Il y a quelques semaines, durant mon fameux brunch avec Misao, je me suis un peu senti pousser des ailes en lui promettant un dîner époustouflant - alors que mes compétences en cuisine se limitent à : préparer des oeufs brouillés avec du bacon et réchauffer de la sauce bolognaise en boîte. Autant dire que le défi est de taille, mais impossible de faire marche-arrière (ma fierté ne s'en remettrait pas), aussi j'ai commencé à prendre des cours de cuisine et à faire des petits tests de mon côté. Comme c'est le cas ce soir - je viens squatter la cuisine du réfectoire après les heures de souper, vu que l'accès est libre et que je n'ai pas vraiment de quoi faire la popote convenablement dans ma chambre.

Pour le moment, ça ne se passe pas aussi mal que je le craignais, même si je me cantonne à des recettes très simples. Mais bon, ça ne sert à rien de m'aventurer à faire des plats compliqués si je ne maîtrise pas les bases, hein ! Et ce soir, c'est pâtes carbonara - un classique. Si je me fie à la bonne odeur qui embaume la pièce, je pense que je ne me suis pas trop plantée - mais à voir quand je passerai à la dégustation. J'égoutte les pâtes dans l'évier, un sourire satisfait aux lèvres, quand le bruit de la porte battante retentit dans mon dos, suivi de pas légers. Je termine ce que j'étais en train de faire, avant de me tourner vers le nouveau venu.

Un gamin se tient là, dans son pull trois fois plus grand que lui. Au premier coup d'oeil, avec sa petite taille, ses cheveux et sa peau blancs et ses yeux particuliers, on pourrait le méprendre avec Aylan ; mais non, c'est un garçon que je ne connais pas. Et qui est sans doute atteint de la même maladie que le petit berbère, à en juger par son physique atypique. Je lui souris gentiment en agitant un peu la passoire que je tiens toujours dans les mains.

"Salut ! Tu as un petit creux ? J'étais justement en train de préparer des carbo, si ça te tente de goûter ? J'en ai fait assez pour deux !"

Je retourne vers le plan de travail pour transvaser les pâtes de la passoire à la casserole, avant d'ajouter la sauce dessus. Plus qu'à mettre ça dans une assiette, ajouter un peu de fromage, et c'est parti pour goûter ! Enfin, moi je vais goûter en tout cas ; le gamin, j'attends sa réponse.

Cela faisait maintenant une nuit complète et une journée entière qu'Oscar était arrivé. Il avait fait la rencontre d'un de ses camarades de chambrée, et avait exploré le rez-de-chaussée du bâtiment. C'était plutôt cosy, assez bien aménagé et il y avait de quoi manger, se doucher, faire du sport. Enfin, pour le sport on repasserait : Oscar avait beau s'être remplumé auprès de sa famille d'accueil, il était encore chétif, toujours trop maigre selon le médecin. Alors il cachait ça dans des pantalons larges ou des joggings et avec ses sweatshirts bien-aimés.

En tout cas, ce soir-là, Oscar s'était tellement absorbé dans son livre préféré qu'il en avait oublié d'aller manger. Il ne considérait pas la nourriture comme quelque chose d'intéressant, mais plutôt comme un carburant : il savait qu'il fallait manger pour rester en vie. Il prit donc la direction de la cafétéria en espérant y trouver des restes du repas servi ce soir-là. En entrant, il constata avec bonheur qu'une odeur de pâtes et de carbonara flottait dans l'air. Il se glissa donc comme un petit fantôme en direction de la cuisinière. Il y avait quelqu'un mais il n'y fit pas attention dans un premier temps, tout à sa recherche de nourriture. Un vrai petit mulot. C'est un mouvement qui le tira de ses recherches. La personne (la femme) qui se tenait non loin semblait s'adresser à lui. Oscar mit un moment à comprendre qu'il n'entendrait rien, et pour cause : il avait oublié ses appareils auditifs au dortoir ! Il observa les lèvres de la jeune femme qui agitait sa passoire. Il n'était en général pas très bon pour lire sur les lèvres et cette fois-ci ne fut pas différente des autres. C'est comme si elle parlait une autre langue.

L'ennui, c'est que sans ses appareils auditifs, la voix d'Oscar sonnait à ses propres oreilles comme un bourdonnement, il ne savait donc jamais si il prononçait bien... Et il n'était pas certain qu'elle comprenne la langue des signes. Trop tard de toute façon, elle s'était retournée et semblait occupée à préparer son plat. Oscar s'approcha pour attirer son attention.

- Pa'don, che 'ai 'as en'en'ue... Essaya-t-il.

"Pardon, je ne t'ai pas entendue." Il espérait qu'elle le comprendrait.

L'adolescent ne me répond pas tout de suite, aussi je retourne à mes préparations pour lui laisser le temps de se décider. Il s'approche finalement de moi, et j'abandonne une fois de plus ma casserole pour me retourner vers lui avec un sourire. Je fronce légèrement les sourcils à sa réponse, que je ne comprends pas - en revanche, cette prononciation un peu étrange... Je l'ai déjà entendue. Dans une série que je regardais, l'un des personnage était sourd de naissance mais tout de même capable de parler - d'une manière un peu atypique. Comme lui.

"Désolée, je n'ai pas compris ce que tu as dit... Est-ce que... Est-ce que tu es sourd ?"

