Toujours son carnet en main, Bito suit sagement Mitsu jusqu'à la cuisine.
Il la voit réagir étrangement alors, automatiquement, il lève un sourcil et avance les lèvre inférieur, l'air soucieux. Il voit bien que sa question sur les enfants a provoqué un petit chamboulement dans les pensées de son amie.

Eh oui, Bito est stupide, mais pas aveugle. Encore heureux.

Il lève donc le doigt, prêt à faire une remarque lorsqu'il voit la flotte qui coule du verre qu'elle se sert, mais s'abstient suite à l'enchainement de bizarreries que lui montre Mitsuki... Depuis quand elle a chopé la maladie de Parkinson ?

Les yeux de Bito retombent directement sur son carnet. Il fait comme s'il n'avait rien vu, car il sait bien que c'est toujours foireux de demander à Mitsu le fond de sa pensée... En fait, Mitsu est un peu comme une vieille version de windows : si tu lui en demande trop, elle s'arrête de fonctionner correctement.

— Mes calculs n'étaient pas si bons que ça finalement... Fait-il comme si de rien.

Puis il la fixe à nouveau en train de... s'abreuver tel un dromadaire, je crois ? Et il sursaute lorsqu'elle claque son verre sur le plan de travail de la cuisine.

— Non, non, c'est vrai, j'te jure ! Il me raconte tout un tas de trucs sur les Masters. Comme ce contrat magique que vous signez et qui vous empêche de mentir ! Et la Terrae-mobile que vous construisez en scred' dans une cave souterraine !

C'est fou le nombre de bobards qu'il raconte ce Nikkou. Mais le plus fou dans cette histoire, c'est qu'il existe quelqu'un d'assez stupide pour gober tout ça...

— D'ailleurs c'était quoi le truc que tu bricolais dans ton salon ? Un super moteur ?!

Je fronçai les sourcils alors que Bito reprenait la parole, me balançant toutes sortes de rumeurs fausses sur les Masters. Je le regardai sans comprendre, encore un peu déroutée par ce qu'il avait dit précédemment. Je finis par détourner le regard pour le porter sur ce que j'étais en train de bricoler avant qu'il arrive. Je soupirai, et haussai une épaule.

-Pas du tout... J'essaie de bricoler différentes choses pour essayer de commercialiser mes inventions. D'ailleurs, j'avais prévu de venir te voir quand j'ai vu ton interview, pour savoir comment tu as fait pour monter ta boîte. J'ai aucune expérience là-dedans.

Je lâchai mon verre que je tenais encore entre mes doigts et glissai mes mains dans mes poches.

-Mais du coup, Nikkou te raconte vraiment n'importe quoi, tu devrais arrêter de le croire. Y'a aucun contrat magique, et tu devrais bien savoir que les Masters peuvent mentir... T'as jamais aucun Master qui t'a menti ? Même un mensonge de rien du tout ?

Tentant un peu gauchement de me débarrasser du mal-être qui m'avait envahi après la bourde de Bito, je secouai la tête et me dirigeai vers le salon.

-J'aurais bien aimé finir ma planche volante, mais j'attendais le matériel que tu m'as apporté là. Du coup j'pensais partir sur du petit robot pratique et usuel, genre la poubelle-robot qui monte sur ses pattes et sort se vider toute seule dans la grande poubelle, ou alors le robot que t'emmène avec toi quand tu promènes ton chien pour pas avoir à ramasser toi-même... Enfin t'as compris.

Je me tournai vers Bito.

-C'est Nikkou qui t'a dit que j'voulais d'un... trouple ?

Pas de contrats magiques ? Pas de Terrae-mobile cachée dans une cave secrète ?!
Décidément la vie des Masters n'est pas aussi trépidante qu'elle le semble... Surtout quand on comprend que toutes ces conneries sont inventées par Nikkou.

Bito lâche donc un long soupir, déçu de voir toutes ces belles rumeurs s'évaporer, et déçu de lui-même pour avoir cru si facilement à tous ces bobards.

— Mais il est tellement à fond quand il raconte ses histoires... Se justifie-t-il.

Et en y réfléchissant bien, il est vrai que certains Masters mentent très bien.

