## Lun 27 Mar 2023 - 21:24 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | Le silence est tranchant dans cette maison. Je ne sais plus souvent quoi dire… Et j’ai le cerveau embrouillé par les médicaments. La douleur s’est progressivement installée. Sournoisement installée. Là où je n’avais plus de sensation, le feu a gagné. La glace des jambes explose. Alors je prends un comprimé. Avale une rasade d’eau et planque la boite au fond d’un tiroir. La porte claque. Aylan est rentré. Je sais. Je sais que je devrais faire quelque-chose. Je sais. Je sais qu’Aylan est plus un chat errant qu’un enfant dans cette maison. Je sais que je devrais lui apporter plus. Je sais qu’il ne rentre plus tous les soirs. Je sais qu’il est chez lui, mais que ce n’est pas son foyer. Je sais que je ne suis sa mère que sur le papier. Je n’ai aucunement le droit de revendiquer ce titre d’ailleurs. Il doit le savoir, car il ne me demande rien. Enfin parfois il demande ce qu’on mange le soir, et ça s’arrête-là. On ne l’a pas vraiment acté. Il est arrivé dans cette maison. Mais on n’a jamais parlé du reste. Il m’appelle maman. Parfois. Ipiu d’autres, car de mère je n’ai rien. Je ne lui apporte pas la chaleur d’un parent. J’aimerais, mais je ne m’en donne pas le droit. Et il y a tout le reste. Je sais que je devrais lui parler. Je ne sais juste pas quoi lui dire. Je n’ai aucune légitimité. Je le sais. Il le sait. Je ne suis pas une mère. C’est dur, car pourtant je suis sa mère. Je sais toujours où il est, sans même en parler… Je sais. Je veille. Surveille. J’éloigne parfois les cauchemars d’un brin de magie, mais jamais d’un caresse. Je n’ose pas. Je me sens coupable de m’inquiéter pour lui. Je me sens… Vide. Peut-être plus qu’à mon arrivée. Mais est-ce que c’est le problème de cet enfant à l’aura triste ? Je me mords l’intérieur de la joue, mais le gout métallique ne s’accompagne d’aucune douleur. « Bienvenue à la maison ! » j’essaie de lancer joviale. Menteuse. “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana Dernière édition par Ipiu Raspberry le Mar 28 Mar 2023 - 19:50, édité 1 fois |
## Mar 28 Mar 2023 - 10:39 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | Début décembre __–La semaine s’était écoulée pour notre protagoniste et il avait eu quelque bonheur à la passer sous un autre toit que celui qui portait son nom. __–Le moment était toutefois venu de faire un peu de logistique. Aussi, c’était muni de tous ses vêtements sales, qu’il était parti en direction des maisons des masters. Oh, il n’y avait pas que cette raison qui le poussait à s’y rendre : il y avait aussi Erik. Une semaine sans visiter le domicile familial voulait dire une semaine sans voir cet agréable compagnon, sans disputer quelques parties de Starcraft II avec pour ainsi dire le seul autre pratiquant de cet art dans tout l’Institut, sans une partie de jeu de société, ou une soirée cinéma à profiter sur le canapé de ses talents culinaires discutables. Somme toute, il lui manquait. Ce fut donc avec l’envie de faire une lessive, son sac à dos plein de ses habits et sa tête d’interrogations sur quel film il allait proposer à son blond camarade, qu’il passa le seuil de la maison Raspberry. __–Qu’est-ce qu’elle pouvait bien vouloir, celle-là. __–Aylan, qui venait d’entrer, la regarda avec un air quelque peu étonné. Pour que sa mère fût si démonstrative de sa bonne humeur, c’est qu’il devait y avoir quelque manipulation sous-jacente. Il la regarda, interloqué. __–« Ah euh bah merci. » __–Leurs paroles échangées étaient rares et se limitaient au minimum minimorum. Aylan avait certes insisté pour faire partie de sa vie, mais s’il ne regrettait pas ce choix, il ne le comprenait toujours pas non plus. Il n’avait point su à quoi s’attendre. En fait, il ne s’attendait à rien, mais avait quand-même fini par être déçu. Sans avoir quelque connaissance personnelle de la relation que devaient entretenir parents et enfants, il avait consommé bien assez de médias qui relataient cette