Je parle lentement pour qu'il puisse lire sur mes lèvres - si tant est qu'il y parvienne, et qu'il parle anglais aussi, surtout... En lui posant cette question, je porte ma main à mes oreilles et les tapote doucement, pour qu'il ait au moins une idée de ce que je raconte. Et maintenant, je me fais la réflexion que si ce n'est pas le cas, et qu'il était juste distrait ou quoi, je dois avoir l'air sacrément débile ! Mais bon.

Le garçon a l'air de capter ce que je lui dis, et il hoche doucement la tête en réponse. Mh, je vois. On pourrait peut-être communiquer par écrit ? Parce que malheureusement, je ne connais pas du tout la langue des signes... Ou alors, peut-être que... Je suis Sonore, après tout, et même si je n'y connais pas grand-chose à la surdité, je devrais être capable de me faire entendre tout de même, si je pousse le son directement dans son oreille interne ? C'est une manipulation assez complexe, vu que cette partie du corps est extrêmement sensible ; mais je pense en être capable. C'est assez similaire à la façon d'utiliser le pouvoir de Sonore pour pratiquer l'hypnose et la suggestion. Je m'approche un peu du garçon et lève doucement les mains, de part et d'autre de son visage, comme si j'allais toucher ses tempes - mais j'arrête mon geste avant d'aller jusque là, et je baisse les yeux vers lui avec un sourire.

"Je peux ?"

Je lui demande avant de continuer - on ne touche pas quelqu'un sans qu'il soit d'accord. Déjà que je suis un peu proche de lui, là. J'espère ne pas l'intimider, au moins, parce qu'il est quand même sacrément plus petit que moi en fait...

Visiblement, la tentative d'Oscar pour communiquer sans ses appareils auditifs n'est pas vraiment fructueuse. La jeune femme ne semble pas le comprendre, ce qui l'agace un peu. Oh, il n'est pas agacé par la femme, mais plus par lui-même, d'avoir oublié ses appareils dans la chambre. Il hésite même un instant à aller les chercher, mais son attention est de nouveaux captée par la grande brune. Il voit bien qu'elle fait un effort pour ralentir son débit de parole, mais même comme ça, Oscar ne comprends pas vraiment. Du coup, il incline la tête sur le côté pour signifier qu'il ne comprends pas, et la femme porte une main à son oreille, un air interrogateur sur le visage. Cette fois, c'est facile ! Elle lui demande si il est sourd. Bon, techniquement, Oscar est malentendant sévère, mais c'est à peu près la même chose ! Alors il acquiesce d'un mouvement de la tête.

L'odeur de nourriture commence à lui faire tourner la tête, il reconnaît bien là les signe de la faim, la vraie. Celle qui vous tord le ventre et vous donne envie de manger n'importe quoi du moment que ça vous rassasie. C'est pourquoi il ne se rend pas compte tout de suite que la femme devant lui s'est rapprochée. Elle est beaucoup plus grande que lui, Oscar le remarque à présent, et ça l'intimide pas mal. Alors quand elle tend les mains vers son visage, il recule un peu. Son sourire est rassurant, mais le médecin aussi il a un sourire rassurant juste avant de le piquer avec son vaccin. Il ne se fera pas avoir. Jusqu'à ce qu'elle essaie à nouveau de parler. Elle a l'air de lui demander quelque chose... Elle veut le toucher ? Pourquoi faire ? Enfin, ça ne dérange pas Oscar, tant qu'elle n'essaie pas de lui crever un œil avec ses ongles. Comme dans cette scène du Trône de Fer... Il est déjà sourd, manquerait plus qu'il devienne malvoyant.

- Oui.

Au moins, ça il est à peu près sûr de l'avoir prononcé correctement... Il se pliera à tout ce qu'elle veut, du moment que ça signifie qu'il peut manger un peu. Juste assez pour ne pas avoir trop faim pendant la nuit et pouvoir dormir confortablement. Il aime bien dormir, les rêves sont souvent plus intéressants que la réalité. Au moins dans les rêves, la magie, les dragons, les sorciers, les combats épiques, tout existe, et tout est sans danger. Si il est touché, il a juste à se réveiller ! Donc voilà, il ferme les yeux et laisse la madame faire ce qu'elle veut.

Après quelques difficultés, je parviens finalement à me faire plus ou moins comprendre par l'adolescent - du moins, suffisamment pour qu'il acquiesce quand je lui demande s'il est sourd. Il a l'air un peu... Contrarié, et je me demande s'il m'a trouvée impolie ou trop intrusive à poser la question frontalement comme je l'ai fait. Mais en même temps, on n'aurait pas été très loin si on avait tenté de perdurer dans ce dialogue de sourd... Bref, mauvais jeu de mots.

Plutôt que de tenter la communication par écrit (parce que rien ne me dit qu'il comprend l'anglais, au final), je décide de tenter d'utiliser mon pouvoir de Sonore pour me faire entendre. Je n'ai jamais fait ça, donc je ne suis même pas sûre que ça puisse fonctionner, mais c'est l'occasion d'essayer j'imagine... Je m'approche alors du gamin en levant les mains vers sa tête - la manipulation est suffisamment complexe pour que j'aie besoin d'un contact direct, du moins dans un premier temps - avant de m'arrêter pour lui demander s'il est d'accord que je pose mes mains sur lui. Il se rétracte un peu, au début, sans doute intimidé par cette proximité avec une inconnue totale (et une adulte, en plus), avant de finalement acquiescer. A voix haute, cette fois - je le comprends bien, malgré cette voix toujours un peu étrange.