— Ouais, c'est vrai... j'en connais une qui fait souvent genre "tout va bien", alors que pas du tout.

Oui, c'est de toi qu'il parle Mitsuki.

Et de retour dans le salon Bito écoute Mitsu qui lui présente ses différentes idées d'inventions. La planche volante est une idée osée qui titille sa curiosité. Par contre, les deux autres font moins leur effet... Un robot-sort-poubelle et un ramasse-crotte-automatique, ça ne vend pas du rêve, surtout comment elle les présente.

Il profite du moment où Mitsu lui explique tout ça pour diminuer le volume de la télévision. L'émission en est à un moment où il montre quelques-unes de ses recettes sur place et à un moment gênant où son père se pointe dans le fond avec une pancarte "c'est mon fils".

— Ouais c'est lui... Souffle-t-il pour répondre à la question sur le trouple.

Puis il approche de la table du salon et attrape un truc bricolé par Mitsu pour le reluquer.

— Si tu veux un bon conseil tu devrais te focaliser sur un seul produit. Et faut pas forcément que ce soit une idée de génie qu'elle se vende. Faut que ça te ressemble, que ça t'inspire... Faut que tu sois capable d'en parler tous les jours !

Sa main vient taper contre la table.

— Dis toi qu'un mec brasse des millions en vendant des slips ! Et qu'il est capable de te parler de slips pendant 1 heure sans que tu t'en rende compte ! Et qu'il a réussi à m'en vendre 15 !

Ainsi, Bito finit en slip devant Mitsu.

— Slip made in japan, 95% coton bio, 80 fils/cm² pour plus de douceur, grammage moyen de 150g/m² pour un confort et une hygiène optimale, avec couture renforcée au niveau de l'entrejambe, 5% élasthanne pour le maintient et la souplesse. Petit logo aux couleurs du japon pour rappeler ses origines !

Eh oui, le slip de qualité c'est tout une science.

— Ose me dire que tu veux pas le même maintenant !

J'arquai un sourcil à la réflexion de Bito sans relever. Bah, ça m'regarde pas de toute façon, ceux qui lui mentent. Et j'suis encore trop troublée pour réussir à m'intéresser à lui, faut que j'attende que ça passe.

Je lui désignai le prototype qui trônait sur la table basse alors qu'il me suivait dans le salon, et il s'en empara pour l'observer sous tous les angles. Mais comment il a trop pas l'air emballé, c'est terrible ! Mais vas-y, cache ta déception quoi !!! Les robots usuels c'est l'avenir je suis sûre en plus ! T'as plus à t'occuper d'aucune tâche, ça te libère ta charge mentale de malade ! Ou alors c'est juste parce que moi j'm'occupe jamais des tâches ménagères et que je finis par réaliser que rien ne va quand, plusieurs jours plus tard, je vois que ma cuisine n'est rien de plus qu'une énorme poubelle. MAIS J'Y PEUX RIEN, ON PERD LA NOTION DU TEMPS QUAND ON BRICOLE et puis que personne vienne me dire que jeter les poubelles, faire la vaisselle et laver le sol c'est une priorité. Franchement, si un robot peut le faire pour moi, je prends. Ca m'évitera de vivre dans un dépotoir.

J'allais reprendre mon joujou des mains de Bito quand il commença à se déshabiller en parlant. Je le fixai sans sourciller, alors qu'il me vendait littéralement le caleçon qu'il avait sur les fesses. Quelque part, une petite voix qui ressemblait beaucoup à celle d'Ys me dit que je devais surtout pas regarder parce que ça ne se faisait pas, mais elle fut bien vite oubliée au profit de mon manque de pudeur. Nan mais voilà, c'est bon, plus personne pour me dire qu'il faut absolument faire attention à pas montrer certaines parties de son corps ! Soyons libres !

-Ben en vrai, j'pourrais bien vouloir le même si j'en avais besoin, c'est clair.

Et tous les soucis qui avaient pointé le bout de leur nez quelques minutes à peine plus tôt s'envolèrent comme s'il n'y avait jamais rien eu.

Je retirai mon t-shirt pour montrer mon soutien-gorge à Bito, lui désignant la partie sur les côtés, entre les attaches et le bonnet.