histoire, qui n’avait jamais concerné qu’à peine moins de cent milliards d’individus tout au long de l’histoire et la quasi-totalité des huit milliards qui étaient alors en vie. __–Aylan inspecta le domicile, l’embrassa d’un regard. Ils étaient seuls. C’était embêtant. __–« Tu sais où il est Erik ? » __–Et comme il n’allait pas être interrompu dans ses tâches par l’autre occupante des lieux, il se dirigea vers la machine à laver. __–Devraient-ils faire la conversation ? Si elle l’avait engagée, c’était, quelque part, qu’elle le désirait. C’était assez inhabituel en soi. Ce devait être pour lui demander quelque chose. Attraper un objet en hauteur, par exemple, ou alimenter sa surveillance routinière de quelque inspection de ses relevés de notes. (Elle aurait eu bien du mal, vu qu’Aylan n’en produisait aucun.) __–Quoi qu’il en soit, il était pour le moment résolu à garder l’échange de mots au strict minimum. C’est qu’il avait bien des choses dans la tête ; bien des peurs, des appréhensions, des inquiétudes et des ennuis, qui eux concernaient des personnes qui avaient montré leur affection au petit Air : Ariana ou Nana, qui allaient partir risquer leur vie, Senri, dont la disparition aurait rendu Chrys inconsolable et, bien sûr, sa propre et véritable famille : Brad, Liz, Miguel, Lola. Le moment était peu idéal pour y rajouter tous les troubles que charriaient sa mère avec elle et dont Aylan n’avait ni le besoin, ni le loisir, ni le luxe, ni la volonté, ni l’envie, à cet instant comme à tous ceux qui allaient suivre, d’en partager le fardeau. Dernière édition par Aylan Raspberry le Mer 26 Avr 2023 - 13:32, édité 1 fois |
## Mar 28 Mar 2023 - 20:07 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | Bien entendu qu’il n’a aucun intérêt pour le fantôme qui hante sa vie. Je n’en suis ni étonnée ni blessée. « Il travaille ce soir. » Son autre travail. Celui qui ne consiste pas à me torcher le cul et à faire en sorte que j’ai une hygiène de vie à peu près décente. A peu près. Il sait que certains combats sont perdus d’avance. Aylan se dirige directement vers la machine à linge, sans même m’adresser un demi regard. Comme d’habitude. Je n’ai pas cherché à avoir plus de substance que cela dans sa vie. Il a un toit où s’abriter, des vêtements, de quoi manger. Le reste c’est un luxe qu’on aurait bien du mal à se permettre. Ses sentiments sont en bordels, clairement. Si j’étouffe les miens pour l’instant ce sont les siens qui envahissent l’espace. De la peur principalement. Beaucoup de peur. Je me doute de l’origine de ses craintes, et je ne pourrais probablement pas toutes les apaiser… Mais… Et si j’essayais au moins de l’extraire de ses pensées ? Un truc du genre. « Tu veux un chocolat chaud ou un jus de fruit pendant que la machine tourne ? » Je pars du principe que même en étant irresponsable lui proposer un verre de whisky ce n’est clairement pas adapté. Peut-être que si ? S’il m’en demande je suis pas certaine de me donner le droit de dire non. Est-ce qu’à son âge je buvais déjà de l’alcool ? Certainement. Espérons qu’il n’en demande pas. “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Mer 29 Mar 2023 - 10:33 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Aylan soupira. Il semblait bien qu’il n’allait pas pouvoir s’en tirer avec un échange usuel de banalités, lui rendre un service quelconque et un merci au revoir. __–Non, sans rire, qu’est-ce que c’était que cette question ? __–Il savait se faire à manger tout seul, avait d’ailleurs été bien obligé de le faire pendant près de dix mois après son arrivée. Il regarda sa mère avec une expression indéchiffrable, y compris pour lui. Elle lisait en ce moment ses émotions, c’était assez évident. Les sensitifs comme les télépathes ont en général la politesse de demander la permission avant, du moins dès qu’ils deviennent assez maîtres de leurs capacités pour ne pas lire tout ce qui se passe autour d’eux. Voilà que maintenant, elle se souciait de ce qu’il ressentait ? C’était nouveau. __–Aylan