"D'accord, alors... Ne bouge pas."

Je pose mes paumes doucement au niveau du haut de sa mâchoire, pouces derrières ses oreilles et index au niveau du tragus - histoire de sentir les vibrations et de ne pas lui abîmer les oreilles encore plus qu'elles ne le sont déjà ! Je me concentre, et envoie un son amplifié (mais pas trop), directement dans son conduit auditif, au niveau de l'oreille interne. Je le sens tressaillir légèrement sous mes mains ; j'imagine donc que ça a fonctionné.

"Tu m'entends ? Dis-moi si c'est trop fort ou pas assez fort... Je n'ai jamais tenté cette manipulation avant, mais je crois que je dois pouvoir jouer un peu sur le volume..."

Bon, je n'ai jamais rencontré personne qui soit malentendant avant, donc je ne vois pas trop comment j'aurais pu tester cette fonctionnalité, aussi. Mais je suis plutôt contente que ça fonctionne ; ça va être beaucoup plus pratique pour discuter ! Je lui souris gentiment, avant de tourner la tête en pointant le menton vers mon plat de pâtes, gardant toujours les mains sur son visage pour maintenir la connexion.

"Je viens de préparer des carbo, et je te proposais de manger avec moi, si ça te dit ? Il y a assez pour deux ! J'suis pas une pro de la cuisine par contre, mais du coup ça m'aiderait bien d'avoir un avis extérieur, ahah..."

Même si, bon, je doute qu'un petit ado tout frêle comme lui ose me le dire cash, si ce que j'ai préparé est dégueulasse...

Oscar observa la femme lui parler à nouveau. Si elle savait qu'il ne l'entendait pas, pourquoi lui parlait-elle toujours ? Est-ce que c'était le même phénomène qu'on observait chez les propriétaires d'animaux de compagnie, ceux qui leur parlaient même en sachant que l'animal ne comprendrait pas..? En tout cas, Oscar garda les yeux fixés sur la grande femme tandis qu'elle approchait ses mains de son visage.

Être touché par une inconnue c'est quand même vraiment étrange... Se dit Oscar alors que les doigts fins de la brune se posaient sur sa mâchoire, autour de ses oreilles. Pensait-elle pouvoir l'aider à y entendre mieux ? Elle allait avoir du mal : son souci était de naissance, lié à son albinisme, il le savait maintenant. Il ne s'attendait à rien, alors quand la voix de la femme lui parvint comme à travers un vieux magnétophone, Oscar eut du mal à réprimer un sursaut. Ses yeux trop grands pour son visage s'écarquillèrent.

- Oui, non, ça va.

Il entendait aussi sa propre voix ! Grâce à ça, sa prononciation s'améliora et il put se faire comprendre clairement. La voix de la jeune femme était douce et mélodieuse, assez agréable aux oreilles d'Oscar. C'est sûrement ce qui le poussa à accepter sa proposition. Ça, et la faim qui le tenaillait.

- D'accord, je veux bien manger aussi. Merci.

Oscar a eu un semblant d'éducation dans sa famille d'accueil, le reste il l'a lu dans les livres. Mais c'est un garçon poli qui, même si il ne sourit pas beaucoup, sait dire "bonjour", "merci" et "s'il vous plaît". Ça implique aussi qu'il ne dira pas comme ça, sans tact, si la cuisine de la gentille femme est mauvaise. Et puis, toute nourriture est bonne à prendre. C'est juste un carburant pour vivre, alors que ce soit bon ou pas, ça ne fait pas une différence. Toujours selon le petit albinos, hein.

Il observa donc la femme lui préparer une assiette et en attendant, trouva un petit bout de papier et un crayon abandonnés sur une table. Il les attrapa et retourna auprès de la grande brune. Bien sûr, elle avait dû le lâcher pour pouvoir lui faire une assiette de pâtes carbo, et il n'entendait à nouveau plus grand chose. C'est pour ça qu'il n'écrivit qu'un mot sur le petit papier : "Oscar". Il tapota le bras de l'inconnue et lui tendit le papier, espérant qu'elle comprendrait. Et, profitant qu'elle le regardait, il signa son prénom. Normalement, le signe qui va avec le prénom de quelqu'un lui est donné par une autre personne. Là, c'est Naël qui le lui avait donné. Il signa un petit chapeau de sorcier. Oscar se diminuait en "Oz", comme dans le magicien d'Oz, et c'est de là que venait son signe à lui.

Le garçon me laisse poser mes mains autour de ses oreilles sans broncher ; à vrai dire, il est même étrangement calme et docile, en dehors de ce léger sursaut et de ses yeux écarquillés quand le son lui parvient finalement. Je suis presque aussi étonnée que lui que la manipulation fonctionne ; mais je suis surtout plutôt contente de mon coup. C'est toujours cool, de trouver de nouvelles applications de ses pouvoirs - surtout quand elles sont carrément pratiques, comme c'est le cas ici ! Je souris en hochant la tête quand l'adolescent confirme que le volume est bon pour lui, avant d'accepter ma proposition de partager mon repas.

"D'accord, tant mieux alors ! Je vais préparer les assiettes, ça ne prendra que deux minutes, tu peux aller t'installer dans le réfectoire en attendant, si tu veux."

