allait y réfléchir.


-Alba. Je vais devenir une pute.

Elle s'apprêtait à prendre un rail mais elle posa sa paille pour regarder sa fille. C'est comme si elle la voyait pour la première fois en quatorze ans. Alba souffla. :

-Ok. Alors il faut que je t'apprenne pleins de trucs.

-Alba...

-Nan, nan, ça va peut-être être gênant mais c'est important, mi corazón. On va commencer par LA leçon NUMERO UN.

-...Le préservatif ?

-Non. Le décalcage de couilles. Mais t'as raison il faut aussi qu'on parle de ça.

Elle a réussi à rire. Un rire triste mais présent. Au final, c'était normal qu'elle s'y mette aussi... Elle ne pouvait rien faire de plus dans ce village maudit.


Personne ne sait où Loup est passé... Mais la vie continuait. Le gang avait des locaux, dans une maisonnée abandonnée, le quartier général qu'ils appellent le Foyer. Parce que c'était devenus leur maison, là où les adultes étaient absents de leurs vies, il n'y avait plus que cet endroit pour les accueillir, les reconnaître. ...Avec des noms de code, mais au moins, ils étaient vivants. Vipère éduquait ses filles -et ses garçons- sur les façons de se protéger, avec l'attention d'une mère veillant sur ses petits. L'ancienne Madonne n'avait jamais porté autant d'attentions à ses prostitué.es, la seule réputation de Vipère rassuraient les membres du gang tout entier. Elle était en contact avec le Chasseur qui, même si ce n'était pas officiel, semblait avoir retourné sa veste, ne respectant plus les Vikings... Mais elle savait la vérité, avec Cynthia. Si Jérémy veillait la nuit pour que les rues du village soient plus sûres, ce n'était que pour la petite sœur qu'il allait avoir... pas pour les putains du coin.

Rat aussi avait sa réputation. Il avait repris les rênes au départ du Loup. Quelque chose avait changé chez lui... Il était toujours le grand frère du groupe mais, quand il avait l'impression qu'on ne le regardait pas, son visage fermé était terrifiant. Des Vikings déménageaient loin d'ici, à la recherche d'une autre vie, mais les rumeurs disaient que c'était Rat, dans une quête vengeresse, qui les éliminait en silence, sans rien laisser derrière lui. Les plus peureux le fuyaient comme la peste. Vipère soignait ses blessures autant qu'elle le pouvait.

Et puis un jour le Loup Noir est revenu. Avec un américain, son "professeur". C'était bizarre... mais elle avait été si heureuse de le revoir, même un peu, même s'il ne semblait pas plus heureux loin du village... C'était sans doute normal quelque part, on ne se débarrasse pas de ces expériences aussi facilement. Après avoir amené le Loup et l'invité étrange jusqu'à Ama, elle a couru dans une des réserves d'armes du gang, là où elle savait qu'elle trouverait Rat. :

-Rat ! Rat, Loup est revenu ! Tu veux le voir ?

-Non.

Réponse catégorique, dure. Ça l'a surprise. Elle avait vu les garçons se battre, souvent, mais elle avait cru qu'ils avaient fini par s'entendre... Rat soupira en reposant le FAMAS qu'il examinait, avant de partir en direction de la sortie. :

-J'ai autre chose à faire que de m'occuper de sa "petite visite".

-Alors... Où tu vas ?

Parce qu'il n'avait que ça à faire pour aujourd'hui... Vérifier les stocks des munitions. Pourquoi il partait maintenant en laissant les autres derrière lui ? Rat ne se retourna pas, il réfléchit un instant, debout devant la porte. :

-Tour de garde.

Il mentait.


Et puis quelques mois après cette histoire, le Chasseur aussi est parti. Apparemment au même endroit où vivait le Loup, d'après Cynthia qui était encore en contact avec eux. C'était vraiment bizarre cette histoire. Les Vikings, vieillissant et maintenant sans leur meilleur Chasseur, s'étaient comme essoufflés dans la nature... Le Jarl avait fait une crise cardiaque lors d'une partie de jambes en l'air trop intense... Vipère n'a jamais démenti ou confirmé si c'était bien un de ses bébés qui en étaient la cause. Mais maintenant qu'Amadéus était un peu vengé, il était devenu le maître des ombres. Le village semblait si calme... toujours aussi affreux, mais bien plus calme. Les gamins n'avaient pas peur de courir dans les ruelles aujourd'hui. Certains utilisaient les parcs, plus seulement pour dealer ou se vendre, mais aussi pour faire de la balançoire. Il y avait moins de grabuges en centre-ville, des caméras avaient été installées.

Un jour où elle avait invité Cynthia à prendre le thé, elles parlaient de cette évolution bienvenue certes, mais surprenante. :

-Ça se trouve, le problème de la délinquance juvénile sera réglé avant que je n'ai le temps de devenir Juge des Enfants !

-C'est un joli espoir...

