Être une master a ce privilège que je peux foutre des heures de colle en toute quiétude… bon, je le faisais déjà quand j’étais bibliothécaire… Mais alors mon autorité s’arrêtait aux portes de la bibliothèque… Aussi il y a quelques temps je n’aurais pas pu avoir deux recrues pour nous aider à ranger mais bien une seule, car au final seul Senri avait porté attente à l’intégrité de l’édifice. Bon il avait été bien cramé, alors j’aurais quand même du faire remonter aux masters le comportement de Tiago, mais je n’aurais pu que suggérer ces travaux d’intérêt général… Là je les leur ai imposés.

Bon, j’ai quand même fait remonter l’incident apprenant par la même que Tiago n’était pas le seul à surveiller. Senri aussi commençait à faire parler de lui… On a une équipe de noob qui sont arrivés, je vous dit pas… C’est de la top quali ! En attendant, avoir de nouveaux esclaves employés n’est pas de tout repos. Je les attend à mon bureau à l’heure convenue, ils commenceront à travailler alors que les usagers sont encore là et continueront une heure après la fermeture. J’ai été magnanime. Je me suis bridée pour ne pas abuser…

« Maintenant que vous êtes là tous les deux, je vais vous donner vos instructions. Vous allez chacun prendre un des chariots de rangement que vous voyez ici et parcourir les rayons pour ranger les ouvrages qui se trouvent dessus tout en récupérant ceux que vous verrez trainer pour les ranger. Le premier qui a fini pourra partir et finira vingt minutes plus tôt le reste de la semaine. Si vous posez les livres n’importe où je le saurais et je serais tentée de prolonger votre punition. C’est clair ? »

Oui, c’est typiquement la technique de la carotte et du bâton. Il serait trop tentant de déposer le contenu de son chariot au même endroit et de partir, ou de lambiner et de ne pas en branler une et de ne pas ranger la moitié du chariot.

« Et bien entendu vous ferez ceci en silence, sans vous quereller et sans déranger les usagers de la bibliothèque. Je compte sur vous. »

Je le dis gentiment, mais à la moindre bavure ils auront à faire à moi.

La lose. A peine je sors de l'hosto que j'dois me rendre à la bibliothèque. Il me faut faire preuve d'une discipline monstrueuse pour ne pas prendre la direction du bar et bifurquer avant. Troquer les verres de whisky pour de vieux bouquins poussiéreux, trop naze. Ouais je sais, certains peuvent être neufs mais là j'suis d'humeur à me plaindre (intérieurement faut pas déconner non plus) alors fout moi la paix.

Le pire c'est que tout ça c'est de la faute de l'autre abrutit. D'où il a eu l'idée d'aller décrocher la porte de la biblio pour me la balancer sur la gueule ? Ça peut avoir du style ok, mais le but c'était qu'on s'entre-tue tranquillement, pas qu'on se paye l'autre relou d'Ipiu. Du coup jackpot, va encore falloir que je supporte ces deux là en même temps. Nan, du trio je ne crois franchement pas être le pire ! Je ne peux évidemment pas m'empêcher de repenser à cette scène ridicule en passant la porte d'entrée avant de me diriger vers l’accueil où la master tyrannique nous attend déjà de pied ferme, son discours bien prêt. Je suis beaucoup trop agacé pour saluer qui que ce soit, je me contente donc d'attendre en mode piquet, pensant déjà au moment où je pourrais me barrer d'ici tranquille, sans prendre le risque que ce soit cette fois Hideko qui me tombe dessus.

- "Tss, trop facile, t'as vraiment cru que cet idiot a la moindre notion de ce qu'est l'ordre alphabétique ?"

Un sourire sarcastique à destination des deux intéressés, je vais attraper ce charriot au passage (non sans trainer des pieds). Eh, j'étais étudiant (bien qu'un peu branleur) avant d'arriver sur cette île, bien sûr que je sais comment on range des bouquins dans une bibliothèque ! Cela dit, j'ai intérêt à me contenter de la partie "langues latines" parce que j'y capte rien à leurs symboles chelous qu'ils utilisent de ce côté du globe.

- "Alors gamin, t'as récupéré assez de forces pour pousser c'caddie ?! Je t'épargne le coin des encyclopédies si tu veux, ce serait con que tu retournes direct à l'hosto parce que t'auras voulu porter un truc trop lourd."

Un air parfaitement provoquant en prononçant ces quelques mots, bien sûr que je n'ai pas l'intention de respecter scrupuleusement toutes les règles énoncées par miss casse couilles. Elle veut qu'on bosse ensemble très bien, mais je ne risque pas de faire ça gentiment en silence. Alors voyons voir s'il est chaud le petit.