Ce sera plus confortable que de manger assis sur le plan de travail de la cuisine, tout de même... Le garçon s'éloigne un peu, pendant que je mélange les pâtes dans la casserole pour que la sauce s'en imprègne bien, avant de diviser le tout dans deux assiettes - mais il revient rapidement vers moi en me tendant un papier. Je souris en lisant son prénom, Oscar, et hoche la tête pour indiquer que j'ai compris, alors qu'il esquisse un signe semblable à un petit chapeau. Est-ce que c'est comme ça qu'on dit Oscar, en langue des signes ? J'approche ma main de son oreille - une seule, cette fois-ci - et prends le temps de retrouver les sensations précédentes avant de lui répondre ;

"Enchantée, Oscar. Moi je m'appelle Pandora. Je ne sais pas s'il y a un signe pour mon prénom..."

Mais peut-être que oui, vu que c'est tiré d'un personnage mythologique ? J'enlève ensuite ma main, attrape mon assiette et lui tends la sienne, avant de l'inviter à se diriger vers le réfectoire, qui est vide à cette heure. Je reste à côté de lui alors que nous marchons ; je me dis que ça doit être un peu stressant d'avoir une personne derrière son dos quand on ne peut pas l'entendre.

La femme était vraiment gentille. Elle faisait plein d'efforts pour communiquer avec Oscar. Le garçon le voyait bien, même si il ne comprenait pas trop comment, juste en le touchant, elle pouvait faire en sorte qu'il l'entende. Enfin, pour l'instant ce qui lui importait c'était de rester sage pour avoir son assiette de pâtes. Alors quand elle lui dit de retourner au réfectoire, c'est ce qu'il commença par faire, avant de se rendre compte qu'il ne s'était même pas présenté. Alors il avait trouvé un papier, un crayon et avait écrit son nom. En revenant, il l'avait donné à la grande brune qui l'avait lu avec attention. Il avait même signé son nom, au cas où. Où quoi ? Il ne savait pas trop mais voilà, au moins elle savait.

En réponse, elle se pencha de nouveau vers lui et posa de nouveau ses doigts contre son oreille. Et les sons revinrent. C'était très déroutant pour le jeune albinos qui tressaillit à nouveau. Le volume allait, mais la disparition et la réapparition des sons, faite de manière aussi rapprochée, c'était beaucoup pour lui. Heureusement la voix de la femme était douce et l'apaisa un peu. Elle lui dit s'appeler Pandora. Oscar chercha dans son esprit si il se rappelait d'un signe lié à ce nom, mais pas vraiment. Il profita qu'elle ait toujours la main sur son visage pour lui répondre à l'oral.

- Je sais pas. Je pense que oui, mais j'ne l'connais pas. Puis "Pandora" et "Pandore" c'est pas la même chose, vous êtes pas la Pandore de la mythologie.

Il avait appris la langue des signes par lui-même, avec l'aide de Naël qui avait demandé à apprendre celle-ci en plus de ses cours de primaire. En plus, Oscar signait dans un mélange de langue des signes française et anglaise, qui n'étaient pas exactement les mêmes.
La jeune femme, non, Pandora, retira sa main et lui tendit son assiette. Il y avait là-dedans de quoi nourrir trois fois le garçon, mais il ne s'en plaignit pas. Quand on a manqué de nourriture pendant si longtemps, on ne rechigne pas à un peu de rab. Il marcha avec la jeune femme jusqu'à une table du réfectoire et s'y assit en faisant attention de ne pas renverser l'assiette. Puis il attrapa ses couverts, avant de les reposer.

"Bon appétit" Signa-t-il.

Il reprit ensuite les couverts et attaqua la nourriture à belles dents. Les pâtes étaient bonnes et la sauce pas trop salée, c'était tout à fait convenable. Oscar se demanda si c'était un plat qu'on qualifiait de "bon" d'habitude. Et la réponse, fournie par quelques souvenirs de repas avec sa famille d'accueil, lui sembla être positive. Alors il se tourna vers Pandora et se frotta le ventre avec un sourire, pour lui dire que c'était bon.

L'adolescent se présente sous le nom d'Oscar et effectue le signe associé ; en réponse, j'approche à nouveau ma main de son visage pour qu'il puisse m'entendre, et lui donne mon prénom. Je penche légèrement la tête sur le côté, un peu confuse alors qu'il m'explique que "Pandora" est différent de "Pandore" (que je n'ai jamais entendu) ; ce doit être une différence au niveau de la langue, j'imagine ?

"Oh, tu parles quelle langue, à la base ? Je ne savais pas que ce nom était différent dans d'autres langues... Mais je suis anglaise - et chez nous, Pandora, c'est bien le prénom de la fille à la boîte ! Ma mère était une grande fan de mythologie, tu vois."

Je laisse échapper un petit rire à cette remarque. C'était une grande fan de mythologie, et aussi une grande adepte de l'adage "la curiosité est un vilain défaut" - je suppose que le prénom était tout trouvé, du coup... Mais je l'aime bien, malgré la connotation négative que certains lui donnent.

Nous passons ensuite au réfectoire, je laisse l'adolescent choisir une table et s'installer. Il attrape ses couverts mais les repose rapidement, avant d'effectuer un nouveau signe. Et puis il commence finalement à manger. Est-ce qu'il me souhaitait un bon appétit ? Je souris doucement et essaye de copier le geste qu'il vient de faire, mais je ne suis pas certaine que ce soit correct (enfin, il aura bien compris l'intention, je pense !). J'entame mon assiette à mon tour ; et je suis plutôt satisfaite du résultat, étant donné que c'est la première fois que je teste cette recette ! Sans prétendre devenir une grande cheffe cuistot, il semblerait tout de même que je ne sois pas un cas aussi désespéré que je l'avais initialement pensé...