-Tu passes ton bac bientôt non ? Tu n'as pas envie de faire quelque chose comme moi ?

-J'ai pas les moyens de me payer des études... Et je suis très mauvaise à l'école, j'ai à peine la moyenne.

Et puis, elle ne pouvait pas faire grand chose. Elle avait sa place, au Foyer. Cynthia ne pouvait pas comprendre que si elle tentait de changer quoi que ce soit, de se sortir de sa situation, elle risquait bien plus de souffrances que ce qu'elle endurait depuis toute petite... Elle préférait la violence qu'elle connaissait bien, au moins, il n'y avait pas de surprise.


Elle a eu son bac mention "de justesse" et après ça elle a arrêté l'école pour être aussi souvent que possible au Foyer. Elle prenait parfois un petit boulot de caissière aux différents supermarchés du coin, alternant ses payes avec les différentes primes et allocations auxquelles elle peut prétendre lors de ses périodes de chômage... Sans oublier ce qu'elle gagne en faisant le trottoir. Cela faisait un moment qu'elle se chargeait seule de payer le loyer et les différentes factures... Alba disparaissait de plus en plus souvent, de plus en plus longtemps. Là, elle zonait sur le canapé, en plein crash. Elle pleurait. :

-Tiens, bois un peu d'eau Alba. Tu as mangé aujourd'hui ?

-Je n'ai pas faim.

Justine soupira... Elle n'avait pas le temps de s'occuper d'elle tout de suite, on l'attendait au Foyer.

Ce soir-là, Alba da Silva a fait un AVC. Elle avait 34 ans.


-Est-ce que tu as besoin de moi pour quoi que ce soit Vipère ?

Elle hocha la tête. Rat semblait plus attristé par la situation qu'elle. Tout ce qu'elle arrivait à penser pendant l'enterrement, c'était que le noir lui allait bien, qu'elle devrait plus souvent mettre des robes dans cette couleur. Elle s'attachait à ce détail, n'arrivant pas à ressentir de la tristesse pour cette femme qui l'avait portée sans le savoir. :

-Tu sais Rat, je ne vais pas t'expliquer ce que c'est de vivre comme j'ai vécu, après tout tu fais aussi parti du gang, tu as vu des choses... mais tu n'as pas survécu comme nous. Alba est partie. Ce n'est pas triste, ça allait arriver un jour où l'autre.

-...Tu pleures Justine.

Elle hoche de nouveau la tête, le remerciant qu'il la prévienne. Elle prit une inspiration et essuya ses larmes avant de l'embrasser sagement. :

-C'est parce que j'aurais aimé qu'elle soit ma maman pour au moins une journée. Mais c'est terminé.

C'est terminé. Et elle n'y pouvait rien.


Son compost semblait prêt à l'emploi. Vipère eut une moue satisfaite avant de demander à deux petits de remplir la brouette et d'aller répartir tout ça dans le champ d'à côté. Elle, elle remplit un petit seau et alla s'occuper elle-même de ses plants de belladone. Les "cerises du diable" étaient bientôt prête à la cueillette. C'est une plante en danger d'extinction dans le monde, qui ne pousse pas très bien dans les sols comme on en trouve autour du village... Mais elle en avait pris tellement soin que les siennes étaient en pleine forme ! Que ce soit pour s'en servir de médicaments ou de poisons, elle allait pouvoir bientôt faire le plein d'atropine. :

-Mamá Víbora ? On a fini de mettre l'engrais !

Elle le félicita avant de les libérer, et s'en alla de son côté vers le Foyer. La maisonnée en ruine avait été retapée au cours des années. Elle vibrait d'une activité joyeuse qu'elle n'avait jamais connue. Certes, il y avait toujours des salles entières réservées au séchage de certaines plantes, où l'on conservait différents alcools, où s'entrainaient certains à se défendre... Mais on trouvait aussi certains qui faisaient leurs devoirs ou dessinaient. L'une des plus grandes salles avait maintenant un miroir sur toute la longueur du mur et les fillettes dansaient. Dehors, Rat avait fabriqué une cage pour que les plus sportifs jouent au foot avec un ballon de mousse. Elle toqua à une porte de l'étage avant d'entrer, salua Amadéus en l'embrassant du bout des lèvres. :

-Je reviens des champs. On aura une bonne récolte.

-Hm.

-Dis... Je me disais... elle hésita avant de s'asseoir sur ses genoux. Tout va bien en ce moment ?... Tu pourrais peut-être prendre d'autres capos... En plus je veux dire !

-Tu cherches une remplaçante Vipère ?

-N-non je pensais juste...

Elle se tait devant le regard de son patron. Elle lui fait un câlin, tapotant son dos comme pour rassurer un enfant. Cette homme le cachait bien, mais il avait peur de l'abandon... et après la mort d'Oldie qu'il aimait bien plus que ce qu'il ne voulait l'avouer, et le départ de Loup qui lui avait brisé le cœur, il n'était plus pareil. Ça avait certes contribué au petit havre de paix qu'était devenu le Foyer, maintenant qu'il était plus calme... ...Elle ne pouvait rien faire de plus qu'être là. Alors elle conclut. :

-Ce n'est rien. Je vais voir si Rat à besoin d'aide aujourd'hui.