n’était pas du tout quelqu’un d’en colère. Très loin de là. Contre personne. Pas même contre le Centre : aussi étrange que cela puisse paraître, il ne souhaitait pas nécessairement cette opération, il ne souhaitait pas spécialement que cette organisation fût détruite, ses dirigeants éliminés et ses membres mis hors d’état de nuire. Toute cette violence le répugnait. Il ne voulait qu’en finir avec cette histoire, retrouver les siens et la laisser derrière lui. Oublier, pardonner, peu importe le mot mis dessus. __–Mais, alors qu’elle n’avait rien fait, justement parce qu’elle n’avait rien fait, quand il voyait sa mère, là, il ressentait une sorte de pincement étrange dans son cœur. Quelque chose d’inconfortable, d’inconnu, qui toujours était atténué par une grande lassitude, une absence totale d’intérêt et de considération pour celle qui, par ses actes, avait bien signifié ne pas lui en accorder la moindre. __–Aylan n’aurait pas su mettre le doigt dessus. Permettez-moi de nommer à sa place ce sentiment étrange : la cruauté. __–« Écoute, euh… Je sais pas ce que tu essaies de faire, mais j’aimerais bien que ça me concerne pas. T’façons t’as déjà très bien fait comprendre que dans ta vie bah j’étais pas concerné. » |
## Mer 29 Mar 2023 - 22:57 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | Qu’est-ce tu veux répondre à ça ? Que je fais comme je peux ? Et qu’en ce moment j’peux pas grand-chose ? Que c’est pas plus facile pour lui que pour moi ? que ces derniers mois j’arrive même pas à prendre correctement soin de moi, alors prendre correctement soin de lui c’est au dessus de mes forces ? Qu’s’il m’a pas choisi comme mère, j’ai pas choisi d’l’avoir non plus ? Que j’ai tout de même assez de considération pour lui pour faire attention à ses fréquentations, à ce que d’autres pallient à mon inexistence ? Non. J’peux pas lui dire ça, j’ai le sentiment qu’en effet, ça ne doit pas le concerner. Qu’il a autre chose de plus important à faire. Alors que répondre à ça ? Un soupir. « Et du coup ? Tu veux du jus de fruit ou pas ? » Le reprendre ? Lui dire qu’il se trompe ? A quoi bon ? Ce sont des faits qu’il énonce. Je ne suis plus présente psychiquement et physiquement ni pour lui ni pour moi. Alors j’vais pas le contre dire. Est-ce qu’il faudrait que je le rassure ? Que je lui dise que si j’me sens concernée par ce qui lui arrive ? Est-ce que ça changerait réellement quelque-chose si mes paroles ne peuvent pas être suivies d’actes ? Non. Cela briserait encore plus les liens que ne nous unissent pas. Peut-être qu’un jour j’apprendrais à être mère, mais il y a peu de chances que ce soit avec lui. “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Dim 2 Avr 2023 - 18:13 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Aylan regarda sa mère. Sans un son, sans un geste. Sans même un clignement d’œil. La porte du réfrigérateur s’ouvrit, la bouteille de jus en tomba, décrivit un petit vol plané et alla se poser dans la main l’Aylan. Mêmement, un placard s’ouvrit et après quelques manipulations aériennes, un verre finit dans la main de notre protagoniste. On pourrait y voir là un fort peu subtil moyen de lui rappeler qu’elle ne brillait que par son inutilité et on aurait raison. __–Non, tout compte fait, il n’avait pas soif. D’un petit vol, les deux objets finirent sur le plan de travail. __–Aylan se redressa. Il avait bien assez scruté Ipiu. __–C’était étrange, cette capacité des adultes à ne pas prendre de décision, à préférer contempler une situation pourrir, pleurer dessus et la laisser telle quelle. Venant de tous, Aylan comprenait, ou au moins acceptait les raisons de ces tergiversations : ils connaissaient mieux la situation, devaient prendre plus de paramètres en compte dont certains qu’il ne pouvait lui même pas connaître, y compris leurs propres troubles, inquiétudes et angoisses. Là où Aylan était très compréhensif envers Chrys ou Ariana, deux personnes qu’il aurait pu citer en exemple pour ce qui était de la difficulté