"Oh, merci !"

Je lève le pouce en l'air avec un sourire, alors qu'Oscar me fait signe qu'il apprécie le repas lui aussi. C'est étrange, ce réflexe de parler pour combler le vide, alors même que je sais que la personne en face ne peut pas m'entendre. Mais ça me semblerait tellement bizarre de juste faire des gestes sans rien dire !

Je termine rapidement mon assiette, et repose calmement mes couverts en attendant que le gamin en fasse de même. Il a l'air de peiner un peu ; c'est vrai que je lui ai mis une portion comme la mienne, alors qu'il fait la moitié de ma taille... Je souris et approche ma main de sa tête une nouvelle fois pour lui parler.

"Tu n'es pas obligé de tout finir, si tu n'as plus faim ! Je t'en ai mis un peu beaucoup, je crois... Au fait, ce n'est pas super pratique de discuter comme ça - je vais essayer de maintenir le lien auditif sans te toucher, d'accord ... ?"

Je le préviens, parce que je vais devoir me concentrer et que je risque de tirer une drôle de tête, du coup... Eh bien, cette tête-là, justement ; les sourcils froncés et une petite moue sur les lèvres, que j'esquisse alors que j'éloigne ma main de son visage tout en forçant sur mon pouvoir pour maintenir la connexion entre nous. Ca me demande plus d'efforts sans le toucher, mais je devrais être capable de tenir un petit moment tout de même.

"Est-ce que tu m'entends toujours, ça va ? Tu me le dis, si tu veux que j'arrête, hein... Ca doit être bizarre pour toi, j'imagine ?"

S'il a l'habitude de ne rien entendre, tous ces sons d'un coup... Bien que, je ne suis pas sûre de l'effet qu'a mon pouvoir, au final ; est-ce qu'il entend seulement ma voix, grâce à ma magie, ou bien tout le reste autour également ?

Pandora prit un air confus quand Oscar tenta de lui expliquer que "Pandora" et "Pandore" ne sont pas pareils. Elle continuait à lui parler avec une main près de son oreille, ce qui est vraiment déroutant pour le garçon.

- Je parle Français... Dit-il, un peu déstabilisé. En France, la fille de la mythologie, elle s'appelle Pandore, et on appelle sa boîte "la boîte de Pandore"...

En même temps qu'il expliquait, Oscar signa les mots. Puis il reprit la parole :

- Mais de toute façon, un prénom en langue des signes ça se fait avec les lettres jusqu'à ce que quelqu'un t'offre un signe qui te correspond. Moi, j'aime bien lire et "Oscar", ça se rétrécit en "Oz", comme dans l'histoire du magicien d'Oz. Alors Naël - c'est mon frère - m'a donné ce signe, en référence au magicien.

Il conclut en signant de nouveau son prénom : un petit chapeau de sorcier. Il espérait qu'il avait été clair. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas autant parlé, et sa gorge était déjà toute sèche.

Il accompagna ensuite Pandora au réfectoire, affublé de la plus grande plâtrée de pâtes qu'il ait jamais vu de sa vie. Une fois attablé, il signa "bon appétit". Comme la grande brune n'avait plus de contact avec lui, il était de nouveau entouré du quasi-silence cotonneux dont il avait l'habitude. Pandora l'observa et tenta de reproduire son signe. C'était maladroit, mais le signe était assez facile à faire : il était composé d'une main à plat paume en bas et d'un poing qu'on vient tapoter sur le dos de l'autre main. Oscar sourit à Pandora. C'était gentil d'essayer de s'adapter à lui. Il commença à manger et le plat était mangeable, voire même bon, même si Oscar avait toujours eu du mal à différencier un plat "bon" d'un plat "mangeable" ou "mauvais". Il mangeait ce qu'on lui donnait voilà tout.

Pourtant, il ne voulait pas froisser Pandora, et comme le plat lui convenait très bien, il montra à la jeune femme qu'il se régalait. Elle lui sourit et dit quelque chose en levant le pouce. Il réussit à lire "merci" sur ses lèvres grâce à ses bases en anglais. Pour lui montrer le geste, il signa "merci" tout en essayant de le dire à voix haute.

- Me'ci.

Puis il retourna à son plat. Il avait englouti la moitié de l'assiette quand son estomac commença à crier grâce. Mais pour le jeune garçon qui avait passé des années à manger les restes, c'était une ressource tellement importante qu'il continua à manger, bien que beaucoup plus lentement. La main de Pandora le fit sursauter, il était si concentré sur son assiette (comme si il pouvait tout téléporter dans son ventre d'un seul regard) qu'il ne l'avait pas vue bouger. Le son revint, l'envahissant un peu brusquement. Il se concentra sur la voix de Pandora.

- Non, ça va je peux finir. Oh, d'accord.

Il laissa la jeune femme faire... ce qu'elle avait à faire, sa magie ? En tout cas quand elle s'éloigna, le son resta. C'était étrange, il entendait sans la sensation de ses appareils dans les oreilles. Elle tirait aussi une drôle de tête qui arracha un petit rire à Oscar. Il posa ses mains devant sa bouche.