-Ton mec là, il fait des soutiens-gorges aussi ? Parce que tu vois les miens me saoulent en ce moment, ils manquent trop d'élasticité à cet endroit-là, c'est pénible ! J'ai l'impression d'être trop bloquée dans mes mouvements. Du coup j'en mets quasiment plus, de toute façon j'ai pas grand chose à cacher, mais c'est surtout qu'en été c'est un peu plus gênant avec le frottement contre les tissus...

Elle retire son haut ?! Mais quelle aguicheuse cette Mitsu !!
Non attendez... C'est Bito qui a commencé en retirant son froque, alors c'est lui l'aguicheur ! Honte à toi Bito ! En plus, Mitsuki aura vu ton plus beau slip bien avant Elfie !
...
Le bon coté des choses, c'est qu'il a trouvé un moyen simple d'obtenir un strip-tease de la part de Mitsu.

CEPENDANT ! Le regard passionné de notre héros ne va pas plus loin que le bout tissu que lui présente Mitsu. Il n'a pas vu les boobs parfaitement proportionnés de la demoiselle, ni le magnifique tatouage de Master qui orne ses cotes, ni même la blancheur de sa peau qui pourrait refléter le flash d'un appareil photo.
Non, il n'aura pas d'érection en la voyant, ni même une demi-molle exploitable...
Non, la passion du confort pour sous-vêtements passe avant tout !

—  Il a surement une gamme féminine ! On va aller voir ça sur son site tout de suite !

Un coup d'œil à gauche, un coup d'œil à droite, il repère rapidement l'ordinateur portable de Mitsuki placé soigneusement sur la table basse.

Alors, déterminé, il s'avance vers cette dernière et... *PAF*. A peine tente-t-il de faire un pas en avant que son pied se prend dans son pantalon et qu'il se casse la gueule au beau milieu du salon. Et comme pour couronner son échec, Balto se jette sur lui pour aller lui faire un petit brin de toilette.

—  Ha arrête ça ! Tu pue les croquettes !! Fait-il en tentant d'éloigner l'animal.

Plusieurs expressions passèrent un peu rapidement sur mon visage. D'abord la surprise, puis d'un coup vint l'inquiétude pour une milli-seconde, avant que j'éclate de rire en voyant Balto se jeter sur Bito pour le recouvrir de léchouilles. Je finis par m'approcher après quelques secondes quand même pour repousser Balto, puis je tendis une main à Bito pour l'aider à se relever.

-Tu t'es pas fait mal ?

J'allais ensuite prendre mon ordinateur pour l'ouvrir en m'asseyant dans le canapé, comprenant que c'était ce qu'il cherchait, avant de m'arrêter et de le regarder, juste après avoir entré mon code de session.

-Attends mais en fait là dans 5 minutes j'vais me retrouver à acheter des nouveaux sous-vêtements alors qu'à la base j'voulais des conseils pour monter ma boîte ! Mais t'es doué en fait !! C'est un pote à toi ce mec ?!!

Là va carrément falloir que je bosse sur la comm' en fait !!! OMG mais comment j'peux faire pour que les gens achètent mes robots ménagers ?!! Va falloir faire des pubs vous croyez ?! MAIS IL ME FAUT DES ACTEURS. COMMENT ON TROUVE DES ACTEURS A TERRAE ?! VOUS CROYEZ QU'IL Y EN A ?! Attendez, c'était pas Katsu qui était super populaire sur les réseaux sociaux ?! Et Aria elle a une p'tite communauté aussi non ?! ET ELFIE C'EST PAS UNE STAR SUR SON MACHIN-LA, TIKTOK ?!

-IL ME FAUT DES GENS POPULAIRES POUR FAIRE MA PUBLICITE !!!!

Bito se relève avec l'aide Mitsuki. Il n'est pas blessé, mais ce petit choc lui change les idées et lui fait prendre conscience qu'ils sont tous les deux à moitié nus au milieu du salon.

Il utilise donc une compétence spéciale dont il a le secret, celle de "la-vision-non-périphérique-pour-ne-pas-culpabiliser-et-respecter-la-pudeur-de-cette-nudiste-de-Mitsuki" ...
Il fixe le plafond quoi.