à se décider, il n’avait que de la déception, voire du mépris, pour Ipiu. __–La décision qu’elle avait à prendre était simple. Les circonstances, fort peu atténuantes. __–Il s’approcha d’elle. Jusqu’à arriver assez proche pour qu’elle eût à complètement tourner la tête pour ne plus l’avoir dans son champ de vision. __–« Écoute maman, tu m’as sauvé d’accord, mais c’est ta dernière chance. Soit tu veux être pour de vrai ma maman et tu me le dis, soit t’arrêtes là et je m’en vais. Et pis tu seras juste Ipiu la bibliothécaire. Moi j’peux plus t’attendre et j’peux plus te chercher. » __–C’est qu’il en avait déjà beaucoup, des personnes à attendre et à chercher : des personnes qui comptaient pour lui, qui avaient pris une importance infiniment plus grande que celle que sa propre mère avait jamais voulu se donner. |
## Dim 2 Avr 2023 - 19:37 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | Ah. On en est là. Il me démontre par A plus B qu’il n’a pas besoin de moi. Je n’en ai jamais douté. Il peut s’en sortir sans moi, se servir du jus de fruit alors que je lui propose gentiment. Je n’ose pas m’imposer à lui, et ce depuis le début. J’m’en suis jamais donné le droit. Je vais donc juste retourner à mes occupations et le laisser faire ce qu’il veut, comme d’habitude. « C’est pas un choix qui m’appartient Aylan, j’peux pas faire comme si j’étais ta mère parce que je t’ai donné la vie. On sait tous les deux que ça fonctionne pas comme ça, j’ai jamais été là pour te border le soir, je t’ai jamais aidé à faire les devoirs (que tu ne fais pas je sais) et non je ne t’ai pas sauvé. Terrae t’a sauvé, c’est pas pareil. » J’inspire. « Ce qui ne veut pas dire que je ne veux pas faire partie de ta vie, seulement que je ne sais pas comment faire pour que ce soit juste pour toi.» Ni pour moi. Sans doute. Est-ce que je serais soulagée s’il partait ? Non. Je m’inquièterais, comme je le fais toujours pour lui. De loin. Je continuerais à faire en sorte qu’il tombe sur les bonnes personnes, qu’il ne manque de rien. C’est injuste pour nous deux cette situation. « J’ai l’impression que quoi que je fasse, j’arriverais jamais à… » Être à la hauteur ? Être celle dont tu as besoin ? Non, c’est encore plus complexe que ça. « Te mériter. Tu es précieux. Intelligent, vif, tellement inventif ! » Et tu n’imagines même pas à quel point je suis fière de toi à chaque fois que tu gouttes à la liberté. A chaque entourloupe que tu mènes. A chaque rencontre qui te tire vers l’avant. « Je suis désolée. Je… Je tiens à toi Aylan, vraiment, je suis désolée si mes actions t’ont blessé. C’est pas parce que je suis une adulte que j’ai toutes les réponses. Peu importe mes sentiments, ce qui compte et qui comptera toujours le plus ce sont les tiens. Je serais-là pour toi, de la manière qu’il te conviendra. » “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Dim 2 Avr 2023 - 20:04 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Aylan soupira. Cligna des yeux à répétition. Il avait cessé d’écouter à partir de « mériter ». Qu’est-ce que c’était que ce petit laïus qu’elle lui sortait ? Cette histoire de ne pas savoir comment faire, de choix qui ne lui appartenait pas ? Qu’est-ce que cela pouvait bien être que ces histoires ? Et par corollaire, pourquoi devrait-il non seulement s’en soucier, mais porter le fardeau de ses manquements et de ses hésitations ? __–Le Vide d’Aylan avait toujours été quelque chose d’ardent. Une douleur autant qu’un manque. Quelque part, en cet instant, il retrouvait cette sensation, alors que ses entrailles se nouaient d’une émotion qu’il n’avait jusqu’ici jamais connue, qui le serrait comme la griffe d’un animal et anéantissait toutes les autres. Elle était faible, mais il n’y avait qu’elle. Il se sentait à la fois aussi insensible et froid que le métal et aussi instable et brûlant qu’une terrible explosion. __–Là, pour de vrai, Aylan était en colère. __–« S̰͛t͎͔̩̩̟ͧ̓̈́͊͛o̮͙͔̗͔͓͖̩̯̿̈́͋̿̅ͬͤ̓̓p̻͇̳͎͖̅̽̒̐͂. » __–La voix résonna en lui, en elle, sur les