- Pardon, je me moque pas... Je vous entends toujours... Mais je peux aller chercher mes appareils si c'est mieux ?

Après tout ils n'étaient pas loin, il pouvait très bien faire l'aller-retour.

Donc, c'est bien ce que je pensais - une petite différence de langage à la base de cette incompréhension. C'est marrant, j'aurais pensé que les personnages historiques ou mythologiques avaient le même nom quelle que soit la langue, mais il faut croire que non... Je hoche donc la tête pour signifier que j'ai compris ce qu'il me dit, avant de sourire quand il me parle de l'attribution des prénoms en langue des signes.

"Oh, je vois... C'est une chouette façon de faire ! Et c'est bien trouvé comme signe, du coup - surtout maintenant que tu es à Terrae ! D'ailleurs, tu es de quelle affinité ?"

Clairement, ce n'est pas un petit Tonnerre, hein. Une fois les assiettes servies, nous nous dirigeons en direction du réfectoire pour nous installer et commencer à manger. Oscar me montre comment signer "bon appétit", et puis, un peu plus tard, il me montre également le geste pour dire merci. Je reproduis les signes un peu maladroitement, essayant de les mémoriser - même si, il y a de grandes chances que j'ai oublié d'ici ce soir hein, mais bon.

Voyant qu'il galère un peu à terminer son assiette, je rétablis la connexion entre nous en approchant ma main de son oreille, pour lui dire en souriant qu'il n'est pas obligé de tout finir. Mais visiblement, il en a envie - et ça me fait étrangement plaisir, je suis un peu fière de mon coup quand même. Oui, c'est que des carbo je sais, rho ça va !

"Ok, laisse-moi juste deux minutes..."

Je souligne, fronçant légèrement les sourcils, avant d'éloigner ma main de son visage tout en forçant sur ma magie pour maintenir le lien sonore. Visiblement, ça fonctionne - et je dois avoir tiré une bonne tête de constipée, vu que l'adolescent commence doucement à rire. Il s'excuse directement, et j'agite une main dans le vide en souriant, pour lui signifier qu'il n'y a pas de quoi - je ne vais pas me vexer pour si peu, tout de même !

"Oh ben, c'est comme tu préfères ! C'est juste un peu compliqué de doser les pouvoirs convenablement au début, pour ne pas te hurler dans l'oreille non plus, ahah - mais ça va, j'ai capté le truc maintenant, ça devrait aller... Mais si tu entends mieux avec tes appareils, on peut aller les chercher !"

Je dis "on" comme si c'était tout naturel que je l'accompagne ; alors qu'en fait, il utilisait peut-être juste cette excuse pour s'esquiver...

Pandora sembla comprendre ce qu'Oscar tentait de lui expliquer. Elle complimenta même son nom signé, ce qui fit énormément plaisir Oscar. Il sourit joyeusement et voulut la remercier mais la question de la brune le laissa pensif. Oh, il avait eu un topo au sujet des histoires de magie présentes à Terrae, mais il était encore un peu dubitatif... Après tout, qui avait déjà entendu parler d'une académie qui donnait des pouvoirs à ses résidents ? En tout cas pas lui. Ce n'était pas vraiment surprenant, étant donné qu'il avait passé la majeure partie de sa vie dans une petite chambre ou un cagibi, sans avoir réellement d'accès à l'information ou l'actualité. Sinon, il aurait bien sûr entendu parler de l'Eclipse...

- Je sais pas... C'est comme les maisons dans Harry Potter non ? C'est en fonction du caractère alors ?

La question du garçon venait d'une curiosité sincère. Il avait lu tous les Harry Potter et avait toujours été persuadé qu'il irait soit à Sergaigle soit à Poufsouffle. Quels étaient les équivalents de ces maisons dans les affinités de Terrae ? Il y réfléchit en se dirigeant vers le réfectoire avec son assiette. Pendant qu'il mangeait, il apprit à Pandora à signer "merci" et "bon appétit". Malgré sa maladresse, Oscar la trouva touchante. Après un nouvel échange durant lequel elle avait gardé sa main près de son oreille, la grande brune s'éloigna sans briser la connexion. Cette fois-ci, Oscar en était convaincu : la gentille dame qui le nourrissait était aussi une magicienne ! Tout ce qu'on lui avait dit sur les pouvoirs étaient vrai !! Sans réellement savoir pourquoi, ça l'enthousiasmait beaucoup. Il proposa ensuite à Pandora d'aller chercher ses appareils, étant donné que ce tour de magie devait être difficile. Sa réponse était encore une fois très gentille.

- J'entends très bien avec votre tour de magie, mais ça doit être fatigant... Alors que mes appareils eux, je peux les recharger. Alors il vaut mieux que j'utilise les appareils !

Il termina (difficilement) son assiette et retint un hoquet. Puis il se leva et fit signe à Pandora.

- On va les chercher ? Promis après je fais la vaisselle. Dit-il.

Il ne voulait pas qu'elle se fatigue alors qu'elle l'avait déjà nourri gratuitement.

Je lâche un petit rire amusé à la réflexion d'Oscar ; je n'y avais jamais vraiment pensé, mais c'est vrai que la comparaison avec les maisons de Poudlard n'est pas mauvaise, dans le fond... Au vu de sa réponse, je comprends qu'il est encore Novice - mais qu'il a visiblement déjà reçu un petit topo sur les pouvoirs et affinités de Terrae. Et c'est tant mieux, je m'emmêle toujours les pinceaux quand je dois donner ces explications aux nouveaux - ce n'est clairement pas la partie que je préfère dans mon job de Préfète, hein...