— Tout va bien ! S'exclame-t-il en se tenant droit comme un piquet.

Mitsu lui rappel alors la base de cette conversation : Il doit lui donner de bons conseils pour lancer son business... et les voilà qui se s'apprêtent à faire des achats de sous-vêtements sur internet.
Depuis quand la conversation a-t-elle dérivée ainsi ?

— Non c'est juste un mec que j'ai croisé au hasard au salon de l'entrepreneur.

Puis arrive un grand moment de révélation pour Mitsuki. Bito la suit dans son élan.

— OUI FAUT TE FAIRE DE LA PUB !!
...
Mais non. Enchaîne-t-il pour calmer tout de suite les ardeurs de la demoiselle.

—  Déjà ... ! On va se rhabiller... parce que c'est chelou.

"Et parce qu'on se croirait dans un scénario mal branlé de film pornographique..." Pense-t-il.

Ni une, ni deux, notre héros remonte donc son pantalon et boucle sa ceinture.

—  La première personne que tu dois convaincre c'est toi ! Et la deuxième... c'est le banquier ! C'est seulement après ça que te pourras te préoccuper du reste.

Eh oui, le banquier a l'argent. Et sans argent impossible d'obtenir tout le matériel et la main d'œuvre pour produire ses petites inventions.

—  Parce que tu compte obtenir tous le matos de manière tout à fait légale et légitime, pas vrai ?

Il lui fait un grand sourire. Un sourire sourire plutôt intimidant qui semble vouloir dire : "Bien sûr que tu vas le faire !". Car malgré qu'il ai abandonné son costume de héros, Bito reste un homme fait passer l'ordre et la justice avant tout.

—  PAS VRAI ?

Bito me stoppa dans mon élan et je baissai les yeux sur mon soutien-gorge. J'avais déjà oublié. J'suis un peu déçue, je pensais pas qu'il s'arrêtait à ce genre de choses... Mais quand j'le vois fixer le plafond comme ça sans oser affronter mon regard, j'me dis que j'ai probablement mal interprété les signes. Je haussai donc une épaule pour acquiescer, et remis mon t-shirt que je téléportai dans ma main vu qu'il était resté au sol un peu plus loin.

Une fois rhabillée, Bito fut enfin capable de me regarder dans les yeux, et je l'écoutais attentivement alors qu'il me donnait ses consignes. Le...

-Le banquier ?

Ouais, bon, j'm'y attendais pas, même si ça fait sens.

Son accusation soudaine et son regard insistant me firent me reculer dans le canapé comme une enfant coupable. WESH mais comment il me juuuuuuge.

-Mais oui j'vais passer par Terrae ! J'récupère leur matos, je fais les robots et je les vends !

Je sens que quelque chose cloche quand même dans l'idée d'ouvrir un vrai business dans cette idée, mais je crois aussi que c'est parce que j'ai pas l'expérience derrière, d'où l'importance de Bito ici.

-Mais pourquoi un banquier ? Il va faire quoi ? J'ai déjà les fonds nécessaires pour lancer en soi... 'Fin faut juste que je fabrique des robots et que je les vende quoi !! Non ?

Il écarquille les yeux et soudain... il éclate de rire.

— HAHAHA !

Sauf que Mitsuki a l'air sérieuse dans son délire.

— Attends... T'étais sérieuse ? Depuis quand c'est payé d'être Master ?

Les Master ne risquent pas leur vie gratuitement ? Il ne sont donc pas dévoués corps et âme à Terrae jusqu'à ce que la mort les séparent ?!

— Merde... Nikkou s'est encore foutu d'ma gueule ! Fait-il en se mettant une claque sur le front.

Il était temps quelqu'un mette de l'ordre dans le ramassis de connerie que lui avait raconté le Tonnerre Mythomane.

— Bon bah... si t'as la tune, sa règle déjà un souci. Te reste plus qu'à trouver un nom d'entreprise et déposer un brevet pour tes bidules.

Pour l'instant. Car, si les inventions de Mitsuki deviennent populaires, ce n'est pas ses deux petites mains qui vont satisfaire toute sa petite clientèle.

Puis un regard suspect tombe sur Mitsu.

— Mais pourquoi tu t'habilles souvent comme une clocharde si t'es autant friqué ?