-Tu as des nouvelles de Loup et Chasseur ? Tu veux bien me raconter ?

Ce que Cynthia lui rapportait des conversations avec les garçons était devenu son feuilleton préféré. L'américain avait en quelque sorte adopté ces deux fous furieux et les avaient comme domptés et ça relevait du miracle à ses yeux. Loup étudiait les sciences, dans un domaine qu'elle n'arrivait jamais à retenir... Mais il vivait tellement mieux, au point qu'il a pu s'acheter la moto de ses rêves. Chasseur avait fait ses études dans la cuisine et avait une copine. Une copine ! Quelle était cette femme assez folle pour accepter un homme pareil ?! Elle les enviait de pouvoir vivre cette famille qu'ils ont pu trouver... C'était d'autant plus dur lorsqu'elle rentrait à l'appartement, seule. Elle se demandait quel genre de plantes poussaient là-bas, si les filles japonaises étaient jolies, si elle serait mieux payée pour une pipe,... Mais elle ne pouvait rien faire de plus qu'écouter. ...et imaginer, un peu.


C'est toujours par vague qu'elle revient... La peur. Il y a des rumeurs qui traînent, à propos d'un gang venant de la "grande" ville la plus proche d'eux. La Marque, apparemment, perdaient des clients qui n'hésitaient pas à faire quelques kilomètres de plus en voiture pour venir se fournir chez Ama. Et c'est moins cher parce qu'ils n'ont plus de concurrents, que tout est paisible,... Une nouvelle "guerre" ne pourrait que les arranger. Ils ont plus d'hommes, y compris des hauts placés à la mairie, ils ont des hôtels où des chambres sont réservées pour leurs trafics... Et s'ils venaient un jour et qu'il leur prenait l'envie de tout rasés ?... Et s'ils étaient déjà là en fait ?...

Le Boss de la Marque est un homme d'une quarantaine d'années, dans un costume taillé, qui semble venir d'un milieu aisé. Même ses gardes du corps sont habillés de costards-cravate hors de prix. Ils étaient clairement plus équipés aussi, leurs oreillettes visibles. Les jeunes d'Amadéus faisaient pâle figure à côté, mais ils étaient là. Ama assis à son bureau, entouré de Rat et Vipère, mais aussi de petits yeux qui les entouraient, discrets, curieux, alertes, bestiaux. :

-Votre zoo est... divertissant.

-Vous ne vous êtes pas seulement déplacés d'aussi loin pour vous divertir...

Amadéus avait choisi d'ignorer le manque de respect. Il écouta attentivement le Boss lui demander de lui céder une partie de ses recettes... en échange de rien. En échange de les laisser tranquille, sous-entendus. Et Amadéus... peut-être qu'il en avait assez. Peut-être qu'il pensait que c'était la meilleure chose à faire... Amadéus lui a tout cédé.


Vipère était en train de faire une crise d'angoisse. Elle hyperventilait en s'accrochant à Rat qui ne disait rien. Il se tenait juste face à elle, prêt à agir quand ça devenait trop grave... Elle réussit, petit à petit, à reprendre le contrôle de son corps... elle n'était pas plus calme pour autant. :

-Je ne veux pas travailler pour la Marque ! Tu sais ce qu'ils font aux prostituées ? Ils ligaturent les trompes des filles !

-...Je sais.

Mais ils ne pouvaient rien y faire. Elle frappa le torse de son ami comme pour animer son esprit de rébellion, pour qu'il essaie de trouver une solution, n'importe quoi ! :

-Ils vont tous nous marquer au fer chauffé à blanc ! Même les petits...

Le nom de la Marque n'avait pas été choisie pour rien... S'ils entraient dedans, il y avait peu de chance qu'ils s'en sortent entiers. Amadéus ou l'ancien Jarl des Vikings étaient des enfants de chœur à côté de ces hommes plus expérimentés, plus dangereux, plus cruels...

Pour la première fois, alors qu'elle avait tant subi depuis sa naissance, Justine était profondément triste, apeurée, faible... Elle était impuissante, comme toujours, mais toute son âme, aujourd'hui, voulait fuir.

Note ; oui, quelqu'un va la chercher inRP donc j'en parle pas là (même si c'est évident qu'on sait qui-de-quoi-où-de-quand mais laissez-moi croire que vous êtes dans le suspense svp).

Le psy va probablement remarquer les différentes séquelles qu'elle ne voit pas vraiment elle-même ; les différents effets qu'ont causé la prise de drogues de sa mère alors qu'elle était in utéro, sa naissance prématurée, les différentes maltraitances,... Elle sera suivie déjà par un médecin ce serait pas mal, mais un psy c'est clairement pas une mauvaise idée.