Les fesses sur son lit d’hôpital, Senri regardait dans le vide en battant des pieds, des pansements à l’arcade sourcilière gauche, un autre sur la joue, un hématome sur l’œil droit et des bandages sur l’ensemble de son torse. Le bruit de fonds que produisaient les consignes de l’infirmière n’agaçait même pas Senri. Il était bien trop perdu dans ses pensées, à contempler le carrelage de l’hôpital et faire le point sur cette dernière semaine. Il ne sortit de son état léthargique que lorsque les mots « Tu peux partir » furent prononcés. Il attrapa nonchalamment son jean noir, son débardeur de la même couleur et un sweat-shirt gris dont il rabattit la capuche sur sa tête.

Une fois sorti de l’hôpital, Senri prit le chemin de la bibliothèque puisque Senri était convoqué à celle-ci pour des travaux d’intérêts généraux pour réparer les dégâts qu’il avait causés lors de son combat avec Tiago. C’était d’ailleurs à cause de ce combat qu’il avait dû retourner passer la nuit à l’hôpital étant donné que la majeur partie de ses blessures s’étaient rouverte plus tôt dans la semaine. En partie à cause de son initiation. À cette seule pensée, ses sourcils se froncèrent et sa mâchoire se crispa.

Ainsi, c’est en étant très agacé et contrarié qu’il entra dans le bureau de la bibliothécaire. Il avait néanmoins eu la politesse de la saluer respectueusement, mais n’avait adressé à Tiago qu’un regard plein de ressentiment.

L’adolescent plongea ses mains dans les poches en écoutant les consignes distraitement. Il se contentait simplement d’acquiescer à ce qu’elle disait. Néanmoins, il arqua un sourcil quand la master titilla son instinct de compétition. Là, il était intéressé. Il tenta de rester de marbre, mais le bref changement d’expression sur son visage en avait dit long. Et le fait qu’il ne put s’empêcher de réagir à la remarque de Tiago acheva de trahir son impassibilité.

-J’m’en carre de votre alphabet de gajin. Même sans j’vais te battre.

Il avait bien appuyé le dernier mot de sa première phrase, le tout avec un certain dédain.

Lorsque les deux travailleurs sortirent avec leurs chariot respectifs – Senri avait prit le plus cool et beau – Tiago renchérit et attisa encore un peu plus le feu qui brûlait en Senri. L’adolescent releva vers le décoloré un regard hargneux. Les lèvres pincées par l’énervement.

D’un geste, il retira son pull et le lança dans un coin.

- T’as vu comme ils sont épais ces bouquins ? Tu crois que c’est avec tes bras de crevettes que t’vas les porter ? Tch, tocard va.

Sur ces mots, Senri commença à avancer vers le rayon des encyclopédies. Il n’était pas question de laisser Tiago commencer avant lui, ces vingt minutes, c’était à Senri qu’elle reviendrait.

Les soigneurs n’ont pas été cools avec Senri, ils auraient pu effacer la moindre contusion et pourtant… Il a la sale gueule du gars en train de se rétablir, du bleu jauni sur le visage au regard las. Son étoilisation a pas été fun, et j’ai été plutôt heureuse qui rejoigne les rangs des tonnerres. Un fouteur de merde comme lui, j’aurais été déçue que les feux nous le pique. Comment ça c’est pas très responsable ce que je dis ? Mais je vous emmerde. Puis contrairement à l’autre tocard il a dit bonjour.

Bien ils ont clairement pas l’air heureux d’être là, tant mieux. Sinon j’pourrais pas dire que c’est une punition. Là au moins je rempli par-fai-te-ment mon rôle de master. J’avoue que le petit sourire en prime c’est simplement pour faire chier Tiago… Le p’tit bonus… Parce que clairement ça le fait chier, et clairement il reconnaitra jamais qu’il l’a cherché. J’suis sûre qu’il n’est là que parce qu’il a peur des représailles.

« Autant que toi aux hiragana. » je rétorque au boulet qui commence déjà à râler.

« Faut que je vous imprime des alphabets ? » je leur demande alors qu’en réalité lesdits alphabets attendent déjà sur mon bureau. J’les ai pas amené direct pour le plaisir de les voir galérer un peu. Non j’suis pas sadique, mais comment voulez-vous qu’ils tirent des leçons de leurs erreurs si c’est trop facile ?

Ils s’en vont en s’insultant et je lève les yeux au ciel, bon. Va falloir les surveiller comme l’huile sur le feu, et j’dis pas ça parce que l’un est feu et l’autre a le crane brillant… Je soupire et pars dans mon bureau chercher les alphabets.

« Et en silence ! »

Qu'est-ce que j'en ai à foutre de leurs conneries d'hiraganas ? L'autre gosse il est japonais non, alors on n'a qu'à dire que ça tombe bien... Et que ces connards de ruskoff n'auront qu'à se démerder avec leur alphabet chelou ! Azy j'ai déjà la flemme avant même d'avoir commencé, mais je ne peux pas laisser l'autre merdeux finir avant moi non plus, alors bien sûr que je vais me bouger !

- "Eh ça va, j'suis pas un putain d'assisté, tu peux t'les garder tes alphabets."