Il lève la lèvre inférieu et les yeux de notre héros fixent le vieux jogging troué et plein de tâches d'huiles qu'elle porte.

Si... Si ça paye d'être Master ? Ben non, ça paye pas en soi, enfin à part si tu fais tout le temps des missions, t'as un budget mensuel qui t'es fourni mais je. Enfin je travaille non ?! Pourquoi il se fout de ma gueule. Nan mais en plus IL SE FOUT VRAIMENT DE MA GUEULE LA. Waaaaaaaah. Mais j'devrais pas avoir d'argent normalement ? Mais j'sais même plus où me mettre là, ça devient gênant !!! Pou... Pourquoi il dit que Nikkou s'est encore foutu de sa gueule ? Mais bon sang, il a dit quoi encore ?! J'ai jamais vu un Master qui racontait autant sa vie en fait ! NAN MAIS SI. PLUS QUE MOI, NON ?!

Je me passai une main dans les cheveux, mal à l'aise. Il enchaîna qu'il ne comprenait pas mes tenues si j'étais autant friquée que ça. Mais. Mais j'suis pas friquée non plus ! MAIS QU'EST-CE QU'IL RACONTE ?!

Je tirai sur mon t-shirt, comme pour cacher mon jogging.

-Ca va... J'bossais, j'vais pas mettre des tenues incroyables pour bricoler dans mon coin...

Même si mon style vestimentaire laisse à désirer, je l'entends bien. J'y peux rien si je suis pas faite pour assembler les couleurs ! Je préfère assembler les pièces d'un robot omg !

-Déposer des brevets ?

Ouais, j'y connais rien, j'y peux rien.

-Tu as déposé un brevet pour ouvrir ton restaurant toi ? C'est quoi un brevet ?

Je marquai une pause, regardant ailleurs.

-Et j'suis pas si friquée que ça... 'Fin j'ai de quoi faire mes petites créations dans mon coin, et bricoler ce que je veux quoi... Vu que j'bosse à la surveillance de Terrae, ça me rapporte un salaire, puis comme j'ai des primes quand je construis une machine à cristaux qu'on envoie dans les pays partenaires, ça aide.

Récupérer une partie de l'argent que les pays dépensent pour accéder à cette technologie, j'avoue que c'est un peu comme tirer le gros lot quand même. Et vu le prix d'ailleurs, par rapport au temps que ça me prend à construire, c'est hyper rentable !

La réponse de Mitsu sur sa tenue vestimentaire tient debout... pour aujourd'hui. Mais la prochaine fois qu'il va la croiser mal fringuée, il ne la ratera pas.

— Mouais, ça passe pour aujourd'hui... Fait Bito en croisant les bras.

Puis les questions s'enchainent. Au fur et à mesure, le visage de notre héros se décompose pour laisser place au dépit et un petit facepalm vient  embellir le tout.

— T'es sérieuse là ? T'inventes un tas bidules et t'as jamais déposé de brevet ?! Ça devrait être la base pour une meuf comme toi !

Pardonne-la Bito, elle débute. Ce n'est qu'une enfant dans le corps d'une femme bien gaulée.

Il soupir un bon coup et pose son cul sur le pouf en face du canapé.

— Un brevet c'est un document relou qui décrit ta création dans le détail. Comment tu la fabrique, à quoi elle sert... Ça te permet d'avoir le monopole sur ton invention, ce qui empêche les autres entreprises de te chourer l'idée.

C'est simple, mais on va faire une comparaison. Les enfants adorent les comparaisons.

— Imagine que ta création c'est un beau gosse ultra populaire, mais nymphomane. Et que le brevet c'est un préservatif haut de gamme qui dure 20 ans. Eh bah ça le protège des autres poufiasses qui veulent lui faire un gosse !

Avec ça, l'image du brevet restera gravée dans la mémoire de Mitsuki.

— Moi j'en n'ai pas eu besoin, j'invente rien. Je fais juste de la cuisine j'te rappelle.

A son tour il marque une pause pour souffler. Passer plus d'une heure à expliquer des trucs est épuisant. Il comprend enfin ce qu'est le métier de professeur.