vitres qui frémirent, les murs qui tremblèrent, la poussière qu’Erik avait oublié qui s’envola, comme après une onde de choc, mais Aylan avait parlé à peine plus fort que pour un murmure. __–Il ne cessait plus de la fixer. __–« Je t’ai posé une question simple. Oui ? Ou non ? » __–Il lui semblait si invraisemblable, qu’en cet instant, sa mère, une master, une combattante aussi expérimentée, fut aussi pathétique. Cela lui était insupportable. Que cette personne, entre toutes, n’arrivât pas à se défiler, fût prise comme un poisson dans un filet, à se tortiller sur le sol du bateau, le pêcheur le voit et s’amuse de ses frétillements, alors qu’il a ses yeux perdus dans le vide, la bouche ouverte, comme s’il voulait dire quelque chose, s’en sortir de ce qui l’étouffait par quelque parole, quelque discours, inaudible au marin comme à la mer. Telle était Ipiu pour Aylan, au poing et à l’âme crispés. __–Au moins, elle lui avait dit qu’elle n’avait pas grand-chose à voir dans son sauvetage. Quelque reconnaissance qu’il ait pu avoir pour elle n’avait même plus lieu d’être, à présent. |
## Dim 2 Avr 2023 - 21:06 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | >> https://youtu.be/y_zk8f6aBQk Je ne sais pas si se sont ses pouvoirs ou ses sentiments qui m’atteignent le plus violement. Un enfant ne devrait jamais ressentir ça. Jamais. Mélange d’injustice. De dégoût. De colère. D’impuissance. De résignation. Il crie sa colère. Aïe. Ça craque. Doucement. Cela s’instille. La brèche s’ouvre. Les sentiments oubliés s’y déversent. JE SUIS EN COLERE. Ce choix est injuste. Pour lui comme pour moi. Je suis en colère car je n’ai pas eu le choix. Je suis sa mère. Je ne l’ai pas choisi. Mon corps ne m’appartenait pas. Sa naissance n’était pas un choix. Il est le stigmate de mon vol. De la dépossession totale de mon corps. POURQUOI ? Pourquoi je n’ai pas résisté ? Depuis combien de temps n’avais-je pas fait face à mes sentiments ? Depuis combien de temps les étouffais-je ? Ils me font peur, me submergent. STOP. Non. Je ne veux pas ! Je n’ai pas de droit. Je n’suis pas capable. Pourquoi ? Il murmure sa peur. La peur d’être rejetée. Est-ce la mienne ou la sienne ? Sa peur de l’abandon. Il n’a jamais été choisi. Si cela avait été mon cas, aurais-je réussi à rompre l’emprise du Centre ? Non. Avant d’appartenir au Centre, j’appartenais à une famille. Avant d’appartenir au Centre, je m’appartenais. Il est frêle. Il vacille comme une flamme que l’on pourrait souffler d’un souffle. Ce sentiment que je le suis toujours interdit pour lui. De la première fois où je l’ai senti bouger, au jours où je l’ai rencontré. « Je suis déjà ta mère. » J’ai peur. “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Mer 5 Avr 2023 - 23:08 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Après l’avoir longuement fixée, d’un air mauvais, encoléré, les traits froncés, les entrailles tordues et en flammes, l’esprit en tempête, Aylan soupira. Se massa le visage, les tempes, les yeux. __–« C’est pas possible, quoi. ’faut qu’on trouve un autre moyen pour que je te parle que devoir te forcer. » __–Son ire s’était éteinte. Il n’était plus que fatigué, lassé de celle qui se tenait devant lui ; fragile, minable, terrorisée. En fin de compte, comprit Aylan, ce n’était pas tant l’absence d’Ipiu sa mère qui lui pesait sur le cœur, mais qu’il fallût lui arracher de haute lutte la moindre parole, la moindre attention, le moindre regard. Cela requérait de l’énergie, de la patience ; soit des ressources dont il ne disposait pas en grandes quantités en ce moment. __–En fait, il se sentait comme l’adulte de cette relation : celui qui prenait ses responsabilités, qui décidait, dans un étrange renversement des rôles qui n’était guère pour lui plaire. Qu’Ipiu, en dépit d’être sa mère, ne fût point une adulte capable de s’occuper de lui et déléguât ce rôle à des tiers, ne le dérangeait en fait même pas. Elle n’avait pas choisi l’existence de son fils, après tout. Il aurait été bien importun, même