Et je m'étonne à rester si poli parce que j'aurais pu faire bien pire. Bien sûr que je peux me démerder seul, j'ai appris à lire et à écrire quand même ! En plus ils ont l'air de s'être donné le mot pour me faire chier ! Comme si c'était pas suffisant de se retrouver là. De toute façon, j'ai pas l'intention de faire bien gentiment tout c'qu'on me demande non plus ! Alors c'est parti !

- "En attendant, ces bras de crevette t'ont explosé la face, crâne d’œuf. J'te prends quand tu veux au bras de fer !"

Ouais je sais, c'est un peu trop facile de me provoquer mais c'est pas grave, ça me permet de surenchérir tranquille comme ça. En silence hein ? J'vais voir c'que je peux faire ! Ok, donc le gamin prétentieux veut se charger des encyclopédies ? Très bien, tant pis pour lui !

- "J'suis désolé Ipiu, mais si t'espères pouvoir rester juste avec moi 20 de plus chaque jours, va falloir trouver une autre excuse, parce que j'ai pas l'intention de laisser ce mioche me devancer !"

Un sourire charmeur juste pour la forme (parce qu'il n'est pas question que je la laisse gagner si facilement elle non plus !) je pars aussitôt à l'assaut de ces bouquins en mode skateboard à l'arrière de mon charriot. J'attrape quelques livres qui trainent sur le chemin et repère leur cote pour ordonner mon passage dans la allées. Ah, si seulement je maîtrisais mieux ces pouvoirs je pourrais embaucher quelques "âmes volontaires" pour faire tout ça à ma place. Enfin, si je ne peux pas encore avoir mon armée de serviteurs, j'ai en revanche de quoi faire chier un peu Senri (parce qu'il l'a bien mérité quand même !!).

Un peu en retrait dans ma rangée, en train de remettre un livre écrit en je ne sais quelle langue (italien peut être) à sa place, je repère une ado, plus ou moins du même âge que l'autre idiot on dirait, qui n'a pas l'air très difficile à contrôler. Probablement une novice encore. Concentration au max et hop, voilà la petite demoiselle qui, pour on ne sait quelle raison, se met subitement à courir en direction du chauve à la grande gueule, se prend les pieds dans son charriot et chute direct sur le nouvel apprenti bibliothécaire dans un cri suraiguë caractéristique. Hehe, j'suis trop fier de moi, alors je reporte direct mon attention sur mes bouquins et profite de ce léger contretemps imposé à mon concurrent pour prendre de l'avance ! Ça va, c'est pas méchant ! En plus si ça s'trouve, je viens de lui arranger un super coup sans le vouloir !

Lorsque Senri entendit les mots « bras de fer », un sourire narquois déforma son visage et fit ressortir le mépris de son regard.

-Un bras de fer ? Reviens quand t’seras titan, histoire qu’j’doive contracter.

Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, la réplique de Tiago n’avait pas atteint le jeune homme. Puisqu'il avait une confiance aveugle en sa force et, les seuls qui méritaient de l’affronter dans un bras de fer, devaient au moins être dotés de la force surhumaine d’Amy. C’est avec le torse gonflé et un air satisfait sur le visage qu’il se mit à travailler. Il y avait une vingtaine d’encyclopédies à ranger dans son chariot. Il les prit toute. Cinq furent calées sur chacune de ces épaules, les dix autres dans sa paume gauche. Il utilisait sa main droite pour les glisser les livres dans les rangées.

Alors que son rythme de rangement dépassait de loin, ce qu’il aurait été s’il n’avait pas eut un tel corps qui offrait tant de compartiment de rangement, quelque chose vint tout gâcher. Une silhouette courrait vers lui. Tiago ? Il osait l’attaquer en plein milieu de la bibliothèque ? Senri se jeta en arrière, les livres s’envolèrent alors que le genou droit de Senri se pliait, emmenant tout son corps avec lui. Son pied gauche rasa le sol dans un mouvement circulaire fulgurant. Les jambes de la pauvre manipulée furent fauchées en un instant. Quand Senri vit cette masse de cheveux bruns virevolter, il réalisa qu’il ne s’agissait pas de Tiago. Utilisant son talon gauche comme appui, il se propulsa en avant, prenant appui sur son genou, il put attraper entre ses bras la jeune femme.

Celle-ci avait fermé les yeux pendant sa chute. Lorsqu’elle les rouvrit, elle vit un crâne baignait dans l’âpre et assommante lumière d’un douloureux et morne après-midi d’étude dont l’ennuyant déroulement avait été perturbé par une rencontre prédestiné. Ce prince charmant aux épaules saillantes et au crâne chauve, s’adressa à elle, de sa voix suave et sonore.

-R’garde où tu marches, tocarde !

En un instant, elle fut debout. Le prince charmant qui était en réalité en adolescent coléreux avec des minuscules éclairs au sommet du crâne, l’avait relevé d’une simple traction du bras. La jeune fille, confuse, expliqua qu’elle ne savait pas ce qui lui avait pris, son corps avait soudainement cessé de lui obéir.