— T'as pas chaumé ouais... Un sourire discret apparaît. T'es toujours la même en fait. Incapable de rester en place, jamais à court d'idées, modeste ...

Son air se fait plus taquin.

Toujours aussi teubé.

Il attend la réaction de Mitsu, avant d'ajouter.

Et toujours aussi impressionnante.

Pas étonnant qu'Elfie la voit comme un modèle.

Je plissai les yeux sous les explications de Bito, essayant de comprendre vraiment l'intérêt d'un "brevet". Ok, mais en vrai, qui aurait déjà pu vouloir copier mes inventions ? Elles sont toutes dans mon atelier... Alors personne n'aurait pu les voler. Et en ce qui concerne les machines à cristaux, c'est-à-dire la seule chose qui quitte mon atelier, ben je doute que qui que ce soit à l'extérieur soit capable de les reproduire. 'Fin faut des cristaux, quand même. Et des pouvoirs, pour les enclencher la première fois. J'voudrais pas trop m'avancer, mais jusqu'à preuve du contraire il n'y a personne en dehors de Terrae qui... OMG MAIS J'AURAIS DU FAIRE UN BREVET POUR MES MACHINES A CRISTAUX ?! COMMENT ON FAIT CA ?! FAUT QUE JE DEPOSE CA VITE.

-Quoi ?

Je revins à moi quand Bito me parla de mec, nymphomane, avec un préservatif de fou pour éviter qu'il aille voir ailleurs. J'arquai un sourcil. Quoi ? Attendez, j'ai raté quelque chose là, non ? De quoi il parle ? Qu'est-ce qu'il raconte omg ?! Je comprends plus rien à ses histoires d'un coup là !

J'étais tellement perdue que je n'eus même pas le temps de revenir sur le sujet des brevets, bien trop décontenancée par sa comparaison sans queue ni tête. Il profita d'ailleurs clairement de mon silence pour se payer ma tête, ponctué d'ailleurs de compliment sur la fin, ce qui me fit piquer un fard terrible. Je détournai le regard pour le reporter sur les outils qui étaient sur ma table basse. MAIS D'OU IL SORT DES TRUCS PAREILS ?!

-Mais tais-toi !

Je repris un main ma clé pour resserrer quelques écrous.

-Mais bref, du coup, j'ai rien compris à ton idée de beau gosse ultra populaire, mais... Tu crois que j'aurais dû déposer un brevet pour mes machines à cristaux ?! Et qu'il va falloir que je le fasse là pour mes robots... heu. Ménagers ?! Mais comment on fait ça ?! J'imagine qu'il faut pas juste envoyer un sms pour tout ça. C'est relou ! Comment ça marche ce truc ?! Faut payer ? C'est cher ?! Tu crois vraiment qu'il y a des gens qui pourraient copier mes créations ?! Et si j'y intègre des cristaux ?!

Mauvaise idée.

-Ou heu. Si je mets sur chacun de mes robots une signature qui prouve que c'est VRAIMENT moi qui l'a fait ! Ca marcherait pas ?!

A son tour, Bito rougit et regarde ailleurs.

— Oui j'arrête ! Réplique-t-il lorsqu'elle lui dit de se taire.

Heureusement la conversation revient sur cette histoire de brevet. Bito tente alors une autre comparaison, plus simple, avec des insectes pour que Mitsu comprenne.

— Imagine que t'es une fourmi noir et que tu veux pas que les fourmis rouge...!

Ca ne sert rien de parler en même temps qu'elle, on dirait un dialogue de sourds là.

Encore une fois, il attend qu'elle ai fini, prend une grande inspiration et balance toutes les réponses d'un coup.

— Oui. Oui. Internet. Tout à fait. Non. Oui. On va voir. Oui. Un peu. Oui ! Heu...

Attention cerveau en surchauffe ! Trop de questions répondu d'un seul coup !

Notre héros fait une pause en fermant les yeux et en se massant les tempes. Il n'est pas certains d'avoir répondu à toutes les questions ni dans le bon ordre... mais une chose est sûr, il va terminer avec un :

— T'as cru qu'tu vendais des œuvres d'art ! Tout le monde s'en fout de ta signature !

"J'parie qu'elle est moche en plus..." Pense-t-il très fort.