par Aylan, de lui imposer un rôle maternel et toutes les charges qu’elles impliquaient. __–Aussi ne dit-il plus rien. Il réfléchissait. __–Au final, pourquoi s’entêter ? Que lui chalait l’existence de cette personne ? __–Il alla dans sa chambre. C’est sans la moindre émotion qu’il commença à empaqueter ce qui lui restait d’affaires. Aylan n’était pas triste. Pour briser une relation avec un être cher, il eût fallu qu’il y en eût une. Il n’était pas déçu. Ipiu n’avait eu de cesse de s’ingénier à baisser les attentes que son fils avait envers elle. Il n’était même plus en colère. À quoi bon. C’était si vain. Si contraire à son être. Comme si ses sentiments allaient changer quoi que ce soit en elle. Ce n’était pas comme s’ils avaient eu ce pouvoir auparavant. __–Depuis cette pièce qui lui avait été attribuée et pourrait revenir à son rôle de débarras, il parla assez fort pour être entendu. Et puis, sa porte était ouverte ; elle pouvait y entrer quand elle le voulait. Elle était chez elle bien plus qu’il n’avait jamais été chez lui, après tout. __–« Okay, bah t’es ma mère, mais ça veut rien dire pour toi en fait. Du coup j’sais pas pourquoi ça devrait vouloir dire quelque chose pour moi. Je t’en veux pas, hein. T’as pas choisi. J’ai pas choisi. P’t’être qu’on deviendra copains, un jour. » Dernière édition par Aylan Raspberry le Lun 10 Avr 2023 - 17:01, édité 1 fois |
## Lun 10 Avr 2023 - 16:16 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | > https://youtu.be/M9TToryKku0 Les mots ne me blessent pas. Pas autant que je l’aurais cru. Je n’en relève ni l’ironie, ni l’injustice. J’ai essayé. J’ai essayé d’être là sans m’imposer. Faisant de mon mieux, mais ne pouvant offrir assez. La peur s’est tue, et je le regarde emballer ses affaires du seuil de sa porte. Silencieuse. Nul n’est plus sourd que celui qui ne veut entendre. Les émotions vibrent dans le silence. Je ne suis pas dupe sur ses intensions. Il s’apprête à quitter cette pièce sortie de terre pour l’accueillir. Ses mots ne sont ni justes, ni vrais, ils ne sont que le résultat d’une absence. La mienne. Il aurait voulu que je m’impose à lui. Ce n’est pas ce que je veux, et ce ne sera jamais le cas. Il n’a pas besoin de moi pour être heureux, et je n’en suis que trop consciente. Cela ne me fait pas tellement peur en fait, je crois que j’avais oublié quelque-chose d’important. Mes sentiments n’engagent que moi, personne d’autre n’a à en porter le fardeau. Si je les accepte, ils ne peuvent blesser personne. « Aylan ? » Après s’être exprimés avec violence les sentiments que j’avais tu retrouvent leur place et s’apaisent. Ils n’étaient pas si forts finalement. Pas si terrifiants. Ils faisaient peur quand je ne savais ce qu’ils renfermaient. « Je t’aime. » je prends une inspiration « et c’est pas grave si t’en as rien à faire, si ça compte pas pour toi, c’est comme ça. Ça ne changera pas. J’continuerais à veiller sur toi de loin. » C’est ça que ça signifie pour moi être ta mère. Savoir que tu es avec les bonnes personnes. Savoir que tu es en sécurité. “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Jeu 13 Avr 2023 - 4:47 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Aylan ne se retourna pas. __–La première raison, la plus évidente, était qu’il n’avait plus envie de voir sa mère, pour le moment. Jusqu’ici, elle n’avait été capable que d’être décevante au mieux, de le mettre dans des états émotionnels autant inédits qu’ils étaient inconfortables au pire. Oh, il n’envisageait rien de définitif en cela, mais en tout cas, il voulait être seul avec ses pensées pour cette soirée au moins. Et peut-être la suivante. __–La deuxième était que si son visage était pour le moment impassible, figé dans un sérieux fort étrange et incongru pour son jeune âge, Aylan savait bien qu’il aurait du mal à conserver ce masque s’il reposait les yeux sur elle. Notre protagoniste était loin d’être dénué de toute empathie : déjà la voix d’Ipiu faisait-elle quelque peu trembler son menton, se