-Ça va, j’ai compris. Sois gentille, va dire qu’un mario’ t’as manipulé à la vieille en fauteuil. Elle comprendra.

La jeune fille acquiesça et fila vers le bureau de la bibliothécaire. Senri chercha du regard Tiago. Lorsqu’il capta le regard du décoloré, il lui témoigna un respectueux salut en levant son majeur à son attention. Il se dépêcha de ramasser ses livres avant d’abandonner son chariot, non sans prendre une bouteille de produit d’entretien, le seau d’eau accroché à son chariot, une serpillière et le panneau « sol glissant ».

L’adolescent se glissa entre les rayons. Il comptait sur la diversion d’Ipiu pour occuper Tiago, mais il ne lésinait pas sur la discrétion pour autant ; il se faufilait entre les rayons rapidement, à pas feutrés. Lorsqu’il arriva à la rangée située tout juste à côté de celle Tiago. Il vida toute la bouteille de produit dans son seau d’eau et se dépêcha de plonger la serpillière dans l’eau avant de répandre son piège glissant dans toute l’allée.

Finalement, il passa dans l’allée où se trouvait Tiago, s’assurant qu’il ne regardait pas dans cette direction ; il vint poser son panneau « sol glissant » devant le chariot du Feu. Il n’aurait d’autre choix que de prendre l’allée piégée maintenant.

L’adolescent cacha son seau et la bouteille vide entre les étagères et repartit tranquillement vers son rayon, l’air de rien. Néanmoins, il ne parvenait pas à chasser de son visage ce sourire mauvais et impatient.

« Chéri, si j’avais envie de rester vingt minutes de plus avec toi je te pairais un verre. Maintenant au taf. »

Askip c’est un mec facile, mais j’vais pas m’lancer dans ce genre de débats alors qu’il doit taffer. Il veut pas de mon alphabet ? Qu’il se plante comme un grand. J’regarde le carnage et j’le garde deux heures de plus pour rattraper son merdier. C’tout bénef pour moi, j’ai rien à faire ce soir et une flasque de rhum dans un des tiroirs de mon bureau… Enfin, ça non plus j’veux pas en parler.

Qui m’a refilé une bande de branque comme ces deux-là ? J’vous jure, s’ils me font regretter mon laxisme qui m’a poussé à simplement leur mettre des petits travaux d’intérêt général j’les refile à maman Honda, et c’pas pour rien si ça sonne comme anaconda. Bon bien entendu, j’aurais pu les faire travailler à des horaires différents pour éviter les conflits, mais entre nous… ça aurait été nettement moins drôle on est d’accord non ?

Bon toujours est-il que j’dois aller rouler sur les pieds de Tiago histoire de lui expliquer qu’on n’impose pas sa volonté à ses petites camarades pour les faire tomber dans les bras (certes musclés) de ses copains. Bon bien entendu, avant je dois expliquer à la gamine ce qu’il s’est passé, lui proposer d’aller en parler à un psy si elle en ressent le besoin. J’l’ai déjà testé et perdre le contrôle de ses membres c’est jamais hyper plaisant si tant est qu’tu soies un peu fragile et tu l’vis pas hyper bien.

En chemin je trouve un seau et une serpillère abandonnés en plein milieu du passage. Je fais signe à Senri pour qu’il vienne les ranger. Après tout ça fait aussi partie de son taf… Ensuite je tombe proprement sur le dos de Titi.

« Alors, tu viens de gagner une semaine de rab pour avoir utilisé tes pouvoirs de marionnettistes sur quelqu’un d’innocent. Je suis obligé de le signaler à Hideko ou tu te calmes de toi-même ? »

Tout en rangeant les quelques bouquins récupérés sur mon charriot lors de mon premier passage, je m'arrange évidemment pour garder un œil sur la scène que j'ai provoqué. Ouais je sais, ça aurait sûrement été plus prudent de partir à l'opposé, mais ça aurait également signifié ne jamais savoir comment cette histoire finirait. Et franchement, si j'avais su que Senri serait aussi nul dans le rôle pourtant principal que je lui ai gentiment refilé, je ne serais pas resté ici.

Un sourire parfaitement faux en voyant le môme m'adresser un fuck peut-être partiellement mérité, je ne risque pas de m'énerver pour si peu. Parce que pendant ce temps là, j'ai réussi à prendre pas mal d'avance, alors que lui s'est retrouvé à foutre en l'air une partie de ses belles piles de livres, en essayant de jouer au prince charmant.

Mais si je comptais continuer sur ma lancée pour gagner le droit de me barrer d'ici le premier (et surtout pour ne pas laisser ce sale gosse me passer devant en fait...), le retour de la bibliothèque vénère se fait plus rapidement que prévu. Sérieux ? Il a vraiment été pleurnicher (par intermédiaire, ok) auprès de la casse couille de service ? Un bouquin a priori très sérieux sur "la crise de la betterave" en main, je regarde la blonde à roulettes qui tente de me faire la morale, un air faussement concerné sur le visage.