— Tes trucs à cristaux là, eh bien j'serais pas étonné d'en voir des Made In China à l'heure qu'il est ! En plus, sans une entreprise, une marque qui montre à qui ils  appartiennent... tes bidules valent rien du tout !

Bref Bito se lève, prend un feutre qui traine sur la table et commence à faire une liste sur son tableau de professeur.

-D'abord tu fixe ce que tu veux vendre... ça ok.
- Tu demande la tune pour le construire pour la banque... ça on a dit que c'était ok aussi.

Il barre ces lignes.

- Tu choisi un nom et tu crée l'entreprise.
- Tu bricole, tu brevète...
- Puis tu vends et amasse les bif...

Et là il remarque que ce fameux tableau sur lequel il écrit, n'est autre que le mur du salon...

Mais comment j'vais lui en foutre des oeuvres d'art ! Comment il est méchant ! J'ferais remarquer que chez mes grand-parents paternels y'a un sous-sols remplis d'oeuvres d'art volés par Papa, alors HEIN. Oui ça n'a rien à voir, ET ALORS. Il est en train de se foutre ouvertement de moi et en plus IL ECRIT SUR MON MUR. APRES AVOIR DIT QUE MES BIDULES VALAIENT RIEN. IL SE PREND POUR QUI AU JUSTE ?!

-En fait, c'était une très mauvaise idée de te demander conseil...

MAIS COMMENT JE VAIS FAIRE POUR MON MUR LA ?! En plus j'veux pas être méchante, hein, mais il écrit mal en plus de ça. Donc mon mur est peinturluré d'une liste MAL ECRITE.
Un jour j'ai vu une pub pour des éponges magiques. Est-ce que vous croyez que ça marche vraiment ?

Je me pris la tête entre les mains en poussant un long soupir d'agonie.

-Aaaaaaaaah SERIEUUUUX BITOOOOO.

Encore il aurait fait ça dans l'atelier, j'aurais rien dit. Mais là c'est littéralement sur le mur blanc à côté de la télé. Du coup. Ben non en fait. C'EST BEAUCOUP TROP RELOU.

-Et puis en plus t'es méchant là !!!!

Oui parce que soit il fait des compliments qui sortent de nulle part, soit l'instant d'après il me plante de tous les côtés avec des remarques hyper méchantes ! IL FAUT UN JUSTE MILIEU NON ?!

Allez, on respire.

-C'est quoi ton nom d'entreprise toi ? J'peux pas juste mettre genre mon nom ?

Pourquoi a-t-il écrit sur le mur ce con ?

Il regarde son œuvre en grimaçant.
Dans le feu de l'action, Bito s'est prit pour un professeur d'éco/gestion... et le résultat est tout simplement désastreux. Non seulement il écrit de travers, mais aussi son écriture est illisible... On croirait celle de son médecin traitant.

Il lâche le feutre et s'en éloigne, comme si cet objet maudit l'avait contrôlé à son insu.

— Je voulais pas. J'te jure ! Fait-il en rangeant rapidement ses mains dans ses poches.

Et il se sent un peu plus coupable lorsque Mitsuki utilise le mot "méchant"...

— Je vais nettoyer ça tout de suite !

Il prend un chiffon qui traine sur la table -car Mitsuki ne range rien- et retourne vers le mur qu'il a tagué... Mais ne risque-t-il pas d'étaler l'encre en frottant avec ça ?

— Quand je dis que ça vaut rien, c'est commercialement parlant ! Justifie-t-il. Si je te vends une Ferrari, mais que j'ai rien qui prouve que s'en est une. Tu l'achèterais toi ?

Enfin un exemple qui vaut le coup.

Une nouvelle question l'arrête avant qu'il ne pose le chiffon sur le mur.

— Mouais... tu peux faire ça.
Faut savoir qu'il y a la "raison sociale" de l'entreprise, qui porte ton nom. Et le "nom commercial", la marque de fabrique quoi.
Mon entreprise porte mon nom, mais le nom commercial c'est "Uzura". Tu comprends ?
Après tu peut mettre les même... mais t'as vraiment envie qu'un ramasse-crotte porte le même nom que toi ?

Certains l'assument... comme le mec qui a inventé les poubelles.