serrer son ventre et s’humecter ses yeux. Or, il n’avait pas envie qu’elle le visse en pleurs. Sa mère se rendait déjà bien assez malheureuse toute seule ; nul besoin d’en rajouter. __–Enfin, les émotions d’Ipiu n’étaient pas quelque chose qu’il avait la force de confronter, pour le moment. S’il ne voulait pas pleurer devant elle, il n’aurait pu souffrir de la voir dans cet état là non plus. Quel enfant voudrait voir ses parents ainsi ? __–Je t’aime. __–Dans toute cette tristesse, cela le fit sourire. Il était amusant en effet, de voir que les paroles de sa mère étaient aussi peu adaptées, aussi incorrectes. __–Son sac fait, il se dirigea vers la porte, sans lui adresser un regard. Soupira longuement. Ce n’était… tellement pas ça. Elle n’avait donc rien compris, décidément. Aylan passa sa main sur son visage. C’était pourtant simple. Il avait été assez clair. Lui, au moins, avait été clair. Mais il ne pouvait pas laisser passer cela. Il l’aurait bien voulu, mais Ipiu se trompait tellement, son erreur était si profonde, son décalage avec la réalité si grand, le non-sens de ses paroles si puissant, que c’était plus fort que lui. La corriger le démangeait bien trop. __–Il se retourna. __–« Non mais, maman. Évidemment. Que j’en ai pas rien à faire. » __–… __–« C’est… Il renifla. Une ligne de dialogue entière sans que les larmes lui vinssent, il avait atteint le maximum de sa placidité. C’est le seul truc qui est important, en fait. » __–Il fallait faire un choix, à présent. Se retourner, ou la prendre dans ses bras. Comme c’était lui l’adulte par défaut dans leur relation, ç’aurait été à lui de prendre la décision, de faire ce qui devait être ; d’agir. __–Mais, peut-être que, pour une fois, si Ipiu voulait bien être sa mère, si elle remplissait son rôle en cet instant… Alors, il voudrait bien être son fils. |
## Dim 16 Avr 2023 - 11:23 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | Je me décale, le laissant passer avec son sac rempli des effets personnels qu’il avait laissé ici semble l’écraser. Pourtant cette chambre n’avait jamais débordé. Elle avait toujours été trop peu d’infantile. Je n’avais jamais osé y déposer que des choses utiles, préférant le laisser s’approprier les lieux à ses goûts. N’osant intervenir, je voulais qu’il se découvre. Je sais qu’il part, et je n’arrive pas à penser à cette lessive en train de tourner. Au tambour dont le brouhaha ne réussira pas à le retenir. Si seulement c’était suffisant. Pourquoi n’attend-il pas que cette lessive soit faite, que j’ai le temps de trouver une excuse pour l’empêcher de partir. Ça fait mal, mais pas autant que je le pensais. Parce que finalement, si ça lui convient, moi ça me va. Non. Ça doit m’aller. Non. Ça finira par m’aller. Il est déterminé. Je me mords la joue pour ne rien dire, et si la douleur n’est pas un verrou la volonté en est un. Je ne le forcerais jamais à faire quelque-chose qu’il ne désire pas. Il se retourne, il vacille. Flamme dans la tourmente. Il me toise. Me corrige. Il ne veut pas partir. Il ne veut pas rester. Il veut que je le retienne. « Aylan ? » c’est une question, c’est son nom. Je m’avance vers lui doucement, l’hésitation se lit sur ses traits. Crainte d’un rejet, d’une décision qu’il ne veut pas prendre ? J’aimerais pouvoir me lever et le prendre dans mes bras. Le rassurer de cette présence que je n’ai plus. Les muscles ont fondu, et sous ces amples vêtements je ne suis pas plus épaisse que lui. Je tends ma main que j’aimerais plus solide pour me saisir de la sienne ballante. « Reste, s’il te plait. » “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
## Lun 17 Avr 2023 - 17:46 | ||
Aylan Raspberry Messages : 519 Date d'inscription : 17/04/2021 Emploi/loisirs : écolier | __–Que répondre à cela ? __–« D’accord. » __–Certes, mais détaillons. __–Qu’est-ce que cela voudrait dire, rester ? À quelle histoire commune se raccrocher, laquelle construire, comment ? Qu’est-ce que la proximité pourrait bien leur faire de bon ? Aylan n’allait