"C'est une bonne métaphore, oui ! Les affinités dépendent de la personnalité, même si les critères d'attribution sont parfois un peu flous... Mais dans les grandes lignes, c'est ça ! Du coup, tu es encore Novice, toi ?"

Nous passons ensuite de la cuisine au réfectoire pour manger ; dans le silence, vu que l'adolescent ne peut plus m'entendre à présent. Et c'est d'ailleurs l'occasion de me montrer quelques signes basiques, que je me force à mémoriser pour notre prochaine rencontre - ou si je tombe sur une autre personne malentendante, ce qui est possible aussi.

Une fois notre repas terminé, je rétablis le lien sonore entre nous ; d'abord grâce au contact physique, et ensuite en chipotant un peu avec mes pouvoirs, sans le toucher. C'est un bon entraînement, mine de rien ! Il propose malgré tout d'aller chercher ses appareils auditifs pour que je n'ai pas besoin de me fatiguer, et je hoche la tête avec un sourire.

"D'accord, comme tu préfères ! C'est vrai que c'est nouveau pour moi, cette manipulation, je ne sais pas si je serai capable de la maintenir très longtemps... Je suis Sonore, au fait ; ce qui veut dire que je peux manipuler les ondes sonores, les ultrasons et tout ça..."

Et accessoirement, pratiquer l'envoûtement et la suggestion - mais ça, je préfère ne pas le mentionner, parce que c'est une partie de mon pouvoir qui me met mal à l'aise, et que je l'exploite assez peu. Enfin, je l'ai quand même développé durant mes entraînements intensifs avec Ryu (parce que ça peut s'avérer utile sur le terrain, en mission), mais je ne l'utilise pas du tout dans la vie de tous les jours.

Oscar termine ensuite son assiette - je suis impressionnée, vu son gabarit, je me demande bien où il a réussi à mettre tout ça ! Mais c'est qu'il devait avoir faim... Je hoche à nouveau la tête en souriant alors qu'il propose de se diriger vers les dortoirs pour aller chercher ses aides auditives. Ouf, c'est qu'il n'en a pas encore marre de moi, alors !

"D'accord, allons-y ! Et ne t'en fais pas pour ça, il y a de grands lave-vaisselles industriels dans la cuisine, on n'a qu'à tout mettre dedans avant de partir !"

L'un des grands avantages à venir faire sa popote ici plutôt que dans sa propre chambre ! Et sur ce, je me lève de table et rassemble les assiettes et couverts pour les ramener en cuisine. Je les empile dans le lave-vaisselle déjà presque plein, ainsi que les casseroles et ustensiles que j'ai utilisés plus tôt. Une fois fait, il est temps d'emboîter le pas au jeune garçon, en direction des dortoirs. Ca fait une paye que je n'y ai pas mis les pieds, tiens...

Le rire. Encore un son auquel Oscar n'était pas habitué. Bon, heureusement c'est un son agréable et il arracha même un sourire au garçon. Mais il se dit intérieurement qu'il espérait l'entendre souvent à Terrae, ce son plein de couleurs qui fait comme des ronds à la surface des autres bruits. Pandora lui expliqua un peu mieux comment cette histoire de pouvoirs fonctionnait et Oscar se rendit compte qu'en fait... Il ne connaissait pas grand chose à ce sujet. Et que non seulement ça semblait important, mais en plus ça l'intéressait ! Il hocha la tête à la question de la grande brune.

- Oui j'ai pas d'pouvoirs. Vous par contre, vous en avez.

Ce n'était pas une question, il explosait juste un fait. Cependant, sa curiosité était piquée. Il voulait savoir.

- Dites, vous pensez que j'aurais quoi comme pouvoir ?

Il avait bien sûr retenu toute la liste des pouvoirs que le Master lui avait énoncé pendant le voyage. Que des pouvoirs élémentaires, ce qui l'avait étonné. D'autant plus que Pandora n'avait pas utilisé d'élément pour l'aider à l'entendre... Où peut-être que si ? Il y a de l'eau dans une oreille, peut-être qu'elle était Eau et jouait avec ça. En plus de l'Eau, il y avait la Terre, l'Air, le Tonnerre et le Feu.

Il suivit ensuite et mangea avec Pandora, finissant tant bien que mal l'assiette qu'elle lui avait donné. Il lui apprit aussi quelques mots de langue des signes, parce qu'en mangeant, elle avait dû lâcher Oscar et couper son pouvoir. Elle était maladroite quand elle essayait de recopier les signes et Oscar trouva ça très mignon, pour une adulte. Après le repas, Pandora renoua le contact avec Oscar et réussit même à distance. Le garçon la regarda, impressionné. Il lui proposa tout de même d'aller au dortoir pour récupérer ses aides. La dame l'avait nourri gratuitement, hors de question de la fatiguer avec son handicap. D'ailleurs, il insista même. Elle accepta et lui révéla qu'elle était Sonore. D'abord, Oscar cligna des yeux, confus. Bien sûr qu'elle était sonore, tout le monde l'était ! Elle faisait du bruit mais il aimait bien sa voix donc il se prépara à lui dire que ça ne le gênait pas quand elle compléta. C'était donc son pouvoir !