- "Je sais que tu ne manques pas de défauts, mais tu serais vraiment du genre à aller te plaindre auprès d'Hideko ? Tout ça pour une simple bagarre ? Dont tu n'avais rien à foutre jusqu'à ce que l'autre idiot pète un câble. Et puis, on est dans un institut où tout le monde possède des pouvoirs. On les subis tous, qu'on le veuille ou non..."

Ouais, elle ne va pas me faire croire qu'elle n'utilise jamais ses pouvoirs pour son propre compte hein... Tout le monde fait ça et après tout, ça fait partie des règles du jeu ici. Alors la gamine ferait bien de s'y habituer !

- "Allez, j'suis déjà vachement calme, regarde. Tous ces bouquins qui ont déjà retrouvés leur place ! Et les autres ne vont pas s'y remettre tous seuls malheureusement, alors tu m'excuseras ma belle, mais je n'ai vraiment pas l'intention de me laisser devancer !"

Un sourire comme il se doit et un demi tour des plus stylés parce que je suis largement au dessus de ces péoccupations (et que je ne crois pas une seconde à sa "menace Hideko"), j'ai beau faire gaffe à ma démarche, on dirait que le sol a décidé de se foutre de ma gueule pile à cet instant. La semelle de ma chaussure n'adhère absolument pas, se dérobant de son trajet initial pour me déséquilibrer totalement, plus aucun de mes deux appuis ne voulant assurer leur rôle.

Mais je ne vais pas partir seul dans ma chute. Oh non, mes fesses ont beau se rapprocher du sol à toute vitesse, j'essaie de me rattraper malgré tout à la première chose qui me passe sous la main. J'agrippe une barre qui passe à portée. Manque de bol, le charriot relié à cette tige en laquelle tous mes espoirs se sont portés une fraction de seconde s'avère aussi peu stable que moi. Et m'accompagne avec fracas quelques centimètres plus bas, recrachant son chargement d'ouvrages divers dans l'allée détrempée.

Putain, j'vais m'le faire ce mioche.

Senri qui était tout fier de sa petite entreprise, aperçut Ipiu lui faire signe de ramasser le seau et la serpillière qu’il avait abandonné un peu plus tôt pour son repli stratégique. Penaud, il s’en alla les récupérer. Cependant, ce rappel à l’ordre lui offrit de bonnes surprises.

D’une part, il put voir Tiago subir les remontrances de la bibliothécaire, à travers deux livres. Il se mit à bêtement ricaner, avant qu’un raclement de gorge ne lui fasse tourner la tête. Plusieurs élèves lui lançaient des regards mi-agacés, mi-gênés. Senri mit un certain temps avant de se rendre compte qu’il avait la tête entre deux paires de fesses ; il était au rayon des hentais. La face pivoine, il récupéra ses affaires et s’excusa auprès des élèves.

Quelle drôle d’idée de mettre des bouquins aussi obscènes dans une bibliothèque, aussi !

Senri avait grandement besoin de se détendre et, comme si une entité supérieure avait entendu ce souhait, il fut servi à Senri sur un plateau.

Il s’était replié vers l’allée qu’il avait piégée un peu plus tôt. Et Tiago venait tout juste de s’y étaler. Senri pouffa narquoisement en regardant du coin de l’œil le feu étalé par terre. Mais soudainement, une idée traversa l’esprit du garçon.

Il porta son regard sur son seau à moitié rempli, puis sur Tiago. Il regarda distraitement a droite, à gauche et l’air de rien, lança le contenue du seau dans l’allée, avec suffisamment de force pour que Tiago puisse boire une tasse savonnée.

Et Senri se retira, comme une fleur, le visage serein et en paix. Il regagna son allée pour récupérer son chariot et le temps que Tiago digère sa défaite, Senri se replia dans le bureau de la bibliothécaire pour se procurer les différents alphabets.

Après tout, Senri était un bon garçon.

« Le soucis c’est qu’là t’avais l’intention de nuire, j’en ai rien à battre que vous vous cognez sur la gueule en privé, et t’as raison vous auriez pas dégondé la porte de la bibliothèque, j’aurais détourné le regard. C’est vos problèmes.
Là c’pas pareil, tu es puni, et tu trouve l’moyen d’foutre le sbeul. On accepte quand un initié fait d’la merde avec ses pouvoirs parce qu’il n’y pipe rien. Pas quand il s’en sert pour faire d’la merde intentionnellement. Et j’ai clairement pas envie d’te refiler à Hideko, elle a des trucs plus chiants à gérer. Si faut que j’utilise la force pour que t’arrête d’être un gamin avec deux de QI j’vais devoir le faire. »

Par contre j’suis quand même obligée de le signaler à Hideko… Et j’lui en veux pour ça putain. Je déteste la paperasse. Hm. Ah. Il tourne les talons et se ramasse comme un con. Karma.