pas quitter Terrae. Il ne ferait que s’épargner la vue d’une personne qui devrait compter à ses yeux pour plus que tout, mais avait refusé cela. À quoi Ipiu pouvait-elle s’attendre de plus qu’une convivence ? Est-ce qu’Aylan aurait pu seulement lui offrir plus que cela. __–Il n’accepta pas la main. __–En lieu et place, il se posa sur son fauteuil, se blottit contre elle, une fesse un peu en dehors, un peu serré contre l’accoudoir et la roue. Elle était toute fine, sa mère. Frêle. Amoindrie. Il y avait de la place pour lui à ses côtés. __–Y en avait-il ? Si c’était pour ne ressentir que des sentiments très forts et violents à chaque fois qu’ils se voyaient, ce n’était pas forcément mieux que de s’ignorer comme ils l’avaient fait pendant ces derniers mois. Aylan avait-il besoin d’elle, lui qui avait déjà sa propre famille, lui pour qui les liens du sang n’avaient jamais compté, de quelque manière que ce fût ? On pouvait aussi se poser la question pour Ipiu, qui n’avait jamais vu son fils autrement qu’en échographie, qui avait été extirpé de son ventre sans qu’elle pusse ne serait-ce que le tenir dans ses bras. Qu’était-il ? Une torture supplémentaire qu’elle s’infligeait ? Une griffe pour l’enserrer, une pince pour la briser, un filet pour la piéger ? __–Aylan la serra dans ses bras. Se colla contre elle. (Non, vraiment, elle ne respirait pas la santé.) Ce contact était intense autant qu’il était artificiel. __–Leur relation était presque plus conventionnelle qu’autre chose. Il était son fils, elle était sa mère, il était dans l’ordre des choses qu’ils fussent ensemble, qu’ils le voulussent ou non et que cela ait du sens pour eux ou non. C’était, en quelque sorte, à ce petit jeu étrange qu’ils s’étaient livré, à cette grande répétition universelle. Ils avaient joué un rôle qu’ils ne connaissaient pas, dans une langue qui leur était inaudible, des personnages qu’ils devaient découvrir au moment où ils les incarnaient, dans un théâtre qu’ils n’avaient jamais vu. Peut-être était-il temps de faire tomber le rideau. __–Lever le voile, plutôt. __–Aylan avait bien des questions à lui poser. __–« Tu sais à quoi il ressemblait, papa ? » |
## Lun 17 Avr 2023 - 22:00 | ||
Ipiu Raspberry Messages : 3723 Date d'inscription : 11/07/2013 Age : 29 Emploi/loisirs : Euh... Ecrire ? Humeur : Vous connaissez le syndrome de la cocotte minute ? Bah voilà. sous pression et prête à exploser ! | C’est pas si évident. De prendre un enfant par la main. Pas si naturel que ça. De prendre son enfant dans ses bras. On est un peu les pions d’un échiquier qui ont atterri ensembles sur le banc de touches. Similaires. Différents. Je sens mon cœur qui se calme dans son étreinte. Je l’attire dans la mienne, pour qu’il ne tombe pas. Pour le protéger. Et peut-être, aussi parce que ça fait du bien de le sentir ici. A sa place ? C’est encore trop tôt pour le savoir. Non. C’est sa place. Je passe ma main dans ses cheveux. Ils sont moins rêches que les miens. Le moment de paix ne saurait s’éterniser. Cela serait méconnaitre nos caractères à l’un comme à l’autre. La première question qui passe ses lèvres me fige pourtant. J’inspire une grande goulée d’air avant de répondre. « Oui. » Je préfère prendre les devants avant que les questions se multiplient. Que veut-il savoir ? Dois-je tout lui dire, ou simplement l’essentiel. Qu’est-il en mesure de comprendre ? Sans doute trop de choses pour son bien comme pour le mien. « Tu as son nez et son sourire. » Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas pensé à Julien. Même si je sais que ce nom n’était qu’une légende. Je ne savais pas qu’il était le père d’Aylan avant que mon frère ne me l’apprenne. J’avais longtemps été très en colère contre lui. Maintenant, j’était indifférente à cet homme. J’inspire à nouveau. Prendre les devants. « Que veux-tu savoir à son sujet ? » “- A qui la nuit fait-elle peur ? - A ceux qui attendent le jour pour voir.” ― Pierre Bottero, Ellana |
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