- Mais alors, vous avez pas de pouvoir d'élément ? s'étonna Oscar.

C'était bizarre ! Il devait y avoir plus de pouvoir qu'il avait initialement anticipé. Son assiette finie, Oscar proposa de bouger vers les dortoirs prendre ses appareils auditifs avant de revenir faire la vaisselle. C'est là que Pandora lui apprit l'existence de supers-laves-vaisselle. Une invention vraiment pratique, les lave-vaisselles si vous lui demandiez. En voyant la grande brune ramasser les assiettes et couverts, Oscar s'empressa d'attraper les verres et de suivre Pandora, un peu à la manière d'un poussin. Il mit les verres dans le lave-vaisselle puis prit la direction du dortoir des garçons.

L'endroit était vide, alors Oscar fit signe à Pandora d'entrer et se faufila jusqu'à son lit dans le coin opposé de la pièce. Ses appareils trônaient sur sa table de chevet. On pourrait penser qu'il les aurait cachés pour ne pas se les faire voler, mais comme avait fait remarquer son frère : qui voudrait voler les appareils auditifs de quelqu'un d'autre ? Ça ne sert à rien. En plus, Oscar avait toujours entendu qu'il y avait beaucoup moins de voleurs au Japon qu'en France. Donc il les avait laissés là. Il les enfila et les alluma. Pour la première fois il entendit le petit bruit de fond, comme un bruit blanc, que produisait les aides.

- Voilà, comme ça je vous entends tout le temps. Dit Oscar, son air sérieux toujours plaqué sur son visage.

Oscar confirme qu'il n'a pas encore de pouvoirs, et je hoche la tête quand il souligne que moi, j'en ai - forcément, nous n'aurions pas été capables de communiquer du tout, sans ça... Je réfléchis ensuite à sa question, penchant légèrement la tête sur le côté.

"Mmh, c'est difficile à dire après avoir parlé pendant seulement quelques minutes, mais... De manière générale, les Tonnerres sont hyperactifs et les Feux, grande gueule - donc je dirais que ça n'a pas l'air de te correspondre. Un des trois autres, du coup ? Tu aurais une préférence ?"

Même si on ne choisit pas, mais bon... C'est un peu l'activité favorite des Novices, d'essayer de deviner quelle affinité sera la leur. La majorité des gens que je côtoie sont satisfaits du pouvoir dont ils ont hérité (moi aussi, d'ailleurs) - les seuls qui n'ont pas l'air plus emballés que ça, ce sont Allen et Misao. Mais cela dit, c'est plutôt la magie tout court qui leur pose problème, pas spécialement la catégorie dans laquelle ils ont atterri...

Nous mangeons ensuite, dans le calme, jusqu'à ce que je rétablisse le lien sonore entre nous - l'adolescent m'observe me concentrer sur mon pouvoir jusqu'à ce que je réussisse à maintenir la connexion sans avoir besoin de le toucher, et je lui explique ensuite que je suis Sonore ; même si ça me semble tomber sous le sens, vu la situation. Je hausse un sourcil étonné face à sa réponse, avant de lâcher un petit rire mêlé d'un soupir - bon, il semblerait que la personne qui lui a fait un topo sur les pouvoirs n'ait pas fait un si bon boulot que ça...

"Ah si, si - je suis Air également ! On ne t'a peut-être pas donné l'explication complète sur les affinités, en fait... Mais, en plus du pouvoir élémentaire de base, il y a également un pouvoir secondaire, qui est lié aux astres : Solaire ou Lunaire. Celui-là, je t'avoue que je n'ai jamais trop compris comment il était attribué, par contre... Moi je suis Air Lunaire, donc Air Sonore. Ceux liés aux Soleil sont Soigneurs... Donc au total, il y a dix affinités différentes à Terrae !"

Est-ce que mon explication est claire ? Je ne suis carrément pas la meilleure quand il est question de théorie... J'ai un vague souvenir de flyers explicatifs à distribuer aux nouveaux - une initiative d'Afya, il me semble ? - mais je n'en ai pas sous la main. Il y en a peut-être en salle commune, ça vaudrait le coup d'y faire un tour quand on aura récupéré ses appareils auditifs !

Nous nous mettons d'ailleurs en chemin rapidement, après avoir débarrassé la table et rangé le tout au lave-vaisselle. Une fois sur place, Oscar entre le premier dans les dortoirs, avant de me faire signe que la voie est libre (ce serait un peu gênant que je me pointe juste au moment où un mec est en train de se changer, hein...). Je souris en l'observant ajuster ses appareils dans ses oreilles - ils sont volumineux, ça ne doit pas être super pratique...

"Est-ce que tu es malentendant de naissance ? Ca doit être contraignant de porter ces appareils tout le temps..."

Je note avec une légère moue. Avec la technologie de Terrae, il devrait y avoir moyen de faire mieux que ça ? Une amélioration à la puce traductrice, peut-être ?? Je devrais en parler avec Mitsuki, c'est elle la reine de l'électronique !

"Tu as déjà vu la salle commune ? On peut aller y faire un tour si tu veux, il y a des canapés, une télé et des jeux de société, c'est assez sympa !"

Même si je n'y vais quasiment jamais - parce que c'est surtout le repère des étudiants et des jeunes adolescents, et que moi je fais partie des vieilles maintenant, ahah.