« Commence par ranger ces livres et tu r’viendra la semaine pro. T’es pas obligé d’agir comme un con, j’t’assure. Tu gagnerais à arrêter de te mettre au niveau de Senri. »

Non parce que bon, on sait qui fout la merde… Et Tiago est un fouteur de merde avec une marge de progression. Senri… Lit des mangas. Et… ET PUTAIN IL VIENT DE ME BALANCER UN SEAU D’EAU DESSUS LA ? Ah. C’était lui aussi la foi précédente, ingénieux et débile. Je souris à Tiago.

« Je m’en occupe. Tu vois l’bénef de savoir se tenir à carreau quand il le faut, c’est qu’un jour t’as le droit de taper sur les crétins comme lui. Va te sécher aux chiottes. »

Je le coffre dans mon bureau.

« Senri, tes conneries à deux balles tu te les gardes. T’as gagné une semaine de colle en plus. Et comme je suppose que t’es pas assez mature pour aller t’excuser comme un grand, t’auras des devoirs pour demain. Tu feras une lettre d’excuses à Tiago… Elle a intérêt d’être convaincante, sinon tu gagneras une semaine de plus. Ah et commence par éponger tes conneries merci. »

Je lui souris.

« Et tu commences de suite à éponger tes conneries. »

Putain ils me cassent les burnes ces cons-là. JE DETESTE ETRE L’ADULTE DU COIN.

J'suis sûr que c'est ce discours relou d'Ipiu qui m'a déconcentré ! Ouais, c'est forcément ses remarques à la con qui m'ont suffisamment déstabilisé pour que j'en vienne à me péter la gueule si lamentablement ! Genre glissade ridicule et atterrissage sur le cul. Dans un vacarme absolument pas discret et une pluie de bouquins en accompagnement. Bon ok, peut-être que ça fait un peu mal, mais là ma fierté est carrément beaucoup plus blessée, ce qui m'empêche de montrer le moindre de douleur, au profit de la colère. Pour changer...

- "C'pas comme si j'avais beaucoup d'autres choix. Je crèverai bien avant que ce môme ne réussisse à se mettre à mon niveau, alors j'm'adapte tu vois."

Parce qu'ignorer quelqu'un de relou, ça, je ne sais pas faire. Et s'il y a juste besoin de frapper pour communiquer, ça me va carrément. Besoin de frapper ou de "gagner" de petits concours ridicules aux règles plus ou moins établies, c'est la même. Et quand on me balance de l'eau à la gueule en toute impunité de la sorte, je n'ai pas pour habitude de rester bien sagement à ma place en me contentant de sourire et d'acquiescer. Je crois que mon sang commence à bouillir sérieusement là.

Il ne vaut mieux pas que je réponde à Ipiu. Je me contente juste de me relever aussi dignement que possible tout en ramassant les bouquins désormais trempés qui m'ont accompagné dans ma chute. Je redresse le charriot et y dépose les quelques dommages collatéraux à notre petit affrontement. J'ai beau avoir les nerfs à vif, je préfère laisser Ipiu prendre les devants. Je pourrais tout à fait l'achever plus tard.

Par contre, je laisse mon charriot bien en plein milieu de l'allée, à patauger dans la flaque. Tant pis, j'ai pas du tout envie de me trimballer ce truc. En plus ça va faire des traces de roue partout dans la biblio. Bon, mes shoes ne sont pas beaucoup plus sèches avec tout ça et j'ai l'arrière de mon jean complètement trempé... Et c'est carrément désagréable putain ! Tant pis, je ne vais sûrement pas perdre du temps à passer aux chiottes alors que l'autre gosse est probablement hors jeu pour cause d'engueulade avec l'arbitre.

Je laisse donc les livres hors d'état dans le charriot, mais je me fais une bonne pile verticale de tous ceux qui ont échappé à la flaque savonneuse. C'est lorsque je replace correctement le premier de la pile qu'une idée géniale me traverse l'esprit. J'aperçois le second charriot abandonné le temps du remontage de bretelles. Je remplace son contenu par celui que j'ai actuellement dans les bras, faisant un beau tas d'encyclopédies et de mangas sur un coin de table le plus proche, et je me barre avec mon nouveau charriot pour terminer cette punition à la con. Parce que ça commence à me gonfler sévère tout ça, il est largement temps que je termine tout ça pour pouvoir me barrer !

Lorsque Senri avait lancé son seau, il n’avait pas remarqué qu’en plus de Tiago, il y avait Ipiu dans l’allée. Il fallait s’en douter, son lancer de savon avait fatalement touché la bibliothécaire. Chose que Senri n’avait pas vue. Cela dit, au plus profond de lui, il avait senti une profonde envie meurtrière. Qui avait néanmoins était étouffé par sa fierté d’avoir ainsi piégée Tiago.

Ce n’est que lorsqu’Ipiu rentra dans le bureau que Senri réalisa l’ampleur de son geste.

- Oh la boulette.

Elle était complètement trempée et lui fit amèrement regretter son geste. Senri se sentait totalement impuissant. Si intérieurement, il bouillonnait, aucun mot ne sortait de sa bouche. La tête enfoncée entre ses épaules, son visage pivoine. Il se contentait seulement d’acquiescer pour s’excuser. Ça faisait une éternité qu’il ne s’était pas fait disputer d’une telle manière. Il avait l’impression d’être de retour dans le bureau de son institutrice, car il avait remplacé le contenu des paniers repas de ses camarades par de la terre.

Résultat des courses ; une semaine de plus, une lettre d’excuse à l’asperge décolorée et un sol à éponger.

Senri acquiesça et prit le chemin de la sortie, oubliant les alphabets, raison pour laquelle il s’était jeté dans la gueule du loup un peu plus tôt. Néanmoins, le corps encore à moitié dans le bureau, il demanda d’un air innocent.

- Mais si je finis en premier, j’pourrai quand même partir plus tôt ?

Et avant de se faire jeter quelque chose dessus, il disparut pour rejoindre la salle de la bibliothèque. Avant toute chose, il devait récupérer son chariot. Et quelle ne fut pas sa surprise quand Senri remarqua que son chariot n’était plus là et qu’il y avait un tas de livres posé non loin. Il pesta.

Le plus important était encore d’éponger le sol. Le boxeur abandonna le tas, se disant qu’il y reviendrait plus tard. Il prit le chemin de l’allée savonnée.

Une fois, dans celle-ci, il retroussa ses manches, prit une grande inspiration et se jeta à corps perdu dans la bataille. À genoux, il frottait plus fort que jamais, il aurait fini en un rien de temps !

A chacun de mes pas, je maudis un peu plus ce crane d’œuf écervelé ! Parce que c'est affreusement désagréable de marcher avec des fringues trempées ! J'ai l'habitude des vêtements un peu trop ajustés qui collent bien à la peau, mais ça n'a rien à voir avec ce frottement humide qui accompagne chacun de mes mouvements. Mais ce n'est que partie remise. Je peux largement supporter ce supplice irritant les quelques minutes (dizaines de minutes ?) qu'il va encore me falloir passer dans cette bibliothèque avant d'avoir le droit de me barrer en avance, parce que j'aurais fini bien avant ce gamin aux blagues douteuses !

Je n'ai évidemment aucun doute sur mes capacités à terminer ma tâche bien avant lui ! Et ma conviction n'en est que renforcée quand je le vois sortir tout penaud du bureau d'Ipiu. J'imagine facilement à quel point un face à face avec cette meuf doit être pénible, surtout lorsqu'elle fait partie des dommages collatéraux de ses essais de vengeance. Mais je ne risque pas de le plaindre ! Au contraire, un sourire satisfait vient étirer mes lèvres en le voyant frotter le sol comme si sa vie en dépendait.

- "Dépêche toi de frotter Cendrillon, à ce rythme tu ne pourras jamais sortir à l'heure pour aller au bal. Attention quand même à ne pas faire plus de dégâts que ce que tu n'as déjà fait."

Et comme si de rien n'était, je pousse la tranche de quelques livres du rayon du haut, de sorte à ce qu'ils puissent tomber directement sur le nouvel esclave attitré au ménage. Oui, c'est totalement puérile, mais je n'en ai rien à battre. Comme dis précédemment, il faut bien que je me mette à son niveau si on veut pouvoir communiquer ! Et je ne peux pas me retenir de l'emmerder alors que je passe de l'autre côté de l'allée interdite pour remplir mon (nouveau) charriot avec le second chargement, les bouquins du premier ayant retrouvé leur place d'origine. A l'exception de ceux qui ont fini dans la piscine de produits ménagers évidemment.

Plutôt content de ma large avance, je repars sans perdre une seconde, attrape le premier bouquin de ma nouvelle pile et... Je me décompose en me rendant compte que celui-ci est dans un alphabet qui m'est parfaitement inconnu. Un rapide coup d’œil à la suite et il faut que je me rende à l'évidence. Le groupe qui est venu rapporter ces ouvrages est manifestement originaire de cette région du monde qui a décidé de faire chier le reste avec des symboles indéchiffrables !

La mâchoire de Senri se crispa avant même qu’il ne relève les yeux vers Tiago. Des yeux brillants d’une colère sourde. Bien qu’il en avait très envie, Senri n’eut pas le loisir de répondre quoique ce soit à la provocation du feu. Puisque ce dernier venait de faire tomber une pile de livres sur l’adolescent qui dût se tordre et se jeter à corps perdu contre le sol pour qu’aucun des livres ne tombe sur le sol encore trempé.

Le tonnerre fut donc laissé en plan par le feu, alors qu’il avait un bras tendu vers l’horizon, la jambe opposée, tendue aussi. Il ne s’appuyait que sur son autre main et son autre genou. Sur son dos, se trouvaient trois livres, dans le creux de sa jambe tendue, un, dans celui de son épaule aussi, deux livres étaient superposés sur sa nuque et trois autres tenait dans sa paume, avec un équilibre plus que précaire.

Si la situation semblait déjà catastrophique, il fallait maintenant préciser, que l’autre genou et l’autre main de Senri baignait dans une flaque poisseuse et savonneuse. Dans la précipitation, Senri avait renversé son seau. Le moindre mouvement de travers et les livres se retrouveraient imbibés de savon. Déployant toute sa force mentale, il se suréleva lentement, et pencha lentement du côté de son bras tendu contre le sol. Et il s’éjecta subitement de l’autre côté. Il propulsa les livres à l’autre bout de l’allée et les accompagna dans une roulade, de sorte, que lorsque les livres tombèrent au sol, le torse de Senri occupait l’entièreté de la zone humide.

- Foutu poseur décoloré…

Senri se redressa et ramassa tous les livres. Son débardeur et ses bandages étaient humides à seulement quelques endroit, mais c’était encore plus désagréable. Il termina rapidement d’essuyer son allée avant de se remettre au travail. Il n’y avait plus de temps à perdre ! Mais, avant même de se rendre compte que les livres de son chariot étaient tous dans des alphabets qu’il ne connaissait absolument pas, il aperçut Tiago, planté au milieu d’une allée, complètement perdu. Un large sourire narquois sur les lèvres, Senri tira son chariot jusqu’au décoloré et se glissa derrière ce dernier, en jetant un coup d’œil aux livres de ce dernier.

- Bah alors, on sait plus lire tocard ? Pourtant, c’est un manuel pour gosse, tu vois pas ? Entre sept et huit ans !

Pour illustrer ses dires, Senri passa son doigt sur les caractères en première de couverture. En réalité, il ignorait tout à fait la signification de ces derniers ; c’était écrit en coréen. Mais ça, Tiago n’était pas obligé de le savoir. Senri prit son air le plus supérieur et commença à montrer les piles du doigt en énumérant de fausses catégories.

- Littérature, mathématiques et algèbre, anatomie, astronomie, alchimie, oclumantie. Sérieux, même un nourrisson sait ça, tocard.

Il s’était peut-être sentit un peu trop inspiré pour les deux derniers termes. Mais ça passerait sûrement ! Et très nonchalamment, Senri repartit vers le bureau d’Ipiu, son chariot à bout de bras. Ce petit tour de passe-passe lui avait donné une autre idée. Une fois qu’il fut devant le bureau, il y toqua et entra timidement.

- Euuuh… Excusez-moi, Tiago a besoin des alphabets asiatiques. Il est trop fier pour les demander, mais je me suis dit que ce serait faire preuve de maturité que de les lui apporter…

Senri était effrayant lorsqu’il utilisait ses deux neurones à peu près fonctionnels.

Rester calme. Faire comme si je croyais que Tiago allait suivre mes conseils, transformer ma peau en résistance et y faire tourner un max d’électricité pour qu’elle chauffe et fasse s’évaporer l’eau de mes vêtements. Je vais démonter Senri. Je vais. Je suis restée calme et ce malgré les livres abimés. Aaron soit fière de moi ! Je marche dans tes pas, je suis en train de devenir une adulte responsable !

« On verra. »

ça c’est la phrase qui veut dire : tu peux toujours rêver mais si je suis de meilleure humeur à ce moment-là et qu’il n’y a pas eu d’autres incidents d’ici-là on pourra EVENTUELLEMENT en discuter !

Ces gamins m’épuisent. Vraiment. Est-ce qu’Hideko m’en voudrait beaucoup si j’les tazzais un peu ? Juste un tout petit peu pour voir ! Je viens de sortir de mon bureau et j’ai vu Tiago faire tomber une étagère de livres sur Senri. Si je les lui fait bouffer par le cul il respectera les ouvrages d’ici ? D’ailleurs Senri eu des réflexes dignes d’un héro de shonen qu’il était. Je vais juste rerentrer dans mon bureau et faire comme si j’avais rien vu. Sinon Hideko devra m’engueuler parce que j’aurais fait une connerie. J’vous jure. ON NE MALTRAITE PAS DES LIVRES. Oh. J’ai une idée. Elle n’est pas brillante mais quand Senri se pointe dans mon bureau je suis ravie de lui annoncer.

« Très bien, tu vas faire preuve de maturité en arrêtant de le narguer et en me l’envoyant dans le bureau. Merci. »

Je souris. C’était pas une question mais un ordre. J’lui fais un petit signe de main et j’attends que Tiago rentre à son tour dans le bureau et je lui annonce.

« Vu que tu te mets au niveau de Senri et que tu tentes toi aussi de bousiller les livres de la bibliothèque tu écopes de lignes à écrire pour demain. Je veux que tu écrives quatre cents fois ‘je ne maltraite ni les livres ni mes petits camarades.’ Tiago putain, c’est déjà assez relou d’avoir à gérer un gamin n’en rajoute pas une couche je te prie ! »